Le 28 août 1945, quelques jours après la capitulation du Japon (15 août 1945), les forces alliés composées de soldats américains et australiens débarquaient dans l’archipel. Ce qui suivit fut un enfer pour les civils japonais.
Ci-dessous, un extrait du livre ‘Power and Primacy : The History of Western Intervention in the Asia-Pacific’ (Pouvoir et primauté : l’histoire de l’intervention occidentale en Asie-Pacifique) raconte les souffrances qu’ont dues endurer les civils japonais pendant l’occupation alliée du Japon.
Traduction des pages 66-69 du livre ‘Power and Primacy: The History of Western Intervention in the Asia-Pacific’:
« Il y avait un côté bien plus sombre de l’occupation américaine et alliée du Japon, qui est peu mentionnée dans la grande majorité des rapports historiques américains ou autres. Lorsque le Japon s’est rendu en août 1945, des viols massifs par les forces d’occupation étaient attendus… [malgré la mise en place d’un groupe de femmes de réconfort qui étaient recrutées ou composées de femmes désespérées allant travailler dans des bordels] de tels crimes étaient encore courants et plusieurs d’entre eux étaient extrêmement brutaux et entraînaient la mort des victimes. Le professeur de science politique Eiji Takemae a écrit à propos de la conduite des soldats américains occupant le Japon :
« Les troupes se sont comportées comme des conquérants, surtout dans les premières semaines et les premiers mois de l’occupation. Les mauvais comportements allaient du marché noir, du vol mesquin, de la conduite imprudente et de la conduite désordonnée au vandalisme, aux agressions, aux incendies criminels, aux meurtres et aux viols. Une grande partie de la violence était dirigée contre les femmes, les premières agressions ayant commencé quelques heures après le débarquement des unités avancées. À Yokohama, en Chine et ailleurs, des soldats et des marins ont enfreint la loi en toute impunité, et des incidents de vol, de viol et parfois de meurtre ont été largement rapportés dans la presse [qui n’avait pas encore été censurée par le gouvernement militaire américain]. Lorsque les parachutistes américains ont atterri à Sapporo, une orgie de pillage, de violences sexuelles et de bagarres ivres s’est ensuivie. Les viols collectifs et autres atrocités sexuelles n’étaient pas rares […] Les tribunaux militaires ont arrêté relativement peu de soldats pour leurs délits et en ont condamnés encore moins, et les restitutions pour les victimes de pillage étaient rare. Les tentatives japonaises de légitime défense ont été sévèrement punies. Dans le seul cas d’auto-assistance que le général Eichberger enregistre dans ses mémoires, lorsque les résidents locaux ont formé un groupe d’autodéfense et ont riposté contre les GI hors service, la huitième armée a ordonné le déploiement de véhicules blindés en bataille dans les rues et arrêté les meneurs, qui ont été condamnés à de longues peines de prison.
Les forces armées américaines et australiennes ne se préoccupaient pas de l’état de droit en ce qui concerne les viols de femmes japonaises par leurs propres troupes, et la population japonaise n’était pas non plus autorisée à le faire elle-même. Les forces d’occupation pouvaient piller et violer à leur guise et étaient effectivement au-dessus de la loi.
Un exemple d’un tel incident s’est produit en avril 1946, quand des militaires américains sont arrivés dans trois camions et ont envahis l’hôpital Nakamura dans le district d’Omori. Les soldats ont violé plus de 40 patients et 37 membres du personnel féminin. Une femme qui avait accouché juste deux jours auparavant a vu son enfant jeté à terre et tué, puis elle a également été violée. Des patients masculins, essayant de protéger les femmes, ont été tués. La semaine suivante, plusieurs dizaines de militaires américains ont coupé les lignes téléphoniques d’un immeuble à Nagoya et ont violé toutes les femmes qu’ils pouvaient capturer là-bas – y compris des filles aussi jeunes que dix ans et des femmes aussi âgées que cinquante-cinq ans.
Un tel comportement était loin d’être propre aux soldats américains. Les forces australiennes se sont conduites à peu près de la même manière lors de leur propre déploiement au Japon. Comme l’a déclaré un témoin japonais : « Dès que les troupes australiennes sont arrivées à Kure au début de 1946, les soldats ont traîné des jeunes femmes dans leurs jeeps, les ont emmenées dans la montagne, puis les ont violées. Je les ai entendus crier à l’aide presque tous les soirs ». Un tel comportement était courant, mais les informations relatant l’activité criminelle des forces d’occupation étaient rapidement censurées.
L’officier australien Allan Clifton a témoigné sur un cas de violence sexuelle commis au Japon :
« Je me tenais à côté d’un lit à l’hôpital. Là-dessus gisait une fille, inconsciente, ses longs cheveux noirs en tumulte sauvage sur l’oreiller. Un médecin et deux infirmières luttaient pour la faire revivre. Une heure auparavant, elle avait été violée par vingt soldats. Nous l’avons trouvée là où ils l’avaient laissée, sur un terrain vague. L’hôpital était à Hiroshima. La fille était japonaise. Les soldats étaient des Australiens. Les cris et les gémissements avaient cessé et elle était maintenant calme. La tension torturée sur son visage avait disparu et la douce peau brune était lisse et non ridée, tachée de larmes comme le visage d’une enfant qui s’est endormie en pleurant ».
Les Australiens ayant commis de tels crimes au Japon ont été, lorsqu’ils étaient découverts, condamnés à des peines très mineures. Même celles-ci étaient le plus souvent réduites ou annulés par les tribunaux australiens. Clifton a raconté lui-même un tel événement, lorsqu’un tribunal australien a annulé une condamnation prononcée par une cour martiale militaire en invoquant « des preuves insuffisantes », malgré le fait que l’incident ait eu plusieurs témoins. Il est clair que les tribunaux qui supervisent les forces d’occupation occidentales ont pris des mesures pour protéger ces dernières des crimes commis contre les Japonais – des crimes qui étaient largement considérés comme un simple accès au « butin de guerre » à l’époque par les occupants occidentaux.
Comme cela avait été le cas pendant la guerre, la non-déclaration des viols en temps de paix en raison de la honte associée dans une société traditionnelle et de l’inaction des autorités (les viols dans les deux cas se sont produits alors que les militaires occidentaux étaient eux-mêmes au pouvoir) ont fait significativement baisser les chiffres. Afin d’éviter que le malaise envers leur occupation ne s’intensifie, le gouvernement militaire des États-Unis a mis en place une censure très stricte des médias. La mention de crimes commis par des militaires occidentaux contre des civils japonais était strictement interdite. Les forces d’occupation ont publié des codes de presse et de pré-censure interdisant la publication de tous les rapports et statistiques « contraires aux objectifs de l’occupation ». ‘
Lorsque, quelques semaines après le début de l’occupation, la presse japonaise a évoqué le viol et le pillage généralisé des soldats américains, les forces d’occupation ont rapidement réagi en censurant tous les médias et en imposant une politique de tolérance zéro contre la dénonciation de tels crimes. Ce n’est pas seulement la dénonciation des crimes commis par les forces occidentales, mais toute critique des puissances alliées occidentales qui était strictement interdite pendant la période d’occupation qui a duré plus de six ans. Cela a laissé le gouvernement militaire américain, l’autorité suprême du pays, au-delà de la responsabilité. Des sujets tels que la mise en place de postes de réconfort et l’encouragement des femmes vulnérables dans le commerce du sexe, l’analyse critique du marché noir, les apports caloriques du niveau de famine de la population et même les références à l’impact de la Grande Dépression sur les économies occidentales, l’anticolonialisme, le panasianisme et les tensions émergentes de la guerre froide étaient tous interdits de publication.
Ce qui est particulièrement remarquable à propos de la censure imposée sous l’occupation américaine, c’est qu’elle visait à dissimuler sa propre existence. Cela signifiait que non seulement certains sujets étaient strictement interdits, mais la mention de la censure était également interdite. Comme l’a noté le professeur Donald Keene de l’Université de Columbia : « La censure de l’occupation était encore plus exaspérante que la censure militaire japonaise ne l’avait été parce qu’elle insistait pour que toutes les traces de censure soient dissimulées. Cela signifiait que les articles devaient être réécrits dans leur intégralité, plutôt que de simplement soumettre des XX pour les phrases incriminées. La liberté de la presse était en fait plus restreinte qu’elle ne l’avait été en temps de guerre sous le régime impérial.
En allant plus loin pour censurer même la mention de la censure elle-même, les États-Unis pouvaient prétendre défendre la liberté de la presse et la liberté d’expression. En contrôlant les médias, le gouvernement militaire américain pouvait tenter de favoriser la bonne volonté du peuple japonais tout en faisant apparaître les crimes commis par son personnel et ceux de ses alliés comme des incidents isolés. Si la brutalité des militaires américains et australiens contre les civils japonais était évidente pendant la guerre et dans ses conséquences immédiates, elle ne s’est pas terminée avec l’occupation. Les États-Unis maintiennent depuis lors une présence militaire importante au Japon et des crimes, notamment des violences sexuelles et des meurtres contre des civils japonais, continuent de se produire ».
source : http://lagazetteducitoyen.over-blog.com
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