À en croire nombre de médias et de militants de gauche, l’opposition au phénomène trans serait originaire de l’extrême droite, qui serait d’ailleurs aujourd’hui le seul camp politique à s’y opposer. Cette idée est doublement fausse.
Une brève généalogie de l’opposition au phénomène trans
L’opposition au phénomène trans trouve son origine dans le militantisme et les écrits féministes et constitue, dans cette perspective, un geste progressiste – dans le sens de ce qui favorise la justice sociale, l’égalité, y compris entre les sexes. En 1979, aux États-Unis, Janice Raymond, une féministe radicale lesbienne, professeure émérite d’études des femmes et d’éthique médicale à l’université du Massachusetts à Amherst, connue pour son travail contre la violence, l’exploitation sexuelle et les abus médicaux dont sont victimes les femmes, publie un livre intitulé L’Empire transsexuel (que nous avons réédité avec l’association Le Partage et que vous pouvez vous procurer ici). Pour la rédaction de cet ouvrage, elle demande les conseils de son amie Andrea Dworkin, une essayiste états-unienne, théoricienne du féminisme radical, figure majeure du féminisme de la Deuxième vague, connue pour sa critique de la pornographie, du viol et des autres formes de violence contre les femmes. Dworkin écrivit d’ailleurs une brève recommandation en faveur du livre de Raymond qui fut publiée sur la couverture de l’édition de poche :
« L’Empire transsexuel de Janice Raymond est un ouvrage stimulant, rigoureux et novateur. Raymond examine minutieusement les liens entre la science, la moralité et le genre. Elle pose des questions difficiles et ses réponses possèdent une qualité intellectuelle et une intégrité éthique si rares, si importantes, que le lectorat ne peut qu’être amené à réfléchir, à entrer dans un dialogue critique avec le livre1. »
Dans L’Empire transsexuel, Janice Raymond note très justement que :
« fondamentalement, une société qui assigne un rôle stéréotypé à chacun des deux sexes ne peut qu’engendrer le transsexualisme [et/ou le transgenrisme]. Bien entendu, cette explication ne figure pas dans la littérature médicale et psychologique qui prétend établir l’étiologie du transsexualisme. Cette littérature ne remet nullement le stéréotype en cause […]. Toutefois, tant que ces spéculations sur les causes de transsexualisme persistent à évaluer l’adaptation ou l’inadaptation des transsexuels en fonction de normes masculines ou féminines, elles sont à côté de la vérité. À mon avis, la société patriarcale et ses définitions de la masculinité et de la féminité constituent la cause première de l’existence du transsexualisme. En désirant les organes et le corps spécifiques au sexe opposé, le transsexuel ne cherche simplement qu’à incarner l’“essence” du rôle qu’il convoite.
Au sein d’une telle société, le transsexuel ne fait qu’échanger un stéréotype contre un autre, et renforce ainsi les maillons qui maintiennent la société sexiste, ce qui exerce une influence fondamentale sur les aspects du traitement du transsexualisme. En effet, dans une telle société, il est désormais parfaitement logique d’adapter le corps du transsexuel [ou du transgenre] à son esprit si son esprit ne peut s’adapter à son corps. »
En juin 1979, le psychiatre Thomas Szasz rédige une chronique élogieuse du livre de Raymond dans une colonne du New York Times : « Le développement et la documentation de cette thèse par Raymond sont sans faille. Son livre est une réalisation importante2. »
Szasz remarque :
« Étant donné que le “transsexualisme” implique et est en fait pratiquement synonyme d’importantes modifications chirurgicales du corps humain “normal”, on peut se demander ce qui arriverait, par exemple, à un homme qui irait voir un chirurgien orthopédique, lui dirait qu’il se sent comme un droitier piégé dans un corps ambidextre et lui demanderait de lui couper son bras gauche parfaitement sain ? Que se passerait-il pour un homme qui irait voir un urologue, lui dirait qu’il se sent comme un chrétien prisonnier d’un corps juif et lui demanderait de recouvrir le gland de son pénis d’un prépuce (une telle opération est peut-être évoquée dans 1 Corinthiens 7:17–18.)
[…] Si un tel désir peut être qualifié de […] “transsexuel”, alors la personne âgée qui désire être jeune est “transchronologique”, la personne pauvre qui veut être riche est “transéconomique”, et ainsi de suite. Ces affirmations hypothétiques et les demandes de “thérapie” qui en découlent (ainsi que les réponses cognitives et médicales que nous leur apportons) constituent, à mon avis, le contexte dans lequel nos croyances et pratiques contemporaines concernant le “transsexualisme” et la “thérapie” transsexuelle doivent être envisagées3. »
En France, la sortie de L’Empire transsexuel, en 1981, est saluée par une brève chronique rédigée par la féministe belge Françoise Collin, fondatrice, en 1973, de la revue féministe francophone Les Cahiers du GRIF (« Groupe de recherche et d’information féministes »). Collin écrit :
« L’analyse de Janice Raymond projette un éclairage original et essentiel sur “l’empire transsexuel”. Sa thèse va même à l’encontre de l’idée assez habituelle selon laquelle le transsexualisme marquerait une sorte de passage entre les sexes, soulignant leur relative indifférenciation.
Janice Raymond montre que, bien au contraire, le transsexualisme, qui est à 90% l’adoption du sexe féminin par les hommes, est pour ceux-ci une manière supplémentaire de s’approprier la féminité. Comme si vouloir être une femme était la forme limite de vouloir avoir une ou des femmes, et en quelque sorte prendre leur place, se substituer à elles. En outre, la féminité que le transsexualisme contribue à consolider est la féminité traditionnelle, celle que les hommes ont culturellement fabriquée et définie en termes d’ailleurs schématiques. La science médicale intervient ici par le biais des opérations pour renforcer les stéréotypes.
Mais ce ne sont là que quelques idées-force du livre qui repose sur une très vaste information et fait apparaître de manière subtile les divers plans qui interfèrent dans la définition du sexe. On trouve ici un regard féministe de plus en plus développé4. »
Deux ans avant la parution de L’Empire transsexuel aux États-Unis, en 1977, dans la revue féministe Chrysalis, Janice Raymond avait publié un texte intitulé « Le transsexualisme ou l’ultime hommage au pouvoir du rôle sexuel5 », dans lequel elle esquissait à grands traits l’essentiel de son livre à paraître. L’analyse de Raymond était presciente à plus d’un égard. Elle remarquait par exemple :
« Il est important de noter, cependant, que la “convoitise de l’utérus” (womb envy) et “le maternage masculin” (male mothering), appelez-les comme vous voulez, sont des réalités politiques et pas seulement des concepts psychanalytiques. Ainsi, en tant que réalité politique, le transsexualisme […] tend lui aussi à arracher aux femmes les pouvoirs inhérents à la biologie féminine. Dans un sens très réel, le transsexuel mâle-vers-femelle-fabriquée ne veut pas seulement des capacités biologiques féminines, il veut devenir une femme biologique. […] Le transsexualisme est donc l’aboutissement ultime et, pourrait-on même dire, la conclusion logique de la possession des femmes par les hommes dans une société patriarcale6. »
Ce qui se manifeste aujourd’hui, entre autres choses, par un nombre croissant d’hommes (d’êtres humains mâles adultes) qui se disent femmes (femmes trans), qui prennent des hormones de synthèse et exigent de pouvoir « allaiter » leur bébé. Grâce à l’aide de diverses organisations médicales, certains le font réellement (pour qu’ils puissent produire du « lait » dont la qualité est, pour le dire avec euphémisme, douteuse, différentes substances leur sont prescrites, dont certaines sont notoirement néfastes pour la santé, et donc pour celle du bébé7).
Janice Raymond formulait aussi cet avertissement :
« Nous devons être très attentives aux formes plus subtiles de contrôle et de modification du comportement qui se mettent en place. Il n’est pas inconcevable que les cliniques d’identité de genre, au nom de la thérapie, bien sûr, deviennent des centres potentiels de contrôle du rôle sexuel pour les non-transsexuels — par exemple pour les enfants dont les parents ont des idées bien arrêtées sur le type d’enfants masculins ou féminins qu’ils veulent8 […]. »
C’est chose faite. Désormais, au nom d’une « non-conformité de genre », ou d’une « incongruence » entre leur « genre vécu » et leur « sexe assigné » à la naissance, on propose à des enfants parfaitement sains de se médicaliser, de suivre un traitement à base de bloqueurs de puberté puis d’hormones de synthèse de l’autre sexe, et de chirurgies dès la majorité (voire avant, dès 16 ans parfois, en France, pour les mammectomies). En effet, dans le système de croyances transidentitaire, on considère que chacun des deux types de corps sexués est censé aller de pair avec un type d’« identité de genre ». La « transidentité » correspond au « fait d’avoir une identité de genre qui n’est pas en adéquation avec le sexe assigné à la naissance » (Larousse). On parle aussi d’« incongruence de genre », définie comme « une incongruence marquée et persistante entre le genre vécu par un individu et le sexe qui lui a été assigné » (ICD-11). Autrement dit, dans l’univers trans, le sexe du corps est censé déterminer un type de personnalité (l’univers trans rejoint en cela l’univers conservateur). Une enfant de sexe féminin qui présente des comportements, des préférences ou des goûts culturellement considérés comme masculins peut être jugée « non-conforme de genre ». Et afin de remédier à son « incongruence de genre », on peut lui proposer de conformer son corps sexué à son esprit (considéré comme appartenant à l’autre sexe, en quelque sorte) au moyen de traitements médico-chirurgicaux.
Reprenons. En octobre 1978, quelques mois avant la parution du livre de Janice Raymond, Marcia Yudkin, une autre féministe, publie un texte intitulé « Le transsexualisme et les femmes : une perspective critique9 » dans la principale revue féministe anglophone, Feminist Studies. Elle y défend à peu près la même perspective que Janice Raymond :
« Ce que j’essaie de montrer, c’est que la “condition” du transsexualisme ne peut exister que s’il existe une conception commune renvoyant à l’idée d’“agir comme une fille” ou d’“agir comme une femme”, accepté sans esprit critique par le sujet et par la société qui l’entoure. Le phénomène ne peut être détecté et décrit que s’il existe une identité sociale “fille/femme” maintenue distincte de l’identité sociale “garçon/homme” et jugée incompatible avec une identité biologique mâle. Malheureusement, les autorités sont aveugles à cette dimension du problème, que j’appellerais avec Janice Raymond la dimension politique du problème. »
La conclusion de son article, formulée sous forme de question, appelait à une abolition des normes sociales restrictives qui constituent un des facteurs causaux du transsexualisme (ou du transgenrisme) :
« Existe-t-il une alternative à notre système actuel qui consiste à enregistrer un sexe biologique à la naissance, à socialiser la personne dans le rôle censé aller de pair avec ce sexe, à attendre d’elle qu’elle développe une identité de genre congruente et, comme nous le faisons actuellement, à proposer la mesure d’urgence que constitue la chirurgie transsexuelle lorsque le processus échoue désespérément ? »
Quelques mois auparavant, en février 1977, la féministe et journaliste Gloria Steinem, aujourd’hui mondialement célèbre, publiait, dans son magazine Ms., un article intitulé « Si la chaussure ne convient pas, changez le pied10 », dans lequel elle dénonçait la « direction antiféministe » du phénomène transsexuel :
« Quelle que soit la diversité de leurs origines et de leurs personnalités, qu’ils aient fait le voyage homme-vers-femme ou vice versa, un thème commun sous-tendait les explications de leur choix radical : la conviction écrasante et permanente que leur propre personnalité avait été emprisonnée et inhibée par l’identité sexuelle de leur naissance. Leur désir de liberté était si grand qu’ils allaient jusqu’à subir des mutilations chirurgicales pour obtenir des rôles sociaux correspondant à leur personnalité.
Tout cela avait renforcé ma conviction selon laquelle le transsexualisme représente peut-être le témoignage le plus fervent et le plus radical du pouvoir des rôles sexuels dans ce système politique qu’est le patriarcat. Après tout, quel plus grand hommage pourrait-on rendre à l’idée que les différences génitales doivent dicter nos vies et nos avenirs ? Si notre humanité était réellement un terrain commun et partagé, les rôles sexuels seraient-ils des prisons telles que certaines personnes se sentent obligées de se mutiler pour libérer leur personnalité ? »
Comme elle le relevait encore, « pour les individus socialement contraints de mettre leur vie en danger, voire de risquer de devenir des objets d’exposition bizarres pour l’autojustification d’une culture obsédée par le genre », les traitements médicaux ne sont « qu’un moyen de traiter chirurgicalement la non-conformité » aux rôles et aux stéréotypes que la société patriarcale assigne à chaque sexe. En fin de compte, ajoutait-elle ensuite, « les féministes devraient peut-être considérer l’essor et la célébration [du phénomène transsexuel] comme une partie du retour de bâton que subit la révolution féministe ».
Dans un livre publié en 1980, intitulé The Double Standard (« Le double standard », jamais traduit), Margrit Eichler (1942–2021), une sociologue et féministe d’origine allemande, qui occupera par la suite d’importantes positions universitaires au Canada11, remarque :
« que les patients transsexuels ont une image trop étroite de ce qui constitue un comportement “conforme à leur sexe” (sex appropriate), ce qui se reflète dans les attitudes des cliniciens traitants (psychologues, thérapeutes et médecins) et de la famille d’origine du patient. Si les notions de masculinité et de féminité étaient moins rigides, les opérations de changement de sexe ne seraient pas nécessaires. Plutôt que d’identifier comme malade une personne ayant un “problème d’identité de genre”, nous pourrions définir comme malade une société qui insiste pour élever les garçons et les filles d’une manière clairement différenciée. Ce qui devrait être traité comme une pathologie sociale est traité comme normal. Et lorsque [ce problème d’origine sociale] se manifeste chez des individus, on le traite comme une pathologie individuelle à “corriger”, au lieu de tenter de combattre le problème à sa racine : la définition oppressive […] de rôles appropriés pour chaque sexe12 […]. »
Eichler relève que dans les récits des transsexuels (on dirait aujourd’hui des personnes trans), l’on est frappée par une « distinction très rigide et très nette qui est faite entre les attributs dits féminins et masculins et, plus significativement, par leur perception selon laquelle il est inapproprié d’adopter des comportements qui sont considérés comme convenant à l’autre sexe ».
En conclusion :
« Le patient et le médecin renforcent ainsi conjointement l’idée que le comportement et les traits de caractère sont légitimement déterminés par le corps, en dépit des preuves qui suggèrent que notre identité sexuelle est imposée à une structure de caractère largement ou entièrement indifférenciée sur le plan sexuel et que, par conséquent, l’identité sexuelle est un produit social plutôt que biologique.
La justification de la chirurgie de réassignation sexuelle semble reposer sur une logique circulaire qui va comme suit. Le sexe détermine le caractère. C’est naturel. Par conséquent, les cas où le sexe biologique n’aboutit pas aux identités sexuelles attendues sont contre nature. Par conséquent, nous devons changer le sexe biologique (c’est-à-dire la nature) afin de maintenir le principe selon lequel le sexe biologique détermine le caractère d’une personne.
Les transsexuels sont des personnes qui souffrent si profondément de la structure sexuelle qu’elles sont prêtes à endurer de terribles douleurs et une lourde solitude afin d’alléger leur peine. Ces personnes pourraient être les plus déterminées à faire pression en faveur d’une modification de la structure sexuelle, parce que leur aversion pour les rôles “sexuellement appropriés” est apparemment insurmontable. En les déclarant, par décret chirurgical, membres de l’autre sexe, ce potentiel de changement est détourné et devient aussi conservateur qu’il aurait pu être révolutionnaire. »
Jusqu’ici, je n’ai cité que des femmes défendant une critique féministe du phénomène trans (qui, à l’époque, correspondait au transsexualisme). Mais à l’instar de Thomas Szasz, mentionné plus haut pour sa recension parue en 1979 dans le New York Times du livre L’Empire transsexuel de Janice Raymond, des hommes aussi le dénonçaient. En février 1982, dans une revue sociologique, deux socialistes, Dwight B. Billings et Thomas Urban, respectivement de l’université du Kentucky et de Yale, publient une critique anticapitaliste et antisexiste (proféministe) du transsexualisme sous la forme d’un essai intitulé « La construction sociomédicale du transsexualisme : Une interprétation et une critique13 ». Les deux auteurs y démontrent « que le transsexualisme est une réalité socialement construite qui n’existe que dans et par la pratique médicale. En outre, nous soutenons que la chirurgie de changement de sexe reflète et étend les logiques de réification et de marchandisation du capitalisme tardif, tout en réaffirmant simultanément les rôles traditionnels de l’homme et de la femme. » Ils affirment qu’en « offrant un rite de passage entre les identités sexuelles, la chirurgie de changement de sexe réaffirme implicitement les rôles masculins et féminins traditionnels. Malgré le témoignage muet de patients confus et ambivalents sur l’éventail des expériences de genre, les individus qui ne peuvent ou ne veulent pas se conformer aux rôles sexuels qui leur ont été attribués à la naissance sont tailladés sur la table d’opération afin d’être accueillis dans le rôle du sexe opposé. » C’est pourquoi, concluent-ils, « en substituant la terminologie médicale au discours politique, la profession médicale a indirectement dompté et transformé une grève sauvage potentielle à l’usine du genre ».
En 1984, la philosophe et féministe radicale lesbienne états-unienne Mary Daly, qui enseigna longtemps à l’université de Boston, publie un livre intitulé Pure Lust : Elemental Feminist Philosophy (« Pure convoitise : philosophie féministe élémentaire », non traduit), dans lequel elle défend la perspective de Janice Raymond. Daly raille la propagande absurde et sexiste qui cherche à nous faire croire « qu’une “vraie femme” » pourrait se cacher « derrière les apparences d’un corps mâle14 ».
En 1991, dans une compilation d’essais écrits par de multiples auteur∙es, intitulée Body Guards : The Cultural Politics of Gender Ambiguity, l’anthropologue Judith Shapiro discute de la « capacité des systèmes traditionnels de genre à absorber, voire à exiger, des formes de croisement de genre telles que le transsexualisme15 », en examinant brièvement, en plus du transsexualisme euro-américain, le cas des berdaches amérindiens et des xaniths du sultanat d’Oman. Shapiro remarque que :
« De nombreux transsexuels sont en fait “plus royalistes que le roi” en matière de genre. Le sociologue Thomas Kando, qui a travaillé avec un groupe de transsexuels ayant subi une opération de changement de sexe à l’université du Minnesota en 1968–1969, a rapporté des résultats de tests et de questionnaires montrant que les transsexuels étaient plus conservateurs que les hommes et les femmes (ou, pour être précis, que les hommes et les femmes non transsexuels) en ce qui concerne les normes relatives aux rôles sexuels, les femmes étant les moins conservatrices. Les transsexuels hommes-vers-femmes ont obtenu des résultats plus élevés en matière de féminité que les femmes. La plupart des transsexuels de l’échantillon de Kando occupaient des emplois féminins stéréotypés et semblaient, en moyenne, mieux adaptés au rôle féminin que les femmes. Comme l’a noté Kando, “[les transsexuels] sont, dans nombre de leurs activités quotidiennes, de leurs attitudes, de leurs habitudes et de leurs accents, ce que notre culture attend des femmes, et plus encore” (Kando 1973). »
Ainsi : « Le conservatisme des transsexuels est encouragé et renforcé par le corps médical dont ils dépendent pour leur thérapie. Le conservatisme des médecins est à son tour renforcé par leur besoin de se sentir justifiés d’entreprendre une procédure aussi importante qu’une opération de changement de sexe. »
Shapiro cite un autre commentaire de Thomas Kando n’ayant rien perdu de sa justesse :
« Contrairement à divers groupes libérés, les transsexuels sont réactionnaires, se rapprochant de la culture traditionnelle au lieu de s’en éloigner. Ils sont les Oncle Tom de la révolution sexuelle. Avec ces individus, la dialectique du changement social accomplit un cycle complet et la position de la plus grande déviance devient celle de la plus grande conformité. (Kando 1973 : 145) »
C’est pourquoi, observe Shapiro :
« Bien que l’analogie ne puisse être poussée trop loin, traiter les questions de genre par le biais de la chirurgie de changement de sexe revient un peu à se tourner vers les dermatologues pour résoudre le problème de la race. »
En novembre 1993, dans un article publié dans le numéro 10 de la revue féministe Off Our Backs (« Lâchez nous la grappe »), une féministe lesbienne, Beth Walsh-Bolstad, se demande :
« Pouvez-vous définir ce qu’est une femme ? Vous devrez peut-être y réfléchir un jour, car des hommes tentent d’accéder à la communauté lesbienne en prétendant qu’ils sont des femmes. Pour ma part, je refuse de répondre à cette question. Les hommes ne sont pas les bienvenus dans l’espace lesbien. Un point c’est tout. On a toujours attendu des femmes qu’elles acceptent une définition masculine de la femme. Et maintenant, on nous dit que nous devons faire un pas de plus et croire que les hommes peuvent devenir des femmes et des lesbiennes, qu’une femme peut être construite chirurgicalement. Sommes-nous à l’âge de Frankenstein du genre ?
[…] Bien que notre société soit à blâmer pour le phénomène de la transsexualité en raison du manque total de flexibilité dans les rôles des femmes et des hommes, et des types d’expression rigidement contrôlés autorisés pour une femme ou un homme, cela ne signifie pas que la communauté lesbienne devrait être obligée de s’ouvrir aux hommes castrés ou à tous les hommes qui prétendent être des “femmes piégées dans des corps d’hommes”. Une femme n’est pas la somme de plusieurs morceaux, elle est une unité spirituelle et physique, entière et inimitable16. »
En janvier 1994, dans la même revue, un article de la féministe lesbienne Claudine O’Leary dénonce pareillement la volonté d’imposer des hommes (qui se disent femme) dans les espaces lesbiens17.
En 1995, Bernice L. Hausman, diplômée en littérature et en études féministes de l’université de Yale et de l’université de l’Iowa, publie un excellent livre intitulé Changing Sex : Transsexualism, Technology, and the Idea of Gender (« Changer de sexe : le transsexualisme, la technologie et l’idée de genre »), qui n’a malheureusement jamais été traduit. Elle y montre comment « l’évolution de la technologie et des pratiques médicales a joué un rôle central dans la mise en place des conditions nécessaires à l’émergence de la demande de changement de sexe, considérée comme l’indicateur le plus important de la subjectivité transsexuelle », et y expose « le biais hétérosexiste » qui sous-tend « les constructions médicales de l’intersexualité et du transsexualisme18 », en rejoignant sur ce point les thèses de Janice Raymond.
Dans un article intitulé « Le militantisme transgenre : une perspective de féministe lesbienne », publié en 1997 dans une revue lesbienne (Journal of Lesbian Studies), la féministe et politologue britannique Sheila Jeffreys, souscrivant aux thèses de Janice Raymond, écrit :
« Le transsexualisme, dans cette analyse, est profondément réactionnaire, une façon d’empêcher la perturbation et l’élimination des rôles de genre qui est à la base du projet féministe. Le transsexualisme s’oppose au féminisme en maintenant et en renforçant des notions fausses et socialement construites de la féminité et de la masculinité. La grande majorité des transsexuels adhèrent encore au stéréotype traditionnel de la femme et cherchent à devenir de “vraies” femmes féminines. Le conservatisme de leur conception de la féminité et de celle du corps médical ressort clairement de leurs biographies. […] Un pilote de course s’est rendu compte qu’il ne pouvait plus bien conduire une fois qu’il était devenu une “femme”. Un journaliste du Times a constaté qu’il n’accordait plus d’importance qu’aux petites choses de la vie et qu’il avait développé une intuition féminine. Ce qui dérange les féministes dans ce phénomène, c’est que les hommes construisent un fantasme conservateur de ce que les femmes devraient être. Ils inventent une essence de la féminité profondément insultante et restrictive19. »
Dans un livre initialement publié, en anglais, en 1999, et traduit en français en 2002 sous le titre La Femme entière, la féministe et universitaire australienne Germaine Greer, considérée comme une des principales voix du féminisme de la deuxième vague, affirme que « les femmes ne peuvent que compatir avec les transsexuels ». Cependant, continue-t-elle immédiatement :
« une féministe se doit d’ajouter que la guérison ne peut passer par une mutilation de l’individu en question, mais par un changement radical de son rôle sexuel. Tout au long de l’histoire, les femmes qui ne pouvaient assumer le rôle qui leur était prescrit ont été victimes de multiples interventions gynécologiques abominables et, comme les transsexuels, elles ont éprouvé de la reconnaissance à l’égard de leurs bourreaux. Les femmes peuvent difficilement fermer les yeux sur les mutilations sexuelles pratiquées sur les individus des deux sexes, même si les victimes affirment qu’elles sont en droit de les réclamer. La chirurgie est, en ce domaine, profondément conservatrice. En effet, elle renforce une division sexuelle tranchée en façonnant les individus pour qu’ils s’adaptent à ces rôles respectifs20. »
Comme vous pouvez le constater au travers de cette brève généalogie – loin d’être exhaustive – de la critique du phénomène trans, celle-ci provient, avant tout, du milieu féministe, notamment du féminisme radical, mais aussi du milieu socialiste. Ce n’est qu’après les années 2010 que l’extrême droite, 40 ans après les féministes, s’empare du sujet en en produisant une critique moisie, composée d’arguments raisonnables et d’idées rétrogrades et sexistes. Car si les militants d’extrême droite comprennent l’absurdité qu’il y a à vouloir redéfinir n’importe comment les termes « femme », « homme », « fille » et « garçon », par exemple en leur conférant des significations tautologiques (du type « une femme, c’est toute personne qui se dit femme »), ils tendent cependant à fonder leur opposition au phénomène trans sur une vision opposée à celle des féministes radicales. Tandis que ces dernières affirment que les femmes devraient être libres d’avoir les goûts, les préférences et les activités qu’elles souhaitent, qu’elles ne devraient pas avoir à se dire « homme trans » pour cesser de se conformer à la « féminité », les traditionnalistes d’extrême droite soutiennent, en gros, qu’une personne de sexe féminin devrait être féminine et une personne de sexe masculin masculine, et que les personnes qui désirent « changer de sexe » ou « transitionner » ne sont que des tarées. Tandis que les féministes radicales souhaitent l’abolition du « genre », au sens des stéréotypes, des attributs et des rôles sociaux assignés par la société patriarcale à chacun des deux sexes, les militants d’extrême droite prennent au contraire la défense du genre.
Tout ceci est à dire que lorsque des militants de gauche affirment que la critique du phénomène trans provient de l’extrême droite, ils mentent. Lorsque des militants de gauche affirment qu’il n’existe qu’un seul type de critique du phénomène trans, ils mentent. Lorsqu’ils assimilent la critique féministe du phénomène trans à une critique d’extrême droite, ils mentent. En effaçant ou en travestissant la critique du phénomène trans que portent les féministes, en allant jusqu’à l’assimiler pleinement à la critique de l’extrême droite, les militants transidentitaires ont réussi à convaincre la gauche d’embrasser une idéologie réactionnaire, misogyne, sexiste et qui s’en prend désormais à des enfants (à la différence de ce qu’il se passait dans les années 1980).
La situation présente
Il me semble important de noter que si un certain nombre de femmes féministes qui dénonçaient ouvertement le sexisme du phénomène trans dans les années 1980 et 1990 ont cessé de le faire, ce n’est pas – en tout cas pas vraiment – en raison d’un changement d’avis. Il y a environ deux ans, après avoir lu le très bon livre de Bernice Hausman susmentionné, j’ai voulu l’interviewer. J’ai réussi à trouver son contact et je lui ai proposé un entretien, qu’elle a accepté. Avant de se raviser. Par crainte, il me semble, des conséquences qu’impliquerait pour elle le fait de s’exprimer aujourd’hui, publiquement, sur le sujet. Les conditions sociales ont changé. Désormais, les femmes qui osent publiquement formuler une critique du phénomène trans sont harcelées, vilipendées, insultées, injuriées, calomniées, parfois physiquement agressées, et voient même leur emploi menacé (des militants transidentitaires n’hésitent pas à faire pression sur les employeurs pour qu’ils licencient leurs employées supposément « TERF » ; plusieurs femmes ont déjà perdu leur emploi de cette manière). Le terrorisme – il faut bien appeler un chat un chat – moral et économique qu’exercent les militants trans porte ses fruits21.
Heureusement, certaines continuent de dénoncer publiquement le sexisme, l’absurdité et la toxicité générale du phénomène trans. Comme Sheila Jeffreys, qui a publié deux ouvrages traitant (seulement en partie, pour le second) du sujet : Gender Hurts : A Feminist Analysis Of The Politics Of Transgenderism (soit « Les ravages du genre : Une analyse féministe de la politique du transgenrisme ») en 2014, et Penile Imperialism : The Male Sex Right and Women’s Subordination (soit « L’impérialisme pénien : le droit au sexe masculin et la subordination des femmes ») en 2022, dont j’ai traduit l’introduction. Et comme Janice Raymond, qui, en 2021, soit près de quarante ans après L’Empire transsexuel, a sorti un second ouvrage critique du phénomène trans, intitulé Doublethink : A Feminist Challenge to Transgenderism (« Doublepensée : une critique féministe du transgenrisme »), dont j’ai aussi traduit un extrait.
Entre-temps, d’autres femmes féministes se sont jointes à elles. Au Royaume-Uni, la philosophe écosocialiste britannique Jane Clare Jones a produit ce qui constitue peut-être la critique la plus méticuleuse, la mieux articulée et la plus pertinente du phénomène trans22. Jones constate par exemple que :
« Comme les approches conservatrices, l’idéologie trans accepte fondamentalement les équations mâle/homme = masculin et femelle/femme = féminin. Simplement, elle inverse le sens de la causalité. Tandis que le conservatisme pense que les hommes doivent être masculins et les femmes féminines, l’idéologie trans pense que les personnes masculines doivent être des hommes, que les personnes féminines doivent être des femmes et que les personnes qui sont à la fois l’un et l’autre, ce qui est le cas de la plupart des gens, ne sont ni des hommes ni des femmes et ne sont donc pas sexuées23. »
Ce qui, on en convient, est formidablement absurde. Au Royaume-Uni toujours, outre Jones, un certain nombre de féministes expriment publiquement leur opposition au mouvement trans, parmi lesquelles Karen Ingala Smith, qui dirige une organisation caritative luttant contre la violence domestique et sexuelle, basée à Londres (Royaume-Uni), Rosemary Clare Duffield (Rosie Duffield), une politicienne, membre du Labour Party jusqu’en septembre 2024, Kathleen Stock ou encore Julie Bindel.
En Suède, la féministe marxiste et journaliste Kajsa Ekis Ekman, connue pour son opposition à la prostitution et à la GPA24, a publié en 2020 un livre-enquête intitulé On the Meaning of Sex : Thoughts about the New Definition of Woman (« Sur le sens du sexe : Réflexions sur la nouvelle définition du mot femme ») dans laquelle elle propose une très bonne critique du phénomène trans. Ekman remarque par exemple qu’avec le transgenrisme :
« Les rôles de genre font leur retour sans que nous l’ayons remarqué ! C’est simplement que sexe et genre ont été intervertis. Le genre est désormais considéré comme réel tandis que le sexe se voit considéré comme une construction sociale. Le sexe est dit “assigné” à la naissance, c’est-à-dire qu’il est considéré comme une construction sociale que la société impose de force à l’enfant. L’identité de genre, en revanche, est dite innée. Il s’agit d’essentialisme du genre : le genre comme une essence indépendante du corps.
Le genre n’est pas du tout dissous, contrairement à ce que nous pensions au départ. En fait, c’est exactement le contraire. Le genre règne en maître, ayant vaincu le sexe, et il repose toujours sur les mêmes vieux stéréotypes. On assiste à une sorte de refonte idéologique. La théorie de l’identité de genre emprunte des termes fondamentaux au féminisme, mais leur attribue des significations opposées. L’expression “construction sociale” est conservée, faisant ainsi allégeance à la théorie féministe, ainsi que l’expression sexe biologique, qui désignait ce qui est fixe, immuable — mais ces deux expressions ont été permutées. Désormais, les rôles de genre constituent le vrai sexe. Être une femme n’est plus synonyme d’utérus, mais de rubans roses et de poupées. Être un homme n’est plus synonyme d’avoir un pénis mais de guerre et de machines. Et, ces rôles de genre, nous dit-on, sont innés25. »
En France, la féministe libertaire Vanina a récemment pris position sur le sujet en publiant un livre intitulé Les Leurres postmodernes contre la réalité sociale des femmes (Acratie, 2023), dans lequel elle critique le phénomène trans.
La même année, l’historienne féministe Marie-Jo Bonnet, cofondatrice du Front homosexuel d’action révolutionnaire (FHAR) et des Gouines rouges, et Nicole Athea, gynécologue endocrinologue, ancienne interne et ancienne cheffe des Hôpitaux de Paris, ont publié Quand les filles deviennent des garçons chez Odile Jacob. Elles y exposent le fait que ce sont désormais en majorité des filles qui demandent à « transitionner », et non des garçons, et montrent que cette demande s’explique notamment par un désir de fuir la condition déplorable des filles et des femmes dans la société contemporaine ainsi que par une homophobie intériorisée.
En 2023 toujours, Audrey A. et moi-même avons publié Né(e)s dans la mauvaise société : Notes pour une critique féministe et socialiste du phénomène trans.
Mais à la différence de ce qu’il se passe au Royaume-Uni, si, en France, des féministes et des militant∙es de gauche bénéficiant d’une faible notoriété expriment leur opposition au phénomène trans, aucune des féministes les plus renommées n’en a formulé la moindre critique. Au contraire, toutes semblent y adhérer et le défendre plus ou moins vigoureusement.
En Espagne, l’opposition féministe et socialiste au mouvement trans est possiblement encore plus forte qu’au Royaume-Uni. Un certain nombre de féministes socialistes s’opposent ouvertement aux revendications transidentitaires, parmi lesquelles Ángeles Álvarez, qui avait été l’une des forces motrices du Pacte d’État contre la violence sexiste lorsqu’elle était députée du PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol)26, l’autrice Laura Freixas, l’anthropologue Silvia Carrasco, professeure à l’université autonome de Barcelone, la féministe historique du parti socialiste espagnol et ex membre du conseil d’État espagnol Amelia Valcárcel, ou encore la psychologue juridique et médico-légal Laura Redondo.
La féministe marxiste et antifasciste Lidia Falcón, qui fut arrêtée, emprisonnée et torturée par la police franquiste dans les années 1970 et qui fonda, en 1979, le Parti féministe d’Espagne, dont elle est actuellement secrétaire-générale, considère elle aussi le déploiement des idées trans comme une « nouvelle stratégie du patriarcat visant à diviser le mouvement féministe, le ridiculiser et le rendre stérile27 ». Plus largement, et à l’instar de presque toutes les féministes qui dénoncent le phénomène trans, Falcón critique l’ensemble du mouvement et des idées « queer », qui se sont imposées dans toute une partie de la gauche, y compris dans les milieux féministes, et qui promeuvent des choses terriblement nuisibles pour les femmes – notamment pour les femmes pauvres – et pour la société dans son ensemble, comme la prostitution, la pornographie et la GPA.
Alicia Miyares Fernández, une autre féministe espagnole, professeure de philosophie, autrice du manifeste du Tren de la Libertad (« Train de la liberté »), une campagne de défense des droits sexuels et reproductifs des femmes qui a mobilisés des dizaines de milliers de personnes en 2014, en opposition à un projet de restriction de l’accès à l’avortement conçu fin 2013 par le gouvernement espagnol, alors dirigé par des conservateurs, Alicia Miyares, donc, remarque également que « l’agenda trans est radicalement contraire à l’agenda féministe28 ».
L’autrice hispano-marocaine Najat El Hachmi a elle aussi dénoncé le phénomène trans et ses exigences sémantiques absurdes, par exemple sa volonté d’imposer l’idée selon laquelle « une femme est toute personne qui se sent femme29 ». Dans un texte paru dans le quotidien espagnol El País le 19 mai 2023, Najat El Hachmi propose de « céder le genre » aux « hommes qui se prétendent femmes » :
« Je laisse volontiers aux hommes qui se prétendent femmes tout ce qu’ils associent à la féminité : le poison du maquillage et la torture des talons hauts, les vêtements étouffants, les soutiens-gorge qui s’enfoncent dans la chair, les strings qui déchirent la peau, la cire chaude et les poils arrachés à la racine, les aiguilles et le scalpel, les produits injectables de comblement et les extensions de cheveux, les prothèses et les articles rembourrés, les cheveux longs et les teintures, les fers à lisser, les sèche-cheveux et les recourbe-cils, les gestes délicats, les jambes croisées et les poses de créatures frivoles et superficielles, naïves et idiotes, les contorsions et les déhanchés, la faiblesse physique et le manque de compétences manuelles, le fait de ne pas savoir conduire ou se servir d’une perceuse. Je leur lègue la dépendance et l’hystérie, le manque de contrôle émotionnel ou la perfidie innée, l’incarnation du mal et la séduction trompeuse, le devoir de beauté et de discrétion, le bon caractère et le sourire de rigueur. Dentelle, tulle, paillettes, docilité et mansuétude servile : je leur remets tout cela volontiers.
Bien sûr, il faudrait aussi qu’ils fassent le ménage et la cuisine gratuitement, qu’ils changent les couches et préparent les repas des bébés, qu’ils mettent au monde des enfants les uns après les autres, qu’ils servent leur mari, qu’ils s’occupent des personnes âgées et des handicapés, qu’ils effectuent les tâches les plus ingrates pour des salaires de misère, qu’ils ne cotisent pas et se retrouvent avec une retraite de merde. Être mariée dès l’enfance, être enfermée à la maison à vie, être couverte de la tête aux pieds, être mutilée pour ne jamais avoir d’orgasme, être violée chaque nuit par un inconnu, partager son mari avec d’autres femmes, être engrossée puis se faire voler ses enfants, être pénétrée chaque jour par des dizaines d’inconnus, être exhibée dans des vidéos où l’on vous agresse, vous crache dessus et vous humilie. Travailler comme une esclave dans n’importe quelle maquiladora ou être la première victime de la guerre. Manger moins partout et être déshéritée par la loi. Être moins promue sur le plan académique et professionnel. Tout cela, voilà ce qu’est le “genre” qu’ils défendent aujourd’hui comme leur identité. Ce qui nous a été imposé depuis notre enfance pour faire de nous des sous-hommes, une catégorie privée du niveau de dignité que les hommes ont gardé pour eux, le dense maillage des attributs utilisés pour nous asservir. Si, désormais, ils souhaitent incarner la féminité qu’ils ont inventée, qu’ils le fassent, qu’ils gardent tout le “genre”. Nous le leur remettons de bon cœur pour pouvoir enfin nous consacrer à être des personnes30. »
Quelques semaines avant la parution de ce texte, le journal Le Monde, qui n’a de cesse de relayer la propagande transidentitaire, célébrait l’écriture « musicale, riche d’images poétiques, parcourue d’énigmes et de sagesses » de Najat El Hachmi dans une recension de son « magnifique roman » Mère de lait et de miel31.
En Espagne toujours, nombre de groupes, d’organisations ou de collectifs féministes ancrés à gauche, parmi lesquels la Federación de Mujeres Progresistas (la « Fédération des femmes progressistes »), la Alianza contra el Borrado de las Mujeres (« l’Alliance contre l’effacement des femmes »), Feministes de Catalunya (« Féministes de Catalogne »), Movimiento Feminista (« Mouvement féministe »), Feministas Socialistas (« Féministes socialistes »), s’opposent aux revendications et aux idées trans. Pour les femmes de la Federación de Mujeres Progresistas (la « Fédération des femmes progressistes ») : « Les politiques d’égalité des sexes n’auront plus de sens si la catégorie “femme” devient indépendante du sexe biologique et est redéfinie de manière à pouvoir inclure les hommes. […] Si “femme” devient le nom d’un groupe dépourvu de définition objective (ne pouvant être délimité en termes biologiques puisqu’il s’agirait d’une définition “excluante”), pouvant inclure des hommes sans autre condition que leur volonté, si “femme” devient un mot qui finalement ne signifie plus rien voire disparaît (remplacé par des euphémismes déshumanisant comme “personne enceinte”, “personne menstruée”, “personne à utérus”, “personne à vulve”, etc.), comment pouvons-nous unifier conceptuellement les différentes formes de discrimination que subissent les femmes ? Comment percevoir la continuité historique et géographique de ces expériences, leur dénominateur commun ? Comment pouvons-nous être un sujet politique32 ? »
Les femmes de la Alianza contra el Borrado de las Mujeres, fondée en 2019 par Ángeles Álvarez et d’autres féministes, militent contre la supplantation, dans la loi espagnole, du « sexe » par le concept de l’« identité de genre », qui a pour effet d’effacer les femmes. Elles soulignent :
« Le sexe est à la base de la discrimination et de la violence que subissent les femmes. Supprimer le sexe en tant que catégorie juridique et le remplacer par un “genre” autodéfini est un acte de misogynie. En supprimant le sexe en tant que catégorie juridique, toutes les politiques visant à lutter contre l’inégalité structurelle dont souffrent les femmes deviennent caduques. »
En effet :
« Le genre n’est pas une identité, il s’agit de l’ensemble des normes, des stéréotypes et des rôles imposés socialement aux personnes en fonction de leur sexe. Le genre est un instrument qui favorise et perpétue la situation de subordination dans laquelle nous, les femmes, nous trouvons. C’est pour- quoi le fait de le considérer comme une “identité” revient à l’essentialiser, ce qui réduit à néant les possibilités de lutter contre l’oppression qu’il constitue33. »
En Catalogne, le 15 juillet 2023, la branche barcelonaise de la CNT (la Confédération nationale du travail, une célèbre organisation anarcho-syndicaliste) s’est associée au groupe « Feministes de Catalunya » (« Féministes de Catalogne ») pour dénoncer les effets humains et sociaux délétères des revendications des militants trans lors d’une conférence. Les féministes catalanes y ont présenté les résultats de leur enquête sur l’évolution du nombre de personnes traitées par le service hospitalier catalan « d’identité de genre », entre 2012 et 2021. Le rapport qu’elles ont publié en novembre 2022 fait état d’une « augmentation exponentielle de plus de 7000% en dix ans », sachant que « les cas de 2021 représentant 25 % du nombre total de cas depuis 2012 ». Par ailleurs (quelques extraits traduits dudit rapport) :
- « De 2012 à 2021, l’âge moyen de consultation a baissé de 12 ans, passant de 35 à 23 ans.
- Les orientations vers le Servei Transit (service “d’identité de genre”) concernent de plus en plus de femmes et de mineurs, avec un profil d’âge différencié entre les femmes et les hommes qui révèle des situations très différentes :
- Parmi les enfants de 0 à 9 ans, les garçons prédominent (60,6% de garçons contre 39–4% de filles).
- Dans les groupes d’âge entre 10 et 25 ans, les filles prédominent (65,1% de filles contre 34–9% de garçons).
- Chez les adultes de plus de 25 ans, les hommes prédominent (60,6% d’hommes contre 39,4% de femmes). Les hommes représentent plus de 70 % des cas chez les plus de 30 ans.
- Il y a eu un changement rapide dans le schéma démographique des orientations vers la dysphorie de genre : d’hommes à femmes et d’adultes à mineur·es. La plupart des cas d’enfants mineurs sont des filles et la plupart des cas d’adultes sont des hommes.
- L’augmentation est alarmante chez les préadolescentes et les adolescentes : environ 70 % des cas dans les groupes d’âge 10–14 ans et 15–18 ans sont des filles. Bien que l’augmentation soit également alarmante dans le cas des garçons, entre 2015 et 2021, le nombre annuel d’orientations vers le Servei Transit de filles âgées de 10 à 14 ans a augmenté de 5700%. Cette augmentation est bien plus importante que les 4400% qui ont déclenché la première alarme au Royaume-Uni en 2018.
- Le pourcentage de cas où le sexe de la personne n’est pas enregistré augmente de manière tout aussi alarmante, atteignant plus de 10% dans ces mêmes groupes d’âge. Les tendances observées et la triangulation avec des données provenant d’autres sources partielles permettent de déduire que les cas pour lesquels le sexe n’est pas enregistré sont principalement des filles.
- La plupart des cas se voient prescrire une thérapie hormonale quel que soit l’âge. Malgré plusieurs demandes adressées au ministère de la Santé, les données ventilées par traitement, âge et sexe n’ont jamais été fournies. Cependant, dans un rapport de 2016, Servei Transit a reconnu que dans 87% des cas, la prescription d’hormones se fait lors de la première visite, ce qui est confirmé par d’autres sources médicales.
- En outre, nous avons des raisons de croire que nos estimations sont plutôt conservatrices : l’impact réel du modèle affirmatif pourrait être bien pire. Par exemple, nous n’avons pas eu accès à des données sur les prestataires de soins de santé primaires ou sur les pédiatres qui prescrivent de plus en plus de bloqueurs de puberté et d’hormones dans les services de soins de santé primaires, et nous n’avons pas été en mesure de les inclure. »
Enfin, les féministes catalanes notent :
« De plus en plus d’enfants rejettent leur corps sexué. Plus particulièrement, de plus en plus d’adolescentes ne veulent pas devenir des femmes. Nous devons déterminer les raisons de ce phénomène, même si la “loi trans” récemment adoptée interdit de les rechercher. L’essor de la “dysphorie de genre” est certainement lié à une réalité sociale de plus en plus hostile aux filles, qui sont la cible d’une violence sexuelle croissante, cependant que leurs pairs masculins la nient de plus en plus.
Loin de résoudre les causes de leur mal-être, la “thérapie affirmative” détruit irréversiblement leur santé sans bénéfice avéré, et les condamnent à une dépendance médicale à vie, pour le seul bénéfice de l’industrie pharmaceutique. Il est essentiel que des enquêtes indépendantes soient effectuées sur les unités d’identité de genre et que le modèle affirmatif soit abandonné. Il ne s’agit pas d’un crime de haine, mais plutôt d’une obligation scientifique, politique et sociale34. »
Au Mexique, l’anthropologue, chercheuse et militante féministe Marcela Lagarde, qui est une des figures les plus importantes du féminisme latino-américain, qui est connue pour avoir conçu le terme espagnol « feminicidio » (« féminicide »), désormais utilisé dans la législation de différents pays pour qualifier les meurtres commis contre des femmes parce qu’elles sont des femmes, qui a joué un rôle moteur au Mexique dans l’élaboration de la loi générale pour l’accès des femmes à une vie sans violence (2007) et a été membre de la commission du Congrès mexicain chargée de suivre les enquêtes relatives aux féminicides, et qui a joué un rôle décisif dans le premier arrêt de la Cour interaméricaine des droits humains tenant compte des sexospécificités, rendu contre le gouvernement mexicain pour le meurtre de trois femmes à Ciudad Juárez (nord du Mexique), Marcela Lagarde, donc, reproche — à raison — au mouvement trans de vouloir « éliminer les femmes en tant que sujet du féminisme35 ». La première femme avocate à avoir défendu les droits reproductifs et sexuels des femmes devant un tribunal mexicain, Teresa Columba Ulloa Ziaurriz, qui est aussi directrice de la Coalición Regional contra el Tráfico de Mujeres y Niñas en América Latina y el Caribe (la « Coalition régionale contre la traite des femmes et des filles en Amérique latine et dans les Caraïbes »), affirme également, dans un texte intitulé « La dictature du transactivisme », que « les discours sur l’identité de genre sont des chevaux de Troie que le patriarcat a inventés et qu’il utilise pour tenter d’effacer le sujet politique du féminisme, à savoir les femmes36 ».
***
Arrêtons ici ce tour d’horizon.
Est-il raisonnable de s’imaginer que toutes les femmes mentionnées dans ce texte sont d’affreuses fanatiques d’extrême droite, des Zemmour en puissance, voire d’horribles nazies ? Il s’agit pourtant de ce que soutiennent, parfois littéralement, les militants trans et un certain nombre de militants de gauche. Mais comme vous l’avez peut-être saisi, il ne s’agit-là que d’une des nombreuses inversions de réalité qui parsèment leur rhétorique. En réalité, dans l’histoire, ceux qui mentent à tour de bras, machinalement, façon Donald Trump, et se comportent d’une manière autoritaire et violente qui n’est pas sans rappeler les méthodes de l’extrême droite, ce sont plutôt les militants trans et leurs affidés37.
En parcourant les textes écrits, au cours de plus de 40 années, par toutes les femmes féministes mentionnées dans cet article, j’ai aussi été frappé par une chose. Toutes se sont efforcées d’exprimer leurs griefs, leurs objections, en faisant preuve de courtoisie, de respect, d’empathie, vis-à-vis des personnes dont elles étaient parfois amenées à critiquer les choix ou les propos. Pas d’injure, pas d’insulte, pas de calomnie, pas de diffamation. Leurs arguments étaient et sont toujours clairement articulés et cohérents. En revanche, on ne compte plus le nombre de publications, d’articles, de posts et autres dans lesquels ces femmes sont traitées de tous les noms, injuriées et même menacées de mort par des militants trans. Certains sont même allés jusqu’à créer un jeu vidéo dont l’objectif consiste à tuer des TERF (Trans Exclusionary Radical Feminists, une manière injurieuse de désigner les femmes critiques du phénomène trans). Lors d’une manifestation, en 2022, en Allemagne, un groupe de jeunes affiliés à la gauche ont défilé avec une banderole où était écrit « Les TERF peuvent sucer mon énorme bite de trans ». On trouve très facilement en vente sur internet des t‑shirts et des sweat-shirts portant l’inscription « Kill the TERF » (« Tuez les TERF »).
Mais tout le monde sait bien que, faute de pouvoir formuler un argument rationnel, l’on s’en remet à la violence. Comme l’avait noté Soljenitsyne, le mensonge trouve « son seul soutien dans la violence38 ». Quiconque choisit le mensonge comme règle doit inexorablement choisir la violence comme moyen.
Nicolas Casaux
- Propos de Dworkin publié en couverture de l’édition de poche du livre The Transsexual Empire de Janice Raymond, également cité par Raymond dans son livre Doublethink : A Feminist Challenge to Transgenderism (« Doublepensée : une critique féministe du transgenrisme »), Spinifex, 2021. ↩︎
- Thomas Szasz, « Male and Female Created He Them », The New York Times, 10 juin 1979. ↩︎
- Ibid. ↩︎
- Les Bulletins du GRIF, n°5, 1981. Université des femmes. ↩︎
- Janice Raymond, « Transsexualism : The Ultimate Homage to Sex-Role Power », Chrysalis n°3, 1977. ↩︎
- Ibid. ↩︎
- Cf. le chapitre 23 de notre livre Né(e)s dans la mauvaise société — Notes pour une critique féministe et socialiste du phénomène trans (Le Partage, 2023) ; et Talia Nava, « The Ugly Truth of Male Breastfeeding », The Paradox Institute (www.theparadoxinstitute.com), 8 juillet 2023. ↩︎
- Janice Raymond, « Transsexualism : The Ultimate Homage to Sex-Role Power », Chrysalis n°3, 1977. ↩︎
- Marcia Yudkin, « Transsexualism and Women : A Critical Perspective », Feminist Studies, Vol. 4, No. 3 (octobre 1978), p. 97–106. ↩︎
- Gloria Steinem, « If the Shoe Doesn’t Fit, Change the Foot », Ms. Magazine, Février 1977. ↩︎
- Elle fut, entre autres, la première directrice de l’Institut d’études sur les femmes et le genre de l’OISE (Ontario Institute for Studies in Education, soit l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario), ainsi que présidente de l’Institut canadien de recherche sur les femmes et présidente de la Société canadienne de sociologie et d’anthropologie. ↩︎
- Margrit Eichler, The Double Standard, Croom Helm, 1980. ↩︎
- Dwight B. Billings and Thomas Urban, « The Socio-Medical Construction of Transsexualism : An Interpretation and Critique », Social Problems, Vol. 29, No. 3 (février 1982), p. 266–282. ↩︎
- Mary Daly, Pure Lust : Elemental Feminist Philosophy, Beacon Press, 1984. ↩︎
- Judith Shapiro, « Transsexualism : Reflections on the Persistence of Gender and the Mutability of Sex », in Julia Epstein, Kristina Straub, Body Guards : The Cultural Politics of Gender Ambiguity, Routledge, 1991. ↩︎
- Beth Walsh-Bolstad, « The New, Improved (Surgically Constructed) Woman/ Lesbian ? », Off Our Backs, Vol. 23, No. 10 (novembre 1993), p. 14, 23. ↩︎
- Claudine O’Leary, « Queer politics », Off Our Backs, Vol. 24, No. 1 (janvier 1994), p. 8, 23. ↩︎
- Bernice L. Hausman, Changing Sex : Transsexualism, Technology, and the Idea of Gender, Duke University Press, 1995. ↩︎
- Sheila Jeffreys, « Transgender Activism : A Lesbian Feminist Perspective », Journal of Lesbian Studies, 1(3–4), 1997, p. 55–74. ↩︎
- Germaine Greer, La Femme entière, Plon, 2002. ↩︎
- L’histoire de Kathleen Stock, une professeure d’université au Royaume-Uni, qui a subi un terrible harcèlement de la part des militants trans et a fini contrainte de démissionner, est éloquente et représentative. ↩︎
- Une compilation d’essais de Jane Clare Jones va bientôt sortir aux éditions La Trêve. Il est d’ores et déjà possible de précommander une compilation d’essais de Jones : https://fr.ulule.com/lancement-la-treve/ ↩︎
- Extrait de la compilation à paraître susmentionnée. ↩︎
- Notamment en raison de son ouvrage paru en français sous le titre L’Être et la marchandise. Prostitution, maternité de substitution et dissociation de soi (M éditeur, mars 2013). ↩︎
- Kajsa Ekis Ekman, On the Meaning of Sex : Thoughts about the New Definition of Woman, Spinifex, 2020. ↩︎
- Une interview d’Ángeles Álvarez portant sur le sujet trans a été traduite et publiée sur le site www.partage-le.com sous le titre « Ángeles Álvarez : “Comment évaluer le sexisme si nous éliminons le sexe comme catégorie vérifiable ?” », https://www.partage-le.com/2022/11/16/angeles-alvarez-comment-evaluer-le-sexisme-si-nous-eliminons-le-sexe-comme-categorie-verifiable/ ↩︎
- Lidia Falcón, « La inaceptable Ley Trans », Público(.es), 16 décembre 2019. ↩︎
- G. Sánchez, « Alicia Miyares : “Detrás de muchos menores que dicen ser trans laten realidades como el bullying o el autismo” », Levante, 29 novembre 2022. ↩︎
- Najat El Hachmi, « El fraude es la ley », El País, 15 mars 2024. ↩︎
- Najat El Hachmi, El País, 19 mai 2023. ↩︎
- Kidi Bebey, « “Mère de lait et de miel”, de Najat El Hachimi, une ode de celle qui est partie à celles qui sont restées », Le Monde Afrique, 5 février 2023. Vite, chers journalistes du Monde, supprimez-donc cette recension élogieuse d’un livre d’une abominable « transphobe » ! ↩︎
- « Espagne : Argumentation de la Fédération des femmes progressistes contre la “loi trans” », traduction d’un texte initialement paru le 19 septembre 2022 sur le site du journal numérique espagnol Republica, écrit par la Federación de Mujeres Progresistas : https://www.partage-le.com/2022/10/18/ espagne-argumentation-de-la-federation-des-femmes-progressistes- contre-la-loi-trans/ ↩︎
- contraelborradodelasmujeres.org ↩︎
- Feministes de Catalunya, « D’hommes adultes à filles adolescentes. Évolutions, tendances et questionnements sur les personnes ayant recours au Servei Trànsit en Catalogne, 2012–2021 », feministes.cat, novembre 2022. ↩︎
- Nuria Coronado Sopeña, « Marcela Lagarde : “Tenemos que decir no al borrado de mujeres diciendo sí a su existencia legal y protegida” », Público(.es), 21 juillet 2020. ↩︎
- Teresa C. Ulloa Ziáurriz, « La dictadura del transactivismo », TribunaFeminista, 15 février 2021. ↩︎
- Pour bien d’autres illustrations de ce point, cf. Né(e)s dans la mauvaise société — Notes pour une critique féministe et socialiste du phénomène trans (Le Partage, 2023). ↩︎
- Alexandre Soljenitsyne, « Le Cri », discours écrit à l’occasion de son obtention du prix Nobel de littérature, en 1970. ↩︎
Source: Lire l'article complet de Le Partage