Sur le site internet du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles du Québec on peut lire : « Le gaz naturel d’origine fossile provient de la lente décomposition de résidus organiques trappés (sic) sous la terre et est extrait par forage. […] En raison de son caractère moins polluant que les produits pétroliers, comme l’essence ou le mazout, et de son efficacité énergétique, le gaz naturel est une énergie de transition profitable pour le Québec qui contribue à la diminution des émissions de gaz à effet de serre ».
La dernière proposition a de quoi faire sursauter. Pas étonnant que notre gouvernement caquiste éprouve tant de difficulté à admettre que le gaz naturel que produirait GNL Québec au Saguenay ne contribuerait pas à réduire les gaz à effets de serre à l’échelle planétaire : le conseil des ministres est induit en erreur par l’information émanant de ses propres fonctionnaires!
Sérieusement. Il existe un consensus scientifique à l’effet que le gaz naturel non conventionnel ou non classique, c’est à dire obtenu par la fracturation hydraulique, bien qu’’il n’émette pas autant de CO2 que le pétrole et le charbon ni autant de particules dans l’air, génère sur la durée totale de son cycle de vie autant sinon plus de GES responsables du réchauffement climatique à l’origine d’un nombre croissant de dérèglements alarmants.
La description du ministère relevée plus haut semble dater d’une époque où il existait encore de nombreux gisements de gaz naturel conventionnel au pays. La composition de ce dernier ne diffère pas du gaz non conventionnel, soit du méthane à 95%, un puissant agent de réchauffement, mais comme sa méthode d’extraction est relativement simple, ses impacts sur l’environnement sont limités. Or il s’agit d’une époque pratiquement révolue. Le gaz naturel que l’on trouve encore en quantité abondante de nos jours pour une production de masse est du type non conventionnel. Il génère davantage de fuites de méthane difficilement contrôlables tout au long de son processus d’exploitation, fragilise les sous-sols et risque de contaminer autant les eaux de surface que les nappes phréatiques.
Il est désolant de constater qu’un site gouvernemental provincial présente indifféremment le gaz naturel comme une énergie de transition avantageuse, alors que le BAPE évalue présentement les mérites du projet Énergie Saguenay dont l’usine de liquéfaction serait alimentée par des puits de l’ouest canadien utilisant, de l’aveu même du promoteur, la fracturation hydraulique dans une proportion de 85%.
Vérification faite, l’information présente sur le site internet du gouvernement du Canada s’avère pire encore…
Après avoir beaucoup insisté sur les bénéficies du GNL sur le plan économique, notre pays étant l’un des plus importants exportateurs au monde, Ressources naturelles Canada nous vante ses prétendus avantages environnementaux. « Le GNL est non-corrosif, non toxique et, surtout, il s’agit du combustible fossile le plus propre au monde; il est en outre plus abordable que la plupart des énergies renouvelables! En cette période de discussions sur les changements climatiques et les énergies propres, le GNL apparaît comme un élément de réponse. »
Cette tirade publicitaire est accompagnée d’un vibrant appel aux investisseurs. Le message est clair : comme le GNL coûte moins cher qu’une conversion aux énergies renouvelables, le Canada peut espérer écouler pendant quelques décennies encore sa production de gaz fossile, comme celle du pétrole des sables bitumineux, quitte à retarder la véritable transition énergétique dans les pays importateurs. Plus cynique que ça, tu meurs.
C’est le même discours que tient Éric Tétrault, le président de l’Association de l’Énergie du Québec, naguère connue sous le nom beaucoup plus explicite d’Association pétrolière et gazière du Québec. Le défi de M. Tétrault, ex-lobbyiste pour le projet avorté de pipeline Énergie Est, consiste maintenant à faire accepter celui d’Énergie Saguenay. Même s’il arrive une bonne vingtaine d’années trop tard, cela ne l’empêchera pas d’avoir, pour un temps encore, l’oreille de certains milieux d’affaires ultra conservateurs, appâtés par les promesses d’une relance économique illusoire.
Seule une accélération du passage aux énergies renouvelables – l’hydraulique, l’éolien, le solaire, la géothermie, le biométhane – peut, chez nous comme ailleurs dans le monde, rompre le cercle vicieux de la dépendance aux combustibles fossiles.
Source: Lire l'article complet de L'aut'journal