Lettres de la Libération de la Terre Mère (depuis le sud de la Colombie)

Lettres de la Libération de la Terre Mère (depuis le sud de la Colombie)

Note du tra­duc­teur : « La liber­té vient avec la terre[1] ». Tel est le constat du peuple indi­gène « Nasa » qui vit au nord du dépar­te­ment du Cau­ca, situé au sud-est de ce qu’on appelle la Colom­bie, et qui se bat pour son droit à une exis­tence non civi­li­sée et non capi­ta­liste. Les mots « terre » et « liber­té » ont tra­ver­sé et conti­nuent de tra­ver­ser diverses luttes à tra­vers le monde : de la Rus­sie du XIXe siècle à la Colom­bie d’aujourd’hui, en pas­sant par l’Espagne et le Mexique du début du siècle der­nier (pour n’évoquer que quelques exemples). Ils ont en com­mun la recon­nais­sance de l’importance de la terre pour la liber­té, et vice-ver­sa : l’autonomie maté­rielle et poli­tique, comme nous le rap­pelle Auré­lien Ber­lan dans son livre Terre et liber­té, paru en 2021.

En Colom­bie, comme par­tout dans le monde, la moder­ni­té, le déve­lop­pe­ment, la crois­sance, la mar­chan­dise, le tra­vail, l’argent, etc., sont des idéaux col­lec­tifs reven­di­qués par toutes les forces poli­tiques. Dans ce pays, on regrette que le capi­ta­lisme fonc­tionne moins bien que dans le Nord Glo­bal : à gauche, parce que les richesses ne sont pas bien répar­ties ; à droite, parce que la libre entre­prise ne dis­pose pas des condi­tions opti­males pour se déployer cor­rec­te­ment ; et les bras armés res­pec­tifs de ces idéaux poli­tiques nour­rissent la guerre : l’armée et la police aux ordres de l’État, les mafias et les groupes para­mi­li­taires et, enfin, les rési­dus des gué­rillas de gauche radi­cale qui s’entretuent et ravagent au pas­sage les vies des plus vul­né­rables, qui s’entassent dans les péri­phé­ries des villes et dans les cam­pagnes. Les Nasa libé­ra­teurs de la Terre Mère ne se contentent pas de dire qu’ils ne sou­haitent pas par­ti­ci­per au capi­ta­lisme : ils le confrontent direc­te­ment, armés de leurs machettes et de pierres face à la police anti-émeute, et de leurs graines pour assu­rer leur sub­sis­tance. Ils consi­dèrent que leur vie et celle de la terre en dépendent. Ils occupent les fermes (les fin­cas, comme on dit en espa­gnol) et refusent la pro­prié­té pri­vée des entre­prises et des par­ti­cu­liers, en dénon­çant la dépos­ses­sion de leurs ancêtres Nasa remon­tant aux débuts de la colo­ni­sa­tion. Ils trans­forment ain­si ces terres en lieux de vie pour eux et, en même temps, ils résistent à la des­truc­tion de la nature et de la terre par la mono­cul­ture indus­trielle de canne à sucre.

Cette année, pour la pre­mière fois, un can­di­dat de gauche a accé­dé aux manettes de l’État. Mal­gré les dis­cours huma­nistes et envi­ron­ne­men­ta­listes et les inten­tions d’amorcer la déses­ca­lade de la vio­lence en Colom­bie, l’État conti­nue d´être l’État. Petro, le nou­veau pré­sident, ses ministres et son armée de tech­no­crates de gauche, prônent le déve­lop­pe­ment du capi­ta­lisme[2], au motif qu’il serait urgent de sor­tir la Colom­bie du « féo­da­lisme ». La gauche défend un capi­ta­lisme réfor­mé et réfor­mable, non cor­rom­pu, qui déve­loppe les forces pro­duc­tives pour le bien du peuple et en tenant compte de la crise cli­ma­tique. Il est dif­fi­cile de savoir s’il s’agit de cynisme ou d’ignorance crasse de ce qu’implique le déve­lop­pe­ment et le capi­ta­lisme : on entend les consignes de « tran­si­tion éner­gé­tique », de « poten­tia­li­sa­tion du tou­risme », d’« indus­tria­li­sa­tion de l’agriculture » en vue de deve­nir une puis­sance en reven­di­quant à l’international la valeur mar­chande de tous les « pro­duits » de la nature (fer­ti­li­té des sols, eau potable à pro­fu­sion, « ser­vices éco­sys­té­miques », etc.).

Dans ce contexte, toutes les forces poli­tiques, média­tiques et éco­no­miques, crient au scan­dale et dénoncent une vio­lence injus­ti­fiable face aux indi­gènes et aux pay­sans qui occupent des terres des pro­prié­taires ter­riens et des entre­prises[3] : « cela n’est pas la façon de faire ! » disent-ils, « il faut que l’État pro­tège la pro­prié­té pri­vée ». Alors, l’État pro­met une réforme agraire pour ache­ter des terres et les redis­tri­buer. Mais les Nasa s’en fichent : ils occu­pe­ront leurs terres avec ou sans l’accord de l’État et des entre­prises. C’est une ques­tion de vie ou de mort, de terre et de liberté.

Les lettres ci-des­sous, tra­duites depuis l’espagnol[4], sont un appel des Nasa à l’union de tous les peuples à tra­vers le monde, pour lut­ter contre la des­truc­tion de la Terre Mère par la civi­li­sa­tion indus­trielle, pour la joie de la liber­té, pour l’autonomie et la terre.

Communiqué adressé aux peuples en lutte et à l’opinion publique nationale et internationale.

Face aux évé­ne­ments qui ont eu lieu dans le Nord du Cau­ca, dans le cadre de la lutte pour la terre, nous déclarons :

– Depuis 2005, nous avons repris la lutte directe pour la terre, depuis lors nous l’ap­pe­lons « libé­ra­tion de la Terre Mère », car nous voyons que la terre four­nit déjà ses der­niers efforts pour main­te­nir l’é­qui­libre qui per­met la vie telle que nous la connais­sons. Ce qui cause des dom­mages à la « Terre Mère » est le sys­tème capi­ta­liste, et c’est contre ce sys­tème que nous lut­tons. Les bles­sures ne pour­ront être gué­ries tant que le sys­tème capi­ta­liste et son fon­de­ment, le patriar­cat, exis­te­ront. Alors que d’autres peuples et pro­ces­sus mènent leurs luttes à leur manière, nous lut­tons contre le capi­ta­lisme et le patriar­cat en occu­pant les fin­cas de canne à sucre, en met­tant fin aux plan­ta­tions de canne à sucre, en semant nos ali­ments, en fai­sant pâtu­rer nos ani­maux, en vivant en com­mu­nau­té, en redon­nant son man­teau à Uma Kiwe[5]. Il s’agit d’une lutte qui implique d’affronter le patriar­cat et le capi­ta­lisme qui habitent à l’intérieur de cha­cun de nous.

– La lutte pour la libé­ra­tion de la « Terre Mère » est menée par nous et nos familles, venus de dif­fé­rents ter­ri­toires indi­gènes du nord du Cau­ca, et qui mar­chons main dans la main avec la plate-forme de lutte du CRIC[6]. C’est pour­quoi nous disons : nous sommes Cabil­do[7], nous sommes Cxhab Wala Kiwe[8], nous sommes CRIC.

– Au cours de cette lutte, et plus par­ti­cu­liè­re­ment lors des huit der­nières années, nous avons fait face à tous les dan­gers aux­quels est confron­tée un mou­ve­ment de lutte qui décide de s’op­po­ser au capi­tal. Nous les avons lis­tés dans « le dos­sier de l’axe du mal » : près de 400 ten­ta­tives d’ex­pul­sion, 12 cama­rades assassiné(e)s et plus de 600 blessé(e)s, des vols, des menaces, des dom­mages aux cultures maraî­chères. Tout cela a été per­pé­tré par l’É­tat colom­bien sur ordre de l’a­gro-indus­trie de la canne à sucre.

– Lors des expul­sions, dégâts et vols au cours des sept pre­mières années, l’a­gro-indus­trie de la canne à sucre a recou­ru à ses engins de chan­tier, aux agents de l’ES­MAD[9], à la police, à l’ar­mée et aux ouvriers agri­coles — cou­peurs de canne à sucre, issus des com­mu­nau­tés afro-colom­biennes. Nous avons tou­jours dit aux cou­peurs de canne : « vous êtes nos frères et sœurs, la lutte n’est pas contre vous, le patron vous paie un salaire de misère, rejoi­gnez notre lutte ». Cepen­dant, nous n’a­vons jamais trou­vé d’o­reilles récep­tives de la part des cou­peurs afro, et bien au contraire les expul­sions, les dom­mages et les vols n’ont fait qu’augmenter. Avant 2022, aucune « com­mu­nau­té afro » ne s’était mon­trée hos­tile vis-à-vis de notre pro­ces­sus[10].

– Le 7 mars 2020, les forces de l’ordre, au ser­vice de l’industrie de canne à sucre, ont lan­cé l’une de leurs nom­breuses ten­ta­tives d’ex­pul­sion de la fin­ca Jagüi­to. La com­mu­nau­té afro de cette zone s’est bat­tue à nos côtés, jetant ou empi­lant des pierres pour les lan­cer sur l’ES­MAD. Les com­mu­nau­tés afro consti­tuant « la base popu­laire », qui se trou­vaient autour des fin­cas, nous ont tou­jours dit que, pour elles, le moment n’é­tait pas encore venu de s’unir, mais qu’elles ne seraient jamais un obs­tacle à notre lutte. Qu’est-ce qui les pousse aujourd’­hui à nous jeter des pierres ou à nous tirer des­sus avec des armes à feu ? Qui se trouve der­rière en train d’empoisonner les com­mu­nau­tés afro ?

– Et main­te­nant, alors qu’un gou­ver­ne­ment alter­na­tif est arri­vé, et avec lui une vice-pré­si­dente issue du peuple afro du nord du Cau­ca, les pro­blèmes s’intensifient : le gou­ver­ne­ment lance des pour­par­lers régio­naux pour la paix ; l’a­gro-indus­trie de la canne à sucre répond par l’af­fir­ma­tive tout en ras­sem­blant des bandes armées pour les joindre aux ten­ta­tives d’ex­pul­sion. Depuis le matin du 7 août[11], l’ar­mée et la com­mu­nau­té civile afro-colom­bienne sont ren­trées et ont demeu­ré dans la fin­ca Chimán. À Guaya­bal, il y a des attaques per­ma­nentes menées par des ser­vices de sécu­ri­té pri­vée. La com­mu­nau­té qui se trouve dans la fin­ca San­ta Ele­na est constam­ment har­ce­lée par des civils armés, ayant déjà fait trois bles­sés. Dans le sec­teur d’El Batallón, l’a­gro-indus­trie recrute des per­sonnes armées pour agres­ser les forces de l’ordre, de sorte que lorsque la com­mu­nau­té libé­ra­trice se trouve dans la fin­ca voi­sine, elle se fait atta­quer en pré­ten­dant qu’il s’agit de la gué­rilla. À Alto El Palo, la com­mu­nau­té afro a blo­qué la route pour exi­ger le droit au tra­vail et le res­pect de leurs ter­ri­toires, tout comme sur la route Corin­to-Miran­da. Aupa­ra­vant, inci­tés par les agro-indus­triels de la canne à sucre, les cou­peurs de canne s’é­taient mobi­li­sés pour récla­mer le droit au tra­vail, un droit bafoué par les mêmes agro-indus­triels du sucre[12]. Incau­ca, Aso­caña et Pro­caña[13] conçoivent et mettent en œuvre la tem­pête par­faite, en impli­quant l’É­tat colom­bien et des groupes para­mi­li­taires. En paral­lèle, le gou­ver­ne­ment, au lieu de remettre en ques­tion les actions des entre­prises, leur donne l’a­van­tage d’installer des espaces de pour­par­lers, au sein des­quels ils arrivent comme des colombes de la paix. Nous pré­ci­sons que nous n’a­vons rien à voir avec l’ac­tion du 22 août, au cours de laquelle des voi­sins du sec­teur El Palo ont déci­dé de leur propre chef d’ex­pul­ser le blo­cus du site d’Alto El Palo. La confron­ta­tion n’est pas entre les com­mu­nau­tés, mais bien contre un grand enne­mi appe­lé capi­ta­lisme, repré­sen­té ici par l’a­gro-indus­trie de la canne à sucre.

– La guerre média­tique contre la libé­ra­tion s’in­ten­si­fie. Incau­ca, Aso­caña et Pro­caña créent des comptes Face­book et paient des com­mu­ni­ty mana­gers pour les ali­men­ter et har­ce­ler nos publi­ca­tions avec des com­men­taires racistes. La droite publie des articles dans les médias dans les­quels elle nous accuse d’être « pares­seux », « assis­tés », « enva­his­seurs » ; elle nous dit que nous mena­çons le pro­grès de la région et que nous met­tons en dan­ger 100 000 emplois don­nés par les entre­prises de canne à sucre de la région. Mais garde le silence devant la mise en fonc­tion­ne­ment de machines qui rem­placent une cen­taine de coupeurs/jour, devant le manque d’eau potable pour les habi­tants des com­munes du nord du Cau­ca, devant la pol­lu­tion de la rivière Palo, devant le fait qu’au milieu de tant de « déve­lop­pe­ment » les com­mu­nau­tés afro boivent des eaux pol­luées… Quels men­songes Aso­caña et Pro­caña amè­ne­ront-ils aux pour­par­lers régionaux ?

– Face à ces faits, les orga­ni­sa­tions de défense des droits de l’homme ne se pro­noncent pas : il y a des civils armés, c’est-à-dire des groupes para­mi­li­taires, aux côtés de l’ar­mée ; l’ar­mée uti­lise des civils afro pour entrer et res­ter dans les fin­cas en cours de libé­ra­tion ; les groupes para­mi­li­taires tirent sur les libé­ra­teurs, fai­sant des bles­sés. On assiste à la mise en place d’un pro­gramme de guerre contre la « libé­ra­tion de la Terre Mère », orga­ni­sé par l’a­gro-indus­trie de la canne à sucre. Et pour­tant, jus­qu’à pré­sent, les orga­ni­sa­tions de défense des droits de l’homme res­tent silen­cieuses. Est-ce à la « libé­ra­tion de la Terre Mère » de payer le prix fort de la « paix totale »[14] dans le nord du Cauca ?

– Désor­mais, l’É­tat qui nous a tou­jours per­sé­cu­tés nous convoque. Le grand chef nous dit de nous asseoir avec les indus­triels, de nour­rir le pro­jet de réforme agraire, d’être force de pro­po­si­tion pour le plan de déve­lop­pe­ment natio­nal ; ce ne sont pas des invi­ta­tions insi­gni­fiantes, nous y réflé­chis­sons. Après avoir été le pro­ces­sus le plus per­sé­cu­té en Colom­bie au cours des huit der­nières années, la « libé­ra­tion de la Terre Mère » fini­ra-t-elle dans le grand livre des lois natio­nales ? L’É­tat colom­bien, pren­dra-t-il notre dis­cours, nos man­dats, et dira-t-il qu’il nous a déjà recon­nus, comme l’ont déjà fait d’autres États-nations avec d’autres luttes ? Cela sera-t-il notre suc­cès ou notre échec ? Nous exa­mi­nons les pro­po­si­tions, car l’enjeu n’est pas des moindres.

– Nous sommes jus­te­ment en pro­ces­sus de consul­ta­tion interne pour dis­cu­ter de ces pro­po­si­tions. Pour ces consul­ta­tions, nous ne deman­dons pas de finan­ce­ment de l’É­tat, la vice-pré­si­dente peut donc être ras­su­rée. Cela pren­dra du temps, car la tem­po­ra­li­té des com­mu­nau­tés n’est pas celle de l’É­tat. Au niveau de ce der­nier, un groupe de pro­fes­sion­nels se réunit pour éla­bo­rer des plans sou­mis au dik­tat de leurs connais­sances ou pro­fes­sions et, en l’espace d’une semaine, ils dis­posent d’un plan for­mi­dable. Dans les com­mu­nau­tés chaque point de libé­ra­tion doit d’abord se réunir, puis l’ensemble des points se réunit, suite à quoi, chaque point doit à nou­veau se ras­sem­bler pour cla­ri­fier des détails, attendre de se réunir avec celui qui n’a pas pu se réunir cette fois-ci, consul­ter le vent et les nuages, et le chant des oiseaux. Nous pour­sui­vons ces consul­ta­tions. En atten­dant, nous exi­geons l’es­sen­tiel : qu’au­cune mesure ne soit avan­cée et qu’au­cune action qui impli­que­rait notre lutte ou les terres pour les­quelles nous nous bat­tons ne soit mise en œuvre.

– Depuis 2015, nous menons des dia­logues de paix avec les com­mu­nau­tés afro et pay­sannes voi­sines des fin­cas en voie de libé­ra­tion. Nous main­te­nons cette volon­té et cette action de dia­logue direct entre les com­mu­nau­tés. Il y a beau­coup de choses à dire, à cla­ri­fier, à excu­ser. Et il y a aus­si la néces­si­té de nous auto-appe­ler à lut­ter contre le capi­ta­lisme. En tant que « libé­ra­tion de la Terre Mère », notre com­bat est pour la vie de tous les peuples et de tous les êtres de la pla­nète, et ce mal­gré tous nos échecs et toutes nos dif­fi­cul­tés. Bien enten­du, nous nous bat­tons pour un mor­ceau de terre, mais nous nous bat­tons aus­si pour arrê­ter le dérè­gle­ment cli­ma­tique, afin qu’il y ait de la nour­ri­ture pour tous les êtres. Au cours de ces années, nous avons culti­vé des ali­ments, nous en avons ache­mi­né des tonnes dans les villes, nous avons fait des ren­contres avec d’autres mou­ve­ments qui affrontent le capi­ta­lisme, nous avons mené notre lutte alors même que toutes les forces de l’axe du mal nous atta­quaient et conti­nuent de le faire. Com­ment peut-on nous exi­ger plus de fruits que ceux que nous avons déjà récoltés ?

Pro­ces­sus de libé­ra­tion de la Terre Mère (Pro­ce­so de Libe­ra­ción de la Madre Tierra)
Peuple Nasa, nord du Cau­ca, Colombie
29 août 2022.

***

Main­te­nant que les 48 heures d’ultimatum se sont écou­lées, nous adres­sons cette lettre au monde entier pour lui faire part de notre lutte, du dan­ger qui nous guette et com­ment nous allons y faire face. Le grand chef nous fait savoir que nous sommes des enva­his­seurs et nous accorde 48 heures pour aban­don­ner notre lutte et la terre sur laquelle nous nous bat­tons. Et sinon, tout le poids de la loi de l’État colom­bien s’abattra sur nous.

Tout d’abord, nous vous par­le­rons de notre lutte. Le 2 sep­tembre, nous avons com­mé­mo­ré les 17 ans de la reprise de la lutte directe pour la terre, dont les racines remontent à 1538, lorsque notre peuple a déci­dé de décla­rer la guerre aux enva­his­seurs. Ces enva­his­seurs se sont empa­rés de notre terre et nous ont repous­sé vers les mon­tagnes ; ils ont fait de la dépos­ses­sion un mode de vie, le fon­de­ment de leur civi­li­sa­tion. Ils détiennent aujourd’hui les terres les plus fer­tiles et dis­posent de docu­ments prou­vant qu’ils en sont les pro­prié­taires. Ils consti­tuent un pou­voir orga­ni­sé qui tire les ficelles de la poli­tique, de l’économie, de la jus­tice et des médias colom­biens. Ce qui leur per­met de main­te­nir les docu­ments à jour et d’exploiter tou­jours plus la « Terre Mère », au point de lui arra­cher la peau, lui sucer le sang et de creu­ser dans ses entrailles. Et c’est cela qu’ils appellent « le pro­grès », « le développement ».

Pour nous, les familles du peuple Nasa du nord du Cau­ca, la terre est Uma Kiwe, notre mère. Tout est vivant en elle, elle est vie dans sa tota­li­té, tous les êtres sont nos frères et sœurs et tous les êtres avons la même valeur. L’envahisseur nous a endoctriné(e)s pour nous apprendre que nous, les humains, sommes en-dehors de notre Mère et supé­rieurs à elle. Mais, au fond de notre cœur Nasa Üus, nous savons que nous, les gens, sommes Uma Kiwe — tout comme le condor, le papillon, le maïs et la roche sont Uma Kiwe. L’envahisseur nous a endoctriné(e)s pour nous apprendre que le pára­mo[15] est une res­source qui pro­duit de l’argent ; qu’en cou­pant la forêt nous pour­rons faire croitre nos comptes en banque ; qu’en creu­sant et en suçant les entrailles d’Uma Kiwe avec d’énormes tuyaux, nous pour­rons avoir accès à une vie de bien-être. Ce sont les mots de l’envahisseur et il l’appelle : « l’objectif », « le pro­jet de vie ».

Les terres de la val­lée de la rivière Cau­ca, où nous vivons main­te­nant, là où nous menons notre com­bat, sont le foyer de cen­taines d’animaux, de plantes, de rochers, d’eaux, d’esprits ; en espa­gnol, cette forme de vie est appe­lée : forêt tro­pi­cale sèche. L’envahisseur a tout détruit. Ce foyer n’existe plus, il a défi­gu­ré le visage de la « Terre Mère ». Dans leur empres­se­ment à vou­loir impo­ser leur civi­li­sa­tion, ceux qui détiennent les docu­ments rela­tifs à ces terres ont semé de la canne à sucre dans toute la val­lée de la rivière Cau­ca : 400 000 hec­tares où la canne à sucre est culti­vée jusqu’au bord de la rivière. Dans d’autres régions de Colom­bie, les enva­his­seurs, ont dépla­cé les com­mu­nau­tés avec la guerre et ont plan­té des pal­miers à huile sur des mil­liers et des mil­liers d’hectares ; dans d’autres régions encore, ils ont dépla­cé des com­mu­nau­tés pour construire des bar­rages, ou pour extraire de l’or ou du pétrole.

Dans la région d’Antioquia, la rivière Cau­ca s’est rebel­lée et a endom­ma­gé les machines et les équi­pe­ments du bar­rage, la rivière a débor­dé, et les per­sonnes qui avaient déjà été dépla­cées par le pro­jet hydro­élec­trique, ont été obli­gées, une fois de plus, à être dépla­cées car — à nou­veau — leurs terres avaient été inon­dées. Nul n’est cou­pable pour ces évé­ne­ments. Cepen­dant, tout « le poids de la loi de l’État colom­bien » ne s’est pas abat­tu ni sur les enva­his­seurs de la rivière Cau­ca, ni sur ceux qui ont dépla­cé les com­mu­nau­tés et ni sur ceux qui ont per­pé­tré les mas­sacres afin d’imposer le déve­lop­pe­ment. Et ain­si, chaque recoin de ce pays qu’ils appellent Colom­bie — la démo­cra­tie la plus ancienne et la plus stable d’Amérique Latine — est fait de pièces décou­sues de pro­jets de déve­lop­pe­ment, ins­tal­lés là où la guerre a dépla­cé des com­mu­nau­tés entières, là où les bois, les pára­mos, les savanes, les mon­tagnes, les forêts et les plaines ont été — ou sont tou­jours — rava­gées pour que quelques per­sonnes puissent jouir des « délices » du développement.

Nous, familles indi­gènes du peuple Nasa, qui avan­çons au sein de la pla­te­forme de lutte du CRIC — notre orga­ni­sa­tion, ne croyons pas à ce déve­lop­pe­ment et ne croyons pas en cette civi­li­sa­tion qui impose la mort à tra­vers des lois et des actions légales pour obte­nir des pièces de mon­naie. On nous a endoctriné(e)s pour nous faire croire en leur civi­li­sa­tion et on nous a dit que nous, les humains, sommes supé­rieurs aux autres êtres, mais nous consta­tons que par­mi les humains il y a des niveaux : cer­tains sont supé­rieurs à d’autres. Ceux qui sont supé­rieurs prennent toutes les richesses tan­dis que nous, les infé­rieurs, sommes contraints de vivre accu­lés dans les recoins que le déve­lop­pe­ment nous laisse dis­po­nibles. Mais on nous dit que si nous fai­sons un effort ou si nous nous ven­dons (en tant que force de tra­vail), nous pour­rons alors pas­ser au niveau des supé­rieurs. Cette façon de vivre ne nous plaît pas, nous ne l’acceptons pas.

C’est pour­quoi, il y a 17 ans, le 2 sep­tembre 2005, nous sommes descendu(e)s des mon­tagnes pour mener une lutte que nous pour­sui­vons encore aujourd’hui et que nous appe­lons « libé­ra­tion de la Terre Mère ». Car nous disons que nous, les gens, ne serons pas libres tant qu’Uma Kiwe sera réduite en escla­vage. Nous disons aus­si que tous les ani­maux et les êtres qui confor­mons le vivant, serons des esclaves tant que nous ne ren­drons pas sa liber­té à notre mère. À cette époque-là, en sep­tembre 2005, nous avons fait une erreur tac­tique — comme l’a dit un libé­ra­teur, nous avons négo­cié un accord avec le gou­ver­ne­ment Uribe, une erreur qui nous a coû­té un retard de 9 ans. Mais ensuite, nous sommes revenu(e)s pour occu­per les fin­cas appar­te­nant à l’agrobusiness de la canne à sucre en décembre 2014. Ce qui signi­fie que nous sommes sur le point de fêter nos 8 ans, et au cours de ces 8 ans, la démo­cra­tie la plus ancienne et la plus stable d’Amérique Latine n’a pas réus­si à nous expul­ser des fin­cas, mal­gré plus de 400 ten­ta­tives. Et nous n’allons pas par­tir. Et nous avons tel­le­ment pro­gres­sé dans l’occupation de ces terres que nous comp­tons déjà 24 fin­cas en cours de libé­ra­tion, soit 8 000 hectares.

Lorsque nous ren­trons dans les fin­cas, nous fau­chons la canne à sucre, et à la place poussent les ali­ments que nous semons. La brous­saille pousse aus­si, car Uma Kiwe doit se repo­ser. Les poules, les canards, les vaches, les petits cochons gran­dissent à leur tour. Les ani­maux sau­vages reviennent… pro­gres­si­ve­ment nous res­ti­tuons la peau et le visage de la « Terre Mère ». C’est notre rêve, ou, si vous pré­fé­rez, notre « pro­jet de vie ». Et il y a encore un long che­min à par­cou­rir ; par­fois le dis­cours de l’envahisseur arrive et nous embrouille, mais en com­mu­nau­té nous par­lons et nous cla­ri­fions. D’autres fois les médias de l’agro-industrie ou du pou­voir colom­bien nous qua­li­fient de ter­ro­ristes, de fai­néants. Ils nous accusent de frei­ner le déve­lop­pe­ment, ils nous disent que nous sommes des « enva­his­seurs », comme le dit le gou­ver­ne­ment actuel de Gus­ta­vo Petro et de Fran­cia Már­quez. Ils mentent en pré­ten­dant que nous volons la terre de nos voi­sins des com­mu­nau­tés afro-des­cen­dantes qui vivent accu­lés sur les bords des champs de canne à sucre. Ce que nous pou­vons vous dire avec cer­ti­tude, c’est que les docu­ments de pro­prié­té des 24 fin­cas en voie de libé­ra­tion figurent soit au nom d’Incauca — qui est le plus grand pro­prié­taire, soit au nom d’autres ter­ra­te­nientes[16], ou bien il s’agit des terres louées par Incau­ca ou par d’autres Inge­nios[17] qui pro­duisent du sucre ou des agro-carburants.

L’appareil judi­ciaire de la démo­cra­tie colom­bienne dit lui aus­si que, parce que nous sommes des ter­ro­ristes, ils vont nous cap­tu­rer par le biais de bar­rages de police ou grâce à des man­dats d’arrêt, et nous mettre en pri­son. Et les para­mi­li­taires orga­ni­sés par l’agro-industrie de la canne à sucre disent que puisque l’État colom­bien ne par­vient pas à en finir avec nous, eux vont s’en char­ger. Et ils sont déjà venus dans les fin­cas en voie de libé­ra­tion pour nous tirer des­sus avec des armes de courte et longue por­tée, mais notre por­tée est plus longue encore parce que nous savons déjà com­ment ils sont orga­ni­sés et com­ment ils fonc­tionnent. Et cela fait 7 ans que les agro-indus­triels — Incau­ca, Aso­caña, Pro­caña — nous envoient des pro­po­si­tions de négo­cia­tion ou de par­te­na­riat, mais depuis 7 ans nous avons répon­du « NON », parce qu’une lutte ne se négo­cie pas ; « NON », car pour eux être par­te­naires signi­fie que nous, hommes et femmes, four­nis­sons la main‑d’œuvre la moins chère pos­sible et qu’ils four­nissent le capi­tal. Non mes­sieurs, nous ne sommes pas là pour chan­ger de patron, nous nous bat­tons pour qu’il n’y ait plus de patron.

Et main­te­nant qu’un nou­veau gou­ver­ne­ment et un nou­veau congrès viennent ren­for­cer la démo­cra­tie la plus ancienne et la plus stable d’Amérique Latine, le congrès nous dit que nous pou­vons envoyer des pro­po­si­tions pour le pro­jet de loi de réforme agraire « parce que la “libé­ra­tion de la Terre Mère” est une réforme agraire concrète » ; nous n’avons pas encore don­né de réponse, mais nous savons que réta­blir l’équilibre d’Uma Kiwe, notre Terre Mère, va beau­coup plus loin qu’une simple réforme agraire. Et la der­nière chose qui est arri­vée, c’est que le nou­veau gou­ver­ne­ment du pré­sident Petro et de la vice-pré­si­dente Fran­cia nous a dit que nous étions des « enva­his­seurs » et que nous avions 48 heures pour quit­ter ces terres où nous lut­tons, où nous semons, où nous fai­sons brou­ter nos ani­maux, où nous voyons la brous­saille repous­ser et les ani­maux sau­vages reve­nir. Bref, ils nous ont dit de quit­ter cette terre où nous vivons. Et c’est en ces termes que nous avons com­men­cé cette lettre.

Une fois les 48 heures écou­lées, soit le 2 sep­tembre, l’État a atta­qué avec l’armée et l’ESMAD. Il n’y a pas eu de demi-heure de dia­logue, comme le nou­veau gou­ver­ne­ment l’avait pro­mis ; les véhi­cules blin­dés sont arri­vés en tirant des gaz. Plus tard, l’armée a tiré ses armes de longue por­tée contre les com­mu­nau­tés qui libé­rent la Terre Mère, pas de dia­logue non plus. Il y a 17 ans, le 2 sep­tembre 2005, c’était Uribe qui avait don­né l’ordre à l’ESMAD et à l’armée de nous tirer des­sus avec leurs armes. Ce nou­veau gou­ver­ne­ment est de gauche, le gou­ver­ne­ment d’Uribe était de droite. Après huit heures de ten­ta­tives d’expulsion de l’une des fin­cas en cours de libé­ra­tion, l’ESMAD et l’armée de la plus ancienne démo­cra­tie… n’ont pas réus­si à nous expul­ser, nous sommes tou­jours là, et d’ici nous envoyons cette lettre au monde entier.

Nous, hommes et femmes, en tant que pro­ces­sus de libé­ra­tion de la Terre Mère du nord du Cau­ca, fai­sons savoir au grand chef que nous n’allons PAS déguer­pir, que nous res­te­rons ici sur ces terres parce qu’ici c’est chez nous, là où nous vivons et lut­tons II. Nous disons II parce que nous avions déjà publié un texte disant qu’ici c’est chez nous, là où nous vivons et lut­tons I[18]. À cette époque, en 2018, les para­mi­li­taires nous avaient déjà don­né un délai pour quit­ter cette terre, mais les para­mi­li­taires nous avaient don­né un délai un peu plus long, plus « ration­nel », car ils nous avaient don­né 2 mois ; et quand les deux mois se sont écou­lés, nous leurs avons dit NON, que nous ne pou­vions pas par­tir parce qu’ici c’était chez nous, là où nous vivons et lut­tons. Voi­là pour­quoi nous disons II, car mal­gré tout, nous ne per­dons pas notre sens de l’humour.

Et pour vous dire aus­si que ni Uribe, ni San­tos, ni Duque ne nous ont jamais dit « vous avez 48 heures ». Et nous leurs disons aus­si que nous ne par­ti­rons pas parce qu’ici, sur ces terres en voie de libé­ra­tion, 12 cama­rades sont tom­bés depuis 2005, assas­si­nés par les entre­prises pri­vées Incau­ca, Aso­caña et Pro­caña, et par l’État colom­bien. Ici nous nous sommes déjà enraciné(e)s. Nous res­te­rons ici jusqu’à ce que le gou­ver­ne­ment prenne les mesures néces­saires pour remettre les docu­ments à nos auto­ri­tés indi­gènes, soit par le biais de la réforme agraire soit par la voie la plus rapide. Et s’il ne le fait pas au cours des pro­chaines années, nous res­te­rons ici.

Nous fai­sons éga­le­ment savoir au grand chef que nous allons occu­per d’autres fin­cas car notre lutte ne s’arrête pas là. Hier, nous étions réunis lors d’une grande action pour accom­pa­gner une com­mu­nau­té qui est en train de libé­rer une fin­ca, parce que l’ESMAD les har­cèle avec des gaz en per­ma­nence depuis plu­sieurs jours, mal­gré le fait qu’ils nous avaient pro­mis que l’ESMAD allait dis­pa­raître, puis qu’il allait se trans­for­mer, et puis qu’il allait chan­ger d’uniformes. Et c’est vrai, parce que ses membres ont mis une tenue de sport pour jouer un match de foot­ball alors qu’ici, ils conti­nuent à nous tirer des gaz. Nous pour­sui­vrons nos actions pour nous enra­ci­ner davan­tage dans cette terre et pour que notre parole ait de la sub­stance, car sinon, ce serait comme un décret ou une pro­messe de cam­pagne, qui est écrite et signée mais qui ne se réa­lise pas.

Nous invi­tons les com­mu­nau­tés dans d’autres régions de Colom­bie qui mènent une lutte directe pour la terre à ne pas quit­ter les fin­cas. Nous invi­tons davan­tage de familles, davan­tage de com­mu­nau­tés dans le nord du Cau­ca, en Colom­bie et dans le monde entier à occu­per davan­tage de fin­cas, à en prendre pos­ses­sion et à faire vie et com­mu­nau­té comme nous le fai­sons déjà sur ces terres et comme le font de nom­breuses luttes qui ont été qua­li­fiées d’envahisseuses par les grands diri­geants de la patrie. Parce qu’aucune lutte n’a été gagnée à coups de bécots.

Nous envoyons éga­le­ment un mes­sage à nos cama­rades de lutte qui sont main­te­nant au pou­voir au sein de l’État colom­bien, pour qu’ils et elles ne s’embourbent pas sur le che­min. Parce qu’ils et elles ont mar­ché aux côtés de nos luttes, mais nous voyons main­te­nant qu’ils oublient d’où ils et elles viennent — ce qui peut arri­ver à toute per­sonne attei­gnant un som­met, et inca­pable de voir qu’après le som­met vient la des­cente. C’est aus­si pour­quoi nous leur fai­sons savoir que nous allons occu­per une autre fin­ca, où nous ferons des rituels et plan­te­rons des ali­ments pour les par­ta­ger avec eux, et nous prie­rons pour eux et pour elles pour qu’à la fin de leur pas­sage au pou­voir, ils et elles conti­nuent à être les mêmes per­sonnes qui, un jour, sont arri­vées là grâce aux votes de mil­lions de per­sonnes qui ont vu en eux et en elles un espoir.

Cette lettre s’arrête là, mais notre parole conti­nue. Nous écri­vons notre parole dans les fin­cas que nous libé­rons, voi­là notre pre­mière parole. Les docu­ments, les lettres, les vidéos, la radio…, la deuxième parole, nous sert à racon­ter au monde ce que nous fai­sons, les dan­gers aux­quels nous sommes confron­tés et com­ment nous conti­nuons à mar­cher face à ces der­niers. Mer­ci aux luttes et aux peuples du monde qui nous écoutent et sont soli­daires avec nous. Comme nous l’avons déjà dit dans « ici c’est chez nous, là où nous vivons et lut­tons I », la meilleure manière de nous sou­te­nir est de ren­for­cer vos luttes : le capi­ta­lisme aura beau­coup de mal à expul­ser ou à contraindre par la loi, des mil­liers de luttes à tra­vers le monde.

Pro­ces­sus de Libé­ra­tion de la Terre Mère (Pro­ce­so de libe­ra­ción de la Madre Tier­ra)
Peuple Nasa, nord du Cau­ca, Colombie
3 sep­tembre 2022.


Tra­duc­tion : Ale­jan­dro Balen­tine G.

  1. Liber­tad y ale­gría con Uma Kiwe. Pala­bra del Pro­ce­so de Libe­ra­ción de la Madre Tier­ra. Pue­blo nasa — norte del Cau­ca – Colom­bie. Décembre 2016. https://rebelion.org/docs/220925.pdf. (Toutes les notes de bas de page sont du tra­duc­teur.)
  2. « Nous allons déve­lop­per le capi­ta­lisme colom­bien. Nous devons vaincre le féo­da­lisme colom­bien ». https://www.marxist.com/colombie-petro-remporte-une-victoire-historique-luttons-maintenant-pour-le-socialisme.htm
  3. https://www.infobae.com/america/colombia/2022/09/15/ocupacion-ilegal-de-terrenos-procuradores-regionales-deben-atender-los-casos-en-menos-de-48-horas/
  4. Le pre­mier texte a ini­tia­le­ment été publié, en espa­gnol, à cette adresse : https://liberaciondelamadretierra.org/a‑pesar-de-todos-los-ataques-seguimos-en-pie-de-lucha-en-todas-las-fincas/ et le second à cette adresse : https://liberaciondelamadretierra.org/no-nos-vamos-esta-es-nuestra-casa-para-vivir-y-luchar-ii/
  5. Mot qui veut dire Terre Mère en langue Nasa des com­mu­nau­tés Nasa Yuwe, qui pour la plu­part habitent au nord du dépar­te­ment du Cau­ca.
  6. Conseil Régio­nal Indi­gène du Cau­ca (Conse­jo Regio­nal Indí­ge­na del Cau­ca)
  7. Mot qui désigne l’une des formes d’organisation des peuples indi­gènes en Colom­bie. Notam­ment asso­cié à une aire géo­gra­phique déter­mi­née.
  8. Ter­ri­toire qui intègre les 22 « cabil­dos » (mot qui dési­gnait, pen­dant la période colo­niale, un corps admi­nis­tra­tif colo­nial. Aujourd’hui en Colom­bie, le mot fait réfé­rence à une com­mu­nau­té indi­gène asso­cié à un ter­ri­toire don­né) asso­ciés aux Nasas dans le nord du dépar­te­ment du Cau­ca. Veut dire « ter­ri­toire du grand peuple ».
  9. C’est la bri­gade anti-émeute, « Escua­drón Móvil Anti Dis­tur­bios », ce qui cor­res­pon­drait aux CRS en France. En cam­pagne, le nou­veau gou­ver­ne­ment de gauche avait pro­mis sa dis­so­lu­tion, mais une fois arri­vé au pou­voir, ce qui a été pro­po­sé c’est une réforme à ce corps de répres­sion, notam­ment un chan­ge­ment de nom. Des chan­ge­ments à la marge sur la doc­trine, les tac­tiques et les armes pour gérer les mani­fes­ta­tions, ont été pro­po­sés. Ce qui relève – plu­tôt – de chan­ge­ments d’ordre sym­bo­lique.
  10. Des com­mu­nau­tés afro-des­cen­dantes, orga­ni­sés en « conseils com­mu­nau­taires », ont récem­ment pris par­ti aux mani­fes­ta­tions et aux actions contre les occu­pa­tions des fin­cas. Leur reven­di­ca­tion prin­ci­pale (en accord avec les inté­rêts des entre­prises) est que les occu­pa­tions mettent en dan­ger leur droit au tra­vail.
  11. Pour rap­pel, c’était le jour de l’investiture du nou­veau pré­sident Gus­ta­vo Petro.
  12. Ces mêmes entre­prises qui incitent les ouvriers à s’en prendre aux com­mu­nau­tés « libé­ra­trices », ont his­to­ri­que­ment rem­pla­cé et viré les ouvriers jour­na­liers pour les rem­pla­cer par des machines. Dans l’économie de mar­ché, les tra­vailleurs sont rem­pla­çables (et rem­pla­cés) et mani­pu­lables (et mani­pu­lés) dans le seul but capi­ta­liste d’accroitre les béné­fices. Ce n’est pas la « libé­ra­tion de la Terre Mère » qui met en cause leurs emplois, mais l’entreprise elle-même qui les uti­lise comme la pre­mière pièce inter­chan­geable quand les opé­ra­tions se voient per­tur­bés.
  13. Trois des grands groupes indus­triels de la canne à sucre mais aus­si de l’agro-industrie de Colom­bie.
  14. C’est ain­si que le nou­veau gou­ver­ne­ment appelle sa poli­tique de sécu­ri­té inté­rieure.
  15. Éco­sys­tème endé­mique des Andes qui se trouve au-des­sus de 3.000 mètres d’altitude. Le pára­mo per­met de régu­ler le cycle de l’eau et est à l’origine de l’abondance hydrique carac­té­ris­tique de la Colom­bie.
  16. Grand pro­prié­taire ter­rien.
  17. Mot qui désigne un com­plexe agro-indus­triel lié à la culture de la canne à sucre et sa trans­for­ma­tion.
  18. https://liberaciondelamadretierra.org/este-es-nuestro-hogar-para-vivir-y-liberar/
Print Friendly, PDF & Email

Adblock test (Why?)

Source: Lire l'article complet de Le Partage

À propos de l'auteur Le Partage

« Plus on partage, plus on possède. Voilà le miracle. »En quelques années, à peine, notre collec­tif a traduit et publié des centaines de textes trai­tant des prin­ci­pales problé­ma­tiques de notre temps — et donc d’éco­lo­gie, de poli­tique au sens large, d’eth­no­lo­gie, ou encore d’an­thro­po­lo­gie.contact@­par­tage-le.com

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Recommended For You