L’interview suivante a initialement été publiée, en anglais, sur le site Quillette, le 6 novembre 2019. Des notes de la traductrice sont insérées dans le texte entre crochets.
Ray Blanchard est un professeur associé de psychiatrie à l’Université de Toronto spécialisé dans l’étude de la sexualité humaine, et plus particulièrement dans l’orientation sexuelle, les paraphilies et les troubles de l’identité de genre [maintenant appelé « dysphorie de genre »]. Dans les années 1980 et 1990, il a élaboré une théorie sur les causes de la dysphorie de genre chez les hommes connue sous le nom de « typologie du transsexualisme de Blanchard ». Cette typologie — qui continue à susciter de nombreuses controverses [particulièrement chez les autogynéphiles] — catégorise les hommes transidentifiés (c’est-à-dire les hommes qui s’identifient comme des femmes et qui sont dits « femmes trans ») en deux groupes distincts.
Le premier groupe est composé d’hommes transidentifiés (femmes trans) « androphiles » (parfois appelés « homosexuels »), sexuellement exclusivement attirés par les hommes et dont le comportement et l’apparence sont nettement « féminins dès leur plus jeune âge » [c’est-à-dire que leur comportement a été interprété par les adultes de leur entourage comme n’étant pas « conforme » à la masculinité viriarcale de notre culture]. Ils entament généralement le processus de transition médicale avant l’âge de 30 ans.
Le second groupe est motivé par ce que Blanchard appelle l’« autogynéphilie » : une orientation sexuelle [typiquement masculine] définie par une excitation sexuelle à la pensée ou à l’image de soi en tant que femme. Les autogynéphiles sont généralement attirés sexuellement par les femmes, bien qu’ils puissent aussi s’identifier comme asexuels ou bisexuels. Ils sont plus susceptibles de faire leur transition plus tard dans leur vie et d’avoir vécu jusqu’alors en conformité avec la masculinité conventionnelle.
Bien que la typologie de Blanchard soit soutenue par un large éventail de sexologues et d’autres chercheurs, elle est fortement rejetée par la plupart des militants trans qui contestent l’existence de l’autogynéphilie. [Très certainement parce que ces militants trans sont eux-mêmes autogynéphiles, à l’instar de « Julia Serano ».] L’historienne de la médecine Alice Dreger [devenue, entre-temps, une activiste trans instrumentalisant l’existence des personnes nées avec des troubles du développement sexuel pour justifier fallacieusement la notion d’identité de genre et l’inclusion des hommes dans les espaces et les sports des femmes], dont le livre Galileo’s Middle Finger, publié en 2015, comprend un compte rendu de la controverse sur l’autogynéphilie, résume le conflit :
« Il y a une différence essentielle entre l’autogynéphilie et la plupart des autres orientations sexuelles : la plupart des autres orientations ne sont pas érotiquement contrariées par le simple fait d’être étiquetées. Lorsque vous qualifiez un homosexuel typique d’homosexuel, vous ne perturbez pas ses espoirs et ses désirs sexuels. En revanche, l’autogynéphilie se comprend mieux en étant considérée comme un “amour” [nos guillemets] qui préférerait vraiment qu’on ne dise pas son nom. L’érotisme ultime de l’autogynéphilie réside dans l’idée de devenir ou d’être réellement une femme, et non dans le fait d’être un homme qui désire être une femme. »
[Dans Shame and Narcissistic Rage in Autogynephilic Transsexualism (« Honte et rage narcissique chez les transsexuels autogynéphiles ») Anne Lawrence, un transsexuel, psychologue et sexologue, parle de la « rage narcissique » que manifestent nombre d’autogynéphiles lorsque leurs interlocuteurs refusent de se prêter au jeu (sexuel pour eux) de les considérer comme des femmes, et remarque que les autogynéphiles sont plus susceptibles de manifester des traits comportementaux liés au trouble de la personnalité narcissique. N’importe qui ayant eu affaire aux transactivistes comprendra instantanément ce qu’entend Lawrence par « rage narcissique ».]
J’ai interviewé Ray Blanchard par courriel et par Skype. Le texte a été légèrement modifié pour plus de clarté.
* * *
Louise Perry : Quelle a été la réaction à votre travail sur l’autogynéphilie, tant au sein de la communauté trans qu’à l’extérieur ?
Ray Blanchard : J’ai introduit le mot et le concept d’autogynéphilie — la tendance de certains hommes à être sexuellement excités par la pensée ou l’image d’eux-mêmes en tant que femmes — en 1989 comme une extension du concept de fétichisme de travestissement. Dans le diagnostic DSM, le fétichisme de travestissement était défini — en psychiatrie à cette époque — par des pulsions et des fantasmes sexuels impliquant le travestissement chez les hommes hétérosexuels.
J’ai publié mes premiers écrits sur l’autogynéphilie dans des revues spécialisées à très faible tirage. Je les destinais à un petit lectorat de cliniciens spécialisés dans l’évaluation et la prise en charge des patients dysphoriques (gender-dysphoric). Cependant, ces travaux ont attiré l’attention de deux personnes qui ont décidé de les promouvoir plus largement, la première le fit en ligne (Anne A. Lawrence) [lui-même autogynéphile et s’efforçant d’adopter le rôle social assigné aux femmes dans notre culture] et la seconde dans un livre (J. Michael Bailey). Ces efforts, en particulier le livre, ont provoqué la fureur de trois hommes transidentifiés influents[1] — dont deux universitaires de haut rang — qui ont tenté de faire renvoyer Bailey de son poste d’enseignant à l’université Northwestern pour avoir écrit ce livre [des années plus tard, une campagne de cyberharcèlement a été organisée par des transactivistes via Facebook, allant jusqu’à impliquer des menaces et des scénarios pédophiles incluant ses jeunes enfants]. Cette campagne a été documentée en détail par Alice D. Dreger, historienne de la médecine. Paradoxalement, les efforts des transactivistes, à l’époque et aujourd’hui, pour supprimer toute mention de l’autogynéphilie des discussions publiques ont eu pour effet de sensibiliser davantage le public à ce phénomène. Je pense que le comportement autodestructeur des transactivistes a persisté parce que l’idée de l’autogynéphilie vise droit dans le mille. Si l’idée n’avait eu aucun écho chez eux, ils l’auraient tout simplement ignorée, et l’idée de l’autogynéphilie ne serait qu’une des nombreuses hypothèses oubliées comme cause du trouble de l’identité de genre.
Par la suite, d’autres événements étranges et inattendus (pour moi) se sont abattus sur ma notion d’autogynéphilie. Les transactivistes modernes se sont réapproprié le transsexualisme/transgenrisme comme un problème politique et non plus un problème clinique. Le déni catégorique de l’existence de l’autogynéphilie est devenu l’un des canons du transactivisme moderne, le transactivisme est devenu une sous-division des mouvements pour la justice sociale, et les mouvements pour la justice sociale sont devenus les principaux combattants [SJW pour « social justice warriors »] de cette guerre culturelle omniprésente.
[Il ne s’agit pas tant d’une guerre culturelle de conservateurs de droite contre progressistes de gauche que de la guerre que différents groupes patriarcaux mènent pour garder le contrôle sur le corps des femmes et leurs capacités reproductives et sexuelles (ayant depuis plusieurs millénaires séparés les deux), et dans laquelle les progressistes défendent les stéréotypes conservateurs les plus misogynes et les plus sexistes sous couvert d’identité de genre. Le résultat est la destruction des droits des femmes au travers du remplacement, dans la loi, de la réalité du sexe par la fiction de l’identité de genre, et ainsi l’immobilisation de leur mouvement de libération. La réification dans la loi de notions imaginaires pensées dans la tête des hommes est au fondement des institutions patriarcales/viriarcales.]
En conséquence, la plupart des transactivistes — et, par solidarité, leurs « alliés » — nient l’existence de l’autogynéphilie. [Ils nient aujourd’hui l’existence du sexe.] La plupart des psychologues, sociologues et professeurs de sciences humaines étant des « alliés », le sujet de l’autogynéphilie est mis à l’écart ou ignoré dans les cours sur la sexualité humaine et dans les études de genre, et ce pour une génération entière. L’autre camp de la guerre culturelle (quel que soit le nom qu’on veuille lui donner) est prêt à reconnaître l’existence de l’autogynéphilie, mais il a tendance à l’utiliser comme une insulte à jeter au visage des hommes transidentifiés (male-to-female trans, MTF) qui l’offensent. Ce n’était évidemment pas mon intention lorsque j’ai inventé ce terme il y a 30 ans.
[Blanchard est un homme. Il se soucie bien peu des conséquences que cette idéologie et cette paraphilie ont sur les femmes et leurs droits. Il parle ici d’hommes conservateurs, tels Matt Walsh et Ben Shapiro de la chaîne Daly Wire, d’hommes qui adhèrent aux valeurs de la masculinité viriarcale et pour lesquels les hommes « féminins » sont une aberration.]
À l’heure actuelle, de nombreux MTF (hommes qui se disent femmes) hétérosexuels — qui, selon leur point de vue, sont des « femmes trans lesbiennes » — passent leur temps à surveiller les forums en ligne à la recherche de toute mention d’autogynéphilie. Si un nouveau venu écrit qu’il pense que l’autogynéphilie décrit sa propre expérience, ils lui feront rapidement savoir que c’est un crime de pensée (wrongthink) et que l’autogynéphilie n’existe pas. Il est donc difficile de se faire une idée du nombre d’autogynéphiles dysphoriques (gender dysphorics) qui pensent secrètement que l’autogynéphilie correspond à leur propre expérience, car le fait de l’affirmer en ligne suscite le mépris et d’autres réactions négatives.
[Il existe des chaînes YouTube d’hommes autogynéphiles qui parlent ouvertement de leur condition, dont un qui s’identifie en tant que « trans » et un détransitionniste :
https://www.youtube.com/watch?v=hG9jBXGPnxE
https://www.youtube.com/watch?v=LnesyY9dHD0
https://www.youtube.com/watch?v=7sJJd3QJy48]
La prévalence de l’autogynéphilie a‑t-elle augmenté au cours des dernières décennies, ou les autogynéphiles sont-ils simplement plus susceptibles de faire une transition qu’auparavant ?
Je doute fort que la prévalence de l’autogynéphilie per se, ou la prévalence de la dysphorie de genre autogynéphile ait augmenté. Je pense que ce qui a changé, c’est la proportion de trans autogynéphiles qui ont fait leur « coming out » auprès de leur famille, de leurs amis et de leur employeur, et non pas le nombre total de trans autogynéphiles. Il y a quarante ans, la décision d’un autogynéphile d’endosser le rôle féminin avait souvent des conséquences négatives dans la sphère personnelle et professionnelle. [Bien évidemment, le soin aux parents âgés et aux enfants, effectué à 75% par des femmes dans le monde, ainsi que le travail domestique non rémunéré, effectué à 90% par des femmes, ainsi que les différences de revenus, etc., ne font pas partie du rôle qu’ils souhaitent endosser.] Aujourd’hui, une telle décision a autant de chances d’être louée pour sa « bravoure » que d’être critiquée pour son égoïsme et son irresponsabilité.
Le changement, en ce qui concerne les conséquences du coming out sur les individus trans androphiles, a été beaucoup moins important. Ils ont tendance à avoir des manières ostensiblement « féminines » (ou efféminées), même lorsqu’ils essaient d’être « virils », ce qui était aussi vrai il y a 40 ans que maintenant. Les individus trans androphiles avaient moins de statut social à perdre en changeant de sexe à l’époque, et c’est également encore vrai aujourd’hui.
[On parle ici d’hommes qui ne se conforment pas à la masculinité viriarcale, qu’ils le veuillent ou non, et qui sont rejetés par les autres hommes afin de conserver la masculinité viriarcale intacte. S’ils acceptaient ces hommes parmi eux, alors, le sens de leur existence s’en trouverait menacé, étant donné que les hommes viriarcaux de notre culture ou d’autres cultures traditionnelles se définissent uniquement en relation à la féminité, leur antipode inférieur et méprisé. C’est pourquoi les cultures aux normes sociosexuelles rigides créent généralement une troisième classe sociosexuelle pour y rejeter ces hommes. Quid des femmes « lesbiennes » ou « non féminines » ? Elles ne menacent en rien la masculinité, elles sont ignorées ou « corrigées » (par le viol). Les troisièmes classes sociosexuelles (ou « troisième genre ») servent à rassembler les hommes non conformes aux valeurs de la masculinité viriarcale en marge de la société, et à les laisser vivre en leur accordant des fonctions spirituelles et/ou religieuses spéciales.]
En 1987, lorsque j’étudiais les ratios d’hommes autogynéphiles et d’hommes androphiles dysphoriques [parmi les « trans »], les cas d’autogynéphilie étaient déjà majoritaires, approchant les 60 %. Cette proportion avait atteint 75 % en 2010, et elle pourrait être encore plus élevée aujourd’hui. [Les hommes qu’il appelle « androphiles » sont des hommes homosexuels au comportement et/ou à l’apparence jugée « non virile »]
Il n’existe pas à ma connaissance de preuve de l’existence de populations significatives de trans autogynéphiles MTF [hommes qui se disent femmes] dans les pays non occidentaux. Cela ne signifie pas que ces individus n’existent pas. Cela pourrait simplement signifier que, pour les hommes non homosexuels, le coût social du coming out en tant que trans y est beaucoup plus élevé dans les cultures non occidentales.
Recommanderiez-vous une transition médicale comme moyen de traiter la dysphorie de genre chez les patients atteints d’autogynéphilie ?
Cela dépend de l’intensité de l’autogynéphilie et, peut-être plus important encore, de la gravité de la dysphorie de genre qui en découle. Dans le cas d’une dysphorie de genre légère ou intermittente, des conseils ou une thérapie cognitivo-comportementale devraient suffire à aider le patient à surmonter les « poussées » de dysphorie. Il s’agit d’un choix logique de traitement si le patient veut préserver un mariage ou une carrière importante qui en pâtirait s’il se mettait à endosser un rôle [sociosexuel] féminin.
[Et par endosser un rôle féminin, encore une fois, il faut entendre « performer » des stéréotypes sexistes : mettre des talons, porter une robe et/ou des sous-vêtements sexys, se maquiller, sourire niaisement, etc., mais pas se mettre à faire le ménage sérieusement, quand bien même ils peuvent être excités à l’idée d’agiter un plumeau.]
Dans le cas d’une dysphorie de genre grave et soutenue, le traitement hormonal et la chirurgie de réassignation sexuelle peuvent constituer la meilleure chance pour le patient d’avoir une certaine tranquillité d’esprit et une meilleure qualité de vie. À mon avis, les cliniciens responsables devraient exiger que les patients vivent pendant une période significative « dans le rôle de l’autre sexe » avant de les autoriser à subir une intervention chirurgicale. Un an serait le strict minimum, mais je pense que deux ans sont préférables.
Je ne crois pas que l’autogynéphilie en elle-même — ou toute autre paraphilie ou orientation sexuelle — puisse être supprimée par un traitement. À mon avis, on peut apprendre aux gens à se retenir de laisser libre cours à leurs désirs — lorsque ce qu’ils désirent est dangereux pour eux-mêmes ou pour les autres [Blanchard s’est également intéressé aux pédophiles et aux travaux de James Cantor, qu’il connaît] — mais on ne peut pas leur apprendre à ne pas désirer ce qu’ils désirent. [La pédophilie, l’autogynéphilie, l’apotemnophilie et toutes les perversions sexuelles seraient des conditions qui ne se « soignent » pas, mais qui se gèrent seulement. En tout cas dans le contexte de la civilisation industrielle.]
Que répondez-vous à l’affirmation selon laquelle l’autogynéphilie est également fréquente chez les femmes ?
Je ne crois pas que l’autogynéphilie se produise chez les femmes (natal females). La seule « preuve » de son existence est une mauvaise étude qui a posé des questions biaisées à un petit nombre de femmes non représentatives. Cette étude, réalisée par Charles Moser, M.D., a été immédiatement acclamé par les membres de la communauté trans parce qu’elle affirmait ce que beaucoup de trans MTF [hommes qui se disent femmes] voulaient désespérément croire : que leurs expériences personnelles de l’autogynéphilie ne contredisent pas leur conviction selon laquelle ils sont psychologiquement identiques aux femmes biologiques, étant donné que les femmes biologiques font aussi l’expérience de l’autogynéphilie.
L’étude de Moser a été critiquée pour des raisons méthodologiques par un autre médecin, Anne A. Lawrence, M.D. Lawrence, qui a écrit la monographie la plus complète sur l’autogynéphilie : Men Trapped in Men’s Bodies (« Des hommes coincés dans des corps d’hommes »), et est lui-même un transsexuel autogynéphile postopératoire [un homme autogynéphile transsexuel, un homme qui a été opéré et qui vit en tant que stéréotype social de femme et qui est autogynéphile]. [Il] soutient que les éléments du questionnaire que Moser a utilisé pour mesurer l’autogynéphilie chez les femmes (29 employées d’hôpitaux) ne permettent pas d’évaluer correctement l’élément essentiel de l’autogynéphilie — l’excitation sexuelle à la simple pensée d’être une femme — parce qu’ils ne mettent tout simplement pas l’accent sur cet aspect.
Mes propres arguments contre l’affirmation selon laquelle l’autogynéphilie serait fréquente chez les femmes (natal females) étaient d’ordre plus général et ne visaient pas l’étude de Moser. J’ai écrit, par exemple, que l’idée selon laquelle les femmes (natal females) peuvent être érotiquement excitées par — et parfois même se masturbent sur — la pensée ou l’image d’elles-mêmes en tant que femmes peut sembler crédible si l’on considère uniquement les fantasmes conventionnels des femmes qui s’imaginent belles et séduisantes dans l’acte d’attirer un homme (ou une femme) beau et désirable. [N’est-ce pas le principe d’un fantasme ou d’une fantaisie sexuelle ?] Cela semble beaucoup moins crédible si l’on prend en considération les diverses autres façons dont certains hommes autogynéphiles se représentent en tant que femmes dans leurs fantasmes masturbatoires.
Parmi les exemples que j’ai recueillis, citons : les fantasmes sexuels de menstruation et les rituels masturbatoires qui simulent les menstruations [😨] ; se donner un lavement anal, tout en imaginant que l’anus est un vagin et que le lavement est une douche vaginale [et être en érection à cette idée 😨] ; aider la femme de ménage à nettoyer la maison [et être en érection à cette idée 😨] ; s’asseoir dans une classe de filles à l’école [et être en érection à cette idée 😨] ; tricoter en compagnie d’autres femmes [et être en érection à cette idée 😨] ; et monter sur un vélo de fille [et être en érection à cette idée 😨]. Ces exemples montrent que les fantasmes sexuels autogynéphiles ont un caractère fétichiste qui les rend qualitativement différents de toute idéation superficiellement similaire chez les femmes.
Il y a aussi le phénomène révélateur des autogynéphiles qui sont involontairement excités par des idées de travestissement ou de changement de sexe, et qui se plaignent de difficultés à revêtir des vêtements féminins sans avoir une érection ou une éjaculation. Il est probable que peu de femmes rapportent des difficultés à se vêtir sans que cela ne leur déclenche une lubrification vaginale ou un orgasme.
Pensez-vous qu’il arrive que des femmes (natal females) fassent l’expérience d’autoandrophilie (excitation sexuelle à la pensée ou à l’image de soi en tant qu’homme) ?
Les mentions cliniques de femmes hétérosexuelles présentant de « forts traits masculins » qui disent avoir l’impression d’être des hommes homosexuels et qui se sentent fortement attirées par des hommes efféminés remontent à plus de 100 ans. Je ne pense pas qu’il s’agisse de l’équivalent féminin des autogynéphiles, et pour souligner ce point, j’ai commencé à les appeler des autohomoérotiques (autohomoerotics). Certaines de ces personnes développent une dysphorie de genre cliniquement significative, et il est bien documenté qu’au moins quelques autohomoérotiques ont subi une réassignation sexuelle chirurgicale et ont été satisfaites de leur décision.
[L’auto-andro-hubris, terme que nous employons pour décrire le fait que certaines femmes ne peuvent s’aimer (amour-propre) et se respecter qu’en tant qu’homme, existe en revanche chez les femmes qui veulent transitionner. L’auto-andro-hubris est le pendant de l’auto-misogynie qu’elles éprouvent vis-à-vis de leurs corps sexués et d’elles-mêmes, induite par la culture misogyne dans laquelle elle vivent, mais n’est pas le fait d’une excitation sexuelle à l’idée d’être un homme. Au contraire, ces femmes se projettent dans des relations sexuelles avec des hommes, leur sexualité n’est pas paraphile, ni homosexuelle, mais tournée vers le sexe opposé.]
Jusqu’à une époque récente, les transsexuelles autohomoérotiques FTM [femmes transidentifiées en hommes] étaient assez rares. Les différences entre l’autogynéphilie chez l’homme et l’autohomoérotisme chez la femme peuvent sembler subtiles. Les dysphoriques de genre autogynéphiles (hommes) sont attirés par l’idée d’avoir un corps de femme ; les dysphoriques de genre autohomoérotiques (femmes) sont attirés par l’idée de participer à des relations sexuelles homosexuelles masculines. Pour les autogynéphiles, devenir une femme lesbienne est un objectif secondaire — la conséquence logique d’être attiré par les femmes et de vouloir devenir une femme. Pour les autohomoérotiques, devenir un homme gay semble être l’objectif principal ou très proche de celui-ci.
Il existe également des différences frappantes dans l’histoire développementale de cette condition. De nombreux trans autogynéphiles font le récit d’une période de leur vie, généralement pendant la puberté, où ils ont enfilé des sous-vêtements féminins (souvent « empruntés » à leur mère ou à leur sœur) et se sont masturbés jusqu’à l’orgasme. En revanche, l’histoire des femmes autohomoérotiques ne comprend pas de masturbation jusqu’à l’orgasme dans des sous-vêtements masculins.
[Ni de masturbation dans des vêtements typiquement masculins tout court. Cela n’a rien à voir, car il ne s’agit pas d’une paraphilie mais d’une sexualité de déplacement. Les jeunes filles, qui sont constamment exposées à l’hypersexualisation du corps des femmes dans notre culture (et à une interdiction de faire quoi que ce soit aux époques antérieures, leur statut étant celui d’êtres humains mineurs privés de droits) développent une relation compliquée à leur propre corps lors de la puberté, tout en valorisant les hommes. Les représentations pornographiques mainstream se concentrent sur l’avilissement du corps des femmes, soumises à des violences, des humiliations et tout un tas de brutalisations ignobles pour la satisfaction sexuelle d’hommes malades du porno. Une partie des jeunes filles vont développer leur imagination érotique en dehors de ces représentations en regardant/lisant des animes/manga/fictions fantaisistes mettant en scène ce qu’elles s’imaginent être des hommes gays, une niche marketing rapidement venue captiver ce public orphelin d’adolescentes et de jeunes femmes à prendre pour modèles. Imaginer qu’elles sont des hommes leur permet de contourner le formatage pornographique omniprésent du corps féminin avili. Mais ce n’est pas le fait de s’imaginer « en homme » qui éveille leur érotisme, c’est le fait de s’imaginer relationner sexuellement avec des hommes — sans l’aspect avilissement/brutalisation associé à leur corps féminin. Certaines peuvent évidemment reproduire des scénarios par excitation traumatique (passifs de violences sexuelles, enfants incestées, sexuellement exploitées…) dans le véhicule imaginaire du corps d’un homme, mais l’objet du fantasme ou du scénario sera toujours une relation à un autre homme. Références ? Tous les forums de rôle-play tenus par de jeunes femmes existants.]
Pourquoi les paraphilies touchent-elles essentiellement les hommes ?
Pour savoir pourquoi la plupart des paraphilies sont plus fréquentes chez les hommes que chez les femmes, il faudrait également connaître les causes de chaque type de paraphilie. Par exemple, nous comprenons pourquoi l’ostéoporose est plus fréquente chez les femmes âgées que chez les hommes âgés parce que nous savons que l’ostéoporose est liée à de faibles niveaux d’hormones.
Je pense que nous sommes très loin de connaissances comparables sur les causes des paraphilies. Pour mettre cette ignorance en perspective, considérons la recherche sur l’orientation sexuelle. L’homosexualité n’est pas une paraphilie, mais elle sert de point de comparaison utile. L’homosexualité a fait l’objet de beaucoup plus de recherches en laboratoire que n’importe quelle paraphilie, et pourtant nous ne savons toujours que peu de choses sur les facteurs qui influencent l’orientation sexuelle.
Pensez-vous qu’il soit possible de discuter de l’autogynéphilie sans déclencher de polémique ?
Je sais qu’il est possible de discuter de l’autogynéphilie de manière franche et dépassionnée, voire avec compassion, car j’en ai été témoin sur mon fil Twitter. [SIC]
À quelques reprises, des autogynéphiles (anonymes) ont publié des fils de discussion synthétiques et bien organisés expliquant ce qu’ils ressentent lorsqu’ils pensent ou se représentent en tant que femmes, comment ces sentiments sexuels sont liés à leur aversion émergente pour leur corps masculin et à leur désir de posséder un corps féminin, ainsi que les effets délétères de l’autogynéphilie et de la dysphorie de genre sur leurs relations personnelles, leur humeur générale et leur vie quotidienne. Ces fils de discussion ont toujours incité quelques autres adeptes à poster des messages de félicitations pour leur honnêteté et leur courage, ainsi que des déclarations de sympathie. Personne n’a jamais dit : « Maintenant que je comprends mieux ce que tu es, tu me dégoûtes encore plus » — alors même que sur Twitter, les gens sont en général très loin de manifester de la retenue et encore moins de la bienveillance.
En attendant, je ne sais pas si une telle discussion a déjà existé, ou si elle ne sera jamais possible dans des espaces de discussion plus généraux. Ce n’est en tout cas pas possible pour le moment à cause de la politisation de la notion d’autogynéphilie.
Traduction : Audrey A.
Annexe : les nouvelles générations trans et la classification de Blanchard
La classification de Blanchard établit une distinction entre deux archétypes clairement séparés. En forçant le trait, il y aurait la catégorie des « gentils » homosexuels efféminés qu’il appelle les trans « androphiles », et la catégorie des hommes hétérosexuels « pervers » autogynéphiles. Au passage, on rappellera que le terme « paraphilie » a été introduit par des sexologues au cours du 20ème siècle comme un euphémisme pour désigner ce qui était autrefois qualifié de « perversion sexuelle ». Il s’agissait de déstigmatiser les pédophiles et divers fétichistes en tous genres de manière à ne pas les dissuader d’être pris en charge et d’oser demander de l’aide au lieu de commettre des actes de délinquance ou de criminalité (dans le cas des pédocriminels) sexuelle, voire de normaliser certaines pratiques (Cf. le livre de Lars Ullerstam, publié en anglais en 1966 et intitulé Les Minorités érotiques : une charte des droits sexuels). On rappellera aussi que l’homosexualité n’est pas une paraphilie, mais simplement une orientation sexuelle.
Toutefois, on remarque que des hommes androphiles manifestent certains traits associés à l’autogynéphilie, tels que des troubles de la personnalité narcissique. Certains d’entre eux sont de virulents transactivistes, comme India Willoughby ou Dylan Mulvaney. Cependant, l’excitation de ces hommes ne réside probablement pas tant dans le fait de s’imaginer être des femmes que dans le fait de s’imaginer être des femmes en train d’avoir des relations sexuelles avec des hommes. Que l’homophobie intériorisée puissent jouer une part importante dans leur transidentité ne fait aucun doute : nombreux sont les transactivistes androphiles à exprimer des propos homophobes horrifiants tels que « les homosexuels sont des lâches qui n’osent pas devenir des femmes » ou « les homosexuels sont des femmes ratées ». Ce type de discours est exprimé par des hommes transidentifiés androphiles, et mis en lumière, par exemple, sur le compte @TransHomophobes sur Twitter.
Le principal aspect de l’autogynéphilie est l’excitation sexuelle que ressentent les hommes à l’idée d’être des femmes, et peut donc se produire par le simple fait d’enfiler un vêtement associé à la féminité.
En outre, la typologie de Blanchard peut être considérée comme un continuum (contrairement au sexe !) allant de l’autogynéphilie pure et dure jusqu’au travestissement des hommes androphiles homosexuels pour lesquels imaginer qu’ils sont des femmes est l’expédient psychique qui leur permet de survivre en société viriarcales. Entre ces deux extrémités, tout un spectre de comportements, y compris des hommes autogynéphiles bisexuels, dont la bisexualité est indépendante de l’autogynéphilie, et d’autres chez lesquels la bisexualité est une « pseudo-bisexualité » telle que définie par Blanchard, causée par l’autogynéphilie : en effet l’homme autogynéphile fera feu de tout bois, c’est-à-dire que quiconque valide son fétiche en le considérant comme une femme participe à son excitation sexuelle et constitue donc pour lui un partenaire contribuant à son plaisir sexuel.
Une nouvelle culture de revendication de l’autogynéphilie
Les réseaux sociaux nous offrent de nombreux exemples d’hommes autogynéphiles au fétichisme de travestissement flagrant, souvent d’âge moyen ou même assez vieux, et bien souvent très repoussants. Des groupes de discussion sur Reddit, Facebook, Instagram et des comptes Twitter sont consacrés à l’exhibitionnisme autogynéphiles de ces hommes — créés et tenus par eux-mêmes pour leurs semblables. Toutefois, bien qu’ils constituent le gros des bataillons par leur exhibitionnisme sans retenue, les plus jeunes générations ont développé une culture qui leur est propre.
Aujourd’hui, les jeunes hommes transidentifiés ont développé une culture qui mêle homosexualité et autogynéphilie de manière inextricable. On le remarquait déjà chez les xénials et les millénials (générations X et Y). Voir par exemple le cas d’Ashton Challenor. Le phénomène des transmaxxers illustre cette culture du côté de jeunes hommes en rupture avec la société, qui sont, à la base, des hétérosexuels en grande difficulté affective et qui se qualifiaient eux-mêmes d’incels. Ces deux sous-cultures sont rejointes et grossies par les rangs d’hommes malheureux et isolés, mais ces cas de figure sont loin d’être les plus représentatifs.
Nombre de jeunes hommes transidentifiés parviennent à s’épanouir et à vivre facilement leurs fétiches depuis que les droits sexo-spécifiques des femmes et des filles ont été abrogés par les diverses législations trans. Prenons l’exemple de l’affaire William « Lia » Thomas, le tricheur de l’Université de « Penis-sylvanie » admis dans la catégorie femme en compétition de natation, et qui a pulvérisé tous les records des catégories de natation féminines. En dépit du scandale, du mépris des droits des femmes à une compétition équitable, des expositions indécentes de son pénis attaché à sa grosse carrure d’homme dans les vestiaires des filles et des protestations des athlètes féminines, l’U‑peen a persisté et signé en accordant à Thomas le titre universitaire de « femme de l’année ».
C’est tout ce que nous connaissions jusqu’ici au sujet de Thomas. Mais qui est-il dans sa vie privée et ses loisirs ? N’est-il qu’un imposteur d’un bout à l’autre de son histoire ou est-ce plus compliqué que cela ? Malheureusement, il s’avère que Thomas n’a pas feint sa transidentité pour accéder aux compétitions des femmes. Thomas est un « trans autogynéphile » revendiqué.
Son entourage social est constitué de jeunes hommes dans sa situation, tous revendiquant fièrement leur fétichisme de travestissement et leurs fétichisme anatomique, selon la typologie de Baileys que nous présentons plus bas. Thomas et ses partenaires expriment publiquement leur autogynéphilie par de nombreux partages de publications et de contenus ouvertement « autogynéphiles », loin de la honte et de l’exclusion que rencontrait cette notion il y a encore quelques années. Le « petit ami » principal de Thomas s’identifie lui-même comme autogynéphile.
Ses profils sur les réseaux sociaux montrent un jeune homme pris dans une culture d’hypersexualisation avec d’autres jeunes hommes transidentifiés revendiquant leur autogynéphilie, et qui se fréquentent les uns les autres dans le cadre de relations sexuelles et romantiques de groupes : sont-ils tous homosexuels ? Leur autogynéphilie est-elle ce qui va les pousser dans des relations homosexuelles ? Ou est-ce leur homosexualité qui prime et qui a déterminé leur autogynéphilie ? Il est difficile de l’établir sans en discuter avec eux individuellement. Ces jeunes hommes se distinguent eux-mêmes des trans qu’ils appellent « HSTS », soit homosexuels transsexuels, les « homosexuels androphiles » de la typologie classique. Ray Blanchard gagnerait à s’entretenir avec ces jeunes générations qui revendiquent leur paraphilie autogynéphile.
Liathimas est le compte privé de William « Lia « Thomas, il est suivi par le compte de l’équipe de natation de l’université de Pensylvanie et n’a donc rien d’une « vie secrète ». C’est au grand jour que Thomas vit son autogynéphilie.
Quelques publications likées par « liathimas » ou publiées par ses proches :
Nous vous invitons à aller voir par vous-même l’ensemble du fil Twitter. Sur une des photos, le petit ami de Thomas pose fièrement avec des testicules dans un bocal, après se les être fait enlever chirurgicalement.
Le petit ami de Thomas apparaît ainsi comme un autogynéphile anatomique, étant allé jusqu’à l’opération pour satisfaire son fétichisme sexuel. Michel Bailey, le psychologue qui a été horriblement harcelé à la sortie de son livre The Man Who Would Be Queen (« L’homme qui voulait être reine »), a théorisé les 4 types d’autogynéphilie : physiologique, comportementale, anatomique et travestie :
Le but n’est pas ici de présenter ces jeunes hommes comme des malades mentaux ou des obsédés sexuels, bien qu’ils soient possiblement l’un et l’autre, mais de faire prendre conscience au public que c’est pour le fétichisme sexuel et les paraphilies de ces hommes que les droits des femmes et des filles sont détruits. Que William Thomas soit un autogynéphile et vive pleinement sa paraphilie aux côtés de ses semblables n’est pas le problème. Le problème, c’est que le transactivisme a réussi à convaincre la société que ces hommes étaient « nés dans le mauvais corps », qu’ils sont des femmes et qu’ils souffrent horriblement de dysphorie de genre, alors qu’il n’en est rien. Et, avant tout, le problème, c’est que les militants trans ont réussi à modifier les lois pour qu’elles leur permettent de réaliser leurs fantasmes.
L’autogynéphilie peut causer une dysphorie parce qu’elle est liée à l’obsession sexuelle de ces hommes. Qu’ils reçoivent tous les soins les plus appropriés, de la psychothérapie à la chirurgie si telle est la meilleure solution pour améliorer leur qualité de vie (mais que cela se fasse aux frais de la société devrait a minima être débattu), soit. Mais ces hommes ne sont pas des femmes. Il est temps que la société réalise que ces hommes n’ont pas à partager les vestiaires et les prisons des femmes, qu’il est intolérable qu’ils brisent les carrières universitaires de femmes, qu’ils prennent les places de femmes dans des compétitions sportives, des listes politiques, des bourses universitaires.
Ces hommes sont des hommes dans des corps d’hommes avec une sexualité paraphilique appelée « autogynéphilie ».
Audrey A.
- Lynn Conway (informaticien de renommée mondiale à l’université du Michigan), Andrea James (défenseur des trans-consommateurs à Hollywood et consultante en entreprise sur les questions trans) et Deirdre McCloskey (professeur émérite d’économie, d’histoire, d’anglais et de communication à l’université de l’Illinois à Chicago). ↑
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