Dans la vidéo ci-dessous, Kitty Demure, drag-queen professionnel, rappelle aux parents qui emmènent leurs enfants assister à des spectacles de drags, aux responsables qui mettent en place des programmes de « lecture aux enfants » par les drags dans les bibliothèques publiques et aux drag-queens eux-mêmes, transsexuels ou non, que la performance des drag-queens est intrinsèquement sexuelle. Qu’il s’agit d’une performance hypersexualisée destinée à un public adulte. D’un divertissement pour adultes. Qu’il est parfaitement incompréhensible que des parents exposent des enfants à la vision d’attributs sexuels hypertrophiés mis en scène dans des chorégraphies obscènes. Qu’il lui est incompréhensible que les exécutants eux-mêmes ne soient pas mal à l’aise à l’idée de tortiller du cul et d’agiter leurs nichons (vrais-faux ou faux) devant des enfants.
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Ce mouvement est un mouvement d’hommes adultes, gays ou hétérosexuels, autogynéphiles extrêmes ou légers, au cœur duquel se trouve l’objectification et l’hypersexualisation des femmes par des hommes.
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Kitty Demure dénonce aussi à juste titre le fait que les jeunes enfants ne sont pas en mesure de comprendre que les personnages grotesques qui se trémoussent devant eux ne sont pas des femmes, et que les jeunes enfants assimilent donc les femmes à ce que montrent les drags dans leurs performances. Qu’ils assimilent les femmes au fait d’écarter les cuisses et d’être maquillé comme un camion volé.
L’un des premiers — sinon le premier — magazines consacrés aux drag-queens, aux États-Unis, s’intitulait Female Mimics, soit « Imitations de femmes », et avait pour sous-titre « Les meilleurs imitateurs de femmes au monde » (« impersonators » en anglais). Dans les premières pages du premier numéro, paru en 1963, on apprend qu’un « imitateur de femmes » est « un homme qui s’habille avec les vêtements du sexe opposé et qui, grâce à son imagination, et aidé par les vêtements, est capable de se transformer, comme par magie, en une femme ».
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Le troisième numéro de Female Mimics (1963) :
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Un numéro plus récent (1997) de Female Mimics International :
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Un des derniers numéros du magazine Drag (paru en 1980) [ATTENTION : pornographie, nudité] :
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Toujours dans le premier numéro de Female Mimics, suite à la définition de l’imitateur de femmes s’ensuivent, afin de rationaliser, de défendre et de justifier cette pratique, des exemples d’hommes illustres qui aimaient apparemment à « s’habiller en femmes », et qui « prenaient un grand plaisir à les représenter », comme Jules César, Néron ou Louis XIV. Le magazine explique en outre que : « Les “imitateurs de femmes” professionnels sont devenus populaires en Amérique à la fin des années 1800. La plupart des premiers spectacles de ménestrels comprenaient un numéro avec un imitateur de femme dans un sketch comique. À l’époque du vaudeville, de nombreux artistes sont devenus célèbres pour leurs imitations amusantes de femmes. »
Dans les pages suivantes, on nous présente « Bambi », un drag-queen[1] (ou travesti) parisien, travaillant au cabaret Le Carrousel. « Bambi use de deux artifices qui ajoutent à la crédibilité de son numéro : il évite la perruque et a laissé pousser ses propres cheveux à une longueur de femme [SIC] ; il a suivi un traitement hormonal pour que sa poitrine prenne les doux contours de la féminité. Artiste de talent, Bambi chante, danse, et sait imiter les actrices françaises célèbres… »
Mais il y a plus : « Contrairement aux imitateurs américains, Bambi ne se débarrasse pas de son apparence de femme en dehors de la scène. À la maison, il cuisine, coud, tient la maison comme n’importe quelle jeune fille de carrière. [SIC] »
Les hommes qui éditent ce magazine emploient de manière parfaitement indifférenciée les termes « femme », « femelle », « fille » ou « féminité ». Ils ne font aucune différence entre les « femelles adultes de l’espèce humaine » et les stéréotypes sexistes de leur culture, c’est-à-dire, les rôles sociosexuels imposés aux femmes, c’est-à-dire aux femelles humaines, ainsi que tous les attributs comportementaux et vestimentaires de la subordination : soumission, passivité, douceur, salope en chaleur, vêtements inconfortables et contraignant, sexualisation de l’apparence, objectification et pornification du corps via des positions contorsionnées et maniérées, attraction « naturelle » pour la cuisine, le ménage et la vaisselle. Pour eux, être femme c’est correspondre à ces stéréotypes. La femme n’est rien d’autre que l’ensemble des représentations stéréotypiques et des rôles sociosexuels conçut par les hommes et qu’on appelle la féminité.
Et comme le fait remarquer Kitty Demure, les drag-queens qui tiennent absolument à se donner en représentation devant les enfants font passer leur communauté pour des pédophiles.
Le drag-queen a dès le départ consisté et consiste par définition en l’objectification extrême des femmes par des membres de la classe sexuelle dominante dans la phallocratie. Justement parce qu’il s’agit d’hommes, ceux-ci ont très vite pu légitimer leurs pratiques assimilées à l’homosexualité, et que le grand public associait également à l’homosexualité. Le drag-queen, c’est la moquerie ultime de l’oppression des femmes, c’est la sexualisation d’un état de subordination injuste dans une société de domination. C’est un loisir, une performance d’excitation libidineuse d’oppresseur. C’est l’érotisation ou la fétichisation de l’oppression des femmes, dans le sens où c’est l’érotisation ou la fétichisation des rôles sociosexuels, des stéréotypes comportements et vestimentaires qui sont assignés aux femmes.
Comme l’a écrit la philosophe et féministe Marilyn Frye dans sa collection d’essais intitulée The Politics of Reality (Politique de la réalité) :
« Parmi les choses qui laissent accroire au monde hétéro que les homosexuels ne sont pas vraiment des hommes, on retrouve l’effémination de certains homosexuels et la pratique gay de l’imitation des femmes qui, dans l’esprit populaire, sont associés à l’homosexualité masculine. Mais d’après moi, l’effémination des homosexuels et le fait qu’ils portent des vêtements féminins ne témoignent pas d’un amour pour les femmes ou la féminité. La plupart du temps, cette féminité est affectée et se caractérise par une exagération théâtrale. Il s’agit d’une moquerie désinvolte et cynique des femmes, lesquelles sont opprimées par la féminité, mais aussi d’une sorte de jeu, de jeu avec ce qui est tabou. Il s’agit d’une perversité à laquelle se livrent, je pense, davantage ceux qui croient en leur immunité à la contamination que ceux qui ont des doutes ou des craintes. […] La représentation de la féminité par les hommes homosexuels me semble être une sorte de sport sérieux dans lequel les hommes peuvent exercer leur pouvoir et leur contrôle sur le féminin, tout comme dans d’autres sports on exerce un pouvoir physique et un contrôle sur des éléments de l’univers physique. Certains homosexuels parviennent, en effet, à une maîtrise prodigieuse de la féminité, et ils sont souvent traités par les initiés avec le respect dû aux héros. Mais la maîtrise du féminin n’est pas féminine. Elle est masculine. Il ne s’agit pas d’une manifestation d’amour des femmes, mais de haine des femmes. Quelqu’un qui possède une telle maîtrise peut avoir la toute première prétention à la virilité. »
Les pages des tout premiers magazines de travestis et de drag-queens ne sont qu’érotisme, sexualisation et grossière excitation libidinale. Les hommes rédigeaient très probablement en état d’érection : les études de Ray Blanchard sur le sujet montrent que la simple écoute d’un propos stupide, n’ayant en lui-même rien d’érotique, sauf pour un autogynéphile — tel que : « Vous enfilez vos bas et procédez à vous mettre du rouge à lèvres… » — suffit à provoquer une érection chez ses patients, même chez ceux qui niaient être autogynéphiles (certains admettaient être atteints de cette condition médicale, d’autres se montraient plus résistants). L’autogynéphilie, chez certains, exige un état d’excitation constante, à la manière d’une dépendance sévère. L’homme autogynéphile extrême aimerait pouvoir passer sa vie en érection.
En tout drag-queen, il y a un homme autogynéphile, que son excitation soit faible ou extrême. Il est regrettable d’exposer des enfants à l’excitation sexuelle d’hommes qui objectifient et pornifient les femmes, que ce soit en spectacle dans des bars ou dans un cadre plus institutionnel (bibliothèque).
Audrey A. & Nicolas C.
- Oui, l’usage voudrait qu’on écrive « une » drag-queen, mais il nous semble plus approprié d’écrire « un » drag-queen. ↑
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