Note du traducteur : Emma Hilton, l’autrice de ce texte, est une biologiste du développement à l’université de Manchester (Royaume-Uni) qui étudie les maladies génétiques humaines. Depuis près de cinq ans, elle utilise son expertise en biologie du développement dans le domaine de l’étude du développement sexuel, des différences entre les sexes et du sport, notamment en ce qui concerne l’équité et l’inclusion des hommes transidentifiés inhibant leur sécrétion de testostérone dans les catégories féminines. En 2021, avec le Dr Tommy Lundberg (Karolinska Institute), elle a publié un examen majeur de la physiologie musculo-squelettique chez les hommes transidentifiés inhibant la testostérone, évaluant si des preuves existent à l’appui de l’hypothèse selon laquelle la suppression de la testostérone dans cette population supprime l’avantage athlétique masculin et permet ainsi une compétition équitable et sûre. Elle a constaté que leurs pertes de masse musculaire et de force étaient modestes, et que ces individus conservent un avantage significatif par rapport aux paramètres féminins de référence. Ces données, confirmées ultérieurement par un deuxième examen indépendant, remettent sérieusement en question l’hypothèse du Comité international olympique (et, par la suite, de nombreuses instances dirigeantes du sport) selon laquelle la suppression de la testostérone chez les hommes transidentifiés garantie une compétition équitable dans les catégories de sport féminin.
Vu son statut et son travail, elle s’efforce en général d’employer la novlangue transgenre, comme dans le texte suivant, initialement publié, en anglais, sur son blog, le 18 août 2022. Elle y emploie l’expression absurde « femme transgenre » pour désigner les hommes qui se disent femmes et choisit d’utiliser le pronom féminin pour référer à ces individus ; par souci de compréhension et pour souligner l’absurdité de tout ça, je place cette expression entre guillemets et des indications sur les pronoms qu’il aurait fallu utiliser pour référer à la réalité matérielle entre crochets.
Les différences physiques entre les hommes et les femmes
et pourquoi elles importent dans le sport
Puisque apparemment, il faut encore le rappeler, je vais discuter ici des différences physiques et athlétiques entre les sexes et de leur importance pour le sport féminin. Le texte suivant pourrait en partie sembler paternaliste — en effet, une grande partie de son contenu est enseigné à l’école primaire — mais j’ai réussi à faire une différence dans ce domaine en repartant de principes biologiques élémentaires, plutôt qu’en luttant après coup contre des politiques terribles.
Note : une grande partie de ce qui suit n’est pas référencée. S’il vous faut les références, c’est que vous n’êtes pas bien sportif.
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Comme presque tous les animaux et de nombreuses plantes, les hommes (les mâles) et les femmes (les femelles) sont différemment constitués parce qu’ils ont des rôles différents dans la reproduction. Les hommes possèdent des testicules qui fabriquent des spermatozoïdes qui seront délivrés par le pénis. Les femmes possèdent des ovaires qui produisent des ovules qui seront fécondés par les spermatozoïdes et, dans l’utérus, deviendront des bébés.
Chez les humains, comme chez presque tous les animaux et de nombreuses plantes, il existe deux sexes.
Nos systèmes reproductifs différents se développent, dans l’utérus, sous l’influence des gènes puis des hormones, mais le rôle des hormones ne s’arrête pas à la formation des systèmes reproductifs. Durant la puberté, les hormones amènent les mâles et les femelles à développer les caractéristiques secondaires sexospécifiques qui permettent à un corps mature d’être prêt à se reproduire. Façonnées par l’évolution et la sélection sexuelle qui, par exemple, favorise les aptitudes au combat chez les primates mâles, ces caractéristiques secondaires aident également ces mâles et ces femelles à trouver ou à attirer un ou une partenaire en vue de la reproduction.
Si les deux sexes partagent l’expérience de la maturation reproductive, des poussées de croissance, de l’augmentation radicale de la densité osseuse, de l’apparition du désir sexuel, de la pousse des poils et des taches cutanées dues aux changements hormonaux, les différences les plus évidentes dans ces caractéristiques secondaires sont que les mâles — stéréotypiquement : chasseurs et combattants — sont plus grands et plus forts, possèdent des os plus longs, des épaules plus larges et des hanches plus étroites. Ils possèdent une masse musculaire beaucoup plus importante, en particulier dans le haut du corps, et leurs muscles sont construits différemment, ils s’attachent aux os de manière plus serrée et reçoivent les signaux de mouvement d’une manière différente. Ils possèdent un cœur plus gros, une plus grande surface pulmonaire et peuvent transporter davantage d’oxygène dans leur corps. Les femmes — stéréotypiquement : des attractrices difficiles à satisfaire — portent beaucoup plus de graisse corporelle, ont des seins plus gros et des hanches plus larges, afin de pouvoir porter et nourrir une progéniture en bonne santé, et peut-être même de le faire savoir.
Il existe sans doute des milliers de différences physiques entre les hommes et les femmes, qui ne sont pas toujours aussi évidentes que des abdominaux en tablettes de chocolat. Les femelles sont généralement dotées d’une meilleure vision périphérique que les mâles, ce qui nous rend peut-être plus aptes à surveiller les enfants en bas âge et à repérer les baies à collecter. En revanche, les mâles sont deux fois plus rapides pour détecter avec précision la trajectoire d’un objet en mouvement, c’est-à-dire la vitesse à laquelle il se déplace, la direction dans laquelle il se dirige et l’endroit où il se trouvera dans une seconde. Cette compétence est utile lorsque vous essayez de jeter une lance sur un lapin, ou lorsque vous tentez d’intercepter un ballon de rugby.
Il n’est pas surprenant, étant donné la nature physique de la plupart des sports, que les différences physiques entre les hommes et les femmes induisent des différences fonctionnelles pertinentes. Une grande taille et de longs doigts facilitent la prise en main d’un ballon de basket lors d’un dunk — un geste banal dans tous les matchs de la NBA (masculine), mais que très peu de basketteuses savent réaliser. Par rapport aux femmes, les hommes peuvent courir 10 % plus vite, sauter 20 % plus loin, lancer une balle 50 % plus loin et soulever une masse 65 % plus lourde. Grâce à des épaules plus larges et à une masse corporelle supérieure, les hommes sont presque deux fois plus forts que les femmes au niveau du dos et des épaules ; ils peuvent exécuter un mouvement de type coup de poing avec 2,5 fois plus de force que les femmes.
La preuve de cette capacité athlétique masculine supérieure est visible dans les records des athlètes d’élite, des clubs et des écoles. Il s’agit de la raison pour laquelle les athlètes femmes ont besoin d’une catégorie sportive protégée. Sans cela, elles ne peuvent espérer gagner ; dans certains sports, aucune n’atteindrait le top 10 000. Si l’on compare des athlètes de même niveau en matière de talent, d’entraînement, de nutrition, etc., l’avantage des hommes dans les compétitions sportives semble insurmontable ; certains universitaires ont conclu que les femmes ne pourront jamais courir ou nager aussi vite que les hommes. D’ailleurs, les meilleures athlètes femmes ne peuvent pas courir aussi vite que les garçons (lycéens) les plus rapides, qui battent les records des athlètes féminines d’élite dès l’âge de 14 ou 15 ans, ce qui témoigne de l’importance de la puberté dans le développement corporel.
La puberté masculine est à l’origine du chasseur-combattant et du sprinter courant les 100 mètres en moins de 10 secondes (un exploit réalisé par plus de 150 hommes, mais aucune femme). Et qu’est-ce qui détermine le développement de cet avantage athlétique masculin au cours de la puberté ? Les hormones. Et, plus précisément, la testostérone. Il s’agit de l’hormone de la « masculinité », de la « taille » et de la « musculature ». Lors de la puberté, les hommes présentent des taux de testostérone jusqu’à 20 fois supérieurs à ceux des femmes, ce qui favorise le développement, au cours de l’adolescence, des caractéristiques sexuelles secondaires masculines qui, dans le contexte du sport, se traduisent par un avantage athlétique masculin.
Mais cet avantage ne se limite pas aux différences physiques et fonctionnelles conférées par la morphologie, la constitution et la taille des hommes. De toute évidence, les athlètes féminines doivent généralement faire face aux effets du cycle menstruel et aux effets cycliques des hormones sur la capacité d’entraînement et la performance. Le cycle menstruel est connu pour affecter les fonctions cardiovasculaires, respiratoires et cérébrales, la réaction aux aides ergogéniques, l’orthopédie et les paramètres métaboliques, et représente un obstacle à la capacité athlétique que les hommes ne connaissent pas. De plus, la susceptibilité aux blessures diffère entre les hommes et les femmes, ce qui a un impact sur le temps d’entraînement. De nouvelles recherches montrent que, par rapport aux hommes, les joueuses de rugby semblent plus susceptibles de subir des blessures par commotion, avec des conséquences plus graves. Ce phénomène a été attribué à une moindre résistance à l’impact des muscles du cou et à des structures cérébrales plus délicates. Des études sur la fragilité neuronale des cellules nerveuses masculines et féminines dans une boîte de Pétri ont révélé que les neurones féminins sont plus facilement endommagés par les lésions dues à l’étirement.
Dans la plupart des sports, les athlètes féminines ont besoin d’une catégorie protégée — qui exclut l’avantage masculin et traite les athlètes féminines comme des personnes dignes de respect — pour bénéficier de possibilités équitables. Et les protections pour les athlètes féminines, sous la forme d’une discrimination autorisée, sont soutenues par la loi britannique sur l’égalité. L’article 195(1) de la loi sur l’égalité de 2010 autorise la discrimination sexuelle dans les sports où le sexe importe, c’est-à-dire ceux où « la force, l’endurance et le physique » influencent le résultat. Les jeux comme les fléchettes et les échecs peuvent avoir du mal à justifier une catégorie féminine protégée sur la base du sexe, même s’il est possible d’organiser des compétitions réservées aux femmes pour encourager leur participation à ces sports de « pub » (fléchettes, billard, etc.) traditionnellement masculins. Mais la course à pied, l’aviron, le rugby et bien d’autres sports peuvent — sur simple décision — exclure les hommes de catégories réservées aux femmes ; aucune autre justification n’est nécessaire du moment qu’il s’agit d’un sport où le sexe importe.
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Les catégories sportives réservées aux femmes excluent ceux qui bénéficient de la stimulation liée à la puberté masculine (elle-même liée à la testostérone) et ainsi de l’acquisition d’une plus grande taille, d’une plus grande masse musculaire, d’une plus grande capacité cardiovasculaire et de nombreux autres avantages par rapport à qui ils auraient été si les contingences de la reproduction sexuée n’avaient pas fait d’eux des mâles, mais des femelles. L’inclusion des femmes transgenres — des hommes qui, selon Joanna Harper (j’y reviendrai), possèdent un « sentiment inné du genre, ou identité de genre, qui ne correspond pas à leur sexe biologique » et qui, dans la plupart des cas, ont connu une puberté masculine — crée un casse-tête pour les personnes chargées de la régulation des sports.
Étant donné le rôle clé de la testostérone dans le développement masculin, les « femmes transgenres » qui cherchent à diminuer l’impact fonctionnel ou visuel de leurs caractéristiques physiques masculines peuvent supprimer la testostérone et prendre des œstrogènes (l’hormone qui sous-tend le développement des caractéristiques sexuelles secondaires féminines). De nombreux commentateurs soutiennent que ce régime hormonal est suffisant pour autoriser les femmes transgenres dans la compétition féminine, quelle que soit l’ampleur de son effet sur le corps (ou peut-être supposent-ils qu’il aboutit à une parité avec les métriques féminines). Cependant, la possibilité que les femmes transgenres conservent l’avantage durable que confère la puberté masculine induite par la testostérone — autrement dit que la testostérone sécrétée à l’âge de 13 ans possède des effets physiques ne pouvant être annulés ou compensés par une diminution de la testostérone à 30 ans — a été admise dès 1990 par World Athletics (alors l’Association internationale des fédérations d’athlétisme). Seulement, elle a ensuite été remise en question par le Comité international olympique (CIO) en 2003 lors de la désormais tristement célèbre « réunion de Stockholm ».
En 2003, le CIO, sur la base d’une seule étude scientifique portant sur la taille des muscles de la cuisse chez des femmes transgenres supprimant leur sécrétion de testostérone, détermina que l’ablation des testicules au moins deux ans avant la compétition, un statut légal de femme et des hormones conformes au profil féminin — résultant de l’ablation des testicules et d’une supplémentation en œstrogènes — suffiraient à garantir l’équité entre les femmes et les femmes transgenres. Et ce malgré la suspicion de la persistance d’un avantage masculin durable, qui était d’ailleurs étayée par des preuves apportées par cette même étude montrant que les « femmes transgenres » qui perdaient de la masse musculaire au niveau des cuisses (l’atrophie musculaire est un effet connu d’un faible taux de testostérone chez les hommes) conservaient néanmoins des muscles des cuisses nettement plus importants que ceux des femmes, même trois ans après le début du traitement hormonal. La stupéfiante interprétation de ces données par l’auteur principal de l’étude révèle la dégradation croissante de l’équité pour les athlètes féminines ; il affirma qu’il était « arbitraire » de séparer les compétitions masculine et féminine.
Le CIO mit à jour ses directives pour l’inclusion des femmes transgenres dans les sports féminins fin 2015. La présentation d’une étude menée par Joanna Harper sur les performances avant et après suppression de la testostérone de huit « coureuses » transgenres de haut niveau (dont elle-même [enfin, lui-même, NdT]) a permis de calculer des classements relatifs similaires dans le domaine féminin après la suppression de la testostérone et dans le domaine masculin avant la suppression de la testostérone. En d’autres termes, un homme ayant un score de course particulier dans le domaine masculin obtenait le même score de course dans le domaine féminin (ce que nous appelons désormais un « avantage de classement »). Et même si la tentative de mesurer les changements réels de performance chez les « femmes transgenres » sportives était — et demeure — la bonne approche pour informer les directives sur l’inclusion, l’étude fut mal menée, la cohorte déclarant souvent elle-même ses propres temps sur différents parcours de course sur différentes distances, et sans contrôle de l’entraînement, des blessures, du régime alimentaire, etc.
L’une des « femmes transgenres » ayant participé à l’étude de Harper obtint de bien meilleurs résultats dans le domaine féminin que dans la compétition masculine, résultat d’un entraînement de haute intensité, auquel on pouvait s’attendre étant donné la population athlétique visée par les directives dérivées. Cela fournissait un début de preuve du fait que la suppression de la testostérone chez les femmes transgenres ne nuit pas inévitablement aux performances sportives. Harper retira cette athlète de ses calculs finaux, au motif qu’il se serait agi d’une « anomalie ». Harper a clairement fait savoir que les résultats de son étude de 2015 se limitaient à la course à pied de haut niveau (même si ses recherches doctorales en laboratoire se poursuivent avec des athlètes d’autres disciplines) et que certains avantages masculins — elle [il] cite souvent la taille et la force — sont conservés. Dans son livre, Sporting Gender (« Genre et sport »), elle se rappelle avoir été claire à ce sujet avec le CIO en 2015.
Mais même si l’on ne tient pas compte des lacunes de son étude, l’ensemble de ses données montre que les performances en course à pied n’ont pas nécessairement pâti de la suppression de la testostérone et Harper elle-même [lui-même] reconnaît avoir conservé un avantage. D’autres experts présents soulevèrent des questions sur la mémoire musculaire et les proportions du squelette. Le type de 2003 mit à jour ses précédents conseils, passant d’une exigence de deux ans de suppression de la testostérone à un an seulement, malgré le fait que toutes ses données publiées en 2004 montraient la conservation d’un avantage significatif trois ans après le début de la suppression de la testostérone. Et depuis 2003, une poignée d’autres études ont montré que les femmes transgenres qui suppriment la testostérone pendant au moins un an perdent généralement un peu de masse et de force, mais conservent des muscles plus volumineux et une plus grande force que les femmes.
Néanmoins, en 2015, le CIO a encore assoupli ses directives en décidant de renoncer à l’exigence chirurgicale, de remplacer le statut légal de femme par une déclaration sous serment concernant l’identité de genre, et d’exiger un an de « faible taux de testostérone » à un seuil maximal dépassant de loin les niveaux typiquement féminins. Alors pourquoi, en dépit du fait que toutes les données scientifiques confirment une hypothèse vieille de 25 ans — désormais avérée — selon laquelle l’avantage masculin, comme des muscles plus gros et une plus grande force, persiste au cours de cette période, le CIO a‑t-il revu à la baisse la rigueur de ses critères physiques pour l’admission des « femmes transgenres » dans le sport féminin ? Permettre à des personnes présentant des avantages physiques disqualifiants d’accéder à une catégorie restreinte paraît contraire aux membres de ladite catégorie. Le CIO — et, par conséquent, la plupart des fédérations sportives qui, paresseusement, s’en remettent aveuglément au CIO en ce qui concerne leurs décisions politiques — semble penser différemment. Et il est difficile de trouver des preuves scientifiques permettant d’expliquer pourquoi il pense différemment.
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En gardant à l’esprit les directives de 2015 qui, selon le CIO, garantissent une compétition équitable pour les femmes, le Dr Tommy Lundberg (Karolinska Institute, Suède) et moi-même avons examiné ce qui arrive aux corps des « femmes transgenres » (et des autres hommes) lorsqu’ils suppriment la testostérone. Nous avons recherché des études sur la masse corporelle maigre, la taille des muscles et la force chez les « femmes transgenres » qui suppriment la testostérone conformément aux directives du CIO, et nous avons trouvé un consensus scientifique. C’est-à-dire que, sur une douzaine d’articles étudiant des « femmes trans » supprimant la testostérone, nous avons constaté que leur squelette ne change pas et qu’ils perdent un peu de masse musculaire et de force. Une perte d’environ 5 %. En comparaison d’un avantage initial leur conférant, par rapport aux femmes, une force presque deux fois plus importante dans le haut du corps et 50 % plus importante dans les quadriceps, ces petits changements n’altèrent pas significativement la force, qui est une mesure clé de l’avantage athlétique masculin, qui rend inéligible aux sports féminins. La catégorie féminine est conçue pour exclure l’avantage masculin.
D’ailleurs, certaines « femmes trans » ne perdent pas du tout de force, et de nombreuses données montrent que l’entraînement compense les pertes lorsque la testostérone est supprimée chez les hommes pour des raisons médicales. Et si la suppression de la testostérone à l’âge adulte n’annule pas l’avantage athlétique masculin, en particulier si une personne suit un programme d’entraînement athlétique, alors l’auto-identification dans une catégorie sportive par le biais de l’« identité de genre » anéantit la ségrégation sexuelle dans le sport.
Revenons-en à la situation juridique (du moins au Royaume-Uni). Dans les sports où le sexe importe, l’article 195(2) de la loi sur l’égalité de 2010 autorise la discrimination sur la base de la caractéristique protégée du changement de genre (gender reassignment). En d’autres termes, les « femmes transgenres » qui sont biologiquement des hommes, mais en possession d’un certificat de reconnaissance de genre (CRG) et donc juridiquement des femmes peuvent être exclues si nécessaire pour garantir l’équité et/ou la sécurité des athlètes féminines qui ne présentent pas la caractéristique protégée du changement de genre (les femmes biologiques [les pléonasmes où nous en sommes rendus, quelle absurdité (NdT)]). La justification de l’exclusion des « femmes transgenres » possédant un CRG — des individus qui sont juridiquement des femmes avec la caractéristique protégée du changement de genre — repose sur le fait que la puberté masculine a cimenté l’avantage masculin — une « femme transgenre » est plus grande et plus forte qu’une femme ayant connu une puberté féminine —, et qu’il est impossible de défaire ce qui a déjà été fait en enrayant la sécrétion de testostérone.
(On ne sait pas comment la loi peut s’appliquer aux « femmes transgenres » qui sont juridiquement des femmes et qui n’ont pas connu de puberté masculine à cause du blocage de la puberté. Il y a un manque de données dans la littérature scientifique, et les résultats physiologiques pour ces mâles biologiques nécessitent une étude plus approfondie. Une étude récemment parue montre que : « Les filles transgenres deviennent grandes : la taille adulte n’est pas affectée par le traitement aux analogues de la GnRH et à l’estradiol. » Dans cette étude, des filles transgenres ayant reçu des bloqueurs de puberté à partir de 13 ans environ, puis des hormones du sexe opposé à 16 ans, ont acquis une taille adulte moyenne bien supérieure à la moyenne féminine de la population et proche de la moyenne masculine de la population. La taille adulte pourrait s’avérer largement réfractaire aux traitements hormonaux).
En outre, on pourrait faire valoir que le fait de ne pas exclure les mâles des catégories féminines constitue en lui-même une discrimination à l’égard des femmes, ce qui est particulièrement visible au niveau individuel, lorsqu’une athlète féminine perd une place, un prix, une certaine fierté ou, dans le pire des cas, son intégrité physique en concourant avec ou contre des « femmes transgenres ». Mais il existe également une discrimination indirecte au niveau politique, lorsque, par rapport au sport masculin, le sport féminin est affecté de manière disproportionnée par les politiques d’inclusion transgenres. La longue et douloureuse histoire du dopage dans les pays de l’Est nous a montré que les femmes, même dopées à la testostérone synthétique, aux hormones de croissance et à je ne sais quoi d’autre, ne peuvent tout simplement pas rivaliser avec leurs congénères masculins. Les « hommes trans » ne sont pas une menace pour les concurrents masculins, alors qu’une seule « femme trans » [un seul homme qui se dit femme] peut évincer de nombreuses femmes concurrentes.
À l’heure actuelle, en 2022, certaines instances gouvernantes comme World Rugby (et les fédérations nationales associées comme les fédérations anglaise et irlandaise de rugby), USA Powerlifting et la FINA (la fédération internationale des sports aquatiques) ont mené — et rendu publics leur processus de consultation et leurs données — leur propre analyse et interdit aux hommes qui suppriment la testostérone après la puberté de concourir dans la catégorie féminine. Les autres instances dirigeantes devraient s’en inspirer.
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Durant les jeux de Tokyo 2020 — au cours desquels la première « femme transgenre » olympique « déclarée » a concouru dans la catégorie des poids super-lourds en haltérophilie féminine —, une table ronde avec des journalistes a beaucoup fait couler d’encre. Les responsables du CIO semblent y avoir admis que les avantages athlétiques clés acquis par les « femmes transgenres » pendant la puberté masculine n’étaient pas supprimés par les critères du CIO alors en vigueur, qui exigeaient une réduction de la testostérone à un niveau inférieur à 10 nanomoles par litre (nmol/l) pendant au moins 12 mois avant (et pendant) la participation aux catégories sportives féminines, et que ces directives de 2015 étaient dépassées.
À la lumière de ces éléments et de la publication intermédiaire d’une vaste consultation menée par les conseils sportifs britanniques, ayant conclu qu’il était impossible de concilier équité et inclusion — les fédérations sportives doivent faire un choix, et le justifier —, je m’attendais à ce que les nouvelles directives du CIO, qui devaient arriver fin 2021, soient strictes. Comme tout le monde l’avait anticipé, elles confiaient l’élaboration des politiques aux fédérations sportives individuelles, et prétendaient également fournir un cadre dans lequel ces fédérations sportives pourraient élaborer des règles sur mesure. Fait remarquable, les nouvelles lignes directrices de 2021 affirment qu’il ne doit y avoir « aucune présomption d’avantage » pour les mâles inhibant leur sécrétion de testostérone dans les sports féminins — une position qui sape l’existence même de toute catégorie.
D’un point de vue conceptuel, tous et toutes les athlètes ont accès à l’ensemble des talents, stratégies, entraînements et dévouements que la compétition sportive cherche à récompenser. Par exemple, hommes et femmes, jeunes et vieux, valides ou non, peuvent posséder le « gène de la vitesse » qui modifie la répartition des types de fibres musculaires, et est censé favoriser une capacité explosive dans des sports comme le sprint. Ces mêmes athlètes peuvent être entraîné·es selon des stratégies pareillement bonnes et une psychologie pareillement efficace pendant le jeu. Ils et elles peuvent s’entraîner avec une même intensité, manger la même chose, porter les mêmes chaussures, et ainsi de suite. Les différences physiologiques flagrantes entre les différents types de corps — les avantages que procure le fait d’être un homme, valide et à l’apogée de sa maturité physique — transcendent les différences entre athlètes qui résultent du talent, de la stratégie, de l’entraînement et du dévouement.
Il ne s’agit pas d’une idée obscure. Nous savons tous que les personnes de 40 ans possèdent un avantage physique sur celles de 80 ans, même si la personne de 40 ans moyenne s’avère plus lente qu’Usain Bolt en 2060. À talent égal, entraînement égal, etc., nous savons quels paramètres physiques confèrent un avantage : l’âge, le fait d’être valide, parfois le poids, la taille peut-être, et, bien sûr, le sexe. En abandonnant le principe des catégories, tous les sports seront dominés par des hommes valides de 25 ans, au détriment de toutes les autres personnes.
Plus étonnant encore, le directeur médical et scientifique du CIO, le Dr Richard Budgett, a affirmé que la testostérone ne faisait aucune différence dans les performances sportives, et personne dans le monde de la science du sport — y compris à l’Agence mondiale antidopage — ne sait comment réagir face au déni infâme d’un phénomène que nous connaissons — et que des générations de femmes du bloc de l’Est ont exploité avec succès — depuis des décennies.
Les événements récemment survenus dans les sports américains et britanniques ont mis en évidence les insuffisances des politiques qui exigent la suppression de la testostérone. Cette situation ne peut plus durer. Nous avons vu dans la natation et le cyclisme un mouvement de femmes athlètes et d’avocates — qui ont été soigneusement ignorées jusqu’à présent — affirmer leur droit à une catégorie protégée, qui exclut les hommes. Quelle que soit la sympathie que nous pouvons éprouver pour ces hommes ayant des problèmes d’identité et de dysphorie, et qui suivent les règles fixées par les organes dirigeants.
Ces règles sont erronées. Et les femmes athlètes qui invoquent l’équité et la science ne peuvent et ne doivent être ignorées.
Emma Hilton
Traduction : Nicolas Casaux
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