Vous serez tous très heureux d’apprendre que le secteur minier est de plus en plus vert. En effet, de plus en plus d’entreprises minières recourent à des centrales de production d’énergie dite « renouvelable » ou « verte » ou « propre » pour alimenter — une partie — de leurs exploitations. Car si les immenses camions et engins miniers ne fonctionnent pas encore tous à l’électricité, « le plus grand véhicule électrique du monde est un camion à benne [un camion minier] de 290 tonnes ». Konbini nous rapporte que :
« Ce camion, nommé Fuel Cell Electric Vehicle (FCEV), possède une capacité de stockage de 1 000 kWh, soit treize fois la capacité d’une Tesla Model 3. Équipé originellement d’un moteur diesel, il est en cours de conversion par Ballard avec l’aide de Williams Advanced Engineering, qui a notamment fourni les batteries pour les courses de Formule E
Il disposera d’une motorisation hybride grâce à neuf piles à combustible à hydrogène couplée à une batterie lithium-ion. Il sera donc aussi le plus gros véhicule à hydrogène au monde. Une autre des particularités de ce monstre est qu’un dispositif de régénération des batteries au freinage a été mis en place, permettant au camion de conserver de la batterie durant les descentes et de s’économiser sur des terrains difficiles. »
En effet, fort heureusement, charitablement, généreusement, « l’industrie minière plébiscite les camions électriques géants ». Ainsi qu’un article publié sur le site Renewables Now (littéralement : Les renouvelables maintenant, un site dédié à l’industrie des énergies dites renouvelables) nous l’apprend :
« Un des principaux avantages des énergies renouvelables, c’est qu’elles peuvent répondre aux besoins énergétiques d’exploitations minières situées dans des régions isolées, où le coût de construction des infrastructures nécessaires pour raccorder la mine au réseau électrique ou pour construire une centrale électrique classique serait très important. En disposant d’une source d’énergie renouvelable hors réseau, une exploitation minière peut satisfaire tous ses besoins énergétiques à partir de sources vertes et réaliser des économies importantes sur le prix de l’électricité. »
Autrement dit, les énergies renouvelables, c’est super. Même dans les régions encore préservées des ravages de la civilisation, on peut installer une centrale photovoltaïque ou éolovoltaïque, et hop, on peut ouvrir une mine. N’est-ce pas formidable ?!
« Voyez par exemple le projet de la société aurifère canadienne B2Gold de développer et d’installer l’un des plus grands systèmes d’énergie photovoltaïque et à batterie hors réseau du monde à sa mine de Fekola au Mali. Ce projet de 38 millions de dollars US consistera en une centrale solaire de 30 MW avec un stockage par batterie de 13,5 MWh, qui sera intégrée à la centrale électrique existante qui fonctionne au HFO [au fioul lourd, HFO = Heavy-Fueled Oil]. »
Remarquez, au passage, le cercle éminemment vertueux que tout ceci induit, véritable symbiose entre industrie des énergies renouvelables et industrie minière :
« Il est donc très clair que les industries de l’exploitation minière et de la production d’énergies renouvelables auront, et doivent avoir, une relation symbiotique forte à l’avenir. L’industrie des énergies renouvelables, qui doit nous permettre d’avancer en direction de la neutralité carbone, repose sur l’extraction de métaux et minerais. En retour, l’industrie minière s’appuiera de plus en plus sur les énergies renouvelables afin de faire en sorte que son image d’industrie sale s’estompe au profit de l’image d’une industrie propre, en vue de conserver et renforcer l’appétit des investisseurs. »
À ce propos, un article a récemment été publié dans la prestigieuse revue scientifique Nature, intitulé « La production d’énergie renouvelable va exacerber les menaces que les exploitations minières font peser sur la biodiversité ». S’il dénonce à juste titre les dommages environnementaux qu’implique le développement des industries de production d’énergie dite « propre », « verte » ou « renouvelable », il commence par une belle absurdité, qui illustre très bien le problème de perception dans lequel sont englués la plupart des gens ayant été fructueusement conditionnés par l’idéologie dominante :
« La production d’énergie renouvelable est nécessaire pour endiguer le changement climatique et enrayer les pertes de biodiversité qui y sont associées. »
Nécessaire ! Comme si, afin de mettre un terme au réchauffement climatique, il était impératif de construire des centrales photovoltaïques et de produire de l’électricité. Comme si la planète avait impérativement besoin que les humains produisent de l’électricité afin de diminuer son taux de carbone atmosphérique ! Comme si la production d’électricité photo- ou éolovoltaïque était une condition sine qua non de la préservation des baleines ! Quelle connerie. La production d’électricité sert aux humaindustriels, à la civilisation industrielle. Si ces scientifiques considèrent ce moindre mal (moindre par rapport à faire encore plus con, à tout détruire encore plus vite) du développement de nouvelles industries faussement vertes comme le minimum vital, c’est qu’ils partent du principe, de l’axiome indiscuté, à l’instar de la plupart des civilisés, selon lequel la production d’électricité, la perpétuation de l’essentiel du mode de vie techno-industriel moderne, est une nécessité fondamentale, et qu’ils occultent alors tout questionnement sur si une telle chose peut-être, ou non, compatible avec la prospérité de la vie sur Terre et l’existence de sociétés égalitaires, démocratiques, offrant aux humains des vies désirables. C’est qu’ils sont incapables d’envisager la seule solution qui puisse être réellement bonne, positive : arrêter la civilisation industrielle, c’est-à-dire arrêter de produire de l’électricité et de l’énergie industrielles, et tout ce que cela implique.
(Dans un autre épisode, je vous parlerai peut-être du verdissement de l’armée et de l’industrie de la guerre plus généralement. Les réussites de l’écologisme sont innombrables.)
Nicolas Casaux
Source: Lire l'article complet de Le Partage