Dans bien des esprits, la Torah se résume à un ensemble de lois pour les Juifs. Or, loin d’être un long récit tranquille de vies modèles, elle décrit plutôt le meurtre, l’inceste, le viol, la rapine, la haine et la jalousie… Il faut avoir le cœur bien accroché ! Mais aussi, et surtout, elle présente cet attachement au bien par la recherche de la fraternité et de la sororité, de l’espérance et de la résilience. Le tout, au travers de la reconnaissance de la trace divine présente en soi et en chaque humain.
La Torah désigne d’abord les cinq premiers livres de la Bible hébraïque : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres et Deutéronome. Contrairement à un usage répandu, le mot Torah ne se traduit pas par loi, mais enseignement, selon l’un des sens de sa racine hébraïque.
Cet enseignement se décline au travers de récits et de lois, depuis la création du monde jusqu’à la veille de la conquête du pays d’Israël. Ce sont là des paradigmes qui charrient des enseignements sur l’humain, ses manquements et grandeurs.
Tout se passe comme si, pour découvrir Dieu, il fallait le chercher dans le texte, l’étude de son contenu, ses significations, ses contradictions, ses répétitions, voire ses silences.
Cette quête est aiguillée par les 613 commandements auxquels sont tenus les Juifs. Et bien qu’un certain nombre d’entre eux concernent la vie dans le Temple de Jérusalem, les autres touchent à tous les aspects de l’existence : nos relations à autrui, à Dieu et à nous-mêmes.
Présent dans l’histoire
Selon la tradition juive, la Torah a été donnée au peuple d’Israël par l’intermédiaire de Moïse, maitre et prophète, au cours des années passées dans le désert. Le nom « Israël » désigne ici les descendants de Jacob, nommé ainsi après son combat avec l’ange. L’un des moments-clés de cette transmission est l’énoncé des dix paroles (ou dix commandements) au mont Sinaï, il y a plus de trois-mille ans.
La première de cette parole est éloquente : « Je suis l’Éternel ton Dieu qui t’a fait sortir d’Égypte, de la maison de l’esclavage » (Exode 20, 2). L’Éternel ne se présente pas ici comme Dieu créateur — ce que la conscience monothéiste sait déjà — mais comme un Dieu agissant dans l’histoire. Il a œuvré à cette sortie d’Égypte et de l’esclavage. Et même si sa Providence à d’autres occasions est cachée, elle serait bien là.
C’est le thème même du Rouleau d’Esther où le nom de Dieu n’apparait jamais et se drape derrière les hasards. Et, tôt ou tard, la délivrance surgira. C’est là l’obstination de la foi d’Israël puisée précisément dans ce paradigme de la sortie d’Égypte.
À la rencontre d’autrui
L’un des deux termes en hébreu pour exprimer le « Je » est anokhi, un Je de majesté en quelque sorte. C’est ce « Je » qui est utilisé dans cette première parole de l’Exode citée précédemment. Un sage de l’Antiquité, Rabbi Yohanan, interprète ce terme de la manière suivante : « Moi ma personne, je l’ai donnée par écrit ».
Tout se passe comme si, pour découvrir Dieu, il fallait le chercher dans le texte, l’étude de son contenu, ses significations, ses contradictions, ses répétitions, voire ses silences. Il arrive aussi de guetter son sens au travers de la contemplation des formes des lettres hébraïques et de ses agencements dans un verset. C’est pourquoi l’étude juive est l’un des commandements essentiels du judaïsme. La tradition va jusqu’à dire qu’étudier la Torah réitère la Révélation au mont Sinaï, ce moment où Dieu donne la Torah au peuple juif comme un acte de mariage — une alliance.
Il faut cependant relever que cette recherche du divin dans le texte ne s’effectue pour le Juif qu’au travers de la Torah orale. Cette Torah orale, donnée selon la tradition juive en même temps que la Torah écrite, présente un contenu et des règles d’interprétations afin d’expliciter et compléter le texte. Elle a été transcrite plus tard dans le Talmud, achevé au 6esiècle de notre ère, ainsi que dans d’autres textes qui lui sont plus ou moins contemporains.
Mais chercher Dieu dans le texte doit nous mener à mieux connaitre et pratiquer ses injonctions, dont l’une d’entre elles : faire « ce qui est droit et bon aux yeux de Dieu » (Deutéronome 6, 18) et d’ainsi « marcher dans ses Voies » notamment dans une inclinaison à la bienfaisance et la miséricorde (Deutéronome 11, 22).
Point de recherche du divin qui ferait l’impasse sur l’humain, son respect quel que soit sa race, sa religion, son sexe, car chacun porte cette trace divine. Il faut donc lever les yeux de sa page après que son regard ait été forgé par tous ces enseignements pour rencontrer autrui, comme l’énonce si bien le philosophe Emmanuel Levinas : « Le visage de mon prochain est une altérité qui ouvre l’au-delà ». Et de préciser : « Moi, devant autrui, est infiniment responsable » 1.
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- Respectivement dans Difficile Liberté et Éthique et Infini.
Source : Lire l'article complet par Le Verbe
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