par Alexandre Lemoine
Des articles avec une critique soudainement sévère de Volodymyr Zelensky ont commencé à apparaître dans les médias. « L’icône de la démocratie ukrainienne » a été critiquée pour la purge du champ politique, les tendances dictatoriales et la corruption dans le cadre du scandale de Pandora Papers. Les interlocuteurs du magazine Politico ont prédit un autre Maïdan et ont même indiqué sa date éventuelle.
« Vous savez, le Maïdan peut se reproduire », a prédit un ancien ministre ukrainien à Politico, qui a publié le 18 avril un article détaillé sur la possibilité d’une nouvelle révolution en Ukraine, après l’opération militaire spéciale ou sur fond d’hostilités. Cet ancien ministre ukrainien a partagé son opinion sous couvert d’anonymat, craignant de « donner un prétexte de propagande à la Russie » et de saper le moral des forces armées ukrainiennes.
La députée ukrainienne Irina Sovsoun, du parti Voix, s’est également exprimée dans ce sens, mais sans se cacher. « J’étais dans les rues pendant la révolution orange en 2004 et j’ai de nouveau participé aux actions de rue (pendant l’Euromaïdan) en 2014 », a déclaré la députée au média américain. Selon elle, les Ukrainiens ont tendance à « organiser des révolutions » tous les 10 ans et « ce seuil approche ». Selon cette logique, le prochain Maïdan devrait être attendu en 2024, quand la prochaine élection présidentielle devrait est prévue en Ukraine.
Les évènements de 2014 ont eu des « conséquences imprévues », qui sont les hostilités actuelles, note Politico. Et, comme indiqué dans la publication du média américain, des griefs s’accumulent contre Volodymyr Zelensky dans le milieu politique ukrainien.
« Depuis un an, Zelensky est loué comme une icône de la démocratie… Et sa rhétorique belliqueuse inspirante et son éloquence envoûtante ont joué un rôle important pour convaincre les États-Unis et l’Europe de soutenir l’Ukraine », rapporte Politico. Cependant, l’ancien ministre anonyme a expliqué au magazine que Volodymyr Zelensky s’était révélé être un leader aux tendances autocratiques.
Se référant aux évaluations des analystes, Politico note que le taux d’approbation actuel du président ukrainien de 84% est le résultat d’un « rassemblement autour du drapeau » (c’est-à-dire un effet de la propagande militaire), alors qu’avant le début de l’opération militaire spéciale, le niveau d’approbation du chef d’État était en constante baisse. Son soutien avait chuté à un moment donné à 11% après le licenciement du premier ministre réformiste (Oleksiï Gontcharouk), l’inclusion d’amis et d’anciens partenaires commerciaux dans le gouvernement et les échecs dans la lutte contre la corruption.
Politico rappelle également la purge du champ politique lancée par Volodymyr Zelensky à la veille de l’opération militaire spéciale, les sanctions personnelles contre les opposants « au nom de la lutte contre l’agression russe » et la volonté de construire une « démocratie dirigée » avec la domination du parti proprésidentiel Serviteur du peuple.
Enfin, le magazine indique que quatre mois avant le début de l’opération spéciale russe, « Zelensky et deux personnes proches de lui ont été impliqués dans des activités financières offshore ». Politico fait référence aux documents Pandora Papers qui montrent que Volodymyr Zelensky a continué à percevoir des bénéfices via des sociétés offshore créées avant son élection à la présidence.
Lorsque la purge récente du milieu politique ukrainien a été menée par des structures américaines, elle n’a pas affecté le dirigeant ukrainien.
Rappelons qu’en janvier a été annoncée simultanément la démission du chef adjoint du bureau du président de l’Ukraine, Kirill Timochenko, du vice-ministre de la Défense, Viatcheslav Chapovalov, et du vice-procureur général, Oleksiï Simonenko. Il a été suggéré que la purge, principalement dans le bureau présidentiel, a été initiée par l’Agence nationale de lutte contre la corruption (NABU), créée en 2015 à la demande des États-Unis et considérée comme un outil de contrôle externe américain.
La publication en soi dans Politico d’un article critiquant Volodymyr Zelensky et prédisant un éventuel Maïdan est probablement un signe que le président en exercice n’est pas très apprécié aux États-Unis.
D’un autre côté, si l’on revient aux prédictions d’un troisième Maïdan, il faut se rappeler qu’après 2014, aucune tentative de convertir le mécontentement économique ou politique en actions de protestation à grande échelle n’a été couronnée de succès.
Il est possible que la question relative à Volodymyr Zelensky soit résolue « par la voie démocratique et légale », pendant le cycle électoral de 2024. Rappelons que les deux Maïdan étaient associées aux élections présidentielles.
La prochaine présidentielle aura lieu en octobre 2024, et les résultats seront comptés de sorte que Volodymyr Zelensky ne sera soudainement plus président.
Dans ce contexte, il convient d’examiner de plus près la figure qui était considérée presque comme le leader potentiel d’un coup d’État militaire. Les médias évoquent depuis longtemps un conflit au sommet du pouvoir ukrainien, et à cet égard la figure du commandant en chef des forces armées ukrainiennes, Valeri Zaloujny, est mentionnée. Ainsi, en mars, le journal allemand Bild a fait état d’une dispute entre MM. Zelensky et Zaloujny en raison de divergences de vues sur les actions tactiques à Bakhmout.
Valeri Zaloujny bénéficie d’une grande confiance des généraux de l’armée ukrainienne, contrairement à Volodymyr Zelensky. Un certain nombre d’experts estiment que l’option d’un coup d’État au sommet en Ukraine est la plus probable dans les conditions actuelles.
D’autres, en revanche, ne sont pas enclins à prendre au sérieux le « facteur Zaloujny », estimant qu’il n’est pas une figure suffisamment importante en termes de charisme ou d’intelligence. Cependant, selon eux, les États-Unis pourraient impliquer Valeri Zaloujny dans un autre scénario pour un « transit démocratique du pouvoir », où le premier mandat de Volodymyr Zelensky serait également le dernier. Les politologues estiment qu’il est tout à fait possible que le chef d’état-major des forces armées ukrainiennes se présente à l’élection en tant qu’alternative au président sortant et le batte.
source : Observateur Continental
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