Campagne de dons – Juin 2020
Chers amis lecteurs, Au début de cette année, nous écrivions que 2020 serait une année de bouleversements à l’échelle mondiale. Elle a pleinement tenu ses promesses, et ce n’est apparemment que le début de quelque chose de plus grandiose encore, et dont la principale caractéristique est une tentative de prise de contrôle total de l’information. C’est même l’essence de toutes les guerres livrées contre les peuples depuis quelques décennies. Plus que jamais, il est nécessaire que des sites comme le nôtre se multiplient pour contrer toutes les tentatives de monopoliser l’information à des fins de manipulation. Grâce à votre fidélité, vos encouragements et votre aide, nous avons réussi à surmonter toutes les pressions et contourner les divers obstacles destinés à nous faire disparaitre ou à nous intimider. Nous comptons à nouveau sur vous pour nous aider dans notre combat, et nous permettre de continuer à vous fournir un travail de qualité et une vision juste et équilibrée du monde. Merci pour votre soutien. Avic
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Les derniers cadavres dus au Covid-19 ne sont pas encore refroidis que déjà l’Amérique « rebondit » !
« Le taux de chômage est ainsi ramené à 13,3% après avoir bondi en avril à 14,7%, son plus haut niveau depuis 1948.
Ces chiffres déjouent complètement les anticipations puisque les économistes interrogés par Reuters prévoyaient en moyenne 8,0 millions de suppressions de postes et un taux de chômage en hausse à 19,8% »[1].
Bien évidemment, pour Donald Trump, c’est déjà « le plus grand comeback de l’histoire américaine »[2].
Un enthousiasme que son « rival » Jo Biden fait mine de ne pas partager, « opposition » oblige, mais que partagent déjà, et depuis le « creux » de mi-Mars, en réalité, les marchés financiers… :
« L’indépendance financière » de la France étant ce qu’elle est depuis quelques décennies déjà, le CAC 40 n’a pas hésité à suivre fidèlement son « maître »… :
Et pourtant, selon le sens commun et à priori, les raisons d’un tel « enthousiasme » sont pour le moins paradoxales…
En effet, selon Fitch Rating, « une agence de notation qui évalue la qualité des États ou entreprises en tant qu’emprunteur »[3], le PIB des USA devrait tout de même reculer de -5,8% en 2020…
Alors que son grand rival chinois devrait surnager à +0,7%…
Une performance très relative, néanmoins, compte tenu du fait que son taux de croissance, même si en « baisse », ces dernières années, tournait encore autour de +6% ! Tout est relatif…
Match nul, donc ? Encore en cours, pour le moins, et surtout, très mal engagé pour la France, en tous cas, selon Darmanin lui-même, qui nous place carrément en recul du PIB, à -11,4% !!! [4]
Le recul total, et donc « moyen » en quelque sorte, du PIB mondial pour 2020, est évalué à -4,6%… Ce qui permet de situer, en proportion, l’état de notre économie « réelle »…
Et pourtant, comme on le voit clairement, cela ne fait nullement trembler les actionnaires du CAC 40…
Des « nerfs d’acier », ou simplement, une autre vision des choses… ?
En fin de compte, pour le monde financier, la situation est-elle réellement plus mauvaise que ce qu’elle était au tournant 2019-2020 ?
La voici décrite par le magazine en ligne « fusacq-buzz » (« l’actualité collaborative des fusions-acquisitions », tout un programme !) le 10 Janvier 2020 :
« L’optimisme est de mise en ce début d’année et ce malgré une économie mondiale qui est loin d’afficher une santé resplendissante.
Le monde croule sous les dettes. L’ensemble de la dette mondiale dépasse 255 000 milliards de dollars (230 000 milliards d’euros) à la fin de 2019, selon des estimations de l’Institute of International Finance (IIF), soit près de 32 500 dollars pour chacun des 7,7 milliards d’humains vivant sur terre. Ce montant est plus de trois fois supérieur à celui du produit intérieur brut (PIB) mondial »[5].
Selon ce même IIF, le chiffre précis était même alors de 322% du PIB Mondial ![6] …Et l’optimisme de « fusacq-buzz » n’était pas forcément unanime du coté des businessmen… :
« La Banque mondiale a également récemment [NDLR : en Janvier 2020, donc !] alerté les dirigeants politiques sur le danger d’une crise mondiale de la dette.
Dans la dernière édition des Perspectives économiques mondiales (PEM), sa publication semestrielle, l’institution prévient que, malgré des taux d’intérêt historiquement bas, une crise financière est toujours possible. « Les taux d’intérêt bas dans le monde entier rendent la dette plus gérable, mais cela n’offre qu’une protection précaire contre une crise financière. Le passé a montré qu’une accumulation de dette se termine généralement mal ». (6)
D’aucuns avaient donc même déjà vu, dès Mars 2019, l’imminence d’une crise majeure, alors que le « coronavirus » futur du « Covid-19 » était encore tout à fait inconnu…
« Une crise financière majeure se profile avant la fin 2020 en raison de l’Endettement des États
Une crise économique plus dévastatrice que celle de 2008 viendra perturber l’économie mondiale fin 2020 en raison de la dette colossale de plusieurs gouvernements, a prédit George Ugeux, ancien vice-président de la bourse de New-york (NYSE). Dans son ouvrage intitulé « la Descente aux enfers de la finances », l’éminent financier tire la sonnette d’alarme »[7].
Entre les « pessimistes » de la Banque Mondiale et les « optimistes » genre « fusacq-buzz », une sorte de débat par « médias économiques » interposés semblait donc être en cours…
L’enjeu ? Manifestement, le rôle économique de la dette des États, principalement. Un constat évident et unanime, cependant, l’endettement énorme et croissant des États avait été la porte de « sortie » incontournable et « indispensable » de la crise de 2008[8]. Mais cette « porte de sortie » devait-elle rester ouverte indéfiniment ? Ne devait-on pas la refermer si l’on estimait la crise de 2008 « terminée » et en fin de compte, même si on le voulait vraiment, le pouvait-on réellement ?
Déjà en Mars 2019, « Les banques centrales doivent absolument arrêter progressivement d’emprunter de l’argent facile », soutient férocement Georges Ugeux. L’ex haut dirigeant de la NYSE » (7)
Mais ce n’est déjà plus la chanson des Banques Centrales, en Janvier 2020…
« L’IFF indique que les faibles taux d’intérêt sont la raison principale de l’accumulation de dettes. La Réserve fédérale américaine a baissé ses taux directeurs à trois reprises en 2019. Et les taux d’intérêt de la Banque centrale européenne n’ont jamais été aussi bas depuis la crise financière. Christine Lagarde, la nouvelle présidente de la BCE, a annoncé le mois dernier qu’elle ne comptait pas modifier cela pour l’instant. » (6)
« Selon l’IIF, cette hausse vertigineuse de la dette mondiale s’explique par l’augmentation du recours aux emprunts bancaires par les gouvernements et les entreprises non financières. Cette tendance a été stimulée par la baisse des taux d’intérêt qui ont, de ce fait, augmenté la demande en crédits bancaires »[9].
Mais déjà, en Janvier 2020, les « optimistes » n’en sont pas moins réalistes… :
« Le monde fait face au mur de la dette et pour qu’il ne représente pas un obstacle infranchissable, les banques centrales du monde entier sont à la manœuvre pour éviter un accident majeur qui pourrait se traduire en crise systémique. »
« Les banques centrales devront poursuivre leur politique non conventionnelle en achetant encore un peu plus de dettes, en maintenant leur taux directeurs au plancher et en recommençant à acheter des obligations pour abaisser les taux à long terme. Les taux vont rester proches de zéro pendant très longtemps encore. » (5)
Or, que s’est-il passé, au moment décisif de la « crise du covid », celui de la décision du confinement ?
C’est bien là, le 12 Mars 2020, que Macron a poussé ce cri inoubliable, et désormais pour l’Histoire, même si cela pourrait bien être la seule trace qu’il y laissera :
« L’État paiera, quoi qu’il en coûte ! »[10]
Et la boîte de Pandore s’est à nouveau ouverte, et les milliards se sont mis à pleuvoir sur la Terre, arrosée par les Banques Centrales…
Et le déluge de l’endettement mondial prend 20% de plus dans la vue, à 342% du PIB mondial !!![11]
Bien entendu, tout étant relatif, il s’agit là de la dette économique globale, et pas seulement de celle des États, mais c’est bien celle-ci qui paraît la plus insolvable, et qui inquiète donc encore quelques économistes ronchons… :
« Selon les dernières projections du fonds monétaire international (FMI) publiées ce mercredi 15 avril, la dette publique mondiale en pourcentage du produit intérieur brut pourrait passer de 83,3% à 96,4% entre 2019 et 2020, soit une hausse de treize points »[12].
Aux USA, « Les statisticiens du Fonds anticipent une augmentation massive de la dette des administrations publiques, passant de 109% à 131,1% entre 2019 et 2020.
Dans la zone euro, la hausse de la dette devrait être moins forte en passant de 84,1% du PIB à 97% du PIB. » (12)
Mais avec quelques inégalités…
En Italie, « Les plans de soutien annoncés par le gouvernement de Giuseppe Conte pourrait faire grimper la dette de plus de 20 points, passant de 134,8% à 155,5% en 2020.
Pour l’économie française, le FMI prévoit une hausse de la dette d’environ 17 points, passant de 98,5% à 115,4%. » (12)
Mais qu’on se rassure, le record reste au Japon, à 238,7% ![13]
En route vers les 250% dans le contexte post-covid ?
On n’en est pas encore là, et si la référence ne fait pas forcément rêver tous les économistes, dont certains parlent de « japonisation » de l’économie, comment expliquer, néanmoins, l’enthousiasme des bourses mondiales ?
En effet, le Japon, tout compte fait, ne se porte pas si mal… Y aurait-il donc encore quelques « pisse-froids » dans le monde économique merveilleux de l’Après ?
Concrètement, il ne faut tout de même pas oublier que si le chômage aux USA se trouve « ramené » de façon quasi-« inespérée » de 14,7% à 13,3%, après avoir été estimé prévisionnellement à près de 20%, il n’en était pas moins à son point bas le plus extrême, à seulement 3,5%, en Février, juste avant la « pandémie »… ![14]
La différence se chiffre donc néanmoins en millions d’emplois perdus, d’entreprises détruites, de vies de famille brisées par le chômage, durable pour des centaines de milliers, dont certaines ne s’en remettront probablement pas. Le cycle de « cicatrisation » des plaies sociales au pays de l’Oncle Sam tournant généralement autour d’une dizaine d’année en cas de récession.
Bien entendu, cela n’interdit pas de se réjouir pour ceux qui ont la chance de retrouver rapidement du travail dans le nouveau contexte, et les « experts » de débattre sur la forme du graphe représentant cet « exploit économique made in USA ». En V, en U, en L (trop lent…), en W (trop chaotique…), etc…
En France, comme on le voit avec Renault, c’est une reprise en « demi V », dont il n’y a que la moitié gauche, celle qui plonge encore !
Mais aux USA, pour Donald Trump, manifestement inspiré par les récents exploits de la NASA, pas de doute : « C’est plus qu’un « V », c’est une fusée » ![15]
John Plassard, spécialiste en investissements de Mirabaud Wealth & Asset Management, plus réaliste quant à lui, a ce « bon mot » :
« Absolument personne ne pariait sur des créations d’emplois qui arriveraient déjà au mois de mai, le scénario en V des indices boursiers et en U de l’économie se précise de plus en plus ». (14)
Ce qui est une manière comme une autre de prendre acte de la « déconnexion » déjà donc tout à fait rétablie, quasi comme au « bon vieux temps d’Avant », entre « l’économie financière » et « l’économie réelle » !
*
Résumons-nous…
Qu’avions-nous « Avant » ?
► Un monde croulant sous une montagne de dettes, atteignant des sommets records, jusque-là totalement inconnus, à 322% du PIB Mondial !
► Une « bulle » financière tout à fait comparable, par contre, à celle qui avait explosé en 2007-2008, et sur le point d’éclater à nouveau, sauf renflouement intense et permanent de la part des Banques Centrales.
► Une économie globale en quasi stagnation, avec même un recul du PIB amorcé dans plusieurs pays, dont la France[16].
Qu’avons-nous « Après » ?
► Une montagne de dettes qui bat les records d’« Avant », à 342% du PIB Mondial, et du sommet de laquelle se déverse en permanence un torrent de « liquidités » émanant des Banques Centrales, et qui contribue donc à maintenir à flots…
► Un marché financier mondial qui a connu une chute aussi brève que brutale et aussitôt arrêtée par le flot de « liquidités » ci-dessus mentionné. Brève chute suivie d’une rapide stabilisation à un niveau élevé et d’un « rebond » spectaculaire ramenant les indices boursiers vers les sommets de la spéculation…
► Une économie exsangue, avec des millions d’emplois détruits, des millions d’entreprises ruinées, une hausse généralisée du chômage et de la misère dans le monde. Et sur cette « nouvelle base » un début de « reprise économique » qui suffit à réjouir le petit monde des Banques Centrales et de ses affidés qui contrôlent et gouvernent en réalité tout ça…
Le monde « d’Après » est-il pire ou meilleur que le monde « d’Avant », et pour qui ?
Cher lecteur, je vous laisse cocher de vous-même les réponses évidentes à une question maintenant rendue aussi simple et claire que possible !
Bien évidemment, ce simple constat peut ramener la question de « l’intentionnalité » éventuelle de la « pandémie » elle-même, mais ce n’est absolument pas là l’objet de cet article, et cela d’autant moins que, considérée du point de vue des réalités économiques, cette question est à postériori tout à fait sans objet…
Le constat est aussi, par contre, la disproportionnalité évidente entre, d’une part, les implications et conséquences économiques de la « pandémie » et de l’autre, son impact sanitaire réel, qui, même à un peu plus de 400 000 morts à l’échelle mondiale, reste celui d’une forte grippe saisonnière, même si avec des symptômes et conséquences différentes pour les malheureuses victimes.
Et ne serait-ce que compte tenu de l’expérience chinoise, et sans même parler de cas antérieurs semble-t-il déjà connus des autorités sanitaires, l’apparent « laisser aller » et négligence absolue dans la préparation d’une réaction sanitaire proportionnée interrogent, pour le moins, concernant l’instrumentalisation qui a été faite par la suite de cette « pandémie » à l’échelle mondiale.
Même si l’on tient à écarter absolument l’intentionnalité machiavélique d’une telle « pandémie », même en vue de sa manipulation ultérieure, il est par contre difficile, voire tout à fait impossible, d’écarter l’effet d’aubaine qu’elle a constitué, en fin de compte, pour le règlement, au moins provisoire, des questions économiques cruciales auxquelles se trouvait confronté le système capitaliste mondial, et surtout, occidental.
Effet d’aubaine qui s’est donc transformé en stratégie globale, même si improvisée à la hâte, ce qui explique aussi les disparités dans la réaction des différents pays concernés, même si la stratégie dite du « confinement » est celle qui a prévalu, à des degrés divers, dans la majorité des pays.
Évidemment, la situation de la Chine, qui est considérée généralement comme le « foyer initial » de la « pandémie », se trouve finalement être la plus paradoxale de toutes les grandes puissances économiques. Dans cette affaire il est clair qu’elle est la seule des grandes puissances à n’avoir eu aucun intérêt à cette « pandémie ». En effet, dans le contexte économique pour le moins difficile, et en fait, carrément en limite de rupture, du tournant 2019-2020, elle est la seule grande puissance économique encore en croissance, malgré quelques difficultés accumulées ces dernières années.
Dans le contexte de « guerre économique » avec son rival US, elle avait donc l’essentiel des atouts en main, en réalité, et la « pandémie », ne serait-ce qu’en ce sens, était donc déjà une aubaine qu’on voudra bien croire « inespérée » pour le clan US et occidental…
Même si la Chine s’est au départ trouvée prise au dépourvu par cette nouvelle maladie contagieuse, elle n’en a pas moins réagi, contrairement aux puissances occidentales, avec un maximum de rapidité et d’efficacité, en réalité, une fois le problème réellement connu et acté. Tout simplement parce que c’était son intérêt vital, contrairement à ses rivaux occidentaux, qui ont néanmoins tenté de lui faire porter le chapeau, et le tentent encore, en vue de dissimuler leur propre attitude, de nature criminelle, en réalité.
Et si le crime paye donc pour l’Occident, ses Banques Centrales et ses bourses surgonflées de « liquidités », la limite de leur gain est donc la bonne résistance de l’économie chinoise…
Ce qui ne tue pas rend plus fort, telle est la loi de la guerre économique, comme de la guerre tout court…
L’Occident se trouvait-il en passe d’entreprendre une guerre « réelle » contre la Chine, pour se sortir de sa propre impasse et régler avec « bénéfice », à la fois son problème de concurrence et celui de sa propre saturation en termes de « croissance » ?
Quoi qu’il en soit, et qu’une telle éventualité ait été envisagée ou non, l’aubaine de la « pandémie » a fourni, en quelque sorte un substitut à bon marché…
Depuis Schumpeter et sa célèbre théorie de « destruction créatrice », ce genre d’idée s’est également développé en économie avec l’introduction des « théories du chaos »…
Le lien entre guerre et progrès des forces productives est effectivement un fait objectif : le meilleur exemple étant celui des « 30 Glorieuses » succédant à la 2ème Guerre Mondiale, mais il y avait déjà celui des « années folles », plus brèves, entre deux guerres et même celui de la « belle époque » qualifiée « rétroactivement », selon certains, dès 1880, etc…
De tout temps les guerres, après leurs cortèges de malheurs, ont entrainé une progression des forces productives, et notamment technique, par transposition des nouvelles techniques et matériels de guerre, et donc aussi par le renouvellement inévitable des entreprises et des matériels détruits, dont une part serait de toutes façons devenue obsolète, et en fait plutôt un frein au progrès.
Bien évidemment, il y a aussi les destructions de bâtiments et les chantiers de reconstruction…
Généralement, même dans ce secteur, les gains excèdent les pertes, même si gagnants et perdants ne sont pas toujours les mêmes !
Mais comme le dit la chanson, les temps changent…
Reconstruire sur les cendres d’une guerre nucléaire n’est pas du même profit… (Hiroshima et Nagasaki n’étaient que des « bombinettes expérimentales » en comparaison des arsenaux nucléaires actuels…).
Et donc, même si les capitalistes ont théorisé le « chaos » et la « destruction créatrice », ils n’en ont pas moins tendance à calculer leurs effets, tant qu’à faire…
Au-delà des guerres « locales » déjà suffisamment terribles pour les populations qui en sont victimes, ils entendent donc le plus souvent limiter leurs provocations à des rodomontades verbales et quelques démonstrations de force sporadiques, mais tout en préférant la « négociation », in fine, à l’embrasement généralisé, même si cela fait encore « rêver », on ne sait trop pourquoi, certains gauchistes à l’esprit à la fois simpliste et embrumé, dont le chroniqueur québecois Robert Bibeau est en quelque sorte l’archétype, assez caricatural, du reste !
(Bien entendu, on ne saurait tout à fait exclure un « accident de presse-bouton », mais depuis les fusées de Cuba en 1962, on espère que ce genre de problème technique a été résolu !)
Il n’y a donc pas, et fort heureusement, de logique absolue vers une « Nème » guerre mondiale…
Par contre, et ce que ces mêmes gauchistes sont incapables de comprendre, c’est que, contrairement à eux, les bourgeois ont évolué et appris à apprendre de leur « erreurs »… et des contraintes de leur système, tout simplement.
À la différence des gauchistes, ils ont lu Marx, et pas forcément « en cachette »… ! (Cf. Attali)
Au départ de leur stratégie de « dégonflement » de la bulle, il y a donc un réajustement entre capital financier « fictif » excédentaire et dynamique de l’économie productive « réelle », devenue insuffisante.
Mais ce n’est pas tout, il apparait clairement désormais, que la compréhension stratégique de la bourgeoisie va au-delà de ce simple réajustement immédiat.
En effet, pour une relance à grande échelle, disons de type « traditionnelle post-guerre », la destruction des entreprises a été trop faible après 2008, et elle sera très « mesurée » et limitée aux canards vraiment trop boiteux, après 2020 :
« La période récente [NDLR : ICI 2008-2018] de conditions de crédit peu onéreux et laxiste a non seulement maintenu à flot des entreprises en mauvaise condition financière (dans l’industrie européenne ou le pétrole de schiste américain, par exemple) mais, comme le décrivait Minsky, encouragé les comportements spéculatifs »[17].
En effet, pourquoi ne pas y avoir été plus « franchement », et laisser les indices chuter jusqu’à 2000 points (pour le CAC), par exemple ?
En réalité, cela tient précisément à l’évolution des forces productives les plus modernes, qui sont informatisées, automatisées, robotisées, et dont le développement, inévitable, et encore plus en cas de « casse » généralisée, réduira encore la part du travail vivant réellement « rentable » en termes de plus-value, et ne fera donc que raccourcir encore les prochains cycles de crise.
La seule « solution » à ce problème, pour la classe dominante, n’est donc pas, à long terme, de relancer durablement un profit en voie de disparition dans le secteur productif, contrairement à ce que rabâchent encore pas mal d’abrutis « de gauche », mais de préparer une succession de cycles plus ou moins « maîtrisés » et fondés essentiellement sur la dette, publique et privée, et incluant, de plus en plus, un relatif « soutien » à la consommation, ce que l’on voit bien, déjà, avec le « chômage partiel », les primes pour changer de voiture, etc…
« Il faut bien le dire, les fondamentaux socio-économiques, et politiques, ne vont pas dans le sens de la réduction de la dépense publique.
Enfin, l’inflation, qui a accompagné l’enrichissement de la génération d’après-guerre, ne représente plus une perspective crédible pour rembourser les dettes déjà émises et à venir. L’équilibre précaire du système financier actuel repose sur une politique de taux bas, voire négatifs, qui accompagnent le déversement quasi illimité de liquidités et entretien une tendance déflationniste dont on ne pourra sortir sans un changement de paradigme économique. Cette surabondance de liquidités, en l’absence d’emplois rentables dans l’économie réelle, alimente la baisse des taux sur les marchés financiers qui absorbent ces liquidités ; une baisse encouragée par les autorités monétaires et les gouvernements pour assurer le service de leurs dettes »[18].
C’est concrètement ce qui a été inauguré aussitôt après 2008, avec les politiques monétaires « non conventionnelles », type « Quantitative Easing ». En fait, il est encore difficile d’admettre, même pour un grand nombre d’économistes « mainstream », que ce soit là un système durable, et pourtant, c’est bien celui qui s’est imposé depuis 2008, et qui s’impose encore plus, suite à l’épisode « covid » ! Comme on l’a vu, c’est un simple constat…[19]
Les responsables des Banques Centrales ont donc clairement « anticipé » et décidé d’abréger, d’une certaine façon, en partie, la vie de l’ancien système du capital financier « classique » tel qu’il s’est imposé depuis le début du XXe siècle, et tel que si bien décrit par Lénine.
Bien entendu, ce système n’en subsiste pas moins, et même à une vaste échelle, y incluant, depuis quelques années déjà, l’essentiel de l’économie chinoise, même si de manière potentiellement conflictuelle. Désormais, pourtant, et radicalement depuis cet épisode « Covid-19 », cette strate de conflictualité se situe à un « étage » hiérarchiquement inférieur à celui des Banques Centrales et soumis à leurs conditions de crédit et de dette. À l’étage « supérieur » se situe donc également la Banque Centrale de Chine et, tôt ou tard, un nouveau « Bretton Woods » se tiendra, qui n’aura comme base ni l’or ni le dollar, ni même le Yuan, mais une nouvelle unité de compte, probablement « digitale » et future « monnaie de réserve » internationale, consacrant ainsi quasi officiellement le nouveau pouvoir mondial des Banques Centrales. (18)
De même, des strates « inférieures », « pré-impérialistes », en quelque sorte, en termes de développement capitaliste, subsistent dans de nombreuses régions du monde, sous la férule des « bourgeoisies nationales » résiduelles, avec, à leur tête, la Russie de Poutine.
Des strates de régions du monde encore « inférieures » en termes de développement, en économies de type « comprador », continuent évidemment également de subsister, comme l’une des bases économiques de la strate « financière impérialiste », dont elles restent les proies, comme l’Inde, l’essentiel de l’Afrique, etc…
Et bien entendu, ces strates sont interconnectées et interagissent dialectiquement entre elles, même et surtout, à travers leurs contradictions.
Le monde du XXIe siècle est donc, et pour longtemps, sauf prise de conscience et révolution, celui de la « destruction créatrice contrôlée »… par les Banques Centrales !
Les Banques Centrales qui nous contemplent donc toujours de plus haut, sur leur montagne indéfiniment croissante de dettes et de cadavres, en déversant sur les survivants la manne céleste de leurs divines « liquidités »…
Néanmoins, le commun des mortels encore doué d’un reste de bon sens se pose toujours la question, sachant que l’argent est supposément la représentation de ressources réelles :
« Mais d’où provient donc tout ce fric ? »
Évidemment, c’est la grande question…
Jusqu’à présent, mais en réalité, jusqu’en 2008, seulement (…et encore, d’où la « crise des subprimes »), et donc, disons, dans le capitalisme « classique », l’argent est la représentation des ressources réelles, mais principalement en termes de valeurs d’échanges, et c’est ce qu’il ne faut pas oublier pour comprendre ce qui se passe depuis…
En période de crise également « classique », sinon « normale », le crédit devient une anticipation nécessaire de la valeur à créer, et donc, aucun problème à faire tourner la « planche à billets », dans la mesure où le développement économique vient effectivement « absorber » en quelque sorte la valeur fictive ainsi provisoirement créée…
Mais c’est bien là qu’il faut comprendre ce que signifie valeur d’échange…
Cette valeur d’échange ne réside pas simplement dans le fait d’échanger des marchandises, même par le détour de l’argent, mais dans le fait d’échanger des produits du travail humain, du travail vivant.
Dans cette forme de circulation du capital, le détour de l’argent n’abolit pas le fait que le travail des uns répond aux besoins des autres, en termes de reconstitution de la force de travail, et réciproquement, évidemment. C’est même ce qui permet la réalisation de la plus-value, in fine, et précisément en termes de valeur d’échange. La masse salariale étant la valeur d’échange de la force de travail, et la production, sa valeur d’usage. La différence étant précisément la plus-value, qui permet l’élargissement du capital investi.
Avec l’accélération de l’automatisation et de la robotisation augmente la productivité du travail, et avec elle, la plus-value relative, en proportion, par tête de prolétaire exploité, mais il arrive un stade où le retrait massif du travail vivant des lignes de production de plus en plus « automatisées » aboutit à ce résultat que la masse du capital en circulation au titre du renouvellement de la force de travail (masse salariale « productive ») se réduit dans des proportions considérables et ne constitue plus une valeur suffisante, précisément en termes de valeur d’échange, pour assurer l’élargissement du capital par le cycle production/consommation.
En réalité, il n’y a plus de réalisation possible de la plus grande partie de la « plus-value relative » théoriquement produite. On peut donc dire qu’une partie de plus en plus grande de la production doit néanmoins toujours circuler, pour répondre aux besoins sociaux courants, sinon même, élémentaires, mais elle circule donc directement en tant que valeur d’usage, et non plus en tant que valeur d’échange. La réalisation « monétaire » si l’on peut dire, de cette valeur d’usage dans les circuits commerciaux, se trouve être en fin de compte autant de valeur qui est retirée au circuit de la valeur d’échange proprement dite, et même d’autant plus, paradoxalement, si un « bénéfice » plus ou moins exponentiel est réalisé à la vente, par rapport au coût de production.
Il y a possiblement des fortunes transitoires, sinon carrément éphémères, à réaliser au passage, mais tôt ou tard il faut bien remettre de l’argent dans le circuit pour compenser la part ainsi rendue manquante du capital circulant originellement au titre de la valeur d’échange réellement produite par le travail humain.
Pour simplifier, il faut comprendre le cas d’une ligne de production entièrement automatisée : le prolétaire qui en achète les produits lui cède une part de la valeur qu’il a lui-même créée par son travail et qui est donc perdue en tant que valeur d’échange. Socialement, la machine n’échange rien avec lui, elle lui cède simplement, contre du travail vivant, une valeur d’usage qui est du travail « mort » accumulé, et qui cesse donc le cycle d’élargissement du capital.
Paradoxalement, intuitivement, mais pourtant, à l’évidence, en réalité, la part de valeur d’échange ainsi perdue pour le cycle est d’autant plus grande que le propriétaire de la machine se sera octroyé une « marge » extensible au-delà du coût d’amortissement de la machine.
Ce syndrome, très bien décrit par Marx dès ses Grundrisse, en 1857, ne se manifeste de façon palpable qu’à un stade suffisamment avancé de développement de l’automatisation, et il devrait normalement permettre à l’humanité d’améliorer son sort à la fois en termes de satisfaction des besoins sociaux et d’augmentation du temps de vie libre hors du temps de travail.
Il se trouve que, dû à certains décalages historiques, dont le développement de la strate impérialiste, qui sont un sujet évidemment connexe, mais aujourd’hui autre, nous vivons donc actuellement cette problématique dans un système encore capitaliste, et avec les effets « pervers » que l’on vient de résumer.
Les Banquiers Centraux qui nous gouvernent donc, en réalité, depuis 2008, ont profité de l’occasion « crise du covid »-« confinement, etc.. », pour balayer les dernières « résistances » du capitalisme financier « classique », désormais leur obligé, en termes de crédits et de dettes publiques et privée. (19)
Avec le système déjà bien connu du « roulement », une nouvelle dette venant « rembourser » une autre, et divers stratagèmes, genre les prêts à taux négatifs, les Banques Centrales recréent en permanence l’argent dont le système a besoin pour faire circuler la part de valeur d’usage de plus en plus grande qui remplace progressivement la valeur d’échange et la plus-value réelle, les « profits » devenant eux-mêmes de plus en plus fictifs, et même totalement, à long terme, et distribués, en quelques sorte, au bon vouloir des Banques Centrales, et selon les critères, politiques et autres, qui sont les leurs.
Ce n’est donc même plus le pouvoir du créancier, qui espère un bénéfice plus ou moins abusif de son « usure », mais simplement le pouvoir de la dette, le pouvoir de décider qui « profite » illusoirement, d’un « roulement » à l’autre, et qui meurt, le plus souvent réellement, par contre ! Bien entendu, les Banquiers Centraux ont donc tout pouvoir de se ranger eux-mêmes du côté des « vivants », et même des « très bons vivants », tant qu’à faire… !
Dans la situation actuelle, on le voit tous les jours, une partie encore considérable de la bourgeoisie capitaliste « classique » refuse d’admettre le fait qu’une économie sous perfusion permanente de « liquidités » soit une situation durable.
Elle essaye, par tous les moyens imaginables par ses « théoriciens » de l’économie, de contourner et même de dénier, en fait, cette réalité.
Cela va des stratagèmes les plus abracadabrantesques qui verraient prétendument « l’économie réelle » rembourser « réellement » l’intégralité de la dette, à des pirouettes « comptables » visant en fait à une annulation de la dette qui permettrait, selon ces illusionnistes, d’en revenir au « capitalisme d’Avant », repartant pour un cycle mythique ou la dette serait « contenue », « remboursable », etc…
Or, comme on l’a vu, cette situation actuelle d’endettement chronique ne provient pas d’une « mauvaise gestion » du capital, mais de l’évolution des forces productives elles-mêmes, qui font progressivement circuler directement en tant que telle une part toujours plus grande de valeur d’usage, au lieu de la valeur d’échange, en voie de réduction drastique, et qui permettait seule l’élargissement « réel » du capital, et non pas purement fictif, comme c’était déjà le cas avec la plus grande partie du capital financier, malgré son lien, de plus en plus ténu, avec l’économie « réelle ».
Seule une fraction minoritaire de la bourgeoisie a acté pleinement cette nouvelle réalité et entrepris activement et consciemment de s’y adapter et d’adapter en fonction ses modes de domination de classe : celle qui contrôle désormais les Banques Centrales.
Cette toute-puissance nouvelle des Banques Centrales sur le reste du système commence donc néanmoins à être étudiée par les économistes du système, qui tentent de lui trouver une origine et/ou une légitimité « historique », par exemple en l’assimilant au pillage de l’or sud-américain au XVIème siècle, dont l’impact « monétaire » avait été théorisé sous le nom « d’Effet Cantillon » …au XVIIIème siècle ! (Richard Cantillon – Essai sur la nature du commerce en général, 1755).
« Toutes-puissantes, les principales autorités monétaires mondiales que sont la BCE et la Fed ont porté à bout de bras les marchés financiers depuis le krach survenu fin mars. »
« Comme l’explique le responsable de la recherche marchés chez Saxo Bank, Christopher Dembik, la crise sanitaire actuelle acte « la transition d’une économie de marché capitaliste à une économie administrée par les banques centrales ». Depuis 2010, ces dernières se sont émancipées de leur mission de maintien de stabilité des prix, héritée des années 1980, pour se substituer au marché en devenant des « market makers » sur certains segments de marché souligne-t-il. Autrement dit, ce sont maintenant les banques centrales qui « font » les prix. »
« Admiré par Ricardo, Hayek ou encore Schumpeter, l’irlandais Richard Cantillon a fait fortune à Paris en misant contre le système de Law, du nom de l’économiste écossais John Law, à l’origine d’une tentative de monétisation de la dette de l’État français sous la régence de Philippe d’Orléans, de 1716 à 1720.
Il a laissé son nom à « l’effet Cantillon », selon lequel une injection de monnaie dans l’économie exerce un effet progressif et différencié sur les prix au fur et à mesure que la monnaie se propage par les échanges depuis le point où elle a été injectée. »[20].
Comme on le voit, cette approche se réfère à un ensemble de pratiques qui rappellent l’époque où le capitalisme en était encore au stade de l’accumulation primitive, basée essentiellement sur la force brute, et où la dynamique de l’élargissement du capital sur le cycle productif n’était pas encore la force sociale dominante.
De fait il en arrive donc à prétendre que le nouveau système ne serait plus tout à fait du capitalisme… :
« La crise sanitaire actuelle acte « la transition d’une économie de marché capitaliste à une économie administrée par les banques centrales ». (20)
Ce qui meurt effectivement, à terme, et comme on vient de le voir, avec la disparition progressive de la valeur d’échange dans le circuit « production-consommation », c’est la base même de ce qui a permis la constitution des monopoles financiers et industriels tels qu’ils se sont constitués en puissances économiques autonomes au cours du XXème siècle, en interaction avec la constitution d’États-nations devenant des puissances impérialistes, comme étant leurs superstructures politiques.
Désormais, la survie même de ces monopoles ne tient plus qu’à leur capacité de monopoliser les circuits de circulation de la valeur d’usage, et cela leur est tout à fait impossible sans les injections permanentes de liquidités provenant des Banques Centrales, qui sont le seul moyen pour eux de continuer à capitaliser des profits eux-mêmes devenus totalement « fictifs », car n’étant qu’ une forme transitoire de circulation de ces liquidités, ne reposant sur aucune autre base que le bon vouloir des Banques Centrales.
Mais le pouvoir des Banques Centrales lui-même n’a pas d’autre base économique que la capacité des monopoles à contrôler les nouveaux circuits de consommation et de production robotisée qui se mettent en place, prenant en otages l’ensemble des besoins, des plus basiques aux plus futiles, de toute la société.
Formellement, la base de fonctionnement d’un tel système reste celle du capitalisme monopoliste, mais la véritable base économique réside dans l’interaction dialectique des Banques Centrales et des monopoles, dans laquelle les Banques Centrales sont l’élément dominant et la superstructure du pouvoir politique réel, les États, les banques d’affaires et les structures des monopoles n’étant plus que des relais obligés de ce pouvoir, et dans une dépendance totale à son égard, en dernier ressort.
L’impérialisme du tournant du XXème siècle fut baptisé ainsi à cause de sa continuation formelle des empires coloniaux.
D’ores et déjà il est clairement admis par les économistes du système que les politiques monétaires, à l’origine « non conventionnelles », des Banques Centrales, ne sont durablement possibles que par une concertation mondiale entre elles, et qu’elle finira donc tôt ou tard par être formalisée par une superstructure centralisée de gestion d’une future nouvelle « monnaie de réserve internationale », et qui consacrera, en réalité, de manière quasiment officielle, le nouveau pouvoir des Banques Centrales.
C’est pourquoi il est d’ores et déjà approprié de qualifier ce nouveau système de domination de classe de « banco-centralisme », pour le distinguer, précisément, du stade « monopoliste-impérialiste » en voie de désuétude, désormais, en tant que force sociale et politique, jusqu’ici dominante, et bien que concrètement encore dotée d’une puissance effective, sur le terrain, pour quelques décennies.
Ce nouvel « ordre économique et social » mondialisé, ce nouveau système de domination de classe que la bourgeoisie « moderniste » est en train de mettre en place est-il pour autant une fatalité ?
Pas plus que toutes les autres mutations des classes dominantes qui ont vu une fraction en éliminer une autre en s’appuyant sur les forces productives les plus avancées de leur temps, celle-ci n’est une fatalité absolue pour les classes dominées et exploitées.
Ce qui a fait le succès relativement incontesté des mutations précédentes, c’est bien que les forces économiques et sociales s’appuyant sur les moyens de production nouveaux apportaient en général au moins l’espoir d’une amélioration relative pour ces classes dominées et pouvaient donc les utiliser éventuellement comme masse de manœuvre contre les anciennes classes dominantes, s’appuyant, elles, sur les vestiges des modes de production devenus obsolètes.
De sorte que la question d’une réelle organisation autonome des travailleurs-producteurs en tant que classe pour eux-mêmes s’est rarement trouvée posée, et encore moins, durablement résolue.
Pour ceux qui refusent de se soumettre, à cette nouvelle forme de domination de classe tout comme à l’ancienne, la voie n’est donc pas non plus dans le déni de cette nouvelle réalité.
Face aux nouvelles réalités, les résistants et les révolutionnaires prolétariens doivent donc également adapter leur stratégie et leurs objectifs politiques. Ils doivent nécessairement construire un projet politique alternatif qui réponde réellement à ce nouveau défi et à ses enjeux, et non pas se contenter de radoter indéfiniment l’antienne, que plus personne n’écoute réellement.
Actuellement l’impression générale est que les cerveaux « de gauche » ont été remplacés par de vieux dictaphones des années 50, répétant en boucle le texte des tracts de cette même époque…
Tout à fait à l’instar des fractions les plus rétrogrades de la bourgeoisie, ils prétendent, et le plus souvent expressément, en revenir aux rapports économiques et sociaux de l’époque, également, celle des « 30 Glorieuses », où les dettes pouvaient encore être rapidement « effacées » par la synergie de l’élargissement « réel » du capital et de l’inflation due au « boom » économique.
Or non seulement une telle époque ne reviendra plus, mais l’époque actuelle, avec ses forces productives de plus en plus « automatisées », offre en réalité de bien meilleures possibilités de répondre aux besoins sociaux, et y compris à l’échelle planétaire, tout en réduisant l’asservissement au travail.
Avec l’évolution des forces productives modernes, il y a progressivement une dissociation de plus en plus grande qui s’opère entre valeur d’échange et valeur d’usage, mais cette « dissociation » est donc inévitable à terme, et ne constitue pas une mauvaise chose en soi, puisqu’elle doit libérer du temps de vie personnelle pour les travailleurs, dans une société socialiste.
La perspective alternative est donc bien celle d’un retour au réel, à la fonction originelle fondamentale de la valeur d’usage, qui est précisément celle de répondre aux besoins sociaux, et non de servir à l’accumulation du capital, qu’il soit « fictif » ou non.
Le retour de cette fonction de base dans les rapports économiques et sociaux doit donc aboutir nécessairement à faire correspondre de manière délibérée les forces productives et les besoins sociaux.
Dans cette transformation sociale du retour au réel, qui est le socialisme réellement prolétarien, le travail restant doit donc être partagé entre tous ceux qui sont aptes à y participer, et avec la meilleure formation professionnelle possible. Le temps de travail ainsi divisé entre tous ne se mesure pas en termes de « rentabilité », ni même de « plus-value », mais en fonction de ce qui est nécessaire pour répondre à l’ensemble des besoins sociaux essentiels, démocratiquement définis.
Il n’est donc pas fixé arbitrairement, en fonction de critères financiers hypothétiques, mais en fonction de la réalité des nécessités économiques, c’est-à-dire du temps de travail global nécessaire à la production ainsi définie, divisé simplement par le nombre de travailleurs potentiellement disponibles.
La masse monétaire, c’est-à-dire, en fin de compte, le crédit total nécessaire au fonctionnement d’un tel équilibre économique réaliste doit donc être maîtrisée par ceux qui le gèrent eux-mêmes, c’est-à-dire l’ensemble des travailleurs-producteurs et de leur organisation démocratique.
Mettre en rapport direct les forces productives et les besoins sociaux, c’est le seul processus de « relocalisation » qui ait réellement un sens. Il ne peut donc se faire que par les travailleurs-producteurs eux-mêmes, en allouant directement les crédits nécessaires aux forces productive à développer pour établir cette correspondance « locale », que ce soit au sens régional ou au sens de l’ensemble d’un pays.
La maîtrise du crédit, c’est la maîtrise du contrôle des forces productives, déjà dans le contexte précédant la récente crise, et définitivement, depuis. Dans le contexte d’une production de plus en plus « robotisée », c’est le levier qui permet de répartir la production des valeurs d’usage, que ce soit au gré des Banques Centrales, au bénéfice de leur classe de parasites ou au contraire selon la volonté des travailleurs-producteurs, en fonction d’objectifs sociaux démocratiquement définis.
La relocalisation des forces productives, en vue d’établir leur correspondance avec les besoins sociaux, ne peut passer que par la relocalisation du crédit, c’est-à-dire sa nationalisation, au niveau du pays.
Ce qui est tout à fait différent des objectifs « souverainistes » nationalistes et sociaux-chauvins de « sortie de l’Euro », « sortie de l’UE », etc…, qui ne sont que des occasions de conflits stériles et tout à fait inutiles et même néfastes, tactiquement et stratégiquement, comme on va le voir.
Le seul vrai problème est celui de la volonté politique et de la conscience collective. Il ne suffit donc pas de « voter » comme en 2005, pour faire avancer les choses.
Il faut d’abord et avant tout construire un projet politique alternatif au système actuel, même si avec des objectifs immédiats qui semblent limités au départ.
La nationalisation des banques en 1945 n’était qu’un aspect formel de la question, le fond étant la politique de contrôle du crédit qu’aurait dû exercer le « Conseil National du Crédit » (CNC), créé par la loi du 2 Décembre 1945.
En réalité il n’a servi qu’à reconstituer les monopoles qui étaient au cœur de l’impérialisme français, et cela avec l’appui du PCF de Thorez.
Donc un nouveau CNC ne doit pas être, précisément, le financier d’une sorte de « nouveau CNR », mais bien le reflet de la volonté populaire pour une nouvelle répartition des forces productives en fonction des besoins sociaux collectifs essentiels, résumés dans une plate-forme unitaire de revendications immédiates.
À court terme, cet objectif de nationalisation du crédit peut donc être un moyen de se réapproprier la vie politique d’un point de vue prolétarien, en faisant avancer les revendications immédiates concrètes et en montrant la nécessité de faire correspondre enfin les forces productives et les besoins sociaux.
Le nouveau CNC ne pourra évidemment commencer que sur la base d’un moratoire sur le remboursement de la dette publique et de ses intérêts.
La reprise du contrôle de la Banque de France par le nouveau CNC est une évidence qui permet de régler en partie ce problème, et/ou, à tout le moins, de poser une base de négociation avec les créanciers, de gré ou de force, au pire aller.
C’est, de toutes façons, un Contre-coup d’État à l’égard du nouveau pouvoir des Banques Centrales, européennes et autres, et elles n’auront pas d’autre choix que de négocier ou d’entrer dans un conflit violent où elles perdent de toute manière le contrôle des forces productives situées en France : la dette des entreprises et leurs crédits étant donc « recentrés » autoritairement par ce nouveau pouvoir de contrôle, qui exige donc bien une réelle mobilisation populaire, et non pas seulement un simple « vote », même « de confiance » dans la nouvelle autorité économique et financière locale du peuple et des travailleurs de France.
Une nouvelle politique du crédit permettra en outre effectivement d’irriguer le tissu des TPE-PME, encore essentiel pour notre survie économique et sociale.
Et comme on l’a bien vu, il ne s’agit donc pas non plus de s’opposer au développement des forces productives modernes automatisées, mais bien au contraire de les mettre au service de la collectivité, pour répondre à ses besoins.
La nouvelle autorité place nécessairement les comptes des entreprises sous son contrôle, et celles qui refusent se mettent d’elles-mêmes « hors-la-loi », et se trouvent donc réquisitionnables de fait, et sans indemnités de « nationalisation », nationalisation qui devient un fait acquis de plein droit.
Pour le reste, la « nationalisation » à priori nécessaire de façon urgente des banques privées actuelles pourrait se faire en convertissant la valeur de leurs actions, basée sur une évaluation moyenne de l’année écoulée, en unités de compte de crédit du nouveau CNC. Autrement dit les porteurs se retrouvent avec une « épargne » qu’ils peuvent réinjecter dans l’économie locale française, à leur gré, si l’on peut dire, et sous le contrôle du CNC… (Bien évidemment, ils cessent donc aussitôt d’avoir droit au moindre dividende sur les entreprises ainsi réquisitionnées ! …Ils en perdent les titres.)
Autrement dit, nationalisation = reconversion d’une partie des « euros » actuellement circulants en France en unités de compte de crédit « national » français. Il n’y a donc absolument pas besoin de changer formellement de monnaie, bien au contraire : ce sont des euros pour irriguer, de gré ou de force, notre économie locale !
Un renversement dialectique et stratégique du problème…
Alors que le nationalisme « souverainiste » et social-chauvin se focalise sur des objectifs qui deviendront dès le départ de lourds handicaps pour la relocalisation réelle des forces productives et leurs échanges nécessaires avec les pays voisins et autres pays amis plus lointains.
Recentrée sur ses propres forces, notre économie locale génèrera donc sa propre valeur, et qu’elle soit formalisée en euros reste donc un avantage pour les échanges avec nos voisins et tous les pays qui en utilisent : le but n’étant pas l’autarcie, évidemment impossible, mais le développement d’une économie endogène !
Effectivement, si d’autres pays suivent ce mouvement, il y a lieu à concertation et accords d’échanges mutuels sur une base équitable, dans l’esprit « Charte de la Havane » (1948), par exemple[21].
Cela laisse donc aux peuples le choix de leur régime social et politique intérieur, y compris le passage au socialisme, qui reste évidemment le but.
De la concordance entre forces productives et besoins essentiels immédiats, si la mobilisation populaire et surtout, prolétarienne, continue de se construire, on passe donc au projet collectif d’une concordance générale planifiée de l’ensemble des besoins et de toutes les forces productives, intégrées dans un même projet politique.
Un projet politique de transition révolutionnaire socialiste, au vrai sens du terme, reposant sur le plan de concordance des moyens et des besoins, et non pas sur le marché, à la mode « Programme de Transition » trotskyste[22], « Nouveau CNR », « 6ème République », ou autre subterfuge dilatoire…
Un projet politique qui est bien d’abord et avant tout une affaire de volonté politique. Même s’il doit donc analyser les réalités et en tenir compte :
« Là où il y a une volonté, il y a un chemin » -V.I. Lénine
Luniterre
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[1] https://www.boursorama.com/actualite-economique/actualites/usa-rebond-surprise-et-spectaculaire-de-l-emploi-en-mai-ce0fbe40cc7794c5abec49524808df80
[2] https://www.midilibre.fr/2020/06/06/spectaculaire-et-inattendu-rebond-de-lemploi-aux-etats-unis,8920227.php
[3] https://www.atlantico.fr/decryptage/3590154/crise–les-pays-dont-l-economie-va-repartir-et-vite-ne-sont-pas-forcement-ceux-qu-on-attend-jean-marc-sylvestre-aude-kersulec
[4] https://investir.lesechos.fr/marches/actualites/france-le-deficit-2020-est-desormais-attendu-a-11-4-du-pib-darmanin-1911936.php
[5] https://www.fusacq.com/buzz/la-dette-mondiale-la-fuite-en-avant-lettre-de-conjoncture-janvier-2020-a191047.html
[6] https://fr.businessam.be/la-dette-mondiale-atteint-un-niveau-record/
[7] https://www.renseignementeconomique.net/2019/03/une-crise-financiere-majeure-se-profile-avant-la-fin-2020-en-raison-de-lendettement-des-etats/
[8] +60% en 10 ans, selon l’institut Thomas More :
__ Voir aussi le « scan éco » du Figaro :
[9] https://www.lemanager.tn/2020/01/18/dette-mondiale-plus-de-253-000-milliards-de-dollars-en-2019/
[10] https://tribunemlreypa.files.wordpress.com/2020/06/verbatim-macron-12-03-2020.pdf
[11] https://tribunemlreypa.files.wordpress.com/2020/06/bpce-suivi-hebdo-10-17-avril-2020.pdf
[12] https://www.latribune.fr/economie/international/covid-19-le-fmi-anticipe-une-forte-hausse-de-la-dette-mondiale-845124.html
[13] https://data.oecd.org/fr/japon.htm
[14] https://www.ouest-france.fr/economie/la-bourse-de-paris-cloture-en-fort-rebond-3-71-une-semaine-de-hausse-historique-6859306
[15] https://investir.lesechos.fr/marches/actualites/la-bourse-completement-surexcitee-par-les-chiffres-incroyables-de-l-emploi-aux-etats-unis-1912295.php
[16] Japon _1,6% au T4 2019
Afrique du Sud _1,4% au T4 2019
Mexique – récession 2018 – stagne 2019
France – recul du PIB _0,1% au T4 2019
Allemagne recul du PIB _0,2% au T2 2019
[17] http://institut-thomas-more.org/2018/09/30/2008-2018-a-t-on-retenu-les-lecons-de-la-crise-financiere/
[18] https://www.lefigaro.fr/vox/economie/la-sphere-monetaire-doit-se-realigner-sur-l-economie-reelle-20200605
[19] https://tribunemlreypa.wordpress.com/2020/05/21/la-croix-et-la-banniere-ou-le-coup-detat-des-banques-centrales-pour-les-archi-nuls/
[20] https://www.tradingsat.com/actualites/marches/les-banques-centrales-ressuscitent-l-effet-cantillon-915451.html
[21] https://fr.wikipedia.org/wiki/Charte_de_La_Havane
[22] https://tribunemlreypa.wordpress.com/2019/11/18/pour-refonder-la-gauche-francaise-marxisme-ou-trotskysme-il-faut-choisir/
source : https://tribunemlreypa.wordpress.com
Source: Lire l'article complet de Réseau International