La société ne fonctionne pas et ne doit pas fonctionner de cette manière. Nous sommes dans un État de droit et ce serait hautement préjudiciable à notre système si un politicien devait se retirer parce que quelqu’un a publié des propos non vérifiés et anonymes sur les médias sociaux. Imaginez le dommage. Oubliez la démocratie, c’est out! : «Je ne l’aime pas ou je n’aime pas ses décisions, pas besoin de voter, je n’ai qu’à le dénoncer et il perdra sa job…»
On entend souvent cette phrase: «Nous sommes dans un État de droit.» Pour ceux qui ne le savent pas encore, c’est l’inverse de la «république de Banane». Le contraire des régimes sur la planète dans lesquels les droits et libertés ne sont pas respectés. Les règles ne sont pas respectées, la loi n’est pas respectée. Des pays où l’on peut être accusé à tort sans que personne s’insurge. Des endroits où certaines personnes utilisent le droit et la politique pour obtenir ce qu’ils veulent.
C’est comme si on avait oublié tout le chemin qu’on a parcouru dans l’histoire en tant que collectivité pour en arriver à construire ce système basé sur l’équité, malgré les griefs souvent légitimes qu’on peut y adresser. C’est Churchill qui disait que la démocratie n’est pas un système parfait, mais que c’est «le moins mauvais des systèmes». Cette amnésie doublée d’ingratitude (ou plus souvent d’ignorance) pour tout ce qu’on a gagné, je la trouve dangereuse avec tout ce qui se passe aujourd’hui:
Il n’y a aucun doute, les victimes présumées d’agression doivent dénoncer, elles en ont le droit, mais certainement pas de cette manière, puisqu’on ouvre la porte à d’autres victimes de diffamation, comme Yves-François Blanchet l’a bien dit. Et le dommage n’est pas moindre si la personne est accusée à tort. Oui, ON A OUBLIÉ que des gens se sont battus pour éviter que des citoyens soient condamnés à tort, qu’ils se sont battus pour avoir un système juste.
Être accusé à tort, c’est une agression de l’âme et de la dignité qui font partie intégrante de l’être humain.
Oui, nous voulons que les présumées victimes dénoncent, mais pas comme ça. Je suis prêt à travailler fort comme beaucoup d’autres juristes pour améliorer le système et empêcher que des victimes restent paralysées dans le silence, mais en ce moment, on assiste à une totale dérive du système.
Oui, on a oublié ce que c’est que de ne pas avoir de droits et libertés et pouvoir être accusé d’une manière arbitraire sans présomption d’innocence et de défense pleine et entière.
Et tant qu’à sonner l’alerte sur le thème, il me semble qu’on oublie également une chose capitale: c’est qu’en faisant toutes ces dénonciations en appuyant sur un bouton, on nuit d’abord et avant tout à l’ensemble des véritables victimes et à leur droit à ce que leurs plaintes suivent un processus rigoureux afin d’obtenir justice, en plus de bousiller d’éventuelles enquêtes (policières ou en milieu de travail)!
Yves-François Blanchet n’aurait donc pas le droit de démissionner à cause d’une allégation anonyme et lâche lancée sur les réseaux sociaux, ou de toute autre pression qui tirerait sa raison d’être de la même source, parce que si c’était le cas, ce serait la mort de la présomption d’innocence, le retour barbare à la vindicte populaire en remplacement des tribunaux, et le début de la fin de l’État de droit et de la démocratie. On s’est trop battus pour ça, pas question de revenir en arrière! Continuons plutôt d’évoluer et améliorons encore le système et le soutien de toutes les victimes.
Votre plainte est sérieuse? Fondée? Portez plainte de la bonne manière et justice sera faite.
Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec