Près de la moitié (44 %) des fonctionnaires fédéraux francophones se sentent mal à l’aise d’utiliser le français au travail.
Plus spécifiquement ceux qui travaillent au Québec, en Ontario et au Nouveau-Brunswick.
Pas à Calgary ou Vancouver. Mais à Ottawa, Montréal, Gatineau, Moncton, le cœur du Canada dit bilingue. Imaginez comment les francos de Saint-Boniface ou de la Nouvelle-Écosse se sentent lorsqu’ils osent utiliser leur langue maternelle au bureau.
En réalité, le français est marginalisé dans la fonction publique fédérale.
Les fonctionnaires, dans certaines régions du Canada, ont le « droit » d’utiliser le français quand bon leur semble.
Alors pourquoi ne le font-ils pas ?
Principalement par peur de déranger et tout simplement parce que leurs collègues et patrons ne comprennent pas leur langue.
« Le réflexe du minoritaire est d’accommoder », explique la professeure Stéphanie Chouinard, du département de science politique du Collège militaire royal du Canada et spécialiste des questions de langues officielles.
La langue par défaut devient donc l’anglais. « Au fédéral, le français, c’est pour les salutations et les cérémonies », ironise un des nombreux fonctionnaires de mon entourage.
Comme chez le garagiste
Ayant grandi dans la région de la capitale fédérale, j’en ai entendu de toutes sortes sur la situation du français dans les bureaux fédéraux, même ceux situés en territoire québécois.
Ceux qui insistent pour parler leur langue, par exemple, se font souvent regarder de travers. À la longue, ce malaise à utiliser une langue peut avoir des conséquences graves sur ses locuteurs.
À force de toujours « switcher » à l’anglais, on en vient à oublier qu’il y a aussi un mot français pour le dire. C’est comme chez le garagiste d’une autre époque où toutes les pièces automobiles portaient un nom anglais : « windshield », « muffler », « brakes ».
Certes, certains ministères opèrent « en bilingue », comme le Patrimoine canadien, mais c’est l’exception qui confirme la règle.
Chien de garde ou chien de poche
Cette enquête du Commissariat aux langues officielles a été publiée discrètement le 8 janvier dernier. Voilà aussi un autre problème.
Il est du devoir du commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, de jouer le rôle d’empêcheur de tourner en rond. Malheureusement, trois ans après être entré en poste, le bilan du commissaire Théberge est plutôt mitigé.
Mme Chouinard le qualifie avec raison de « réactif et trop discret ».
M. Théberge s’est fait discret durant la pandémie lorsque les droits des francophones étaient bafoués par le gouvernement Trudeau, qui a décidé d’importer des produits chimiques sans étiquetage bilingue.
Et que dire de cet important sondage, publié incognito un vendredi, sans même l’envoi d’un communiqué de presse ?
Le comble, voici comment le commissariat de M. Théberge a fait la promotion de son étude sur ses réseaux sociaux : « Le saviez-vous ? Selon notre sondage, plusieurs fonctionnaires francophones et anglophones souhaitaient avoir plus de possibilités d’utiliser le français au travail. »
C’est vraiment ce qu’il y avait de plus important à retenir de ce sondage effectué auprès de plus de 10 000 fonctionnaires fédéraux ?
Lors de la nomination de M. Théberge, le quotidien Acadie Nouvelle avait publié un éditorial coup de poing intitulé : « Un commissaire parfait… pour le gouvernement ».
On y soulignait que Raymond Théberge « n’est pas du genre à brasser la cage » et que « ce n’est pas ce dont les francophones du pays ont besoin ».
Trois ans après le début de son mandat, le commissaire donne malheureusement raison à ses critiques.
Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec