Meurtre de George Floyd : combattre le racisme par l’universalisme

Meurtre de George Floyd : combattre le racisme par l’universalisme

La question du racisme et de la reconnaissance des minorités culturelles, qui a récemment fait surface avec l’assassinat de George Floyd, est au cœur de la vie politique occidentale depuis au moins une vingtaine d’années. Les différents camps se questionnent et débattent par rapport au racisme et au multiculturalisme. Ils ne devraient toutefois pas oublier une vision fondatrice du monde occidental : l’universalisme chrétien.

Notre voisin du sud est à nouveau plongé dans une crise historique depuis la mort de George Floyd, ce citoyen noir de Minneapolis injustement assassiné le 25 mai dernier par un policier. Il souffle depuis sur les États-Unis un fort parfum de révolte qui ne semble pas près de se dissiper. Pendant ce temps, le président Donald Trump ne semble pas vraiment vouloir en appeler au dialogue…

La question du racisme et de la reconnaissance des minorités culturelles est au cœur de la vie politique occidentale depuis au moins une vingtaine d’années, et peut-être même depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Avec la découverte des horreurs de la Shoah et du nazisme a retenti un « plus jamais ça » encore gravé dans nos consciences.

La tolérance au cœur de notre imaginaire  

C’est donc, entre autres, pour prévenir la remontée de l’intolérance que le multiculturalisme est apparu comme idéologie en Occident. Une idéologie qui prend aussi la forme de politiques publiques dans des États comme le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. 

C’est avec une vision proprement humaine, et je dirais même chrétienne, qu’il sera possible de mettre fin à cette triste guerre des races qui n’en finit plus.

Pour les uns, le maintien par l’État de la diversité est essentiel à une société harmonieuse et tolérante, alors que pour d’autres, le multiculturalisme met en péril la cohésion sociale en liguant les groupes les uns contre les autres. Ceux et celles qui me connaissent savent que j’appartiens au deuxième courant. 

J’observe en effet que le multiculturalisme a comme fâcheuse tendance de racialiser les rapports entre personnes. Au lieu de les délivrer de leur appartenance ethnoculturelle, il a pour effet de les y enfermer. Le multiculturalisme peut alors devenir une sorte de prison identitaire, alors que sa prétention est de dresser des ponts entre les cultures. 

La révolution du christianisme 

C’est l’un des plus grands legs de la tradition chrétienne que d’avoir initié ce qui est encore aujourd’hui une grande révolution humaine : l’universalisme. Avant l’apparition du christianisme, la vie sociale et religieuse était encore régie par des règles et des principes ethniques malgré l’existence de vastes ensembles politiques comme l’Empire romain. 

C’est à saint Paul en particulier que l’on doit le passage d’une vision exclusiviste à une vision universaliste de la religion et de la société. Paul fut l’un des premiers à réfléchir à un modèle qui pourrait rassembler tous les humains sous un même et unique toit, celui de Dieu, indépendamment de leurs origines ethniques. Un modèle sans passe-droits ni privilèges, dans lequel tous seraient égaux indépendamment de leur arbre généalogique. 

L’idée pourrait paraitre banale aujourd’hui, mais elle était révolutionnaire à l’époque, et elle a d’ailleurs suscité la vive réprobation des Juifs du temps de Jésus qui refusaient d’ouvrir leur livre, le livre, aux païens. 

C’est une autre fâcheuse tendance du multiculturalisme que d’avoir contribué à la campagne de dénigrement en cours, subtile mais bien présente, de l’héritage chrétien et plus largement occidental.

Pourtant, malgré les crimes auxquels il reste hélas associé (l’Inquisition, la colonisation, etc.), aucune religion n’a fait autant que le christianisme pour défaire l’enferment racial et contribuer à un monde multicolore. L’amour du prochain n’est-il pas une idée proprement chrétienne ? Plusieurs grands penseurs ont déjà noté l’inspiration chrétienne des Droits de l’homme, malgré leur caractère laïque. 

Le christianisme, c’est aussi l’esprit de Bartolomé de Las Casas (1474-1566), grand défenseur des Indiens d’Amérique dans une époque marquée par les débuts de la Nouvelle-Espagne. 

Mettre fin, enfin, à la guerre raciale 

Qu’il y ait une forte persistance du racisme aux États-Unis est un fait. Cet étrange pays reste marqué par les stigmates de la ségrégation et je ne connais aucun observateur honnête qui serait prêt à le nier. 

Cela dit, je me suis souvent demandé si la stratégie du nouveau mouvement antiraciste américain était la bonne. J’en suis toujours venu à la conclusion que non. Dans le cas du racisme, on ne combat pas le feu par le feu. On ne répond pas au racisme par le racialisme, comme on ne répond pas à l’extrême droite par l’extrême gauche. 

En Occident, la nouvelle gauche a troqué la lutte des classes pour la lutte des races, ce qui est loin de favoriser un terrain d’entente. Aux États-Unis en particulier, les suprématistes blancs y ont vu la confirmation de leurs thèses différentialistes. Quand il n’y a plus d’universel, comment peut-on en arriver à un nouveau contrat social ?

C’est avec une vision proprement humaine, et je dirais même chrétienne, qu’il sera possible de mettre fin à cette triste guerre des races qui n’en finit plus. D’ailleurs, avec sa Bible à la main, il est regrettable de voir Donald Trump utiliser la tradition chrétienne pour servir une vision polémique et belliqueuse de la foi. 


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