De nombreux groupes citoyens dénoncent la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) qui veut affaiblir sa réglementation sur la sécurité nucléaire. Une présentation du personnel à la Commission révèle aujourd’hui qu’il travaille à réviser la réglementation depuis 2018, sans consultation publique.
La présentation indique que ces modifications visent à « supprimer les exigences normatives » du Règlement sur la sécurité nucléaire et qu’on prévoit publier le règlement révisé d’ici la fin de 2021 ou le début de 2022.
Un rapport de Ressources naturelles Canada indique que les règlements normatifs sont plus détaillés et plus rigoureux, et plus faciles à surveiller et à appliquer.
« Bien que la CCSN se dise ‘libre de toute pression externe’, les groupes citoyens continuent de remettre en question son indépendance, a déclaré Kerrie Blaise de l’Association canadienne du droit de l’environnement. La CCSN se conforme aux demandes de l’industrie nucléaire visant à éliminer les obstacles réglementaires pour les petits réacteurs modulaires (PRM). »
En effet, le récent plan d’action PRM du gouvernement fédéral confirme que l’un de ses résultats attendus est que « Le Règlement sur la sécurité nucléaire est modifié afin qu’il ne porte que sur les principes généraux similaires à ceux d’autres règlements, et [que] les exigences prescriptives sont supprimées. »
L’exposé de la CCSN montre que l’organisme de réglementation nucléaire du Canada veut modifier son approche réglementaire afin d’accueillir les nouvelles technologies des réacteurs expérimentaux, appelés petits réacteurs modulaires (PRM). D’autres règlements qui seront « améliorés » par la CCSN concernent l’évaluation de la sûreté, la conception et l’autorisation des centrales nucléaires.
La réunion d’aujourd’hui de la CCSN se terminera par une séance à huis clos pour examiner un « Projet de réglementation visant à modifier le Règlement général sur la sûreté et la réglementation nucléaires et le Règlement sur le contrôle de l’importation et de l’exportation aux fins de la non-prolifération nucléaire. »
« Nous sommes déçus que le personnel de la CCSN soit allé de l’avant et propose maintenant une approche réglementaire plus souple sans aucune consultation avec les Canadiens qui seraient directement touchés quand l’un de ces nouveaux réacteurs expérimentaux arrivera dans leur collectivité », a déclaré Brennain Lloyd, coordonnatrice de Northwatch, basé dans le nord-est de l’Ontario.
Le plan d’expansion des nouvelles technologies nucléaires à travers le Canada et dans les communautés minières et autochtones éloignées est controversé. L’Église Unie du Canada s’est récemment jointe à plus de 100 groupes de citoyens, l’Assemblée des Premières Nations, les Chefs de l’Ontario, la Nation Anishinabek et trois partis fédéraux pour s’opposer aux PRM.
Le gouvernement fédéral a fait la promotion des PRM avec son plan d’action et le financement du Fonds d’innovation stratégique d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), affirmant que « le Canada est en passe de devenir un chef de file dans le développement sûr et responsable » des PRM. Pourtant, le gouvernement a exempté la plupart des PRM d’une évaluation environnementale fédérale en vertu de la nouvelle Loi sur l’évaluation d’impact.
Les critiques disent que les PRM exigeraient des milliards de subventions publiques et craignent que leurs concepteurs veuillent également des réglementations de sûreté et de sécurité plus souples. Parmi les plus de 50 conceptions de réacteurs nucléaires expérimentaux qui existent, la CCSN examine une douzaine dans le cadre d’accords préalables à l’autorisation avec des entreprises comme Moltex Energy et GE-Hitachi.
« La CCSN examine la technologie des PRM à huis clos, a déclaré Lloyd. Cela permet à ces entreprises du secteur privé de vendre leurs concepts de réacteur non éprouvés au personnel de la CCSN sans aucun examen public. »
La présentation du personnel de la CCSN indique également que la CCSN « appuie » deux fournisseurs de PRM actifs au Nouveau-Brunswick, y compris leur étude sur la façon dont ils pourraient extraire le plutonium du combustible CANDU irradié hautement radioactif. Unrapport du gouvernement a souligné que le retraitement du combustible CANDU usé (qui n’a jamais été fait auparavant au Canada) augmente les risques de prolifération des armes nucléaires.
« Nous sommes scandalisés que le Nouveau-Brunswick se prête à une expérience risquée et coûteuse avec des matières radioactives dangereuses, et que nous n’aurons pas l’occasion d’exprimer nos préoccupations lors d’une étude d’impact fédérale », a déclaré la Dre Susan O’Donnell, porte-parole de la Coalition pour un développement énergétique responsable au Nouveau-Brunswick.
La présentation du personnel de la CCSN laisse entendre que les premiers PRM devraient être construits bientôt. Global First Power a demandé au début de 2019 un permis pour préparer un site à Chalk River, en Ontario (sur des terres appartenant au gouvernement fédéral), et Ontario Power Generation a avisé la CCSN de son intention de demander un permis de construction de nouveaux réacteurs à la centrale de Darlington d’ici mars 2022.
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