Génocidaire — Jimmy DALLEEDOO

Génocidaire — Jimmy DALLEEDOO

Au moment où j’écris ces mots, un véritable carnage est perpétré contre le peuple palestinien. Nous sommes témoins d’une atrocité d’une cruauté inimaginable. J’ai dû prendre du recul face à cette horreur, qui a suscité un profond malaise en moi. Ce pamphlet est ma façon de surmonter ce malaise en le partageant avec mes lecteurs. Malheureusement, le génocide en Palestine n’est pas un cas isolé dans l’histoire. Toutes ces tragédies trouvent leur origine dans une même source : la quête de domination des forces capitalistes. Washington et Tel Aviv s’allient, formant ainsi un cartel parmi tant d’autres, dans le but de maintenir leur emprise sur un monde en constante évolution. Comprendre la situation en Palestine nécessite donc de saisir les enjeux à l’échelle internationale. Pour saisir la situation en Palestine, il est essentiel de comprendre l’impérialisme, qui représente le stade ultime de domination des forces capitalistes. En effet, les forces impérialistes menacent les peuples avec le spectre du génocide, comme une épée de Damoclès suspendue au-dessus de leurs têtes et prête à s’abattre à certains moments cruciaux de l’histoire. Il y a eu de nombreux génocides et massacres à travers l’histoire, tous ayant une cause commune. L’essence même du capitalisme est marquée par la violence, la barbarie et les massacres. Il est crucial de souligner que la classe dominante est universelle : la bourgeoisie en est un exemple frappant. L’analyse de ces événements doit se faire en tenant compte de la lutte des classes. Voici quelques exemples illustrant cette réalité. Ce texte est un pamphlet pour vous…

1- L’Algérie

L’Algérie connaît actuellement une phase de croissance économique notable. Son PIB a augmenté de 3 % en 2022 et de plus de 4 % en 2024. Bien qu’elle n’ait pas été retenue comme candidate pour intégrer les BRICS, elle a réussi à ancrer son développement économique dans la dynamique du nouveau monde multipolaire dominé par le dollar. Les nouveaux accords commerciaux vont stimuler davantage l’économie algérienne, qui a su trouver sa place dans ce nouvel ordre mondial.

En mars 2024, l’Algérie a été le moteur principal du sommet des pays exportateurs de gaz (GECF), où la Déclaration d’Alger a été approuvée à l’unanimité. Ce pays a surmonté trois obstacles majeurs :

1. Il a développé une économie qui s’intègre harmonieusement dans le nouvel ordre mondial multipolaire.
2. Il s’est débarrassé de l’extrémisme religieux et du terrorisme.
3. Il a lutté contre le néocolonialisme, en soutenant notamment la résistance palestinienne.

Effectivement, le succès actuel de l’Algérie est le résultat d’une longue lutte. Cependant, cette lutte est loin d’être terminée, car l’impérialisme demeure une force virulente. Comprendre la position actuelle de l’Algérie nécessite donc de revenir sur son histoire, marquée par des luttes et des défis, qui ont forgé son identité et influencé ses choix politiques et économiques.

Que s’est-il passé ?

Le 13 mai 1958 à Alger, un événement majeur s’est produit lorsque Pierre Lagaillarde, lieutenant de réserve de l’armée coloniale française, a dirigé une insurrection. Son objectif était de renverser la Quatrième République française. Selon lui, le gouvernement français ne devrait pas négocier avec le Front de libération nationale (FLN) et l’Armée de libération nationale (ALN), les principaux mouvements nationalistes algériens luttant pour l’indépendance de l’Algérie. La stratégie consistait à prendre d’assaut l’immeuble du gouvernement général, alors le centre de commandement de l’administration française en Algérie. Il était environ 18 heures. L’insurrection rassemblait un groupe socialement hétérogène : des étudiants, des lycéens, des agriculteurs, des catholiques intégristes, ainsi que des commerçants poujadistes, représentés par Joseph Ortiz. Les affrontements ont débuté : des grenades lacrymogènes, des jets de pierres, des cris, des matraques et des projectiles ont été lancés.

Le général Trinquier arrive en camion à la tête du Régiment de parachutistes coloniaux (RPC), dont les soldats sont reconnaissables à leurs casquettes en toile de camouflage, héritage du général Marcel Bigeard. Cependant, un problème survient : en effet « les hommes peints » du général Trinquier ne sont pas hostiles à l’insurrection dirigée par le lieutenant Lagaillarde. Par conséquent, ils refusent d’intervenir, privilégiant ainsi la désobéissance.

Lagaillarde apparaît devant la foule depuis le balcon du troisième étage de l’immeuble. Il est 19h30. Dans le même temps, le général Jacques Massu, commandant de la région militaire d’Alger, prend la tête d’un comité de salut public.

Aucun des putschistes ne se réclame du général De Gaulle à ce stade. Le général Massu apparaît au balcon accompagné de sept membres du comité de salut public. Il est 20h45. Le général Massu, ancien membre de la Deuxième Division Blindée, vise à sortir de son silence le général De Gaulle, chez lui à Colombey-les-Deux-Églises. La passion joue un rôle crucial dans ces événements historiques, car elle agit comme une force motrice capable de façonner le cours de l’histoire de la société humaine.

La Cinquième République française a débuté le soir du 20 janvier 1946, lorsque le général De Gaulle a pris la décision de quitter le gouvernement. À l’époque, le parlement était composé des communistes, de la SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière) et du MRP (Mouvement républicain populaire). De Gaulle a alors choisi la stratégie politique de la « chaise vide », pensant qu’il était indispensable et persuadé qu’on le rappellerait. Cependant, cela s’est avéré être une erreur politique grave. Au lieu de cela, les partis se sont stabilisés en formant un gouvernement PCF-SFIO-MRP.

Effectivement, De Gaulle a réagi en fondant le Rassemblement du Peuple Français (RPF) le 7 avril 1947. Cependant, les Algériens ne se montraient pas particulièrement favorables à l’emblème de la croix de Lorraine, symbole associé à De Gaulle. Face à cette situation, le gouvernement français se posait une question cruciale : comment ramener le général aux affaires politiques ? Le général Jean Ganeval, chef militaire de René Coty, a rencontré deux amis de De Gaulle le 5 mai 1958 : le colonel Gaston de Bonneval et Olivier Guichard. René Coty a alors proposé à De Gaulle de prendre la tête du gouvernement de manière légale.

Effectivement, De Gaulle avait appelé à voter pour René Coty en décembre 1953, et il lui était donc redevable. À cette époque, le suffrage universel direct n’existait pas encore en France, et les alliances politiques étaient essentielles, exerçant une influence majeure sur la vie politique française. Bien sûr, il y avait des personnes opposées à l’accession de De Gaulle au pouvoir, mais il représentait avec force les intérêts de l’impérialisme français en Afrique. De Gaulle bénéficiait du soutien solide de plusieurs figures politiques influentes telles que Léon Delbecque, Roger Frey, Jacques Soustelle, Michel Debré, Olivier Guichard, et d’autres encore.

En effet, ils ont tous convenu d’utiliser les événements du 13 mai 1958 à Alger comme levier politique. Le concept du comité de salut public était une idée de Michel Debré ! Ces représentants de l’impérialisme français ont ainsi exploité la légitime colère des Algériens pour servir leurs propres intérêts politiques. Jacques Foccart, figure centrale du colonialisme en Afrique, a dépêché André Petit, un gaulliste, pour demander à Salan de mettre en alerte deux régiments de parachutistes en cas d’intervention à Paris. Ainsi, les événements du 13 mai 1958 à Alger ont vu Lagaillarde prendre le relais, favorisant ainsi les perspectives politiques gaullistes.

Le gouvernement de Pierre Pflimlin, investi en urgence le 14 mai à 2 heures du matin, ne souhaitait pas céder. Bien que l’armée algérienne ait été en alerte, de nombreux policiers, militaires et agents des Renseignements généraux ont choisi de soutenir le coup d’État gaulliste.

La torture en Algérie Française

L’Algérie a été colonisée par l’impérialisme français dans les années 1870, avec la création de trois départements. Les peuples opprimés et colonisés ne bénéficiaient d’aucun développement de leurs conditions de vie. Bien que quelques individus issus des colonies puissent parfois échapper à cette réalité, ils demeurent une minorité. Pendant ce temps, les colonisateurs s’enrichissent davantage, tandis que les peuples opprimés souffrent. Les Algériens ont exigé de leurs belliqueux colonisateurs non seulement la dignité, mais aussi le respect de leur identité. Cependant, cela est difficilement réalisable dans le cadre de l’impérialisme, qui se fonde principalement sur l’exploitation de la force de travail humaine.

Les Algériens ont naturellement rejeté la misère dans laquelle ils étaient plongés. L’armée française n’a jamais été acceptée par la population algérienne, mais la construction d’une organisation politique capable de lutter contre les colonisateurs peut prendre du temps. En effet, l’espoir d’un avenir meilleur, impossible dans une colonie, doit céder la place à la haine envers les exploiteurs, ce qui nécessite plusieurs années de souffrances tangibles. Cette souffrance engendre la haine, qui doit être canalisée au sein d’une organisation anti-colonialiste.

L’influence du Parti du Peuple Algérien (PPA), dirigé par Messali Hadj, a considérablement augmenté dans ces conditions au cours des années 1945. Malgré un bon départ, sa faction armée, l’Organisation Spéciale (OS), a été démantelée dans les années 1950, ce qui a entraîné une scission au sein du parti. Certains militants du PPA ont alors fondé le Front de Libération Nationale (FLN) le 1er novembre 1954. C’est cette organisation qui a donné le tempo dans la lutte héroïque des Algériens contre le colonisateur français. La ligne du FLN-ALN était claire : la lutte armée, l’action directe et l’anti-impérialisme ! Cependant, la scission n’a pas signifié la fin des différends. Des conflits significatifs sont demeurés entre deux factions de partisans : les Messalistes d’un côté et les membres du FLN de l’autre.

L’impérialisme français a profondément divisé la population algérienne. Le colonialisme est devenu un problème intra-algérien, car certains Algériens ont porté l’uniforme français et ont collaboré avec leurs oppresseurs. Ainsi, des vies algériennes ont été perdues dans les maquis, tuées par d’autres Algériens.
Le colonisateur français a accordé une large autonomie aux milices de l’armée, de la police et aux Pieds-noirs pour régler les problèmes « eux-mêmes ». Pourquoi certains Algériens ont-ils vendu leur âme aux diables impérialistes ? Certains sont prêts à sacrifier leur intégrité pour grimper dans l’échelle sociale. Ils espèrent ainsi accéder à une classe supérieure, et l’impérialisme offre les moyens financiers pour les y aider.

La violence a atteint son paroxysme lors de la bataille d’Algérie de 1956-1957, alors que la France était dirigée par le « socialiste » Guy Mollet et que le service militaire français durait 27 mois. La torture en Algérie s’intensifiait, et l’embuscade de Palestro a fait la une des journaux en France, avec la mort d’une vingtaine de Marsouins de l’infanterie coloniale. Il est probable que l’opinion publique française n’ait pas totalement condamné ces massacres, créant ainsi un consensus tacite en faveur de la torture. En effet, certains des militaires tués en Algérie étaient des jeunes effectuant leur service militaire. L’appareil d’État impérialiste était bien conscient de la volonté de vengeance émanant des familles de ces jeunes. Peut-on réellement attendre qu’un parent excuse la mort de son enfant ? La réponse est évidemment non.

Le FLN-ALN gagnait du terrain dans le cœur des Algériens, qui restaient silencieux, fiers, et refusaient de collaborer avec les forces impérialistes françaises. Les services de renseignement français, les policiers et les militaires se heurtaient à un mur de silence. Face à cette résistance, les forces impérialistes ont recouru à des méthodes de torture extrêmes, notamment la « gégène ». Cette technique consistait à utiliser une génératrice électrique connectée aux parties génitales de la personne interrogée, qu’il s’agisse d’un homme, d’une femme ou d’un enfant. Face à ces atrocités, barbaries, meurtres, viols et tortures, le FLN-ALN a réagi en intensifiant les actions directes et la propagande par le fait.

Effectivement, un événement organisé à l’ONU témoignait de l’état d’esprit des Algériens à l’époque. Le 28 janvier 1957, l’ONU a tenu une réunion sur la « question algérienne ». Ce même jour, le FLN-ALN a lancé une grève générale, paralysant ainsi la production. En réaction, le gouvernement français a confié le maintien de l’ordre au général Massu, qui commandait la dixième division de parachutistes. Plus de 4600 hommes ont été déployés dans Alger avec pour mission de briser la grève en écrasant le FLN-ALN.

La torture est devenue une pratique institutionnalisée, avec ses rafles, ses perquisitions de jour comme de nuit, ses exécutions, ses arrestations arbitraires, et ses disparitions inquiétantes. Il est regrettable de constater que Guy Mollet n’a jamais condamné ces atrocités, malgré son étiquette de « socialiste ». En effet, les événements en Algérie ont été officiellement présentés comme une simple opération de maintien de l’ordre…

La « Main Rouge » : une machine à tuer des services secrets français

Le 9 mai 1958, un procès important se déroule en Suisse. Max Ulrich, un inspecteur de police, est condamné à deux ans de prison pour « service de renseignement politique et violations du secret de fonction ». Il était membre de la « Main Rouge », une agence des services secrets français spécialisée dans les assassinats, particulièrement active en Algérie. Ulrich avait été recruté par le responsable du SDECE (Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage) à Berne. Il avait été résistant et déporté à Dachau avant de rejoindre le SDECE en 1952. Il a révélé les opérations d’assassinats, appelées « opérations homos », visant les partisans de la cause algérienne en Europe.
C’est encore une fois Guy Mollet qui avait donné le feu vert aux assassinats de la Main Rouge en Algérie. Il avait également autorisé le renversement de Nasser, un soutien de la lutte anti-impérialiste. La terreur de la Main Rouge a débuté le 28 septembre 1956, lorsque des bureaux de M. Otto Schlüter, fournisseur d’armes au FLN-ALN, ont été visés par une bombe. En juin 1957, la mère d’Otto Schlüter a été tuée dans sa voiture, piégée par les services secrets français.

Les « opérations Arma » du SDECE consistaient à intercepter et saboter les navires transportant des armes, notamment depuis Tanger. Effectivement, le SDECE disposait de moyens impressionnants, notamment des chasseurs de mines, des nageurs de combat, des avions de type GAM-56 et des petits sous-marins. Grâce à ces ressources, le SDECE a réussi à détruire quatorze yachts, des cargos et des caboteurs, coulant ainsi plus de 2000 tonnes d’armes. Des actes d’assassinat étaient également perpétrés, tels que le poignardage de Georges Geiser, un fabricant de détonateurs à Genève, et l’assassinat de Marcel Leopold dans la même ville par Günter Guillaume, un tueur du SDECE, à l’aide d’une fléchette empoisonnée propulsée par une sarbacane. Ces événements, bien que surprenants, sont véridiques.

Le SDECE envoyait également son agence « la Main Rouge » en République fédérale d’Allemagne. Le gouvernement allemand collaborait avec le gouvernement français pour se débarrasser des Algériens jugés gênants, tels que les membres du FLN, les sympathisants communistes, en échange de faveurs. Par exemple, M. Mohammed Ait-Achène a été blessé dans sa Peugeot 203 au centre de Bonn, et ce sont les autorités allemandes qui ont fourni les informations nécessaires au SDECE français.

Les Algériens ont été les victimes non seulement de la soif excessive de sur-profit de l’impérialisme français, mais aussi de sa violence, de sa cupidité et de ses mensonges. Il est crucial de se rappeler que, pour les forces du capital, la force de travail humaine n’est rien de plus qu’une marchandise produisant du profit pour autrui, et leur nationalité importe peu.

Le massacre du 17 octobre 1961

Les Algériens avaient enduré sept années de guerre horrible. La souffrance ne connaît pas de frontières ; elle résonne et mobilise les âmes partout dans le monde. Les indépendantistes algériens aspiraient désormais à négocier la paix. De Gaulle était disposé à entamer ces pourparlers, tout en veillant à ne pas perdre l’influence de l’impérialisme français en Algérie. Cependant, pour certains hommes politiques français, l’idée même de négocier avec ces « indigènes » était impensable. La France devrait-elle vraiment discuter avec ces « sujets » coloniaux ? Pour eux, c’était tout simplement inacceptable.
Face à la perspective de négociations de paix, certains choisirent la voie du terrorisme pour faire obstacle : l’OAS (Organisation de l’armée secrète) sévissait en Algérie. Pendant ce temps, la branche française du FLN organisait une manifestation à Paris, avec pour principale revendication des négociations avec le GPRA. Plus de 30 000 personnes devaient être mobilisées pour cet événement dans les rues de la capitale. Parmi les manifestants, plus de 8 % étaient des FMA (Français musulmans d’Algérie) vivant dans des conditions précaires dans les bidonvilles de Nanterre.

Les FMA étaient soumis à un couvre-feu impitoyable imposé par le préfet de police Maurice Papon. La DST avait mis la main sur des instructions émanant du FLN, ordonnant : « 1- de cesser toute attaque contre les policiers et, en cas de légitime défense et de mort d’un policier, de fournir un rapport détaillé ; 2- de nous informer avec un rapport détaillé sur la manière dont vous liquidez les harkis. Il serait plus judicieux de les organiser au sein même de la caserne pour mener une action spectaculaire, soit une désertion massive, soit en provoquant une mutinerie. Nous croyons qu’il existe des moyens plus efficaces que l’élimination physique individuelle. Si nous pouvions « récupérer » les harkis et mener une action politique spectaculaire, cela serait bien plus fructueux que la vengeance contre de pauvres âmes égarées. »

Le FLN organisait donc une manifestation pacifique, prônant l’apaisement, mais la milice impérialiste qu’est la police nationale était avide de confrontation. Malgré la pluie battante qui s’abattait sur Paris, les Algériens se rassemblaient pour défiler, marquant ainsi le jour du 17 octobre 1961. La procession serpentait à travers les rues de la ville, de l’Étoile à Bonne-Nouvelle, de La Concorde à l’Opéra. Malheureusement, environ 200 manifestants se retrouvaient isolés, perdus dans la nuit. L’heure tournait : il était 20 heures, l’heure où les Algériens devaient regagner leur domicile. Pourtant, plus de 30 000 d’entre eux continuaient de défiler, portés par leur courage, leurs idéaux, leurs revendications. C’est alors que la police passait à l’attaque.

Certains Algériens se retrouvèrent isolés par petits groupes, tandis que d’autres furent entassés dans des stades : la répression qui s’ensuivit fut d’une brutalité sans précédent. Matraqués, frappés, torturés, abattus à bout portant, jetés dans la Seine pour y trouver une mort atroce, ce fut un véritable massacre. Les jours qui suivirent, les cadavres par balles continuaient à être découverts. Et les Parisiens dans tout ça ? Ils n’ont rien vu, bien sûr ! Le silence radio des médias ne faisait que confirmer leur allégeance de classe : de simples instruments de propagande servant les intérêts du capital !

Barbouzes gaullistes

Les « Barbouzes » étaient ainsi désignés, nommés ainsi en référence aux agents des renseignements généraux déployés à l’étranger, se dissimulant derrière de fausses barbes et identités. La France était en proie à la terreur des attentats perpétrés par l’OAS, qui atteignaient des sommets de violence dans les années 1961. L’OAS ne reculait devant rien pour éliminer toute forme d’opposition. Le maire d’Evian fut tué dans un attentat le 31 mars 1961, tandis que le 18 juin, le déraillement du train Paris-Strasbourg causa la mort de 23 personnes. Même le Général De Gaulle échappa de justesse à une tentative d’assassinat le 8 septembre à Pont-Sur-Seine. Un rapport alarmant du commissaire de police Jean-Paul Guépratte des RG en fit état. Roger Frey, Ministre de l’Intérieur, décida alors d’une réorganisation du dispositif anti-OAS, donnant ainsi naissance aux Barbouzes.

Les dirigeants des commandos Delta pro-OAS avaient des sources infiltrées partout : dans la police, la DST, l’armée et même au SDECE. Leur déclaration était claire : « Nous déclarons la guerre aux Barbouzes ! » La France devenait alors un véritable Far West, avec ses voitures piégées, ses mitraillettes et ses hommes armés. C’était une réalité sombre et brutale, où des hommes comme Charles Pasqua étaient impliqués. Dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier 1962, M. Degueldre, l’un des dirigeants des commandos Delta, organisa une attaque au lance-roquette et à la mitrailleuse contre l’un des quartiers généraux des Barbouzes.

Cette attaque a fait un blessé. Le lendemain, un Vietnamien expert en arts martiaux tua de ses mains l’un des assaillants de la veille : incroyable, mais vrai ! La morale de l’histoire ? Qu’il ne faut pas confondre les conflits entre les classes sociales et les conflits à l’intérieur d’une classe sociale ! Les bombes explosaient ça et là, témoignant de la violence de ces luttes. Un autre exemple fut le 29 janvier, lorsque du matériel d’imprimerie fut piégé par les hommes du commando Delta avec l’aide du SDECE, réduisant en cendres une villa des Barbouzes : 19 morts ! Cette guerre fut également celle des représentants de l’impérialisme français entre eux ! La lutte pour la libération de l’Algérie fut donc à la fois une lutte algéro-algérienne et franco-française. C’était une lutte à l’intérieur de la classe opprimée, dominée, colonisée, mais aussi une lutte à l’intérieur de la classe dominante, colonisatrice.

François Mitterrand et ses mauvaises fréquentations

Dans cette guerre des classes, François Mitterrand pensait déjà à exploiter ces différentes contradictions en vue d’une éventuelle accession à l’Élysée. Il y est parvenu, mais saviez-vous qu’il a failli ne jamais franchir la porte du palais de l’Élysée ? En effet, François Mitterrand était ami avec le nationaliste et anticommuniste Robert Pesquet. Pourtant, en politique, on ne peut jamais véritablement compter sur l’amitié. Enfin…

Robert Pesquet a été sur le point de compromettre la carrière politique du futur Président de la République Française. À l’âge de 90 ans en 2006, il avait couronné sa carrière politique en tant que secrétaire départemental de la Manche pour le MNR (Mouvement National Républicain) de Bruno Mégret. La rencontre entre Robert Pesquet et Mitterrand remonte à 44 ans auparavant, alors que ce dernier était sénateur UDSR (Union Démocratique et Socialiste de la Résistance). Pesquet, élu député gaulliste en 1956, avait par la suite des affiliations avec les poujadistes. Son plaidoyer pour une Algérie française était clair : il prônait l’usage des armes pour maintenir l’Algérie sous l’emprise de l’impérialisme français.

François Mitterrand a pourtant accepté de rencontrer Robert Pesquet le 7 octobre 1959 sur les quais de Seine. Là, Pesquet a informé Mitterrand qu’il avait été chargé par les poujadistes de le tuer. Mitterrand fut abasourdi : les poujadistes voulaient le tuer, lui ? C’était inconcevable ! Pesquet a alors proposé un « plan B » à Mitterrand. Il suggérait de simuler un attentat contre Mitterrand. Cette fausse attaque aurait deux effets : premièrement, Pesquet pourrait prétendre avoir accompli sa mission ; deuxièmement, Mitterrand serait protégé par la police, ce qui le ferait passer pour un héros. Le sénateur Mitterrand avait déjà une certaine expérience des manœuvres politiques !

Effectivement, Mitterrand avait signé plusieurs ordres d’exécution de militants du FLN, dont le communiste algérien Fernand Iveton, lorsqu’il était ministre de l’Intérieur ! Après ce premier rendez-vous, les deux hommes se sont retrouvés à deux reprises : une fois dans un bar de l’avenue des Champs-Élysées et une deuxième fois à la fameuse buvette du Sénat. Lors de ce deuxième rendez-vous, Pesquet a informé Mitterrand que l’opération était prévue pour le même jour. Elle devait avoir lieu devant le square de l’Observatoire, près de la rue Guynemer. Mitterrand devait abandonner sa voiture et se dissimuler derrière des arbustes du jardin public, pendant que Pesquet ouvrirait le feu. Le soir est arrivé. François Mitterrand dîne avec un ami à la Brasserie Lipp sur le Boulevard Saint-Germain.

François Mitterrand se dirige seul vers son domicile au volant de sa 403 : il est minuit et demi. Arrivé au point de rendez-vous, il sort de son véhicule, laisse la porte ouverte, se jette au sol et attend. Robert Pesquet arrive au volant de sa voiture de marque Dauphine, armé d’un pistolet mitrailleur. Un problème surgit : deux amoureux s’embrassent devant la voiture ! Au second passage, c’est un taxi qui dépose ses clients. Mitterrand, toujours caché dans les buissons, s’impatiente. Au troisième passage, une rafale de sept balles de 9 mm est tirée sur la 403. Le lendemain, François Mitterrand est réconforté par ses proches, déclarant : “Je ne dirai rien qui puisse ajouter au désordre des esprits, mais il est logique de penser que le climat de passion politique créé par les groupements extrémistes explique cet attentat.”

C’est une diatribe que nous connaissons bien, mais à la manière Mitterrand de l’époque. François Mitterrand retrouvera son “assassin” au Crystal, quelques jours plus tard, dans un bar situé Avenue de la Grande Armée. Robert Pesquet trahit Mitterrand le 22 octobre en expliquant la machination aux hommes politiques et en affirmant que c’est Mitterrand qui avait monté l’opération. La justice poursuivra Robert Pesquet pour détention d’armes et demandera la levée de l’immunité parlementaire qui protégeait le Sénateur Mitterrand. Ce dernier se défendra en affirmant que l’instigateur avait été le Premier ministre Michel Debré. François Mitterrand était alors annoncé comme politiquement mort, mais nous savons ce qu’il deviendra en 1981. Décidément, les voies du capital sont impénétrables !

Jean-Marie Le Pen : expert de la torture en Algérie

Il est intéressant de noter qu’en septembre 2005, la Cour de cassation mettait fin à une polémique suscitée par le journal Le Monde. Celui-ci avait révélé l’implication de Jean-Marie Le Pen dans des actes de torture en Algérie. Malgré une plainte en diffamation déposée par Le Pen, celle-ci n’a pas abouti. Un signe de vérité peut-être ? Jean-Marie Le Pen était alors le benjamin de l’Assemblée Nationale en 1956, à seulement 28 ans, et il appartenait au groupe de Pierre Poujade. Il avait naturellement soutenu l’intervention de l’armée en Algérie.

Il est intéressant de noter que Le Pen a décidé de s’engager en Algérie pour une période de six mois. Il a ainsi intégré la Légion étrangère du 1er REP. À son arrivée en Algérie, la bataille d’Alger faisait rage. La décision de confier l’ordre public en Algérie à des parachutistes, prise par Guy Mollet, était troublante pour un socialiste ! La pratique de la torture était répandue dans cette Algérie martyrisée par l’impérialisme, et Jean-Marie Le Pen était chargé du renseignement. Le 2 mars 1957, à 22 heures, Jean-Marie Le Pen, accompagné d’une vingtaine de personnes, pénétraient dans le 7 rue des Abencérages, une petite ruelle située dans la Casbah.

Leur intention était de capturer Ahmed Moulay, un homme de 42 ans, militant du FLN et père de famille. Le Pen et son groupe ont pénétré dans la maison alors que la famille Chérif Moulay dormait. Ahmed Moulay a été violemment attaqué par le groupe de parachutistes dirigé par M. Le Pen. Il a été jeté dans l’escalier, traîné dans le patio, ses vêtements arrachés, et il a été attaché nu entre deux piliers. Il a ensuite été battu et torturé. Ahmed Moulay succombera à ses souffrances devant sa femme et ses enfants. C’est un acte de violence et de barbarie impensable.

Ces révélations poignantes ont été faites 45 ans après les événements par Mohamed Chérif Moulay, le fils aîné d’Ahmed Moulay, qui avait dix ans au moment de l’assassinat de son père. Il décrit l’horreur que son père a endurée : « On a continué de le bourrer de coups. Dans les testicules surtout. Ensuite, ils lui ont fait ingurgiter de l’eau. Une quantité phénoménale. Son ventre est devenu énorme. Un para lui sautait dessus à pieds joints. Mon père n’arrêtait pas de gémir et de crier. C’était horrible. À un moment, il a perdu connaissance. De temps en temps, Le Pen hurlait : “Donne-nous un nom et tu auras ma parole de soldat que tu seras épargné”. C’est une histoire déchirante qui révèle la cruauté et l’inhumanité de ces actes de torture.

Ahmed Moulay n’a jamais parlé. Le Pen décida alors de recourir à la gégène, espérant briser le silence héroïque de Moulay. Le Pen et ses hommes emmenèrent également un autre prisonnier, Rachid Bahriz, l’un des frères de la femme d’Ahmed Moulay. Lui aussi fut soumis à une torture prolongée. Assistant à la mort de son beau-frère Ahmed, il déclara : « Ils ont repris la séance de torture, à l’électricité cette fois. À un certain moment, il y a eu un court-circuit. Tout d’un coup, j’ai entendu un cri, puis plus rien. L’un des militaires a crié : ’Mon lieutenant, il est mort !’ » C’est une tragédie sans nom, où l’horreur de la torture est exacerbée par la mort brutale et la perte de toute humanité.

La version officielle prétend qu’Ahmed Moulay a été tué alors qu’il tentait de s’enfuir. Cependant, la découverte d’un ceinturon kaki avec un poignard accroché par Mohamed Chérif Moulay, le fils d’Ahmed, dès le lendemain matin, raconte une tout autre histoire. Mohamed Chérif le cacha pendant des années. Malgré deux retours des parachutistes pour fouiller la maison, le ceinturon ne fut jamais retrouvé. Cette perte mit Le Pen dans une rage indescriptible. Des années plus tard, le ceinturon fut remis à des journalistes. C’était un poignard en acier trempé, mesurant 25 centimètres de long sur 2,5 centimètres de large, portant l’inscription gravée : « JM Le Pen – 1er REP ». Un symbole macabre de l’implication directe de Le Pen dans ces atrocités.

2- Le Cameroun

Actuellement, Le Cameroun est confronté non seulement aux attaques du groupe terroriste Boko Haram, mais aussi à des mouvements séparatistes. Il est également en train de s’adapter à la nouvelle dynamique mondiale. Dans ce monde multipolaire émergent, le pays doit trouver sa place. Il est confronté à un choix crucial, tout comme de nombreux autres pays africains. L’un de ces choix est de continuer à être un fournisseur de matières premières et de main-d’œuvre pour les pays impérialistes.

Dans cette perspective, il est également nécessaire de considérer que son gouvernement pourrait être perçu comme une marionnette au service des intérêts impérialistes. L’autre option consiste à opter pour l’indépendance. Dans ce cas, il serait essentiel de promouvoir la lutte anti-impérialiste et anti-colonialiste, en s’opposant à la répression exercée par le gouvernement africain qui agit comme une marionnette. Le Cameroun tente de s’insérer dans ce nouveau paysage mondial multipolaire, qui se détache de la domination du dollar. Contrairement à l’Algérie, qui a réellement atteint une certaine autonomie dans ses choix, le Cameroun n’a pas encore franchi cette étape.

Que s’est-il passé ?

Ainsi, nos deux compères, De Gaulle et Foccart, se positionnaient comme les principaux représentants de l’impérialisme français en Afrique, voire comme des figures politiques centrales lors des événements des années 1960. En effet, les peuples africains refusaient d’être colonisés ou dominés. Ils se soulevèrent pour réclamer leur indépendance. M. Foccart s’exclama alors : « Il faut aider les peuples africains à prendre un bon départ dans leur indépendance. » Un bon départ ? Des paroles doucereuses après les avoir soumis à la torture, aux violences, aux humiliations, aux mauvais traitements, à l’exploitation ! Après leur avoir volé leurs ressources naturelles ! Quelle hypocrisie !

Observons l’Afrique pendant cette période. Les peuples et les ethnies d’Afrique subsaharienne ont été regroupés en deux grandes fédérations en 1958 : d’un côté, l’Afrique occidentale française (AOF), comprenant la Côte-d’Ivoire, la Haute-Volta (Burkina Faso), le Sénégal, la Mauritanie, la Guinée, le Soudan (Mali), le Niger et le Dahomey (Bénin) ; de l’autre côté, l’Afrique équatoriale française (AEF), regroupant le Congo, le Gabon, l’Oubangui-Chari (Centrafrique) et le Tchad. De Gaulle avait une vision claire : « Nous allons vers une vaste et libre communauté. En 1958, nous devons ériger de nouvelles institutions, établir des liens d’union sur un modèle fédéral, et organiser une grande entité politique, économique et culturelle qui réponde aux besoins de la vie et du progrès ».

En d’autres termes, De Gaulle envisageait l’Afrique comme indissociable de la France. Dans les années 1960, la géostratégie internationale relevait d’un équilibre complexe. Le monde était divisé en deux blocs : le capitalisme à l’Ouest et le socialisme à l’Est. Les puissances occidentales cherchaient à exploiter les ressources africaines, tandis que les pays socialistes prônaient un partage des richesses. Bien qu’il y ait eu des tensions, notamment avec la Chine de Mao remettant en question la suprématie de l’Union soviétique, ils partageaient un objectif commun : soutenir les mouvements anticoloniaux. Le Premier ministre chinois Zhou Enlai déclarait même : « L’Afrique est mûre pour la révolution ». En réalité, le gouvernement français avait déjà établi les fondements du néo-colonialisme, avec une sorte de Commonwealth à la française, en s’appuyant sur des élites africaines formées dans de grandes écoles françaises. Bien que issues du peuple africain, ces élites trahiraient souvent leurs propres populations pour servir les intérêts des pays impérialistes.

En d’autres termes, ces élites africaines agiraient comme des intermédiaires entre les peuples africains et les colonisateurs, facilitant ainsi l’exploitation des ressources naturelles. L’année 1960 a revêtu une importance cruciale. La Guinée a mené sa rébellion et son peuple a proclamé son indépendance le 2 octobre 1958. Le Cameroun a suivi le 1er janvier 1960. Ensuite, ce fut le tour du Togo (27 avril), du Bénin (1er août), du Burkina Faso (5 août), du Niger (5 août), de la Côte d’Ivoire (7 août), du Tchad (11 août), de la République centrafricaine (13 août), du Moyen-Congo (15 août), du Gabon (17 août), du Sénégal (20 août), du Mali (22 septembre), de la Mauritanie (28 novembre), et de Madagascar (14 décembre). Le néo-colonialisme a été officiellement institué le 28 septembre 1958 avec l’adoption, par référendum, de la constitution de la Cinquième République française. Ces proclamations d’indépendance étaient en réalité des façades, car le gouvernement français conservait en grande partie le contrôle. Ces pseudo-indépendances n’ont pas réussi à mettre fin à la violence des colonisateurs. Cela suffit, il est temps de prendre des exemples concrets.

Au Cameroun, la rébellion a commencé en 1955 dans le sud du pays, où les Bamilékés ont revendiqué leur indépendance. Le gouvernement français a tenté de négocier avec Ruben Um Nyobé, le leader de l’UPC (Union des Populations du Cameroun). Cependant, les négociations ont échoué car le gouvernement français refusait de reconnaître le droit à l’autodétermination du peuple camerounais, et la rébellion s’est propagée. En 1958, des commandos français ont été envoyés pour détruire le siège de l’UPC, avec l’aide de Maurice Delaunay, ambassadeur du Gabon et proche de Jacques Foccart, sur place. La tragédie s’est produite le 13 septembre 1958, lorsque le gouvernement français a financé des tirailleurs tchadiens pour traquer et tuer Ruben Nyobé. Cet événement a marqué un point de non-retour. Le gouvernement français avait assassiné Nyobé pour installer à la tête du gouvernement camerounais un certain Ahmadou Ahidjo, un musulman du nord, peu populaire mais très manipulable : un pantin.

La rébellion menée par l’UPC dans le Sud du Cameroun ne faiblit pas, avec le Dr Félix-Roland succédant à Ruben Nyobé. Le pays est divisé entre le Nord et le Sud, et Ahidjo n’a pas de contrôle sur le Sud Cameroun. Cependant, il a signé des accords avec les puissances impérialistes pour étendre leur influence dans la région. Les premiers mois de 1960 sont un cauchemar pour le peuple du Sud Cameroun. Le gouvernement français a envoyé cinq bataillons du général Max Briand, connu pour sa brutalité en Indochine et en Algérie, pour brûler et dévaster les villages. Malgré cela, l’UPC refuse de céder et a même formé une branche armée, l’ALNK. Foccart a donné son feu vert au service action du SDECE pour des opérations « Homo » (signifiant homicide, donc assassinat) : la Main Rouge entre en action.

Félix-Roland Moumié devait être éliminé de manière discrète. Le SDECE a fait appel à William Bechtel, un réserviste proche de Foccart. Le 15 octobre 1960, Bechtel s’est présenté au leader de l’UPC, M. Moumié, en se faisant passer pour un journaliste. Au cours d’un déjeuner au restaurant Le Plat d’Argent à Genève, Bechtel a versé du Thallium, un puissant poison, dans le verre de Moumié. Le poison a agi rapidement, terrassant Moumié sur-le-champ. Bien que Moumié ait été assassiné, l’UPC, porteur de ses idées indépendantistes, n’a pas disparu. La guerre au Cameroun s’est intensifiée. Un témoignage poignant de Max Bardet, un pilote d’hélicoptère présent au Cameroun de 1962 à 1964, révèle l’horreur de la situation : « En deux ans, l’armée régulière a conquis le pays bamiléké du sud au nord et l’a entièrement ravagé. Ils ont massacré entre 300 000 et 400 000 personnes. Un véritable génocide. Ils ont presque anéanti la population. Armés de simples sagaies contre des armes automatiques, les Bamilékés n’avaient aucune chance. »

À la fin de la guerre, j’ai effectué une mission de prospection d’un mois avec un administrateur général du nom de Coudret. Il était profondément choqué par ce qu’il voyait. Tous ces villages déserts, où étaient passés les habitants ? Les villages avaient été complètement détruits, comme par les troupes d’Attila. Peu de Français sont intervenus directement. J’en ai personnellement connu trois ou quatre ; cependant, ces événements n’ont pas été médiatisés. On cherchait à ménager le président Ahidjo, car il était crucial pour le maintien des liens entre le Cameroun et la France. De plus, le dictateur Ahidjo était soutenu par une police secrète, le SDESEC (Service de Documentation et d’Études de la Sécurité Camerounaise), qui était entièrement organisée par les services secrets français.

3- La Guinée

Actuellement, le Cameroun est partie prenante d’un mouvement regroupant trois autres pays : la Guinée, le Mali et le Burkina Faso. Ces trois nations ont adopté une orientation politique s’inspirant des idées de Thomas Sankara, en opposition à la politique de certains autres pays africains qui choisissent de demeurer des vassaux de l’impérialisme, à l’instar de la Côte d’Ivoire sous la direction de M. Ouattara. La Guinée, en particulier, promeut des principes politiques hérités du leadership de Sékou Touré.

Que s’est-il passé ?

J’aurais aimé discuter des nombreuses merveilles du continent africain avec vous, mais je suis obligé de partager les horreurs de la colonisation. Malheureusement, la Guinée n’a pas été épargnée par cette barbarie. Les services secrets français ont mené une guerre contre le dirigeant guinéen Sékou Touré de 1958 à 1973. De Gaulle, une fois de plus, réalisait une tournée en Afrique à la fin d’août 1958 pour proposer sa « politique d’association » dans le cadre de la « Communauté Française ». Les conseillers de De Gaulle lui ont recommandé de commencer sa tournée par Conakry, la capitale de la Guinée, sachant que l’accueil y serait plus tendu qu’à Dakar. Sékou Touré n’était pas un révolutionnaire de naissance ; il avait suivi un parcours ordinaire. Il avait participé au congrès de Bamako en octobre 1946, lors de la création du Rassemblement Démocratique Africain (RDA). Il était devenu secrétaire général du Parti Démocratique de Guinée (PDG) en 1952. En outre, il avait été simultanément député à l’Assemblée Nationale française et maire de Conakry dans les années 1956. En 1957, il était membre du Conseil de l’AOF à Dakar et avait l’intention de recevoir De Gaulle sur un pied d’égalité. C’est ainsi que De Gaulle a débarqué en Guinée le 27 août.

À ce moment, Sékou Touré répondait de manière emblématique à la politique d’association proposée par De Gaulle : « Nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage ». Le lendemain, alors que De Gaulle arrivait à Dakar, des pancartes du Parti du Regroupement Africain (PRA) exigeaient également l’indépendance. Il était clair qu’il n’était plus le bienvenu. De plus, le peuple de Guinée avait voté « non » lors du référendum du 28 septembre sur la constitution de la Cinquième République concernant l’association. Ainsi, Sékou Touré devenait la cible principale des services secrets français. La Guinée a proclamé son indépendance le 2 octobre 1958 et a été immédiatement reconnue par la Chine et l’URSS. Le bloc socialiste a fourni un soutien concret aux peuples luttant contre leurs oppresseurs. Foccart a donné son feu vert pour détruire la Guinée, sans faire de distinction entre le gouvernement et le peuple. Les opérations sombres du SDECE étaient en marche. Le SDECE français avait mis en place un réseau étendu sur le terrain : il était omniprésent.

Le gouvernement français a orchestré une opération cruelle : la destruction de l’économie guinéenne en la submergeant de fausse monnaie, contribuant ainsi à des famines et à une précarité accrue. Le service 7 du SDECE a donc fait fabriquer de fausses devises en coupures de 5, 10, 100 et 500 Sylis. Le moment de l’opération n’a pas été choisi au hasard, car la Banque Centrale de Guinée avait lancé l’émission de ses propres billets. De Gaulle avait préparé le terrain funeste en ordonnant de rendre inutilisables trois millions de francs CFA qui étaient stockés en Guinée. Ainsi, l’argent provenant de Guinée ne pouvait plus être utilisé au Sénégal ou au Mali, par exemple. Pendant que Sékou Touré faisait imprimer des billets à Prague, les services secrets français inondaient le marché guinéen de faux billets. Il est important de souligner que cette destruction de l’économie guinéenne par le gouvernement français s’ajoutait à des conditions de vie déjà épouvantables pour le peuple guinéen. Les « eaux glacées du calcul égoïste » se sont déversées sur les âmes de Guinée.

4- La guerre du Biafra

Le Nigeria connaît actuellement une période d’instabilité, avec une présence prédominante de groupes djihadistes dans le pays. Boko Haram y est aussi très présent. Ces groupes djihadistes prennent le contrôle des villes et des villages, semant la terreur et la destruction. Il est possible que ces groupes soient soutenus financièrement et organisés par certaines puissances impérialistes, ce qui entrave la stabilité nécessaire à l’autodétermination du pays.

Que s’est-il passé ?

Deux millions de morts. Des enfants squelettiques avec des ventres énormes : les images ont été effroyables (elles le sont encore de nos jours). Derrière cette guerre sanglante, il y avait des livraisons d’armes organisées par le palais de l’Élysée. La guerre du Biafra, s’étendant de mai 1967 à janvier 1970, avait bouleversé les consciences par sa violence. La province de l’Est du Nigéria, la plus riche du pays, était majoritairement peuplée d’environ 13 millions de personnes appartenant à l’ethnie chrétienne Ibo. Cette région prospère et dynamique occupait les principaux postes dans l’administration et l’armée, au détriment des musulmans du Nord.

Le 15 janvier 1966, des officiers Ibo organisèrent un coup d’État. Le général Aguyi Ironsi prit le pouvoir à Lagos. Cependant, il ne parvint pas à apaiser les tensions entre les 250 ethnies différentes du pays. Une rébellion éclata dans le Nord, provoquant un exode massif vers l’Est du pays. Les massacres causèrent plus de 30 000 morts en quelques semaines. Le général Ironsi fut assassiné le 29 juillet 1966 et le général Gowon lui succéda.

Gowon entreprit de réformer les institutions du pays, mais il ne parvint pas à libérer le Nigéria de l’emprise des multinationales Shell et British Petroleum (BP), qui exploitaient sans relâche le pétrole nigérian. Les conflits divisèrent tellement la population que, le 30 mai 1967, la province orientale du Nigéria fit sécession, donnant naissance à la région du Biafra. Le colonel Ojukwu prit alors la tête de cette nouvelle région.

Les conflits s’aggravèrent, car le pouvoir central voulait reconquérir la « province dissidente ». Les deux camps demandèrent l’aide de la France, souhaitant obtenir des armes. De Gaulle déclara officiellement un embargo sur les ventes d’armes aux deux camps, mais en réalité, il les armait tous les deux. L’aide humanitaire de Paris servait surtout à livrer des armes. La France observait le Nigéria avec une perfidie calculée, suivant de très près son évolution. L’impérialisme français avait étendu ses tentacules sur tout le continent africain, espérant y rester longtemps.

Le Nigéria, peuplé de plus de 40 millions d’habitants dans les années 1960, représentait une immense réserve de main-d’œuvre bon marché. D’ailleurs, De Gaulle avait confié à son fidèle collaborateur, M. Foccart : « Je souhaite le morcellement du Nigéria ». Les Nigérians connurent un destin tragique, semblable à celui de leurs frères africains dispersés à travers le continent.

En effet, pour l’impérialisme français, le Nigéria représentait un pays robuste et en développement, riche en matières premières. Pire encore, il se trouvait sous l’influence de l’impérialisme britannique, concurrent de la France. Le massacre des Africains résultait des contradictions inter-impérialistes. De plus, le monde était alors divisé en deux blocs : l’Est socialiste et l’Ouest impérialiste. Le général Gowon n’a pas caché son rapprochement avec le bloc de l’Est, ce qui était inacceptable pour le gouvernement français. Le Kremlin fournissait des armes à la résistance anti-impérialiste du Nigéria.

Le contexte international s’est encore complexifié après le 27 décembre 1960, lorsque la France a effectué son troisième essai nucléaire (Gerboise rouge) à Reggane, au Sahara. Deux pays ont naturellement protesté : le Maroc et le Nigéria.

Quelques jours après ce tir crapuleux, Lagos expulsa l’ambassadeur de France, Raymond Offroy, en signe de protestation. Le ministre des Armées, Pierre Messmer, se permit d’affirmer en parlant des Biafrais : « Je ne pardonnerai pas au Nigéria son attitude après nos tirs nucléaires à Reggane. Cela permettait de leur faire payer ! Ils avaient été à la fois provocants et ridicules. Provoquants en essayant de soulever les gouvernements africains contre les tirs nucléaires français, et ridicules en disant : « Nous, Nigéria, nous aurons la bombe atomique. » Ce sont des grotesques. Je ne leur ai pas pardonné. » Les Africains doivent se taire et subir ! Ben voyons !

En 1963, le SDECE (encore lui) plaça à Abidjan un nouveau chef de poste : le lieutenant-colonel Raymond Bichelot, un ancien militant de l’OAS. Il devint un élément clé dans le dispositif d’aide au Biafra. Cependant, en 1969, De Gaulle décida d’interrompre l’aide militaire au Nigéria pour contraindre Odumegwu Emeka Ojukwu à accepter des négociations pour un possible arrêt du conflit. Bref, en 1967, il fallut plusieurs mois pour que la France puisse armer le Biafra. Officiellement, la France apportait au Biafra une aide humanitaire, sans reconnaître le gouvernement d’Ojukwu.

En même temps, De Gaulle affirmait le 31 juillet 1968 le droit à l’autodétermination de la province biafraise. C’était la fameuse stratégie des deux fers au feu, très souvent utilisée par l’impérialisme quel qu’il soit. L’aide militaire de la France commença le 8 novembre 1967 lorsqu’un DC-6 atterrit à Libreville, au Gabon, avec à son bord 8 tonnes d’armes et de munitions, notamment des fusils Mauser de fabrication allemande. Cette aide militaire fut intensifiée à l’été 1968. Officiellement, ces armes étaient livrées au Gabon et en Côte d’Ivoire, mais en réalité, elles prenaient la direction du Biafra.

Le 11 décembre 1968, Charles de Gaulle posa la question à son “Monsieur Afrique” :

• Les armes sont-elles arrivées ?
• Mon général, je vous rappelle que vous n’avez pas donné d’armes au Biafra, vous avez reconstitué les stocks d’Houphouët.
• Oui, oui ! Mais enfin, est-ce que cela est arrivé ?

Tous les éléments obscurs caractérisant l’impérialisme furent réunis : mensonges, trafics, assassinats, dominations. Les forces coloniales présentaient leurs interventions sous le prétexte « d’exporter la paix et la démocratie », mais en réalité, elles exportaient la guerre et la dictature coloniale. Malheureusement, les armes furent diffusées aux différents camps en guerre, provoquant un massacre. L’aviation nigériane commettait des massacres sur les routes pleines de réfugiés. L’aviation biafraise, organisée par Carl Gustav von Rosen et recrutée par Caritas, une organisation humanitaire dépendante du Vatican, était également active. Certains mouvements chrétiens considéraient en effet la guerre du Biafra comme une guerre de religion. Omar Bongo s’assura du soutien du pape Paul VI en novembre 1968. Les MiG russes furent pilotés par des Égyptiens, tandis que Lagos était soutenu par les services secrets britanniques. Encore eux !

Le rapport de forces bascula en faveur d’Ojukwu, mais les villes d’Enugu et Calabar tombèrent aux mains du général Gowon. Pendant ce temps, l’opinion publique à Paris fut alertée. Des artistes français tentèrent de sensibiliser le public à ce nouveau drame africain. Le peuple de France fut touché par ces massacres, car l’ORTF multipliait les reportages. Les médias avaient compris depuis longtemps que l’émotion se vendait. M. Foccart organisait des aides pour acheminer les journalistes jusqu’aux zones de conflit du Biafra. Il disait : « Les journalistes ont découvert la grande misère des Biafrais ; c’est un bon sujet. L’opinion s’émeut et le public en demande plus. Nous facilitons bien sûr le transport des reporters et des équipes de télévision par des avions militaires jusqu’à Libreville et, de là, par les réseaux qui desservent le Biafra. »

L’organisation des acheminements pour faire toujours plus d’argent en spéculant sur ces massacres fonctionnait convenablement, mais étrangement, elle ne fonctionnait pas pour les colis alimentaires. Le 11 janvier 1970, le colonel Ojukwu s’enfuit pour un long exil chez son ami Félix Houphouët-Boigny. Le 14 janvier, la capitulation fut signée.

Exemple de la bourgeoisie compradore

Qu’est-ce que la bourgeoisie compradore ? Elle incarne l’hypocrisie, le mensonge, la trahison. La bourgeoisie a créé un monde à son image, un monde dans lequel sa classe prospère en exploitant les classes populaires. C’est une classe dominante, exploiteuse, et cosmopolite, propriétaire des moyens de production. Les forces impérialistes ont positionné leurs pions un peu partout dans leurs néo-colonies. Les gouvernements de ces pays ne sont pas dirigés par de véritables hommes politiques, mais par des pantins politiques à la tête de gouvernements fantoches. Ces néo-colonies deviennent ainsi des pourvoyeurs de matières premières, de main-d’œuvre malléable, mais aussi des zones d’importation faciles pour les capitaux impérialistes. Cette réalité économico-sociale-politique ne touche pas uniquement le continent africain, évidemment. Il existe de nombreux dirigeants africains qui, en réalité, exploitent leurs propres peuples au service des intérêts de l’impérialisme. Prenons quelques exemples.

Au Cameroun, Ahmadou Ahidjo, soutenu par la France, a réprimé brutalement les mouvements indépendantistes pour maintenir les intérêts impérialistes. En Côte d’Ivoire, Félix Houphouët-Boigny a souvent été critiqué pour son alignement avec les puissances coloniales et son rôle dans la perpétuation de l’exploitation économique. Au Congo, Mobutu Sese Seko a pillé les ressources du pays tout en servant les intérêts des puissances occidentales.

Ces dirigeants, tout en prétendant représenter leurs nations, ont en fait collaboré avec les forces impérialistes pour maintenir leur propre pouvoir et richesse, souvent au détriment de leur propre peuple. Ils sont des exemples vivants de la bourgeoisie compradore, une classe qui prospère en trahissant les aspirations de liberté et de développement de leurs propres populations.

Jean-Bedel Bokassa

“Papa ! Merci de me recevoir !
• Voyons, Bokassa, appelez-moi ’mon général’, comme tout le monde !
• D’accord papa !”, répondait Jean-Bedel Bokassa à De Gaulle.

Jean-Bedel Bokassa, ancien caporal des Forces françaises libres (FFL), avait dirigé un coup d’État en République Centrafricaine en 1966 sous les ordres du gouvernement français, renversant son propre cousin, David Dacko, au pouvoir depuis les années 1960. De Gaulle aimait “ce brave bougre de Bokassa” comme il l’appelait affectueusement. La Centrafrique (ex-Oubangui-Chari), partie de l’AEF (Afrique équatoriale française), était passée au néo-colonialisme dans les années 1960. Avec cette fausse indépendance venait une exploitation accrue des richesses de son sol : coton, bois, café, mais surtout ses fameux diamants.

Cependant, le “brave bougre de Bokassa” désobéit à son maître. Dans les années 1969, Bokassa se rapprochait du bloc socialiste de l’Est. Georges Pompidou était furieux ! Bokassa fut accueilli à bras ouverts à Moscou et à Bucarest par Nicolae Ceausescu. D’ailleurs, Ceausescu avait offert à Bokassa une belle fiancée, Gabriela Drimba, une blonde comme Bokassa les aimait (et une espionne des services secrets). Parallèlement, Bokassa conservait des relations avec les États-Unis, exploitant des gisements de diamants et d’uranium en Centrafrique.

L’égocentrisme de Jean-Bedel Bokassa n’avait plus de limite : il se proclama empereur Bokassa 1er. Naturellement, le peuple de Centrafrique se révolta par des manifestations en 1979. Bokassa commit une grave erreur en réprimant sauvagement ces manifestations, notamment par le massacre d’enfants aux mortiers. En conséquence, le président Giscard d’Estaing décida de l’abandonner. Cela déclencha l’opération Barracuda le 20 septembre 1979, destinée à remettre David Dacko au pouvoir, orchestrée par le SDECE.

Jean-Bedel Bokassa est un exemple typique de ces hommes politiques incarnant la bourgeoisie compradore, représentant les intérêts de l’impérialisme français en Afrique. Ils ont tous des trajectoires similaires dans les années 1960 et 1970, passant du colonialisme au néo-colonialisme sous couvert de fausses indépendances : anciens militaires de l’armée française devenus dictateurs, encadrés par le système Foccart et le SDECE. Ils étaient utilisés comme pions politiques pour empêcher les pays africains de basculer du côté du bloc socialiste de l’Est. Jean-Bedel Bokassa est mort en 1996 après un exil et une condamnation par contumace dans son pays. Les accusations portées contre lui comprenaient meurtres, cannibalisme et détournements de fonds publics à hauteur de 170 millions de dollars, tout cela avec le soutien sécuritaire du gouvernement de Paris anti-socialiste.

Omar Bongo

On pourrait lui accorder un surnom : l’Homme parfumé au pétrole. Omar Bongo a été un des plus gros pourvoyeurs de matières premières pour l’impérialisme, exportant pétrole, uranium, canne à sucre, bois d’Okoumé, entre autres. La République du Gabon a obtenu son indépendance le 17 août 1960, mais l’impérialisme français maintenait d’immenses intérêts dans le pays, notamment via ELF-ERAP, sous la supervision de Jacques Foccart, Pierre Guillaumat et le colonel Maurice Robert du SDECE.

L’histoire du Gabon a pris un tournant décisif au début de l’année 1964 lorsque le président Léon M’Ba a été renversé par un “comité révolutionnaire”, un coup d’État organisé par les impérialismes anglais et nord-américains. M’Ba fut rétabli par les responsables locaux du SDECE, mais il mourut le 2 décembre 1967, et Omar Bongo lui succéda. Bongo, téléguidé par le “clan des Gabonais” dirigé par l’ambassadeur Maurice Delauney, un élément clé du réseau Foccart, consolidait alors son pouvoir.

Maurice Delauney, ancien des Forces françaises de l’intérieur (FFI), avait déjà montré de quoi il était capable lors du massacre des Bamilékés au Cameroun. L’impérialisme, en plaçant ses pions, favorisa cette bourgeoisie compradore qui lui devait tout : interdiction des partis d’opposition et des journaux, création d’un parti unique (le Parti Démocratique Gabonais, PDG) et mise en place d’un réseau tentaculaire de police politique et d’espionnage. Le CEDOC (Centre de Documentation Extérieure), une version gabonaise du SDECE, était dirigé par André Casimir, un ancien de la DST, tandis que la société aérienne Transgabon était dirigée par Jean-Claude Brouillet, membre du SDECE, et la compagnie Elf comptait parmi ses rangs Jean Tropel, un “ as ” du service 7 du SDECE. Tous ces acteurs étaient des bailleurs de fonds du système Bongo, des agents comptables organisés à Libreville.

En 1983, Pierre Péan publia le livre Affaires africaines, dénonçant les collusions entre l’impérialisme et la bourgeoisie compradore, représentée au Gabon par Omar Bongo. Le livre fut un succès en librairie, exposant au grand jour ces relations obscures. La légitimité morale de Bongo, déjà fragile, fut sévèrement compromise. Pour maintenir leur influence, l’impérialisme n’hésitait pas à organiser des opérations militaires, comme celle de Kolwezi, au Zaïre, en juin 1978, avec l’aide de Bongo et de son ami le roi du Maroc, Hassan II.

Hassan ll, le Roi du Maroc

Effectivement, ce roi n’a pas été un très bon ami de la France depuis qu’il avait organisé l’enlèvement de M. Mehdi Ben Barka en plein Paris en 1965. Cet enlèvement, réalisé par Mohamed Oufkir, son ministre de l’Intérieur, avait été instigué par le roi lui-même. Le général Oufkir se suicidera le 16 août 1972 après un coup d’État manqué. Quelques temps auparavant, il avait provoqué un véritable coup de théâtre en se constituant prisonnier à Paris le 19 octobre 1966, cherchant à « laver son honneur ».

La France, sous le ministre Louis Joxe, un gaulliste qui avait joué un rôle important lors des accords d’Evian, décida alors un rapprochement avec Rabat. Alexandre de Marenches, le patron du SDECE depuis les années 1970, dont l’épouse avait vécu au Maroc, organisa une alliance anti-communiste des services secrets en Afrique. En échange, sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing, la France aida les Marocains dans la répression des séparatistes sahraouis organisés par le Front Polisario, armé par l’Algérie voisine. Dans les années qui suivirent, le Maroc devint une destination touristique d’envergure avec des prix attractifs, des paysages féeriques et des clubs méditerranéens. La presque totalité des représentants du capital iront se prélasser au palais de Mamounia à Marrakech en participant à des fêtes féeriques inspirées des mille et une nuits. Le marché du cannabis devint très lucratif, estimé à 1,5 milliards de dollars.

Le roi Hassan II était également habile en tant qu’intermédiaire dans le conflit israélo-palestinien. Se disant protecteur de tous les croyants, y compris les juifs marocains, il nomma André Azoulay, un juif, premier conseiller du roi pour les affaires économiques. Le roi Hassan II est mort le 23 juillet 1999.

François Tombalbaye

Il a été président du Tchad de 1960 à 1975. Le Tchad a obtenu son « indépendance » en 1961, mais comme la totalité des pays africains, il est rapidement tombé dans le néo-colonialisme, étroitement contrôlé par les réseaux Foccart. Dans les années 1960, François Tombalbaye a fondé le Parti progressiste tchadien (PPT) et a instauré une dictature au service des intérêts de l’impérialisme dans son propre pays, comme tous les représentants de la bourgeoisie compradore africaine « choisis » par leurs colonisateurs.

Dès la création du PPT, il a interdit la formation de partis politiques d’opposition et de journaux indépendants. Malgré cela, une fronde politique, organisée par Outel Bono et des étudiants, notamment Abba Siddick, a émergé. En mars 1963, des policiers français ont arrêté Bono, médecin-chef de l’hôpital de Fort-Lamy (aujourd’hui N’Djamena), sous prétexte d’avoir organisé un complot. Bien que condamné à mort, grâce à l’intervention du PCF et de l’ambassadeur au Tchad, sa peine a été commuée en prison à vie.

En 1966, le régime de Tombalbaye a désigné le FROLINAT (Front de libération nationale du Tchad), créé par Abba Siddick, comme son principal ennemi. Face à cette opposition, Tombalbaye a tenté d’apaiser les tensions en proposant à Bono un poste au ministère de la Santé, mais sous surveillance.

En 1968, un nouvel ambassadeur français est nommé au Tchad, Fernand Wibaux. Tombalbaye, confronté à la désorganisation totale de son pays, rencontre en urgence Jacques Foccart en 1969 pour solliciter son aide. L’impérialisme déclenche alors l’opération Tacaud 1, envoyant deux bataillons du 2e REP pour combattre le FROLINAT.

En 1970, le gouvernement français apprend le passage à Paris d’Abba Siddick, chef du FROLINAT, et tente de l’enlever, sans succès. Deux mois plus tard, les services secrets de Tombalbaye parviennent à éliminer Bono à Paris.

En 1975, Tombalbaye est renversé lors d’un coup d’État mené par le général Félix Malloum. Sa mort marque le début d’une dictature militaire, un schéma fréquent dans ces pays. Au Tchad, la bourgeoisie compradore devait être étroitement encadrée par l’impérialisme, surtout avec l’agressivité croissante du colonel Mouammar Kadhafi en Libye voisine.

Nous avons mis en lumière des figures emblématiques de cette bourgeoisie compradore, des individus issus de leurs propres peuples mais qui se sont alliés aux intérêts des divers impérialismes. Ils se sont transformés en traitres, en agents de liaison organiques, en intercesseurs entre les exploiteurs, les colonisateurs et leurs propres concitoyens. Leur trahison les a menés à devenir des fournisseurs de matières premières, de main-d’œuvre bon marché pour les forces impérialistes. La longévité de certains présidents africains, par exemple, ne résulte pas de leur légitimité ou de leur force morale, mais plutôt de leur aptitude à réprimer, à spolier, à mentir à leurs peuples, en somme, à les opprimer. Parfois, ces événements sombrent dans le drame, comme ce fut le cas lors du génocide au Rwanda, où la folie meurtrière atteignit des proportions terrifiantes.

Le génocide du Rwanda

Le Rwanda, sous la direction de Paul Kagamé, est devenu le théâtre d’une situation complexe. Des multinationales y ont établi leurs quartiers, attirées par l’opportunité d’acquérir diverses matières premières. Pour faciliter leurs opérations, elles financent des groupes armés particulièrement violents opérant en République démocratique du Congo voisine, avec le soutien des forces de Kagamé. Ces groupes sèment la terreur, massacrent les populations congolaises et pillent les ressources naturelles, pour ensuite les revendre au Rwanda aux multinationales impatientes de les acquérir. Ce schéma de violence et d’exploitation a entraîné l’un des génocides les plus graves des dernières décennies en République démocratique du Congo. Dans ce sombre tableau, certains gouvernements africains sont même complices de ces atrocités. Le cas du Rwanda illustre tragiquement la transition d’un pays autrefois opprimé à un acteur oppressif à son tour.

Que s’est-il passé ?

Le réquisitoire fut implacable au cours des années 1990. L’opération Turquoise, orchestrée par le président François Mitterrand et le Premier ministre Édouard Balladur, aurait au moins facilité, voire permis, l’un des derniers génocides du XXIe siècle. Ce génocide a coûté la vie à près d’un million de personnes, dont la majorité étaient des Tutsis, représentant plus de 15 % de la population. Il aurait été perpétré par la branche radicale des Hutus. L’élément déclencheur aurait été l’attentat de 1994 contre le président Juvénal Habyarimana, un Hutu. Par la suite, porté par les survivants du génocide et certains membres du gouvernement, c’est Paul Kagamé qui a pris les rênes du Rwanda. Ironiquement, Kagamé a été considéré comme le « bon soldat » de l’impérialisme, comme en témoigne le soutien qu’il a reçu de plusieurs associations européennes de défense des droits de l’homme. Les preuves impliquant le gouvernement français dans ce génocide sont troublantes. Une enquête a été ouverte, qui aurait établi cette implication, mais elle est restée sans suite pendant des années, sans que l’armée française ou le gouvernement n’intervienne pour contester ces accusations. Ce silence, à lui seul, semble éloquent.

Une interrogation supplémentaire se pose quant au soutien du gouvernement français à la politique du régime Habyarimana, élément clé dans la compréhension de cette épouvantable tragédie génocidaire. La justice française a choisi d’entendre certains accusateurs le 23 décembre 2005. C’est Jacques Baillet, procureur au tribunal des armées de Paris, qui a ouvert une enquête pour « complicité de génocide et/ou complicité de crime contre l’humanité ». Cette procédure a été enclenchée suite au déplacement au Rwanda de la juge d’instruction au tribunal des armées de Paris, Brigitte Raynaud. Sur place, Me Raynaud a recueilli le témoignage de six survivants du génocide. Ces six témoins ont impliqué des militaires français de l’opération Turquoise, les accusant d’avoir commis viols et assassinats en laissant libre cours aux actes atroces des Hutus. Le 3 juillet 2006, la cour d’appel de Paris a confirmé cette décision, tandis que l’enquête se poursuivait sous la direction du tribunal de Paris.

Le 6 avril 1994, l’avion transportant le président Juvénal Habyarimana a été détruit en plein vol. Le président Habyarimana revenait d’un sommet régional à Dar es-Salaam, en Tanzanie, où les discussions sur l’accord d’Arusha venaient d’être finalisées. Cet accord visait à partager le pouvoir au Rwanda avec le Front patriotique rwandais (FPR) dirigé par l’opposant politique Paul Kagamé. Alors que l’horloge indiquait 20h30, le Falcon 50 a été abattu par un missile sol-air portable alors qu’il s’approchait de l’aéroport de Kigali. À bord se trouvaient trois anciens militaires français, ainsi que le commandant de bord Jean-Pierre Minaberry, assisté de Jacky Héraud et Jean-Marie Perrine, le mécanicien navigant. Aucun survivant n’a été retrouvé. Habyarimana a péri aux côtés de son homologue burundais Cyprien Ntaryamira et de six membres de leur suite.
Les massacres ont débuté quelques heures seulement après l’attentat, ciblant d’abord les opposants au régime Habyarimana. Cet attentat a servi de catalyseur, mais les fondations de la barbarie étaient posées bien avant. En effet, le Rwanda, ce petit pays d’Afrique de l’Est, abritait deux groupes ethniques principaux : les Tutsis et les Hutus. Les Tutsis représentaient 14% de la population, tandis que les Hutus en représentaient 85%. Il est crucial de souligner que certains Hutus qui soutenaient les Tutsis ont également été tués. Le Rwanda a été colonisé à la fois par l’impérialisme allemand et par les colonisateurs belges. Ces derniers ont orchestré la division de la population, favorisant les Tutsis aux dépens des Hutus. À travers une série de manipulations historiques, les colonisateurs ont alimenté la haine entre les deux ethnies pour maintenir leur emprise sur le pays. Lorsque les Belges sont arrivés au Rwanda en 1916, ils ont instauré des cartes d’identité basées sur l’ethnicité. Ces cartes d’identité se sont révélées très utiles aux milices lors du génocide, car elles permettaient de cibler ceux qui devaient être exterminés : les Tutsis.

Une interrogation légitime surgit : qui aurait abattu l’avion ? Certains auteurs pointent du doigt les Français. Par exemple, Colette Braeckman a révélé, le 16 juin 1994, en une du quotidien bruxellois Le Soir, que deux militaires français à la peau noire auraient été envoyés au Rwanda par la France. Ces accusations n’ont jamais été démenties. Ce qui est avéré, c’est que l’engin ayant frappé l’avion était un missile de fabrication russe SAM-16, provenant des réserves de l’armée ougandaise, principal soutien du FPR de Paul Kagamé.

Un témoignage crucial émerge : celui de Jean Heinrich, un ancien général du renseignement militaire (DRM) fortement impliqué sur le terrain au Rwanda. Devant la commission d’enquête parlementaire française le 25 juin 1998, Heinrich déclare que les SAM-16 auraient été acquis par le FPR, qui en aurait détenu un stock. En 2002, la Russie admet avoir légalement vendu ces missiles à l’Ouganda. Jean-Louis Bruguière, juge d’instruction antiterroriste, enquêtant sur l’attentat (à la demande de la fille d’un des pilotes français), affirme que le Falcon 50 d’Habyarimana aurait été ciblé par le FPR de Paul Kagamé dès septembre 1993.

D’après le juge Bruguière, Paul Kagamé aurait confié l’exécution de l’attentat à ses gardes du corps, qui auraient été formés au maniement des missiles en Ouganda, au sein d’une structure appelée « le network commando », dirigée par un certain James Kabarebe, qui deviendra ensuite ministre de la Défense du Rwanda. Le juge français a recueilli le témoignage d’un ancien membre de ce network commando, le capitaine Abdul Ruzibiza. Ce témoignage, rendu public par Le Monde le 10 mars 2004, décrit comment le FPR aurait introduit des missiles à Kigali en passant inaperçu auprès des forces de l’ONU (la MINUAR) présentes sur place à l’époque. Selon l’officier Ruzibiza, deux tireurs, Eric Hakizimana et Franck Nziza, auraient abattu le Falcon 50. Paul Kagamé a naturellement nié ces accusations, affirmant à M. Bruguière qu’il devrait chercher les auteurs de l’attentat à Paris.

Existait-il un pacte de sang au Rwanda ?

Lorsque l’attentat s’est produit, le Rwanda était donc un chaudron de haine préparé par les différents colonisateurs. En octobre 1990, une rébellion Tutsie, organisée depuis l’Ouganda par des émigrés rwandais, a tenté d’envahir le Rwanda. Cette rébellion était dirigée par Fred Rwigyema (tué lors des combats) et Paul Kagamé, tous deux des « banyarwanda » ou réfugiés rwandais en Ouganda. Ils étaient des figures importantes au sein de l’armée ougandaise, la NRA (National Resistance Army), et d’anciens compagnons d’armes de Yoweri Museveni, le président ougandais, qu’ils avaient aidé à accéder au pouvoir. Plus troublant encore, le journaliste étasunien Wayne Madsen a déclaré devant le juge Bruguière que les cadres de l’armée ougandaise avaient été formés à la guerre subversive dans un centre spécialisé de Fort Benning aux États-Unis. Paul Kagamé lui-même a été formé dans l’un des meilleurs centres : Fort Leavenworth au Kansas. C’est après la tentative d’invasion d’octobre 1990 que la France a décidé d’envoyer plusieurs centaines de soldats dans le cadre de l’opération Noroît. Elle a également fourni au président Habyarimana plusieurs tonnes d’armes pour renforcer son régime. Ce sont ces armes qui ont été utilisées pour massacrer les Tutsis.

Le génocide de 1994 trouve ses racines dans une série d’alliances et de jeux de pouvoir complexes, impliquant notamment la France, qui a armé le régime brutal et raciste de Juvénal Habyarimana. Le gouvernement français, sous la présidence de Mitterrand, a fait preuve d’une complicité tacite, motivée par les rivalités impérialistes en jeu. L’impérialisme britannique n’était pas en reste, désireux de mettre la main sur la région des Grands Lacs, riche en ressources naturelles. La France, quant à elle, réagissait aux échos du passé, notamment le complexe de Fachoda, qui avait ravivé ses appétits coloniaux. Cette complicité française se manifestait de manière troublante à travers le comportement des 314 militaires de l’opération Noroît. Déployés en octobre 1990, ils ne se contentaient pas de former l’armée rwandaise et de lui fournir des armes, mais s’impliquaient directement dans le soutien au régime en place. Lorsque l’avancée du Front patriotique rwandais (FPR) fut stoppée, la France renforça sa présence militaire sur le terrain, sous le commandement du colonel Chollet. En janvier 1992, Chollet devint conseiller de l’état-major rwandais, et en mars 1993, l’opération Chimère, dirigée par le colonel Didier Tauzin, fut déployée pour former l’armée rwandaise.

La contribution de l’armée française dans le drame rwandais dépasse largement le simple soutien logistique. Une enquête parlementaire a souligné que, bien que la France n’ait pas pris part aux combats, elle s’est impliquée de manière étroite aux côtés des forces armées rwandaises. Elle a influencé les stratégies de bataille, prodigué des conseils tactiques, et même formé les soldats rwandais à l’utilisation d’armes sophistiquées. Cette implication étroite, voire intime, soulève des questions troublantes sur le rôle de la France dans les événements tragiques qui ont suivi. Mais ce n’est là que la partie émergée de l’iceberg. L’envoi de l’opération Chimère en 1993 a été entaché par des avertissements alarmants de plusieurs ONG de défense des droits de l’homme, annonçant déjà “les prémices d’un génocide”. Les sombres prémonitions des défenseurs des droits de l’homme se sont avérées être des avertissements prophétiques. Un communiqué de presse, datant de janvier 1993, émanant de ces associations, a sonné l’alarme de manière poignante : « De retour d’une mission d’enquête de deux semaines sur place, la commission internationale d’enquête sur les violations des droits de l’homme commises au Rwanda depuis le 1 octobre 1990 souligne le climat de terreur et d’insécurité régnant actuellement dans ce pays. Les premières conclusions de la commission permettent d’ores et déjà d’établir la perpétration d’actes de génocide et de crimes de guerre, ainsi que la paralysie de l’appareil judiciaire. La commission a constaté plusieurs cas de génocide au sens de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, dans les communes de Kibilira, Kinigi, Mukingo, Mutura et Kanzenze. » Ces mots, empreints d’urgence et de désespoir, témoignent du caractère imminent de la tragédie qui allait embraser le Rwanda.

Les ravages du génocide, orchestré avec la complicité des autorités étatiques et des militaires, prennent pour cible l’ethnie tutsie. Au quotidien, le Rwanda est plongé dans un climat de terreur, de brutalité et d’intimidation, où les assassinats sont monnaie courante. Ce terrorisme émane des milices de certains partis politiques et de certaines figures locales. Durant les affrontements, les civils sont victimes de crimes de guerre, au sens des conventions de Genève et des protocoles additionnels, incluant des exécutions sommaires, des viols et des pillages. Ces atrocités sont attribuables tant à l’armée régulière rwandaise qu’au Front patriotique rwandais. Malgré le cessez-le-feu instauré en août 1992, ces violences perdurent, et il est avéré que des viols sont commis par des soldats de l’armée rwandaise.

La FIDH lance aujourd’hui un appel pressant à la communauté internationale pour qu’elle porte une attention particulière aux événements tragiques qui secouent le Rwanda. Cependant, cette communauté internationale, au service du capital financier mondial, a choisi de fermer les yeux, voire pire, en armant les milices, comme nous l’avons vu précédemment. Quelle valeur accorde-t-elle à la vie humaine lorsqu’il est question d’or, de diamants, de cobalt, de manganèse, de cuivre, et bien d’autres ressources encore ? Il est indéniable que les militaires français étaient engagés auprès du régime Habyarimana dès le début des années 1990. Le journaliste du Figaro, Patrick de Saint-Exupéry, évoquait en 2004 un « réflexe mafieux » et un « pacte de sang » entre la France et le régime génocidaire du Rwanda. Il va même jusqu’à affirmer que les réfugiés rwandais de la région de Goma, au Congo, ont été intentionnellement victimes d’une épidémie de choléra perpétrée par les forces impérialistes sur place.

Un autre journaliste, Pascal Krop, avance dans son livre Le Génocide franco-africain : faut-il juger les Mitterrand ? que François Mitterrand aurait déployé les troupes françaises au Rwanda pour protéger les plantations de cannabis appartenant à Jean-Christophe Mitterrand, fils du président, dans la région des Grands Lacs. Une coïncidence troublante, n’est-ce pas ? En effet, Jean-Christophe Mitterrand entretenait des liens amicaux avec le fils de Juvénal Habyarimana, Jean-Pierre Habyarimana. Selon Patrick de Saint-Exupéry, les militaires français intervenus au Rwanda faisaient partie du Commandement des Opérations Spéciales (COS), une unité créée après la guerre du Golfe pour combler les lacunes de l’armée française en matière d’opérations clandestines. Pour lui, le COS symbolisait « le bras armé de notre désir d’empire, de notre aspiration à la puissance souveraine. Une légion aux ordres du Palais de L’Elysée”.

En d’autres termes, cette théorie suggère l’existence d’une sorte de milice au service du capital, agissant en marge des institutions et du parlement. Cela soulève une question importante : si cette structure opérait en dehors des cadres institutionnels, pourquoi intervenait-elle en parallèle de l’opération officielle Turquoise ? Une question qui suscite bien des interrogations. Des affrontements ont eu lieu en juillet 1994 entre le COS et le FPR dans la région de Butare, lors de la mise en place d’une Zone Humanitaire Sûre (ZHS). En 1991, après la guerre du Golfe, la France avait réorganisé son système de renseignement militaire, donnant naissance au COS et à la DRM (Direction du Renseignement Militaire).

Au départ, le COS était sous le commandement de Jean Heinrich, un général ayant dirigé le Service Action de la DGSE. La distinction entre la DRM et la DGSE réside dans le mode d’opération : la DGSE opère de manière très discrète, collectant des renseignements de manière accessoire, tandis que la DRM se concentre sur les informations politico-stratégiques et économiques. Dans les années 1990, la DGSE était active en Ouganda mais moins présente au Rwanda. Pendant l’opération Turquoise en 1994, une équipe du Service Action dirigée par Jacques Costedoat était en contact direct avec le FPR de Paul Kagamé, facilitant la liaison entre les autorités françaises et le FPR. La DGSE avait des échanges d’informations avec des pays alliés, notamment les États-Unis et le Royaume-Uni, grâce à sa collaboration avec l’homme d’État ougandais Yoweri Museveni.

Quand la situation au Rwanda s’est dégradée en octobre 1990, la DGSE s’est opposée à toute intervention militaire. Ce désaccord a été révélé en 1998 lors d’une audition devant une commission parlementaire française par Claude Silberzahn, directeur de la DGSE de mars 1989 à juin 1993. Cette audition, qui s’est déroulée à huis clos sur instruction du Premier ministre Lionel Jospin et qui n’a jamais été rendue publique, a révélé que la DGSE avait exercé ses activités au Rwanda en collaboration avec d’autres services amis présents sur place. En l’absence de structures permanentes sur le terrain, la DGSE avait effectué des missions ponctuelles en envoyant des agents au Rwanda et en Ouganda, utilisant des moyens spécifiques et des filières préalablement établies.

Les missions de la DGSE ont conduit à une conviction bien établie, pourtant ignorée par le gouvernement français : dès 1991, elle avait clairement analysé la situation politique. Elle exprimait des regrets quant à l’implication militaire croissante de la France au Rwanda, préconisant à la fois par écrit et verbalement dès 1992 un désengagement militaire et anticipant le retour triomphant des émigrés ougandais cette même année. Bien que ses avertissements aient été émis, la DGSE n’a pas été réellement écoutée. Bien qu’elle n’ait pas anticipé les massacres de 1994, sa responsabilité dans la gestion de la crise rwandaise réside peut-être dans son manque de combativité pour faire prévaloir son point de vue. Selon Claude Silberzahn, la France avait adopté une attitude nuisible, qualifiée de « bavure d’ingérence ».

La résolution 929

La résolution 929 s’inscrit comme un chapitre sombre et crucial dans le récit du génocide rwandais. L’attentat contre le président Habyarimana, loin d’être l’unique déclencheur, a servi de flambeau à des flammes de violence déjà insidieusement présentes. Les premiers coups de machette ont retenti peu après l’explosion, accompagnés par les cris incendiaires de la radio des « Milles Collines », orchestrant une symphonie de terreur et de mort. Durant trois longs mois, un océan de souffrance et de désespoir a englouti près d’un million d’âmes, victimes d’une folie collective alimentée par la haine. Les bourreaux, une armée hétéroclite de civils, de soldats et de miliciens, plus de cinquante mille âmes animées par les ondes maléfiques de la propagande, ont endossé le rôle de Faucheurs de vies. Même ceux qui n’avaient pas pactisé avec l’extrémisme ont été pris dans le tourbillon de la destruction, fauchés par une lame de haine aveugle. Hommes, femmes, enfants, intellectuels, paysans, tous ont trouvé leur fin dans le ballet macabre des machettes. Peu après le début du massacre, la France a lancé l’opération Amaryllis, sous le commandement du général Henri Poncet, pour sauver ses ressortissants du brasier meurtrier.

Le 17 mai 1994, dans un geste tardif mais vital, la résolution 918 du Conseil de sécurité a donné un nouveau souffle à la MINUAR, permettant le déploiement de 5 500 casques bleus (MINUAR 2) dans une tentative désespérée d’endiguer le flot de violence. La mission prend position le 10 août. C’est presque à la même époque que le terme « génocide » est utilisé pour la première fois dans la résolution 925 du 8 juin 1994. Il est crucial de souligner le rôle de François Mitterrand, qui a effectivement exacerbé la situation du génocide. Alors que l’horreur se déchaînait au Rwanda, il déclarait : « Nos soldats ne sont pas destinés à faire la guerre partout. Nous n’avons pas les moyens de le faire et nos soldats ne peuvent pas être les arbitres internationaux des passions qui aujourd’hui bouleversent et déchirent tant et tant de pays ». En somme, il s’en lavait les mains !

Dans les coulisses du pouvoir, le général Christian Quesnot s’engage d’abord dans une joute verbale avec le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Alain Juppé, afin de le convaincre de l’urgence d’une intervention militaire. Face à cette pression, François Mitterrand consent à écouter son général, tandis que le Premier ministre, Edouard Balladur, donne son approbation sans hésitation, insistant sur le caractère exclusivement humanitaire de l’opération, « destinée à sauver des vies humaines, quelle que soit l’origine ethnique des personnes menacées ». Ainsi, le feu vert est donné pour le lancement de l’opération Turquoise, qui obtient la validation du Conseil de sécurité de l’ONU dans sa résolution 929, le 22 juin.

Parmi les soutiens de l’opération Turquoise figuraient des pays africains tels que le Sénégal, la Guinée-Bissau, le Tchad, la Mauritanie, l’Egypte, le Niger et le Congo. Les Etats-Unis, quant à eux, ont naturellement refusé de soutenir l’opération, en refusant de fournir des avions C-5 Galaxy. Dans ce contexte, la France a bénéficié de l’aide de la Russie, qui a envoyé des Antonov pour assister l’opération. Positionnée dans le cadre du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, qui autorise l’usage de la force, l’opération Turquoise demeure cadrée comme une mission purement humanitaire, et non militaire.

Dans l’ombre des montagnes, la France établit sa principale base à la frontière avec le Zaïre, érigeant son état-major dans la ville de Kikavu. Des années après le dénouement sanglant de ce génocide, les controverses perdurent. Les responsabilités semblent avoir été principalement attribuées aux Hutus, laissant le Front patriotique rwandais (FPR) indemne de toute accusation. Dès l’automne 1994, François-Xavier Verschave publiait un rapport, sous forme de livre, intitulé sans équivoque : Complicité de génocide ? La politique de la France au Rwanda. L’auteur, avec une lucidité sans égale, déclarait quatre ans plus tard : « Le point d’interrogation est une prudence de l’éditeur. Je le juge pour ma part superflu ». Les faits sont indéniables !

Dans un autre rapport édifiant, publié en 1999 par Human Rights Watch, en collaboration avec la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), le rôle du FPR de Paul Kagamé était minimisé. On le réduisait à un acteur ayant simplement mené une « victoire militaire et mis fin au génocide ». Pourtant, l’histoire pourrait être bien plus complexe que cela.

Le 17 juillet 1994, Paul Kagamé s’empare du pouvoir, bien que ses implications dans l’assassinat des deux chefs d’État du 6 avril 1994 n’aient pas encore été clairement établies. Gérard Prunier, consultant pour le ministère de la Défense à Paris lors de l’opération Turquoise, a également écrit un ouvrage sur le génocide rwandais. Selon lui, plus de 800 000 Tutsis ont été massacrés en trois mois, avec entre 10 000 et 30 000 Hutus également tués : une tragédie qui représente probablement l’un des taux de mortalité non naturelle les plus élevés jamais enregistrés dans le monde. En 2005, dans le livre de Pierre Péan Noires fureurs, blancs menteurs : Rwanda, 1990-1994, il est affirmé que le déferlement de violence a été simultanément orchestré par les forces de Paul Kagamé à l’encontre des Hutus.

Pierre Péan peint Paul Kagamé non pas comme un libérateur, mais comme un persécuteur sanguinaire, un conquistador moderne, habile à se présenter sous les traits d’un intellectuel généreux tout en commettant des actes criminels maléfiques. Pendant des années, les soldats français déployés sur le terrain lors de l’opération Turquoise sont restés muets, craignant d’être entraînés dans des procès publics. Pourtant, ces hommes ont décidé de briser le silence et de prendre la parole devant l’opinion publique. En juillet 2006, le général Jean-Claude Lafourcade, ancien commandant de l’opération Turquoise, a annoncé la création de l’association France-Turquoise. Son objectif : rassembler tous ceux qui aspirent à défendre et à promouvoir l’honneur de l’armée française et des soldats ayant servi au Rwanda.

François Mitterrand a fait le choix d’appuyer le régime criminel de Juvénal Habyarimana dès les premières années 1990, alors même que le génocide se tramait. Sa responsabilité politique dans ces événements est indéniable. Le 7 avril 1994, alors que le génocide débutait, la France reconnaissait et soutenait le gouvernement rwandais responsable de ces atrocités. Le 27 avril 1994, en plein génocide, alors que des innocents étaient atrocement mutilés, Jérôme Bicamumpaka, ministre des Affaires étrangères du Rwanda, et Jean-Bosco Barayagwiza, leader de la coalition pour la défense de la République composée d’extrémistes Hutus, étaient en visite diplomatique à Paris. Ils furent reçus à l’Élysée, à Matignon et au ministère de la Coopération. Pendant ce temps, le gouvernement français organisait l’évacuation d’Agathe Habyarimana, la veuve du président, connue pour représenter la faction dure du régime et soutenir financièrement la radio des « mille collines ».

La Palestine

Le conflit Israël-Palestine ne débute pas le 7 octobre 2023. Ses racines plongent dans le dépeçage de l’Empire ottoman au début du XXe siècle, une manœuvre orchestrée par les impérialismes français et britannique. En effet, la Palestine, ainsi qu’Israël, faisaient partie de la Grande Syrie, un territoire englobant la Palestine, Israël, la Syrie, la Jordanie, le Liban, l’Irak et certaines régions de l’actuelle Turquie. La Palestine était alors une province de l’Empire ottoman.

Le monde subit la Première Guerre mondiale entre 1914 et 1918. L’impérialisme britannique et la France partageaient un objectif commun : la chute de l’Empire ottoman. Comment dépecer un empire sans provoquer une rébellion de sa population ? En s’alliant avec une partie de celle-ci, naturellement. Les Britanniques et les Français cherchèrent donc le soutien des Arabes de Palestine. Des négociations furent entreprises entre les dirigeants arabes et le gouvernement britannique, développées en 1917 par T. E. Lawrence, un représentant britannique connu sous le surnom de Lawrence d’Arabie. Les Arabes, tombant dans le piège, acceptèrent de se révolter sous la bannière de l’impérialisme anglo-français. Ils posèrent toutefois une condition : la création d’un État arabo-musulman indépendant. Les premières négociations avaient eu lieu en 1915, menées par Henry MacMahon, un Britannique, et Hussein, le chérif de La Mecque. MacMahon promit à Hussein la création d’un État arabo-musulman indépendant et souverain.

En guise de cerise sur le gâteau empoisonné, les Britanniques firent une déclaration dont l’axe central fut le soutien des Juifs des différents pays du monde : la déclaration Balfour de 1917. Le piège se refermait sur les Arabes. En effet, la déclaration affirmait la nécessité d’un « foyer national juif » devant être établi en Palestine. La ville de Damas fut alors reprise par les troupes britanniques du général Allenby entre 1917 et 1918. Cette annexion fut réalisée sans bataille, car la probable opposition avait été neutralisée par les négociations. Pire encore, elle fut soutenue par certaines forces armées arabes.
L’année des accords Sykes-Picot et de la conférence de Paris.

Cependant, en 1916, des accords secrets furent signés entre les gouvernements britanniques et français, connus sous le nom d’accords Sykes-Picot, et naturellement soutenus par les sionistes. L’impérialisme utilise souvent la tactique des « deux fers au feu », consistant à garder plusieurs portes de sortie. C’est une position opportuniste, car l’impérialisme ne se préoccupe pas des futilités morales. Ainsi, tandis que les Britanniques et les Français faisaient de belles promesses aux peuples arabes, ils organisaient simultanément la colonisation de la future Palestine avec les sionistes.

L’Organisation sioniste mondiale (OSM) était alors représentée par Chaïm Weizmann, qui jouait un rôle clé dans la direction des politiques de l’impérialisme anglo-français. Le gouvernement français envisageait déjà d’établir un mandat sur la Syrie et le Liban avant 1948. La création de l’État d’Israël en 1948 marqua également la naissance de l’impérialo-sionisme. Ensuite, la conférence de Paris vit les pays victorieux de la Première Guerre mondiale finaliser leurs plans de colonisation de la Palestine. Le roi Fayçal Ier revendiquait les territoires légitimes de la Grande Syrie, incluant la Palestine. Cependant, lors de cette conférence, un accord fut trouvé entre Weizmann et Fayçal. Dans un retournement de situation, Fayçal reconnut la création d’un foyer national juif en Palestine.

Quelles en furent les conséquences ?
Les conséquences furent multiples, avec une montée des différents nationalismes. En avril 1920, la Conférence de San Remo eut lieu, précédée par de violentes émeutes à Jérusalem qui causèrent plus de dix morts et plusieurs dizaines de blessés. Ces troubles étaient orchestrés par le gouvernement britannique. Après cette conférence, la Palestine fut officiellement placée sous mandat britannique. Le roi Fayçal Ier fut chassé de la Palestine et Herbert Samuel, un fervent sioniste, fut nommé Haut-Commissaire pour la Palestine. Ce mandat marqua le début de luttes incessantes, attisant les velléités anti-colonialistes légitimes plutôt que de les apaiser.

Malgré plusieurs émeutes en 1921, le haut représentant de l’impérialo-sionisme, Winston Churchill, présenta en 1922 un Livre blanc. Dans ce document, le gouvernement britannique réaffirmait l’obligation de créer un foyer national juif en Palestine, tout en attribuant les territoires situés à l’est du Jourdain aux Arabes. En réalité, ce Livre blanc servait de feuille de route colonialiste. L’émir Abdallah, l’un des fils de Hussein, fut nommé dirigeant du territoire arabe à l’est, tandis que le territoire sioniste se situait à l’ouest du Jourdain. Chaïm Weizmann revendiqua alors le droit d’établir un foyer juif sur l’ensemble du territoire, incluant l’Est du Jourdain. Face à cette avancée, le peuple arabe résista héroïquement aux colonisateurs. En réponse à cette résistance, l’Agence juive fut créée en 1929, devenant un véritable proto-État qui favorisa une immigration juive massive en Palestine.

L’État arabe indépendant n’ayant toujours pas été proclamé, la révolte arabe de 1936-1939 éclata naturellement. Cette insurrection fut sévèrement réprimée, faisant plus de 5 000 morts du côté arabe. En 1939, les colonisateurs présentèrent un troisième Livre blanc. Une fois de plus, la création d’un État arabe indépendant et souverain y était promise, mais cette fois dans un délai maximal de dix ans. Les colonisateurs sionistes recoururent largement à l’action directe. Finalement, après d’innombrables violences contre la résistance palestinienne, l’État d’Israël fut créé en 1948.

Le 7 octobre 2023
Cette contre-offensive de la résistance palestinienne marquera à jamais l’histoire. Le sujet est brûlant. L’action du 7 octobre 2023 a été entachée de manipulations, de mensonges, ainsi que de terreur et de répression idéologique orchestrées par les colonisateurs et leurs alliés.

105 ans de colonialisme : un génocide…

La résistance palestinienne a rappelé que la lutte contre l’occupation et le colonialisme ne débutait pas le 7 octobre, mais qu’elle avait débuté il y a 105 ans, incluant 30 ans de colonialisme britannique et 75 ans d’occupation sioniste. Elle a souligné le nombre tragique de Palestiniens tués au cours des 23 dernières années, dénonçant le manque d’initiative des États-Unis et de leurs alliés pour enquêter sur les événements du 7 octobre 2023. Le Hamas a critiqué le soutien accordé à la version israélienne, accusant ces pays de condamner à tort un prétendu ciblage de civils israéliens. Ensuite, le Hamas a exposé les raisons de son attaque militaire, désignée comme « black saturday » en Israël et qualifiée d’ »opération terroriste » par les gouvernements occidentaux.
Le Hamas expose les raisons de son attaque militaire, qualifiée de « terroriste » par les gouvernements occidentaux et de « samedi noir » en Israël :

Après 75 ans d’occupation et de souffrances constantes, suite à l’échec de toutes les initiatives de libération et de retour pour notre peuple, ainsi que les résultats désastreux du soi-disant processus de paix, le monde attendait une réponse du peuple palestinien face à :

• Les plans israéliens visant à judaïser la mosquée Al-Aqsa, les tentatives de division temporelle et spatiale, et l’intensification des incursions des colons israéliens dans la sainte mosquée.
• Les pratiques du gouvernement israélien d’extrême droite visant à annexer toute la région de la Cisjordanie et de Jérusalem sous la prétendue « souveraineté d’Israël », ainsi que les menaces d’expulsion des Palestiniens de leurs foyers et quartiers.
• La détention de milliers de Palestiniens dans les prisons israéliennes, privés de leurs droits fondamentaux, soumis à des pressions et à des agressions sous la supervision directe du ministre israélien Itamar Ben-Gvir.
• Le blocus injuste imposé à la bande de Gaza depuis 17 ans, comprenant des restrictions aériennes, maritimes et terrestres.
• Après avoir exposé ces points, le Hamas souligne également :
• L’expansion sans précédent des colonies israéliennes en Cisjordanie, accompagnée de la violence quotidienne des colons à l’encontre des Palestiniens et de leurs biens.
• La situation difficile des sept millions de Palestiniens vivant dans des conditions extrêmes dans des camps de réfugiés et ailleurs, désirant retourner sur leurs terres, dont ils ont été expulsés il y a 75 ans.
• Face à cette situation, quelle était l’attente pour le peuple palestinien ? Qu’il continue à attendre et à compter sur l’impuissance de l’ONU ? Ou qu’il prenne l’initiative de défendre ses terres, sachant que le droit à l’autodéfense est ancré dans les lois, les normes et les conventions internationales.
• Dans ce contexte, l’opération « déluge d’Al-Aqsa » du 7 octobre était perçue comme une étape nécessaire et une réponse légitime à toutes les conspirations israéliennes contre le peuple palestinien et sa cause. C’était un acte défensif visant à mettre fin à l’occupation israélienne, à rétablir les droits des Palestiniens et à progresser vers la libération et l’indépendance.

Les fake news d’Israël étrillées

Dans cette partie de leur récit, les porte-parole du Hamas démystifient une série de fausses informations propagées par Israël et relayées en Occident, rejoignant ainsi les enquêtes journalistiques indépendantes qui ont remis en question la justification « antiterroriste » des opérations à Gaza. Ils soulignent un bilan humain tragique, avec plus de 25 295 Palestiniens tués, 63 000 blessés et près de 2 millions de déplacés.

Le Hamas rejette catégoriquement les allégations israéliennes selon lesquelles les Brigades Al-Qassam auraient ciblé des civils israéliens le 7 octobre, les qualifiant de mensonges et de fabrications destinés à diaboliser la résistance palestinienne. Ils soulignent que ces allégations sont basées sur le récit officiel israélien, sans aucune preuve indépendante pour les étayer. Ils critiquent également la tendance du discours officiel israélien à diaboliser la résistance palestinienne tout en justifiant ses actions à Gaza.

Le Hamas énumère ensuite quelques éléments troublants pour Israël et ses alliés, affirmant que ces faits remettent en question les récits officiels et les justifications de l’occupation israélienne :

• Les enregistrements vidéo de la journée du 7 octobre, ainsi que les témoignages ultérieurs d’Israéliens, ont démontré que les combattants des Brigades Al-Qassam n’ont pas ciblé de civils. Au contraire, de nombreux Israéliens ont été victimes de tirs de l’armée et de la police israéliennes, résultant de la confusion sur le terrain.
• Le mensonge selon lequel les combattants palestiniens auraient décapité 40 bébés a été fermement réfuté, même par des sources israéliennes. Malgré cela, de nombreuses agences de presse occidentales ont malheureusement relayé cette allégation sans discernement.

• La notion selon laquelle les combattants palestiniens auraient commis des viols sur des femmes israéliennes a été complètement réfutée, y compris par le Hamas lui-même. Par exemple, un rapport du site d’information Mondoweiss daté du 1er décembre 2023 a déclaré qu’aucune preuve de « viols massifs » commis par des membres du Hamas le 7 octobre n’a été trouvée, et qu’Israël a utilisé cette allégation pour justifier ses actions à Gaza.
• Deux rapports du journal israélien Yedioth Ahronoth (daté du 10 octobre) et du journal Haaretz (daté du 18 novembre) ont révélé que de nombreux civils israéliens ont été tués par un hélicoptère militaire israélien, notamment lors d’un festival de musique près de Gaza. Ces rapports indiquent que les combattants du Hamas sont arrivés dans la zone du festival sans en avoir eu connaissance au préalable. L’hélicoptère israélien a ouvert le feu sur les combattants du Hamas ainsi que sur les participants au festival, causant la mort de 364 civils israéliens. Yedioth Ahronoth a également signalé que l’armée israélienne a ciblé plus de 300 sites dans les zones environnantes de la bande de Gaza.
• D’autres témoignages israéliens ont corroboré le fait que les raids de l’armée israélienne et les opérations des soldats ont entraîné la mort de nombreux captifs israéliens ainsi que de leurs ravisseurs. L’armée israélienne a bombardé les maisons des colonies israéliennes où se trouvaient à la fois des combattants palestiniens et des Israéliens. Cette action semble être une application directe de la célèbre « directive Hannibal » de l’armée israélienne, qui stipule clairement qu’il vaut mieux qu’un otage civil ou un soldat soit tué plutôt que capturé vivant, afin d’éviter de se retrouver impliqué dans un échange de prisonniers avec la résistance palestinienne.
• En outre, les autorités d’occupation ont revu à la baisse le nombre de leurs soldats et civils tués, passant de 1 400 à 1 200, après avoir réalisé que 200 des cadavres brûlés étaient en fait des combattants palestiniens qui avaient été tués et mêlés aux cadavres israéliens. Cela suggère que ceux qui ont tué les combattants sont également responsables des morts israéliennes. Il est à noter que seule l’armée israélienne possède des avions militaires ayant pu effectuer des frappes, brûler et détruire des zones israéliennes le 7 octobre.

L’os médiatique à ronger

Sans surprise, l’unique partie du document sur laquelle se sont rués les médias « israélo-embarqués » est celle où le Hamas admet, du bout des lèvres, que « s’il y a eu des cas de ciblage de civils [israéliens, le 7 octobre], cela s’est produit accidentellement et au cours de la confrontation avec les forces d’occupation. ».

Pour autant, les auteurs palestiniens réfutent le narratif central d’Israël les accusant d’avoir prémédité et perpétré des massacres de civils israéliens. « Il est possible que des erreurs se soient produites lors de la mise en œuvre de l’opération déluge d’Al-Aqsa, en raison de l’effondrement rapide du système sécuritaire et militaire israélien et du chaos causé le long des zones frontalières avec Gaza », tempère le document du Hamas.

« Comme l’ont attesté de nombreuses personnes, le mouvement Hamas s’est comporté de manière positive et aimable avec tous les civils qui ont été détenus à Gaza, et a cherché, dès les premiers jours de l’agression, à les libérer ; c’est ce qui s’est passé pendant la trêve humanitaire d’une semaine, durant laquelle des civils ont été libérés en échange de la libération de femmes et d’enfants palestiniens détenus dans les prisons israéliennes. »

Avant d’en déduire que « les allégations de l’occupation israélienne selon lesquelles les Brigades Al-Qassam auraient, le 7 octobre, pris pour cible des civils israéliens ne sont rien d’autre que des mensonges et des fabrications. La source de ces allégations est le récit officiel israélien et aucune source indépendante n’a prouvé ces allégations. Il est bien connu que le discours officiel israélien a toujours cherché à diaboliser la résistance palestinienne tout en légalisant son agression brutale sur Gaza. »

Appel pour une enquête internationale

Dans la troisième partie, le Hamas estime que « Le peuple palestinien et les peuples du monde entier se rendent compte de l’ampleur des mensonges et des tromperies que les gouvernements qui soutiennent le discours israélien pratiquent pour tenter de justifier leur action. ».

Puis, il fustige « les gouvernements qui soutiennent le discours israélien […], connaissent les causes profondes du conflit, à savoir l’occupation et le déni du droit du peuple palestinien à vivre dignement sur ses terres. Ces pays ne s’intéressent pas à la poursuite du blocus injuste imposé à des millions de Palestiniens à Gaza, et ne s’intéressent pas non plus aux milliers de Palestiniens détenus dans les prisons israéliennes dans des conditions où leurs droits fondamentaux sont le plus souvent bafoués. »

Avec un certains sens de l’équilibre, le Mouvement islamique salue ensuite « les peuples libres du monde entier, de toutes religions, ethnies et origines, qui se rassemblent dans toutes les capitales et villes du monde pour exprimer leur rejet des crimes et massacres israéliens, et pour montrer leur soutien aux droits du peuple palestinien et à sa juste cause. »

Avant d’en appeler à la tenue d’une enquête internationale portant sur les événements meurtriers du 7 octobre : « Nous sommes convaincus que toute enquête équitable et indépendante prouvera la véracité de notre récit et l’ampleur des mensonges et des informations trompeuses du côté israélien. Cela inclut également les allégations israéliennes concernant les hôpitaux de Gaza, selon lesquelles la résistance les utilisait comme centres de commandement ; une allégation qui n’a pas été prouvée et qui a été réfutée par les rapports de nombreux journaux et agences de presse occidentales. »

Rejet de l’antisémitisme

Une fois n’est pas coutume, le Mouvement islamique de libération nationale conteste l’antisémitisme que nombre d’Institutions, de médias mainstream et de lobbies occidentaux lui attribuent. Le Hamas « affirme que son conflit est avec le projet sioniste et non avec les Juifs en raison de leur religion. Le Hamas ne mène pas une lutte contre les Juifs parce qu’ils sont juifs mais lutte contre les sionistes qui occupent la Palestine. »

Et les auteurs du narratif d’enfoncer le clou : « Sur la base de nos valeurs religieuses et morales, nous avons clairement exprimé notre rejet de ce à quoi les Juifs ont été exposés par l’Allemagne nazie […] Le conflit actuel est causé par le comportement agressif du sionisme et son alliance avec les puissances coloniales occidentales. Nous rejetons l’exploitation des souffrances des juifs en Europe pour justifier l’oppression contre notre peuple en Palestine. »

Il est peu probable que des dirigeants tels que Biden, Sunak, von der Leyen, Macron et De Croo accordent une quelconque crédibilité à ces déclarations antiracistes du Hamas. Malgré les affirmations du Hamas, ces dirigeants démocratiques semblent avoir choisi de soutenir Israël, malgré les accusations de racisme anti-palestinien et les actions qui pourraient être qualifiées de génocide, perpétrées par cet État colonial et d’apartheid au Moyen-Orient.

Quoi qu’il advienne, pour le Hamas « les superpuissances, en particulier les États-Unis, le Royaume-Uni et la France, doivent cesser d’offrir à l’entité sioniste une couverture qui lui permette de se soustraire à ses responsabilités et doivent cesser de traiter avec elle comme avec un pays au-dessus des lois. Ce comportement injuste de la part de ces pays a permis à l’occupation israélienne, pendant 75 ans, de commettre les pires crimes jamais commis contre le peuple, la terre et les valeurs sacrées des Palestiniens. Nous demandons instamment aux pays du monde entier d’assumer leurs responsabilités à l’égard du droit international et des résolutions pertinentes de l’ONU qui appellent à mettre fin à l’occupation. »

En conclusion, le Mouvement de résistance armée appelle aussi « les peuples libres du monde entier, en particulier les nations qui ont été colonisées et qui se rendent compte de la souffrance du peuple palestinien […] à lancer un mouvement mondial de solidarité avec le peuple palestinien, à mettre l’accent sur les valeurs de justice et d’égalité et sur le droit des peuples à vivre dans la liberté et la dignité. »

Conclusion

Jean Jaurès exprimait que le capitalisme, tel une nuée porteuse d’orage, engendre inévitablement la guerre. Ces conflits surviennent lorsque le monde déjà partagé ne laisse plus qu’une part limitée à partager, ou lorsque certains, par avidité, désirent encore plus de parts du gâteau. Les périodes de prospérité capitaliste sont marquées par un équilibre entre les classes sociales, où la classe populaire reçoit des miettes suffisantes pour maintenir la paix sociale. Cependant, lors des périodes de déclin du capitalisme, la classe populaire lutte à peine pour sa survie. Si elle est politiquement organisée, elle peut se défendre, mais sans cette organisation, elle devient une proie facile pour les désirs destructeurs de sa classe exploiteuse, souvent représentée par des élites politiquement organisées. Ce manque d’organisation de la classe populaire est exposé de manière criante dans les reportages capitalistes. Dans ces conditions, la classe populaire devient une proie facile pour la classe capitaliste guerrière, agissant tel un loup face à un mouton isolé, prête à être dévorée par les appétits de profit. Lorsque le capitalisme est affamé, il peut même sombrer dans le génocide, dévorant de manière intentionnelle de multiples « moutons » pour sa propre survie.

Existe-t-il un cadre légal définissant ce qu’est un génocide ?
La Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1948, fournit une définition juridique précise du génocide. Selon cette convention :

A) Le génocide implique le meurtre intentionnel de membres d’un groupe particulier en raison de leur appartenance à ce groupe.
B) Il comprend également des actes constituant une atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale des membres du groupe, tels que des actes de torture, de mutilation ou de traumatisme psychologique.
C) Le génocide peut également se manifester par la mise en place intentionnelle de conditions de vie visant à entraîner la destruction physique totale ou partielle du groupe, telles que des privations alimentaires, des conditions de travail inhumaines ou des expulsions forcées de territoires habités par le groupe.
D) Il englobe également des mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe, telles que des stérilisations forcées, des avortements forcés ou des politiques coercitives de contrôle des naissances.
E) Enfin, le génocide peut inclure le transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe, dans le but de les priver de leur identité culturelle, ethnique ou religieuse.
Ces actes doivent être commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, et constituent ainsi une violation grave du droit international humanitaire. La convention engage les États signataires à prévenir et à punir le crime de génocide.

La Palestine est un exemple frappant illustrant le concept de génocide, où l’intention derrière les actions est clairement identifiable. Les bombardements délibérés menés par le gouvernement israélien ont entraîné la mort de milliers d’enfants et des mutilations atroces parmi la population civile. Ces actes de violence ont été fermement condamnés par la communauté internationale, avec des organes judiciaires tels que la Cour pénale internationale (CPI) et la Cour internationale de Justice (CIJ) reconnaissant certains dirigeants du gouvernement israélien coupables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

Parmi les atrocités perpétrées, on retrouve l’utilisation intentionnelle de la famine comme arme de guerre, des exécutions sommaires d’enfants, des actes de torture, des massacres de civils innocents, des viols, ainsi que d’autres formes de violence systématique. Ces actions témoignent d’une brutalité inhumaine qui va à l’encontre des principes fondamentaux de la dignité humaine et des droits de l’homme.

Malgré ces condamnations internationales et les preuves accablantes des crimes commis, les dirigeants du gouvernement israélien persistent dans leur refus de se conformer aux décisions des instances judiciaires internationales. Cette attitude de désobéissance flagrante soulève des questions fondamentales sur la primauté du droit et l’obligation de rendre des comptes, en particulier lorsque les puissances politiques et militaires dominantes cherchent à préserver leur propre pouvoir et à maintenir leur emprise sur des territoires contestés.
Cette désobéissance délibérée de la part de Washington et de Tel Aviv met en lumière les réalités de l’impérialisme contemporain, où les intérêts géopolitiques et économiques priment sur les principes moraux et éthiques. En fin de compte, c’est la population innocente qui paie le prix le plus lourd dans ce conflit, victime d’une violence dévastatrice et d’une injustice persistante.
Ce qui rend la confirmation la plus difficile est certainement la notion d’ »intention ». Parfois, cette intention est clairement identifiable, contrairement à ce que l’on pourrait penser. La Palestine est un exemple frappant de ce qu’est un génocide avec une intention clairement identifiée. Des milliers d’enfants ont été tués et d’autres atrocement mutilés, conséquences des bombardements orchestrés par le gouvernement d’Israël. Les actes atroces commis par l’armée israélienne ont été condamnés par deux instances internationales capables de cibler précisément ces intentions clairement identifiées. La Cour pénale internationale (CPI) et la Cour internationale de justice (CIJ) ont condamné certains dirigeants du gouvernement israélien pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Le gouvernement d’Israël a intentionnellement utilisé la famine comme une arme de guerre, a perpétré des exécutions d’enfants, des tortures, des massacres (des soldats israéliens ont été vus se tenant devant des cadavres en riant et en chantant), des tortures insensées d’enfants souffrant de la famine, des vols, des viols. L’armée autrefois présentée comme la « plus morale du monde » a démontré être l’une des plus « barbares », comme en témoigne la condamnation de la CIJ et de la CPI. Il est également évident que ces dirigeants ne se conforment pas aux décisions de ces instances internationales.
Pour comprendre cette posture de désobéissance claire de Washington/Tel Aviv, il est nécessaire de revenir sur la nature de l’impérialisme.

L’impérialisme est intrinsèquement génocidaire. Il représente le stade le plus avancé du capitalisme. L’utilisation du terme « suprême » ne suggère pas une phase finale au-delà de laquelle il n’y aurait plus de développement, mais plutôt un niveau de puissance supérieur. Dans le cadre du mode de production capitaliste, cette notion de puissance est également associée à celle de parasitage. Les puissances économiques, sociales et politiques qui émergent à ce stade suprême, c’est-à-dire l’impérialisme, ont pour effet principal de détruire nos vies.

Au stade impérialiste du capitalisme, le capital financier devient prédominant. Celui-ci résulte de la fusion entre les capitaux bancaires et les capitaux industriels. En 2024, une partie importante de ce capital financier est dématérialisée et opère sur les marchés financiers. Cette transformation accentue la spéculation et la volatilité des marchés, contribuant ainsi à la précarisation de nombreuses populations à travers le monde.

Le capital financier représente l’une des caractéristiques prépondérantes de l’impérialisme. Il a donné naissance à ce que l’on appelle l’oligarchie financière, une élite politique parasitaire qui domine les marchés financiers et spécule dans le but de générer toujours plus de richesses. Cette concentration de puissance économique est si importante que l’oligarchie financière exerce un contrôle sur les États eux-mêmes. En effet, ce ne sont pas les États qui dictent les directives à l’oligarchie, mais bien l’inverse : c’est l’oligarchie financière qui dicte ses ordres aux États.

Cette oligarchie a modelé le monde à son image, créant un environnement où les frontières deviennent de moins en moins significatives. En conséquence, certaines oligarchies de différents pays forment des alliances et des cartels qui entrent souvent en conflit avec d’autres alliances, indépendamment des positions politiques des États. De nos jours, les États ne sont plus les acteurs principaux de la politique, mais servent plutôt de relais pour les intérêts de l’oligarchie financière. Ils agissent comme des exécutants habillés en costumes, mettant en œuvre les décisions dictées par les intérêts financiers plutôt que par les besoins de leurs populations ou les valeurs démocratiques.

L’équation est simple : l’impérialisme est le stade ultime du capitalisme, caractérisé par l’émergence du capital financier et de l’oligarchie financière, qui forme des cartels, des monopoles ou des alliances. Cette élite politique mondiale exécute des ordres dictés par ces intérêts financiers. Parmi les cartels les plus puissants et dangereux figure probablement celui de Washington et Tel Aviv. Les instances comme la Cour pénale internationale (CPI) ou la Cour internationale de Justice (CIJ) peuvent sembler neutres, mais elles sont impuissantes face à ces cartels. La condamnation systématique du Hamas, quel que soit le contexte, est une simplification trompeuse de l’histoire. C’est une directive politico-médiatique visant à masquer la réalité selon laquelle ces cartels exploitent le monde et ses peuples.

De plus, la question de savoir si le Hamas est une organisation terroriste ne peut être tranchée que par le peuple palestinien lui-même, conformément au principe fondamental de l’autodétermination des peuples. Considérer le Hamas comme une organisation terroriste ne peut être établi par le simple massacre du peuple palestinien. La reconnaissance de l’État de Palestine, ainsi que des conditions de vie dignes pour le peuple palestinien, lui permettrait de déterminer lui-même la nature du Hamas. De plus, bien que le Hamas soit désigné comme une organisation terroriste par une trentaine de pays, dont la plupart sont européens, cela ne représente pas une approbation mondiale unanime, étant donné qu’il existe 197 pays dans le monde.

Ce cartel vise principalement à contrer l’émergence d’un nouveau paysage mondial. Nous observons l’avènement d’un monde multipolaire mené par l’alliance entre la Chine et la Russie. L’axe Washington/Tel Aviv cherche à contrer cette transition vers un monde dédollarisé, où plus de 40% de la population mondiale est concentrée. Pour maintenir sa domination mondiale et augmenter ses profits, ce cartel a besoin de deux éléments essentiels : une force de travail et des moyens de production. Or, la majorité de ces éléments se trouvent dans le bloc de l’Est, dirigé par la Chine et la Russie, plutôt que dans le bloc de l’Ouest dominé par le cartel Washington/Tel Aviv.

Cette perspective économique et politique souligne le caractère implacable des acteurs impérialistes, prêts à recourir à tous les moyens, y compris le génocide, pour préserver leur hégémonie. L’impérialisme ou le capitalisme monopoliste ne recule devant rien pour maintenir son « paradis terrestre » et est prêt à sacrifier des vies humaines pour accroître ses profits. Cette idéologie est profondément égoïste, égocentrique et violente. L’impérialisme et ses cartels représentent une menace pour l’humanité, l’impérialo-sionisme étant l’une de ses manifestations les plus barbares, mais non la seule. La solution réside dans la solidarité des peuples opprimés face à cette menace commune.

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Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir

À propos de l'auteur Le Grand Soir

« Journal Militant d'Information Alternative » « Informer n'est pas une liberté pour la presse mais un devoir »C'est quoi, Le Grand Soir ? Bonne question. Un journal qui ne croit plus aux "médias de masse"... Un journal radicalement opposé au "Clash des civilisations", c'est certain. Anti-impérialiste, c'est sûr. Anticapitaliste, ça va de soi. Un journal qui ne court pas après l'actualité immédiate (ça fatigue de courir et pour quel résultat à la fin ?) Un journal qui croit au sens des mots "solidarité" et "internationalisme". Un journal qui accorde la priorité et le bénéfice du doute à ceux qui sont en "situation de résistance". Un journal qui se méfie du gauchisme (cet art de tirer contre son camp). Donc un journal qui se méfie des critiques faciles à distance. Un journal radical, mais pas extrémiste. Un journal qui essaie de donner à lire et à réfléchir (à vous de juger). Un journal animé par des militants qui ne se prennent pas trop au sérieux mais qui prennent leur combat très au sérieux.

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