Comment miner notre propre langue à même nos fonds publics

N’étant pas un pays, mais une province, contrairement au Rest of Canada où l’anglais règne d’office, le Québec est condamné à protéger sa langue par voie législative. Essentiellement, par la Charte de la langue française, mieux connue sous le nom de « loi 101 ». Or, c’est une œuvre gravement inachevée.

Primo, depuis son adoption en 1977, les tribunaux l’ont souvent affaiblie. Deuxio, nos gouvernements ont refusé d’étendre sa pièce maîtresse – l’obligation des enfants francophones et immigrants de fréquenter l’école primaire et secondaire en français –, jusqu’au niveau collégial.

Résultat : la force naturelle d’attraction de l’anglais étant ce qu’elle est, francophones et allophones sont de plus en plus nombreux à choisir un cégep anglophone. Ce qui, chez les allophones, peut aussi influer sur leur future langue de travail ou celle qu’adopteront un jour leurs propres enfants à la maison.

Ce faisant, le Québec subventionne l’anglicisation d’une part croissante de sa population. Rien de moins. C’est d’une irresponsabilité sans nom. Soyons clairs. À moins de vivre dans un univers parallèle, il n’est pas question ici d’empêcher l’apprentissage de l’anglais. 

Le fait est que selon Statistique Canada, la vaste majorité des jeunes adultes francophones et allophones de l’île de Montréal se déclare déjà « bilingue ».

Pas de prières

Il s’agit plutôt de renforcer l’attraction du français au Québec. Or, donner du tonus au fragile rapport de forces du français face à l’anglais ne se fait pas avec des prières, mais des lois. Au cégep, ça commence même à urger. Des cégeps francophones « bilinguisent »/sic/ des programmes.

Le cégep de la Gaspésie et des îles possède même à Montréal un campus exclusivement anglophone pour étudiants étrangers, et d’autres veulent l’imiter. Le Devoir nous apprend aussi qu’un projet de cégep bilingue à Vaudreuil-Dorion, porté entre autres par deux cégeps francophones, offrirait des cours uniquement en français OU en anglais.

Parce que l’anglais, c’est « vendeur » ($) pour attirer de nouvelles clientèles, on y voit, certes, la marchandisation croissante de l’éducation supérieure au Québec. Très franchement, on y voit surtout notre refus sournois d’assumer pleinement l’immense effort collectif et politique qu’exige une meilleure protection du français sur notre coin de terre d’Amérique.

Refus

De fait, le refus d’étendre la loi 101 aux cégeps, c’est la rencontre dommageable de l’individualisme comme phénomène social et de l’électoralisme comme moteur des partis politiques. Peu de francophones seraient en effet prêts à « sacrifier » leur « droit » au cégep anglais au nom d’un renforcement du français.

Selon un sondage Léger/Le Devoir publié en 2017, 63 % des Québécois s’y opposent carrément. Une donnée par ailleurs constante depuis longtemps. Ces 63 % de Québécois étant aussi des électeurs, aucun gouvernement ne veut risquer d’étendre la loi 101 aux cégeps. Celui de Pauline Marois, minoritaire, en avait parlé. Dès l’élection suivante, en quête d’une majorité, il avait abandonné l’idée.

En cela, toutes origines confondues, nous formons probablement le seul peuple avancé néanmoins suffisamment à courte vue pour miner à même nos propres fonds publics la pérennité de notre propre langue nationale.

 

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À propos de l'auteur Vigile.Québec

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