Guerres de l’ombre: Libération d’espions US, britanniques et français au Moyen-Orient

Guerres de l’ombre: Libération d’espions US, britanniques et français au Moyen-Orient

L’exfiltration de Amer Fakhoury, agent secret US et ex-paramilitaire de la milice de l’armée du Liban-Sud supplétive d’Israël, a été effectuée peu de temps après sa libération par une cour de justice libanaise pour prescription de crimes de guerre. Cette décision de justice est le résultat d’une pression liée à une négociation secrète tenue entre Washington, le gouvernement libanais, la Jordanie et d’autres acteurs régionaux étatiques et non-étatiques dont l’enjeu est fort important pour Washington. La preuve, un Osprey MV-22B du Marine Medium Tiltrotor Squadron 365 (VMM-365) (US Marines) a été spécialement dépêché depuis le nord de la Jordanie pour le récupérer de l’ambassade américaine à Beyrouth. Il aurait été par la suite emmené depuis la Jordanie vers une base militaire britannique à Chypre avant d’être transporté en VIP sur une base US en Allemagne, dernière étape avant d’atterrir sur une base militaire de Caroline du Nord.

Amer Fakhoury

La libération de cet homme recherché au Liban a fait grincer des dents pas mal d’acteurs politiques Libanais mais il semble qu’il y ait eu un accord secret concernant Fakhoury. Le Liban est officiellement en cessation de paiement et donc en banqueroute. La marge de manœuvre est donc extrêmement étroite y compris pour le Hezbollah Libanais. Ce que l’on sait est que la Syrie a refusé tout compromis et considéré le dossier comme une affaire libanaise interne. Le Hezbollah affirme ne pas avoir cédé ou négocié quoi que ce soit et la cour militaire pro-Hezbollah a déposé sa démission suite à cette affaire.

La récupération de Amer Fakhoury n’est pourtant pas un fait isolé et semble s’inscrire dans un processus secret plus large impliquant la libération de plusieurs agents secrets US, britanniques et français ces deux dernières semaines. En échange de quoi ?

Pour la France, la libération de Roland Marchal par l’Iran après neuf mois de détention a été faite en échange de la libération par Paris de Jalal Rouhollahnejad, un ingénieur iranien menacé d’extradition vers les États-Unis. Ce dernier est accusé par Washington d’avoir facilité l’entrée en Iran d’équipements technologiques interdits en violation des sanctions internationales visant Téhéran.

Roland Marchal et Fariba Abdelkhah. Le premier a été liberé en échange de l’ingénieur iranien Jalal Rouhollahnejad. La seconde est toujours en détention dans une prison iranienne.

L’ingénieur iranien Jalal Rouhollahnejad
Arrivée de l’ingénieur Jalal Rouhollahnejad en Iran après sa libération par les autorités françaises. Il remercie le renseignement du Corps des Gardiens de la Révolution d’avoir assuré sa libération. 21/03/2020.Source de la vidéo: Irinn et Press TV

L’Iran a également remis l’agent US Michael White dans la nuit du 17 au 18 mars 2020 à l’ambassade de Suisse à Téhéran et on peut supposer que le gouvernement iranien ait joué un rôle limité certes mais décisif dans l’approbation par le Hezbollah de la libération de l’espion Fakhoury au Liban en échange d’un deal qualifié d’important.

Le visa iranien de Michael White

Ces libérations ajoutées à celles d’une britannique concluent un premier cycle de négociations à l’issue desquelles Washington a publiquement demandé la libération des agents Austin Tice, porté disparu (MIA) à Daraya dans la banlieue de Damas depuis 2012 et, plus discrètement, de deux autres agents sans couverture dont on connaît pas l’identité réelle et qui auraient disparu durant la bataille d’Alep en 2016.

Nazanin Zaghari-Ratcliffe, une britannique détenue en Iran depuis le 03 avril 2016. Elle a été condamnée à cinq de prison ferme pour « complot visant à renverser le régime » mais a été partiellement libérée le 17 mars 2020 suite à un arrangement secret avec Londres.

Le FBI offre une récompense de un million de dollars US pour toute information susceptible d’aboutir à la libération d’Austin Tice.

Le gouvernement syrien nie comme d’habitude avoir emprisonné un quelconque agent US ou autre et affirme que tout étranger rentré illégalement en Syrie doit assumer sa propre responsabilité et celles de son acte. Pour Damas, Austin Tice serait prisonnier d’Al-Qaida, devenue HTS ou Hayat Tahrir al-Cham, l’une des principales organisations rebelles à Idlib.

D’autres espions capturés en Iran et en Syrie ne suscitent aucun intérêt de la part de leurs gouvernements respectifs.

Majd Kamalmaz, un psychologue US de Dallas, est porté disparu en Syrie depuis 2017

Robert Levinson, détenu en Iran depuis plus d’une décennie, abandonné par le gouvernement US qui le considère comme décédé.
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