En couverture : Maurice Strong accueille la Première ministre indienne, Indira Gandhi, lors de la conférence de Stockholm de 1972.
Maurice Strong naît le 29 avril 1929 à Oak Lake, dans le Manitoba, au Canada. À 18 ans, il se fait embaucher par la plus grande compagnie pétrolière canadienne, McColl-Frontenac, qui appartient à Texaco depuis 1941.
En 1947, Strong fait la connaissance de David Rockefeller, le petit-fils de l’immense John D. Rockefeller, ce qui marque le début d’une relation de longue durée avec cette puissante famille.
Après avoir été initié à l’industrie pétrolière chez McColl-Frontenac, Strong est embauché par un certain John Gallagher, patron de la compagnie Dome Petroleum. Strong commence comme assistant – probablement à l’âge de 21 ans –, et deviendra vice-président, en charge des finances. De son côté, Gallagher deviendra un pionnier de la recherche pétrolière dans l’Arctique, notamment dans la mer de Beaufort.
Après Dome Petroleum, Strong « part à la fin de 1952 avec sa femme pour un long voyage de deux ans, qui le mène en Afrique. Au Kenya, centre névralgique où les compagnies pétrolières britanniques, françaises, américaines se livrent à des combats pour s’emparer de nouveaux marchés. Les indépendances ne sont plus très loin. Strong travaille sur place pour la Caltex, joint-venture de Texaco – le propriétaire de McColl-Frontenac, souvenez-vous –, et d’un groupe issu du démantèlement de la Standard Oil, et qui deviendra Chevron. Son travail doit avoir une certaine importance, car il voyage en Érythrée, à Zanzibar, en Tanzanie – où il s’intéresse de près à une mine de graphite –, en Ouganda, à Maurice, à Madagascar, au Zaïre. Strong laisse dire qu’il développera aussi le réseau de stations-service dans tout le Kenya, dont ont dû bien profiter éléphants et girafes.
À son retour en Amérique, Strong crée sa propre compagnie, M.F. Strong Management, qui aide des investisseurs à bien choisir leurs forages pétroliers et gaziers, puis dans les années 50 – il n’a guère plus de 28 ans –, il achète une petite compagnie gazière et pétrolière, Ajax Petroleum. Il va la transformer en l’une des plus puissantes entreprises canadiennes, Norcen Resources. » (Fabrice Nicolino, Le Grand sabotage climatique, 2023)
En 1960, la surpuissante Power Corporation embauche Strong, directement comme vice-président. « En 1961 – il a 42 ans –, il devient même le président de cet énorme conglomérat, mêlant gaz, pétrole, hydro-électricité, finance. Et politique ? Et politique. Power Corporation emploiera au fil des années de futurs Premiers ministres, comme Jean Chrétien ou Pierre Trudeau, et bien d’autres responsables provinciaux. Le cas le plus saillant est celui de Paul Martin, fils de l’autre, que Maurice Strong fait entrer à Power Corporation au début des années soixante. Ce Martin-là, qui sera Premier ministre en 2003, n’hésitera jamais à reconnaître en Maurice Strong un mentor. Power Corporation, faiseur de rois à la tête du Canada. » (Nicolino, ibid.)
En juin 1966, Strong quitte son poste, et devient secrétaire d’État de l’aide publique au développement, qui dépend directement de Paul Martin – père –, alors ministre des Affaires étrangères. En 1968, il crée l’Agence canadienne de développement international.
« Dans son plaidoyer pro domo déjà abondamment utilisé, Strong fait un aveu involontaire qui ne lui coûte pas grand-chose quelques décennies plus tard. Il note qu’il “fut troublé par les effets environnementaux et sociaux néfastes provoqués par les grands projets d’infrastructure que l’ACDI [sa propre organisation] soutenait”. Était-il sincère ? C’est douteux, car sans le crier sur les toits, l’Agence canadienne de développement international a passé un accord avec un groupe privé d’ingénierie, SNC, qui sera à l’œuvre dans tous les travaux de “développement”, notamment en Afrique. Ce n’est injurier personne que de rappeler l’évidence : bureaux d’études et d’ingénierie n’ont jamais eu qu’une raison d’être. Et c’est de faire couler du béton. » (Nicolino, ibid.)
En 1968, toujours, Strong « investit avec un ami dans une société de Toronto, Plural Properties, puis dans une autre, M.N.S. Investments, dont un tiers appartient à Paul Martin père, l’ancien ministre des Affaires étrangères. Comme on se retrouve. Il va ensuite nouer des liens directs avec les fondations Ford et Rockefeller. Qui le conduiront au conseil d’administration de la fondation Rockefeller dès 1971. Et cela mérite un développement. Qui s’appelle la “Révolution verte”. En 1943, la fondation Rockefeller passe un accord avec le gouvernement mexicain, et lance avec lui l’Office of Special Studies. Il s’agit de trouver des semences plus productives de céréales comme le blé ou le maïs par la génétique. Et ça marche. Norman Borlaug, un chercheur, obtiendra en 1970 un prix Nobel pour ses travaux. La fondation Ford fera de même en Inde, où la production de blé augmente, elle aussi. Beaucoup.
Je ne peux entrer dans les détails, mais les vrais résultats de l’entreprise sont catastrophiques. De très nombreux écologistes – et parmi eux, des scientifiques – parlent à son propos de guerre contre le vivant. Et les vivants. Certes, les rendements ont augmenté, mais sans résoudre une seule seconde – on le saurait – le problème de la faim ou de la malnutrition. L’affaire, car c’en est une, aura surtout servi de tête de pont à l’industrie agrochimique mondiale – engrais de synthèse et pesticides – et à des travaux d’ingénierie qui auront surdéveloppé une irrigation folle, très dispendieuse en eau. La “Révolution verte” est un modèle clé en mains, celui de l’agriculture industrielle américaine. En Inde par exemple, les exportations de blé ont bondi, dans le même temps que 300 millions de paysans pauvres n’avaient pas assez à manger. Dresser la liste de toutes les conséquences négatives de ce grand saut “philanthropique” n’est pas possible ici, qui comprennent une considérable perte de biodiversité agricole, la salinisation massive de terres, l’épuisement de nappes phréatiques – phénomène lié –, une grave dégradation de la fertilité des sols, un développement paradoxal de l’insécurité alimentaire. Bien sûr, on pouvait en 1971 avoir quelque illusion. Mais au point d’entrer au conseil d’administration de la fondation Rockefeller ?
[…] En 1969, l’assemblée générale de l’ONU décide la tenue d’une conférence internationale sur l’environnement. Elle deviendra le premier Sommet de la Terre de Stockholm, en 1972. Mais qui pourrait s’en occuper ? Selon Strong lui-même, qu’on n’est pas obligé de croire sur parole, tout serait venu d’un gouvernement suédois inquiet, en 1970, que personne n’ait été encore désigné pour la préparation. Alors, l’ambassadeur suédois à l’ONU, Sverker Astrom, aurait contacté Strong, recommandé par un ami mutuel, Wayne Kines. Et un joli miracle se serait produit : Astrom, séduit, recommande Strong au Français Philippe de Seyne, sous-secrétaire général pour les affaires économiques et sociales. Les deux hommes se rencontrent, et de Seyne recommande Strong au secrétaire général de l’ONU, le Birman U Thant. Lequel lui propose la place, et le nomme dans la foulée sous-secrétaire général de l’ONU. Hum.
Le mystère est d’autant plus épais qu’à cette date, Strong n’a encore jamais marqué le moindre intérêt pour la nature et les écosystèmes. C’est un businessman, qui n’a cessé depuis bientôt trente ans de faire des affaires, le plus souvent dans le pétrole. N’y avait-il pas moyen de trouver mieux ? Apparemment, non. Strong commence alors sa carrière de grand défenseur de l’environnement et de la nature. Est-il de ces convertis tardifs, tardifs et repentants ? Pas vraiment, mais on y reviendra. Après avoir créé et dirigé le PNUE [Programme des Nations unies pour l’environnement] en 1972, il repart vers une carrière dans l’industrie pétrolière. Il devient en janvier 1976 le patron de Petro-Canada. Une compagnie d’État en charge de l’exploration et de l’exploitation du pétrole. » (Nicolino, ibid.)
En 1977, Maurice Strong fait son entrée à l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature). Il devient même le patron du bureau de l’UICN, poste-clé de la structure.
« En 1978, il laisse Petro Canada pour diriger une autre compagnie qu’il a achetée. AZL Resources, basée à Denver (États-Unis) recherche du pétrole partout dans le monde, des Rocheuses en Australie, en passant par le Congo. Chiffre d’affaires en 1981 : 125 millions de dollars. Ce n’est pas la Shell, mais c’est loin d’être une boutique. Cette même année, AZL Resources crée une entreprise commune avec Kuwait Petroleum Corp., dotée d’un capital de 100 millions de dollars. Basée au Koweït, elle est la propriété d’un milliardaire saoudien, Adnan Khashoggi, également marchand d’armes international. No comment.
Retour à l’État canadien, sur lequel règnent tous ses amis. Entre 1982 et 1984, il devient le patron d’une holding en charge des intérêts commerciaux de ce dernier. The Canada Development Investment Corporation s’intéresse surtout à l’énergie, et donc, fatalement, au pétrole et au gaz. La holding possède ainsi le pipeline Trans Mountain, construit en 1951, qui a transporté des millions de barils de pétrole depuis l’Alberta jusqu’en Colombie-Britannique, via les Rocheuses. Il pourrait être doublé prochainement, de manière à transporter 325 millions de barils de pétrole par an, provenant de gisements de sable bitumineux, unanimement considérés comme les plus dangereux pour le climat.
Dans les années suivantes, Strong fusionne AZL, qu’il dirige en même temps, avec un autre groupe pétrolier – sans doute le plus grand des “petits” –, Tosco Corporation, ce qui le rend propriétaire de 40 000 hectares – certaines sources évoquent même 65 000 hectares – dans le Colorado. Que faire ? Laisser vivre la nature ? Strong crée en 1986 une société, American Water Development Inc. – avec un groupe d’investisseurs, dont l’ancien gouverneur du Colorado, Dick Lamm. Pour quelle raison ? Strong a appris qu’une nappe phréatique très importante courait sous son domaine de la San Luis Valley, et a décidé un plan de “développement”. Il s’agirait de creuser 117 puits, avant d’expédier l’eau extraite par des réseaux de tuyauteries, en direction des villes de l’Ouest, qui s’étendent à perte de vue. Dont Las Vegas. Pas un peu. Beaucoup. Environ 300 millions de m3 par an.
Mais ça ne passe pas. Des structures aussi solides que le Colorado Department of Natural Resources – protecteur des eaux du Colorado – ou le National Park Service – il gère les parcs nationaux –, établissent sans mal que le projet s’en prendrait aux droits de l’eau d’autres communautés. Mais surtout, qu’il causerait des dommages écologiques aux fragiles écosystèmes de dunes de sable, ainsi qu’aux zones humides de la région.
Les riverains et paysans locaux, soutenus par des écologistes, se lancent dans une longue bataille. Et, finalement, en 1991, le tribunal de l’eau enterre définitivement le projet, décrétant que l’eau souterraine convoitée par Strong est “affluente de cours d’eau naturels”. Comme on le savait déjà par des études, la nappe communique avec d’autres nappes, alimentant les rivières. Par la suite, Strong fera du Baca Ranch – le nom de sa propriété – un lieu de ressourcement et de spiritualité, avec golf, piscine et temple tibétain. Ô sérénité. » (Nicolino, ibid.)
En 1990, Strong rencontre Stephan Schmidheiny, auquel il confie un poste stratégique dans la préparation du Sommet de la Terre de 1992 organisé à Rio : Conseiller en chef pour les entreprises et l’industrie. Stephan Ernst Schmidheiny, né en 1947, fait partie de la quatrième génération de l’une des principales familles industrielles de Suisse. Comme on peut le lire sur son site personnel : « L’entrepreneuriat est inscrit dans l’ADN de la dynastie Schmidheiny. Comme nulle autre famille, les Schmidheiny ont empreint l’histoire économique de la Suisse. »
Stephan Schmidheiny est le fils de Max Schmidheiny, un industriel du secteur de la construction, qui crée entre autres l’entreprise Eternit Suisse. « En 1984, son père Max procède au partage de la succession. Tandis que Stephan Schmidheiny reçoit le Groupe Eternit Suisse, son frère Thomas Schmidheiny reprend les rênes de la société Holderbank active dans l’industrie du ciment, aujourd’hui connue sous le nom de LafargeHolcim. »
Un article publié en 2014 dans Le Monde, intitulé « Le clan Schmidheiny, cœur du pouvoir suisse helvétique », rapporte que « Max, le père de Thomas et Stephan, a présidé l’entreprise d’électrotechnique Brown Boveri Company (BBC), qui fusionnera, en 1988, avec la société suédoise ASEA pour devenir le géant mondial ABB. Stephan fut un temps le principal actionnaire de la société de compteurs électriques Landis & Gyr. Il a aussi marié la société d’optique Wild, établie dans le berceau du clan à Heerbrugg, avec Leitz et Cambridge Instruments pour créer Leica. »
En juin 1992, à 63 ans, Strong est donc le Secrétaire général du Sommet de la Terre organisé à Rio (20 ans après avoir été le Secrétaire général du Sommet de la Terre de Stockholm). La même année, il prend la tête d’un empire industriel canadien, Ontario-Hydro.
« Ontario-Hydro gère 69 usines hydroélectriques, 8 centrales au charbon ou au gaz, et 16 réacteurs nucléaires, lesquels ont lesté l’entreprise d’une dette si élevée – 34 milliards de dollars. Strong, embauché pour cela, licencie 7 000 employés. Il laisse son poste en 1995, non sans avoir fait acheter à l’entreprise 12 500 hectares de forêt tropicale au Costa Rica. Pour “compenser” – le mot n’est pas encore utilisé – les émissions de carbone d’Ontario-Hydro. » (Nicolino, ibid.)
En 1995, Stephan Schimdheiny crée le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD, Conseil mondial des affaires pour le développement durable), qui entretient depuis des liens étroits avec l’ONU en général, et qui est toujours présent lors des COP. Le WBCSD rassemble aujourd’hui les dirigeants de plus de 200 entreprises parmi les plus importantes du monde : Amazon, Alibaba, ADNOC (Abu Dhabi National Oil Company), ArcelorMittal, BASF, Bayer, BMW, BP, Cargill, Chevron, Dow, Dupont, EDF, Engie, Eni, Google, Hitachi, Honda, IBM, Ikea, etc.
Au début des années 1990, Strong fait construire un ensemble hôtelier de luxe au Costa Rica, à l’intérieur de la réserve naturelle Gandoca-Manzanillo, hautement protégée, avec une entreprise spécialement créée pour l’occasion, Desarollos Ecologicos.
« Villas del Caribe aurait coûté 35 millions de dollars à Maurice Strong, qui en donnera la gestion à son fils. L’affaire est loin d’être claire, et les Indiens Kekoldi n’auraient pas donné leur autorisation à cette construction. Une plainte aurait même été déposée, sans suite. On imagine que les relations très cordiales nouées par Strong avec la dynastie costaricaine des Figueres ne lui auront en tout cas pas nui.
Fin de l’activité industrielle de Strong, que l’on sache, du moins. Passons à la reconnaissance, multiforme. Strong ne s’est pas contenté d’être le patron de grandes entreprises. Il a également participé, au sommet, à l’épanouissement du système économique mondial. Au moment de sa mort le 28 novembre 2015, l’Allemand Klaus Schwab écrit sur le site du Forum économique de Davos une émouvante nécrologie :
“Il a profondément pris en compte la mission du Forum économique mondial, qui est d’améliorer l’état du monde. C’était un grand visionnaire, toujours en avance sur notre temps dans sa pensée. Il a été mon mentor depuis la création du Forum ; un grand ami ; un conseiller indispensable ; et, pendant de nombreuses années, il a été membre de notre Conseil des fondateurs. Sans lui, le Forum n’aurait pas atteint son importance actuelle.”
Qui est Schwab ? Le créateur en 1987 de ce que l’on appelle le Forum de Davos. Chaque année, en Suisse, des patrons de transnationales, des milliardaires, des banquiers, des responsables politiques se retrouvent pour parler entre puissants des affaires du monde. Sur les milliers de participants, la moitié arrivent en jet privé. Officiellement, le but de ces rencontres est “Improving the state of the world”. Améliorer l’état du monde. D’innombrables articles, reportages et commentaires montrent qu’elles servent surtout aux affaires, aux deals, au lobbying, et… aux fêtes. Il n’y a pas de raison de se faire du mal. Le conseil d’administration, sans surprise, compte des milliardaires et des banquiers centraux. On fête les “nouveaux champions”, les “Young Global Leaders”, et bien d’autres promesses d’un avenir profitable. Évidemment, tous les grands prêtres de la mondialisation – Banque mondiale, OCDE, FMI, Organisation mondiale du commerce (OMC) – sont aux premières loges. Faut-il insister ? Davos est l’épicentre de la destruction des écosystèmes.
Il n’y a pas que Davos. En 1995, le président de la Banque mondiale, Jim Wolfensohn, fait de Strong son conseiller proche. Sur l’un des sites de cette institution, on peut lire fin novembre 2015 : “Avec sa mort, nous avons perdu un géant de l’environnement et de la lutte contre le changement climatique.” Et Toyota aussi, bien que je n’aie pas retrouvé de faire-part de la firme automobile japonaise. Strong était l’un de ses conseillers officiels. De même, il a été le conseiller en chef d’une entreprise très importante de services aux entreprises et aux villes, CH2M Hill. On n’a pas dû bien l’écouter, car CH2M Hill a été mêlée à un nombre important de scandales mêlant pollutions et corruption. » (Nicolino, ibid.)
En 2003, sur demande du secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, Strong devient envoyé spécial de l’ONU en Corée du Nord. Mais le 20 avril 2005, l’ONU annonce la démission de Maurice Strong, visé personnellement par l’enquête sur le scandale du programme « Pétrole contre nourriture » de l’ONU en Irak. Strong a en effet encaissé un chèque de 988 885 dollars émis par une banque jordanienne et signé de la main de Tongsun Park, un homme d’affaires sud-coréen inculpé en 2006 par la Cour Fédérale de New York dans le détournement du programme en faveur de Saddam Hussein. Après avoir quitté ses fonctions, Strong s’exile en Chine où il possède un appartement.
Le 13 février 2012, le tribunal correctionnel de Turin, en Italie, condamne Stephan Schmidheiny à 16 ans de prison ferme, car il a été jugé responsable de la mort d’environ 3 000 ouvriers italiens, exposés à l’amiante dans les usines Eternit. Schmidheiny n’a jamais daigné venir s’expliquer devant le tribunal de Turin, laissant une armée d’avocats défendre sa cause. Depuis la confirmation de sa peine en appel, en juin 2013, Schmidheiny évite l’Italie, mais peut en revanche passer du Costa Rica à la Suisse sans aucun problème. Pas de mandat d’arrêt international pour ce criminel de masse.
Voilà pour un bref aperçu de l’histoire du « père du développement durable », ainsi surnommé en raison du rôle majeur qu’il a joué dans les premiers Sommets de la Terre, dans les différentes agences et évènements onusiens dédiés à la préservation de l’environnement. Strong eut une influence majeure sur la « Commission mondiale sur l’environnement et le développement » créée en 1983 par l’ONU, sous la direction de l’ancienne Première ministre norvégienne, Gro Harlem Brundtland. Or c’est cette commission, surnommée « Commission Brundtland », qui est à l’origine de la popularisation du concept du « développement durable », lequel figure à de nombreuses reprises dans le principal texte issu des travaux de la Commission, paru en français sous le titre Notre avenir à tous en 1987.
Une histoire significative, symbolique, odieusement illustratrice de ce qu’est le « développement durable » : une fumisterie, un mensonge promu par des bureaucrates, des fonctionnaires, des chefs d’États et d’entreprises principalement intéressés par la perpétuation du capitalisme industriel, des États, de l’ordre dominant.
Nicolas Casaux
Source: Lire l'article complet de Le Partage