Le 8 mars, l’EARL Verschuere, dans l’Oise, a été condamnée à verser 120 000 € de dommages et intérêts à un collectif de riverains l’ayant attaquée en justice pour nuisances sonores et olfactives, et à démolir une stabulation. Estimant avoir réalisé les aménagements nécessaires pour limiter bruits et odeurs, Vincent Verschuere ne comprend pas la décision du tribunal et ne sait pas quoi faire de plus. Pour lui, c’est l’élevage et l’installation des jeunes qui sont mis en péril.
« Aujourd’hui, notre élevage est remis en cause, comme tous ceux à proximité des habitations. Car, demain, ça peut aussi leur arriver. La population a dit qu’elle ne voulait pas de gros élevages au milieu de nulle part, telle la ferme des 1 000 vaches. Visiblement, elle ne veut plus non plus d’exploitations familiales dans les villages. À un moment, nos politiques doivent dire clairement si oui ou non, ça sert encore à quelque chose d’installer des jeunes, de laisser des élevages se développer et se mettre aux normes, si c’est pour être condamnés au tribunal, pour avoir osé travailler finalement. »
Vincent Verschuere réagit au verdict de la cour d’appel d’Amiens rendu le 8 mars, condamnant l’EARL dans laquelle il est associée avec sa mère. Située à Saint-Aubin-en-Bray dans l’Oise, en plein village, elle doit payer 120 000 € de dommages et intérêts à un collectif de six riverains, l’ayant poursuivie en justice pour nuisances sonores et olfactives, et à démolir un bâtiment si aucune action corrective n’est apportée.
Rappel des faits
Pour comprendre, il faut remonter en arrière.
• En 2009 : Vincent Verschuere s’installe sur l’élevage de 70 vaches laitières, dans la famille depuis quatre générations.
• Dès 2010 : il engage sa mise aux normes « pour se conformer à la réglementation ». Le projet, en réflexion depuis 2007, prévoit la construction d’une étable de 150 places (vaches + élèves), d’une fosse à lisier et d’une salle de traite (2×11 postes).
• En septembre 2010 : quatre mois après le début des travaux, et alors que le bâtiment en construction n’abrite aucune bête, des voisins déposent plainte contre la mairie. Le tribunal de première instance de Beauvais annule le permis de construire. La mairie décide de faire appel.
• En 2013 : la cour d’appel d’Amiens confirme l’annulation du permis de construire.
• En 2014 : organisés en collectif, les six plaignants poursuivent l’EARL pour nuisances sonores et olfactives, et pour prolifération de mouches.
• En 2018 : le tribunal de première instance de Beauvais condamne l’exploitation à indemniser les voisins (plus de 100 000 € de dommages et intérêts) et à démolir le bâtiment si aucune mesure corrective n’est apportée. Les Verschuere font appel.
• Le 8 mars 2022 : la Cour d’appel d’Amiens confirme la condamnation de l’EARL à verser 120 000 € de dommages et intérêts.
« J’ai cherché un terrain plus loin »
« Je n’avais jamais eu de problème avec mon voisinage. Je ne les connaissais pas plus que ça, on échangeait quelques mots, comme souvent avec des voisins. Certains étaient là depuis quelque années, d’autres depuis plus longtemps, ils ne venaient pas de s’installer. La ferme, elle, a toujours été là. Je n’ai rien vu venir. Le plus fort, c’est que deux ont déménagé depuis et un troisième a loué sa maison et les locataires ne se sont jamais plaints », explique le jeune éleveur d’une trentaine d’années qui est cependant « soutenu par d’autres habitants de la commune et de toute la France ». « Agriculteurs et grand public m’envoient des messages, notamment sur les pages Facebook « Soutien Ferme Verschuere – Non à la démolition » (745 abonnés) et Twitter « Sauvons la ferme Verschuere », créées par ma sœur. » Cette dernière a aussi lancé une pétition en ligne « Sauvons la ferme Non à la démolition de l’hangar de la famille Verschuere », qui a déjà recueilli un peu plus de 1 300 signatures. La profession agricole a aussi organisé une marche de soutien en décembre dernier. « Mais cela n’a aucun poids face au tribunal. »
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