« J’ai alors découvert un micro désastre. D’une rive à l’autre, du barrage jusqu’à l’égout, l’eau était pleine de morceaux de savons. En regardant dans la mare, mon cœur s’est effondré.
Flottant la tête en bas, leurs pattes orange mortellement détendues, se trouvaient une mère colvert et tous ses canetons. Le choc d’un tel carnage m’emplit de tristesse, puis de rage. En pataugeant dans la bouillie, je vis la patte d’un petit caneton donner un faible coup. Je le pris dans mes bras, ôtai les résidus de savon de son corps duveteux, essayai d’ouvrir son petit bec et de souffler dans ses poumons. Son petit corps se relâcha définitivement dans ma main tandis que la dernière étincelle de vie s’éteignait. Tout devint flou. Des larmes de chagrin et de colère coulaient sur mes joues.
“Salopards cupides. Bande de salopards ignorants et cupides !”, ai-je lancé en serrant les dents. »
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« Pour la première fois de ma vie, je commençais à m’éloigner de la légion des citoyens respectueux de la loi pour entrer dans le royaume de celles et ceux qui ressentent le besoin instinctif de suivre un autre ensemble de lois, peut-être supérieures aux lois écrites. »
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« Alors qu’ai-je fait ? Essentiellement, j’ai triché ou joué avec la loi. Pas une fois, mais de très nombreuses fois, délibérément et avec préméditation. […]
Qu’ai-je fait à la loi ? Cela dépend de la personne à qui vous parlez. Certains diront que je sors de l’enfer. Que je suis un dangereux, diabolique, transgresseur de lois. Un ennemi redoutable de la loi. D’autres diront que je l’ai juste un peu contournée. Très légèrement. Une désobéissance civile justifiée, un mal nécessaire. La loi de qui ? Celle de l’humanité ?… Peut-être. La loi naturelle ?… Jamais. […]
Au cours des vingt-neuf dernières années, j’ai bouché des cheminées, comblé des égouts et accroché des pancartes. [J’ai] distribué des affiches, détérioré des marchandises et déversé des eaux usées et des poissons pourris dans des bureaux d’entreprise. J’ai également déposé, accroché, transporté et déversé (oui déversé) davantage de mouffettes mortes dans des endroits particulièrement inhabituels que quiconque à ma connaissance. Je suis probablement la seule personne en Amérique du Nord à considérer une mouffette tuée sur la route comme une ressource naturelle.
Nombre de mes petites guerres n’ont duré que le temps d’un raid. D’autres ont duré plusieurs années. J’en ai gagné plusieurs, j’en ai perdu d’autres, et certaines ont été annulées par la pluie. »
— James F. Phillips, alias « Ray Fox » ou « The Fox » (20 novembre 1930 – 3 octobre 2001), Raising Kane : The Fox Chronicles, 1999.
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Comme vous l’avez probablement saisi, James F. Phillips, qui vivait près de Chicago, aux États-Unis, fait partie des figures pionnières de l’écosabotage (ou de l’« éco-terrorisme », selon ceux qui détruisent le monde). Professeur de biologie, James F. Phillips adopta le pseudonyme The Fox, soit « le renard », en référence à une rivière locale, la rivière Fox. Son combat écologiste débuta lorsqu’il réalisa qu’une entreprise de production de savons, Armour Dial, polluait ladite rivière, qu’il aimait tant.
Voilà pourquoi je hais tant les récupérateurs du mouvement écologiste, les Bon Pote, Camille Étienne, Cyril Dion, les WWF, Greenpeace, etc. Tous ces gens et ces organisations passent à côté des problèmes fondamentaux qui se posent à nous et mentent comme des arracheurs de dents en prétendant qu’il est possible de rendre durable, écologique, la civilisation industrielle. Et tandis qu’ils passent leur temps à promouvoir toutes sortes d’illusions renouvelables, la civilisation industrielle ne cesse d’étendre ses ravages, de multiplier ses pollutions, d’accumuler ses déchets, de ravager la vie sur Terre. Y compris, désormais, AU NOM DE L’ECOLOGIE, au nom des imbécilités que promeuvent les Bon Pote, Camille Etienne, Cyril Dion, etc.
Bon Pote, entre mille exemples que l’on pourrait donner, s’est réjouit du fait qu’on ouvre en France « une des plus grosses usines de batteries électriques ».
Alors que les usines et la fabrication de batteries, ça engendre tout un tas de pollutions, ça implique tout un tas de dégradations du monde naturel.
L’écologie, ce n’est pas troquer un fléau industriel contre un autre que l’on imagine moins pire. C’est faire comme James F. Phillips. Défendre la nature contre les assauts industriels, qu’ils soient le fait de l’industrie chimique ou de l’industrie de la production de batteries électriques.
Nicolas Casaux
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