Jancovici en BD : mensonges (pré-)historiques et négation de la domination (par Nicolas Casaux)

Jancovici en BD : mensonges (pré-)historiques et négation de la domination (par Nicolas Casaux)

Célé­brée dans tous les médias de masse (du Point au Monde, en pas­sant par Télé­ra­ma, Atlan­ti­co, Good­Pla­net, OuestFrance, Chal­lenges, L’Express, etc.), la BD Le Monde sans fin, conjoin­te­ment réa­li­sée par Chris­tophe Blain et l’ingénieur poly­tech­ni­cien Jean-Marc Jan­co­vi­ci — idole d’une nou­velle géné­ra­tion d’écologistes déter­mi­nés à assu­rer l’avenir de la civi­li­sa­tion indus­trielle —, s’avère sans sur­prise un tis­su d’im­bé­ci­li­tés et de men­songes, y com­pris par omis­sion, une pro­pa­gande nucléa­riste en faveur d’une sou­mis­sion renou­ve­lable.

D’abord, on remarque une occul­ta­tion sys­té­ma­tique de l’histoire poli­tique de l’humanité. « On » était chas­seurs-cueilleurs puis « on » est pas­sé à l’agriculture parce qu’« on » en avait envie, puis « on » a construit des villes (« dans tous les pays du monde, les villes ont été construites »), puis « on » a déci­dé d’édifier la civi­li­sa­tion indus­trielle (un « tu » est appa­rem­ment der­rière l’affaire, sans doute la main du des­tin : « tu vides les cam­pagnes et tu mets les gens là où il est plus effi­cace d’échanger le pro­duit des machines »). Le recours aux éner­gies fos­siles, loin d’avoir été une colos­sale erreur encou­ra­gée par des indi­vi­dus peu scru­pu­leux avides de pro­fits, « était un choix logique à l’époque ». Pour quoi ? Pour qui ? L’ingénieur ne com­prend pas la question.

Au tout début de la BD, Jan­co­vi­ci est pré­sen­té comme une sorte de super-héros. Une pré­ten­tion gro­tesque. Fatui­té incroyable.

Exit toute la conflic­tua­li­té, les rap­ports de force, toutes les oppres­sions, exploi­ta­tions et domi­na­tions sociales. Le sujet du déve­lop­pe­ment his­to­rique est une huma­ni­té prise en bloc et réduite à un « on » ou un « nous » (« ça fait 200 ans que nous pas­sons notre temps à rem­pla­cer les éner­gies renou­ve­lables par des fos­siles »). Soit à la volon­té des vain­queurs, aux aspi­ra­tions des domi­nants. Dans le monde de Jan­co­vi­ci, les choses sont simples : « l’énergie a fait croître la popu­la­tion, et cha­cun veut pro­fi­ter des bien­faits de l’énergie » ; « et nos dési­rs sont sans limites. » ; « nous sommes des ani­maux oppor­tu­nistes et accu­mu­la­tifs. » ; « c’est à cause de notre stria­tum. » (La fameuse reduc­tio ad cere­brum[1]).


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Nous en serions en quelque sorte arri­vés à la civi­li­sa­tion indus­trielle contem­po­raine par la force des choses, au fil d’un déve­lop­pe­ment his­to­rique linéaire par­fai­te­ment logique, sans doute inévi­table. Et par­fai­te­ment faux : la civi­li­sa­tion indus­trielle contem­po­raine résulte d’une longue his­toire de guerres, d’ethnocides, de géno­cides, de colo­ni­sa­tions, d’asservissements, etc., d’innumérables anta­go­nismes, dis­sen­sions, diver­gences. Elle n’est cer­tai­ne­ment pas le fruit d’un désir consen­suel ou de la libre volon­té de tous les humains ou d’un déve­lop­pe­ment bio­phy­sique iné­luc­table — c’est-à-dire du des­tin ou de la fatalité.

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Par ailleurs, si les auteurs nous rap­pellent les impacts maté­riels de la pro­duc­tion des objets du quo­ti­dien dans la socié­té indus­trielle, par la suite, tous les pro­blèmes des temps pré­sents réduits à une néces­si­té de dimi­nuer les émis­sions de gaz à effet de serre pour endi­guer le réchauf­fe­ment climatique.


Mais par la suite, exit la réa­li­té des nom­breuses manières dont l’écosphère est en train d’être détruite. Aucun ques­tion­ne­ment sur l’usage de l’énergie, qui sert à ali­men­ter des machines, engins ou appa­reils qu’il faut eux-mêmes pro­duire, dont la pro­duc­tion induit nombre d’effets sociaux et éco­lo­giques — tout ça on s’en fout, l’important est uni­que­ment de par­ve­nir à pro­duire de l’énergie de manière durable et décar­bo­née. C’est-à-dire de sou­te­nir le déve­lop­pe­ment du nucléaire. Une bande va même jusqu’à expri­mer le dilemme sui­vant : soit on accepte le nucléaire, soit c’est la des­truc­tion du monde.

Ain­si que le montre la bande ci-des­sus, la radio­lu­mi­nes­cence nous est pré­sen­tée comme un truc cool, avec le grand mage Jan­co­vi­ci brillant façon vert radio­lu­mi­nes­cent (les Radium Girls tiennent à faire remar­quer à Jan­co­vi­ci qu’il peut aller au diable).

Les déchets nucléaires sont tran­quille­ment assi­mi­lés au caca humain.

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Imman­qua­ble­ment, afin d’associer l’idée d’en finir avec la civi­li­sa­tion indus­trielle à une chose ter­ri­fiante, Chris­tophe Blain et Jean-Marc Jan­co­vi­ci col­portent les men­songes habi­tuels de l’idéologie du Pro­grès : sans la civi­li­sa­tion indus­trielle et ses machines, les humains « s’entretueraient ». Notre espé­rance de vie retom­be­rait à 30 ans (on trouve lit­té­ra­le­ment une vignette dans laquelle un per­son­nage du pas­sé s’estime heu­reux d’avoir dépas­sé 30 ans). Grâce aux machines et à la civi­li­sa­tion, « on » voyage et se déplace plus qu’« avant » ; on tra­vaille moins (on a plus de temps libre). Dif­fi­cile de faire plus faux.

En réa­li­té, la lon­gé­vi­té humaine moyenne dépasse les 60 ans depuis des (dizaines de) mil­liers d’années[2]. Nos loin­tains ancêtres chas­seurs-cueilleurs se dépla­çaient — voya­geaient — sans doute bien plus que le civi­li­sé moyen contem­po­rain[3]. Ils tra­vaillaient bien moins[4], et étaient bien plus libres[5].

D’ailleurs, deux bandes de la BD de Blain et Jan­co­vi­ci effleurent une réflexion impor­tante, cru­ciale même, sur le lien entre déve­lop­pe­ment tech­no­lo­gique et asservissement.

Mal­heu­reu­se­ment, l’examen de ce pro­blème est immé­dia­te­ment avor­té et l’on passe à autre chose. De même que la poli­tique, l’an­thro­po­lo­gie n’est pas le domaine de l’ingénieur.

Outre la pro­pa­gande de l’idéologie du Pro­grès, nos deux com­pères répandent celle de la domi­na­tion éta­tique. Une par­tie de l’État, c’est nous, donc la pro­duc­tion et la consom­ma­tion, c’est nous. Nous sommes tous éga­le­ment res­pon­sables du désastre ambiant. Là encore, de gros­siers men­songes pour exo­né­rer les riches et les puis­sants, qui en sont les pre­miers et prin­ci­paux res­pon­sables. Là encore, il s’agit de pas­ser sous silence la véri­table nature — inéga­li­taire, anti­dé­mo­cra­tique — de l’État, des pseu­do­dé­mo­cra­ties modernes.

Mais, bien enten­du, Chris­tope Blain et Jean-Marc Jan­co­vi­ci ne sont pas Louise Michel et Pierre Kro­pot­kine, ne sont pas du genre à remettre en ques­tion les ori­peaux « démo­cra­tiques » de l’État (fran­çais ou non), à nous rap­pe­ler que :

« Ceux que l’on qua­li­fie de “pères fon­da­teurs” des “démo­cra­ties” modernes aux États-Unis et en France, mais aus­si au Cana­da et ailleurs, n’ont jamais pré­ten­du fon­der une démo­cra­tie. Bien au contraire, ils étaient ouver­te­ment et farou­che­ment anti­dé­mo­crates, car ils ne vou­laient pas que le peuple puisse se gou­ver­ner direc­te­ment. Ils étaient en faveur d’une “répu­blique”, terme par lequel ils dési­gnaient un régime dans lequel le pou­voir légis­la­tif se trouve entre les mains des par­le­men­taires aux­quels le pou­voir exé­cu­tif — le gou­ver­ne­ment — doit rendre des comptes et, très sou­vent, deman­der d’approuver le bud­get et le choix des ministres. Leur modèle n’était pas Athènes, mais bien Rome, avec son sénat, ses élec­tions et l’absence d’assemblées popu­laires. À Rome, déjà, Quin­tus Cicé­ron expli­quait aux can­di­dats, dans son Petit manuel de cam­pagne élec­to­rale, que l’électorat pré­fère “un men­songe de ta part plu­tôt qu’un refus” et que “ce qui est indis­pen­sable, c’est de connaître le nom des élec­teurs, de savoir les flat­ter, d’être assi­du auprès d’eux, de se mon­trer géné­reux, de soi­gner sa répu­ta­tion et de sus­ci­ter, pour la manière dont on condui­ra les affaires de l’État, de vifs espoirs”. Le par­le­men­ta­risme s’inscrit donc dans une vieille tra­di­tion de l’Antiquité, mais qui n’a rien à voir avec Athènes et sa démo­cra­tie (directe). La caste par­le­men­taire ne com­men­ce­ra à se pré­tendre “démo­crate” et à uti­li­ser le mot “démo­cra­tie” pour par­ler de l’État que deux géné­ra­tions après la fon­da­tion des États-Unis d’Amérique ou de la pre­mière Révo­lu­tion fran­çaise, et aus­si tar­di­ve­ment que vers 1917 au Cana­da. Cette nou­velle ter­mi­no­lo­gie ne s’est accom­pa­gnée d’aucun chan­ge­ment ins­ti­tu­tion­nel venant ren­for­cer la capa­ci­té du peuple de par­ti­ci­per direc­te­ment à la poli­tique. Il s’agissait avant tout d’une stra­té­gie de mar­ke­ting poli­tique en période élec­to­rale : se dire démo­crate per­met­tait de séduire les foules et de se pré­sen­ter comme un vrai défen­seur des inté­rêts du peuple[6]. »

& effec­ti­ve­ment, la plu­part des ins­ti­tu­tions qui consti­tuent aujourd’hui l’État fran­çais sont héri­tées de la dic­ta­ture bona­par­tiste, voire de régimes d’époques anté­rieures que per­sonne n’oserait pré­tendre démo­cra­tiques[7]. Affir­mer que l’État c’est nous et que nous sommes toutes et tous res­pon­sables de la catas­trophe sociale et éco­lo­gique en cours, c’est donc encore se faire le porte-voix des men­songes des puis­sants, de la classe dominante.

In fine, la « décrois­sance » que pro­meut Jean-Marc Jan­co­vi­ci est une imbé­ci­li­té dou­blée d’une impos­si­bi­li­té. Loin d’encourager la seule chose pou­vant à la fois résoudre les inéga­li­tés sociales et le désastre éco­lo­gique, à savoir la sor­tie de la socié­té indus­trielle, la dés­in­dus­tria­li­sa­tion du monde, le déman­tè­le­ment de l’État et du capi­ta­lisme, l’ingénieur nucléa­riste pré­tend qu’une civi­li­sa­tion tech­no-indus­trielle durable est pos­sible, mais dans laquelle on consom­me­rait tous moins, notre consom­ma­tion de viande serait ration­née, nos loge­ments mieux iso­lés, nos voi­tures, vélos et bus élec­triques, notre éclai­rage basse consom­ma­tion, nos appa­reils plus per­for­mants, etc. (et tout le tra­la­la de la dura­bi­li­té techno-industrielle).

Jan­co­vi­ci est pour­tant conscient, et c’est expo­sé dans la BD, qu’aucune pro­duc­tion indus­trielle (d’énergie, de mar­chan­dises, d’objets) n’est éco­lo­gique, que le nucléaire implique lui aus­si — même si dans une moindre mesure — des dégra­da­tions envi­ron­ne­men­tales et génère des pol­lu­tions. Néan­moins, il prend le par­ti de défendre l’idée d’une civi­li­sa­tion tech­no-indus­trielle sou­te­nable. En effet, le nucléaire, selon Jan­co­vi­ci, « nous per­met­tra de conser­ver une par­tie, et une par­tie seule­ment, de ce que nous avons aujourd’hui ». De per­pé­tuer — pour encore quelque temps — l’existence d’une civi­li­sa­tion indus­trielle basse consom­ma­tion, donc, et avec elle des inéga­li­tés, injus­tices, sociales et sexuelles — le patriar­cat — et des ravages éco­lo­giques qu’elle implique.

Une des seules choses per­ti­nentes que Blain et Jan­co­vi­ci sug­gèrent, c’est la relo­ca­li­sa­tion de la pro­duc­tion de nour­ri­ture. Effec­ti­ve­ment, l’autonomie ali­men­taire est tout à fait sou­hai­table. Mais elle doit aller de pair avec une auto­no­mie poli­tique, éner­gé­tique, tech­nique. Une auto­no­mie complète.

Or, comme le note le phi­lo­sophe Auré­lien Ber­lan dans un récent ouvrage que nous ne sau­rions trop vive­ment vous recom­man­der, et auquel nous vous ren­voyons pour une ana­lyse plus com­plète de l’iniquité et de l’insoutenabilité du capi­ta­lisme indus­triel, « pour renouer mas­si­ve­ment avec l’autonomie, il va fal­loir des luttes d’ampleur, notam­ment autour du fon­cier : reprendre la terre aux machines (indus­trielles, éta­tiques, tech­nos­cien­ti­fiques, etc.) qui la détruisent […] et la rendre aux humains qui veulent vrai­ment chan­ger de mode de vie[8] ».

Nico­las Casaux


  1. Voir : https://aoc.media/opinion/2021/04/08/le-biais-bronner-ou-la-reductio-ad-cerebrum/
  2. « Les chas­seurs-cueilleurs béné­fi­ciaient de vies longues et saines » : https://www.partage-le.com/2016/03/21/les-chasseurs-cueilleurs-beneficiaient-de-vies-longues-et-saines-rewild/
  3. Dans leur livre Au com­men­ce­ment était… Une nou­velle his­toire de l’humanité, par ailleurs très pro­blé­ma­tique, David Grae­ber et David Wen­grow rap­pellent jus­te­ment que déjà, au Paléo­li­thique supé­rieur, « hommes et femmes pou­vaient voya­ger sur de très longues dis­tances à divers moments de leur vie », qu’il y a encore «  quelques siècles, cer­taines formes d’organisation régio­nale se déployaient sur des mil­liers de kilo­mètres », et remarquent :« […] nous pen­sons géné­ra­le­ment que le pro­grès tech­no­lo­gique tend à contrac­ter le monde. Sur le plan pure­ment phy­sique, c’est évi­dem­ment le cas : il est indé­niable que la domes­ti­ca­tion des che­vaux et le per­fec­tion­ne­ment conti­nu des tech­niques de navi­ga­tion, pour ne prendre que ces deux exemples, ont gran­de­ment faci­li­té les dépla­ce­ments. Mais l’augmentation numé­rique des popu­la­tions humaines semble avoir eu l’effet inverse. Plus l’histoire avance, moins on voit d’êtres humains entre­prendre de grands voyages ou par­tir vivre très loin de chez eux. Obser­vé sur le temps long, le rayon de déploie­ment des rela­tions sociales se rétré­cit bien plus qu’il ne s’étend. »
  4. Cf., par exemple, le der­nier ouvrage de l’anthropologue James Suz­man, Tra­vailler. La grande affaire de l’humanité, dans lequel il rap­pelle que contrai­re­ment à ce que l’on croyait jusqu’au milieu du XXe siècle, les chas­seurs-cueilleurs tra­vaillent et tra­vaillaient bien moins que le civi­li­sé moyen d’aujourd’hui. Il rap­porte, entre autres, les décou­vertes de l’anthropologue Richard B. Lee :« Dix-huit mois après son arri­vée au Kala­ha­ri, Lee ras­sem­bla ses car­nets de notes et leva le camp. Une fois ren­tré aux États-Unis, il pré­sen­ta les résul­tats de ses recherches lors d’un congrès inti­tu­lé “Man the Hun­ter” [L’Homme ce chas­seur], qu’il orga­ni­sa en avril 1966 avec son col­lègue DeVore à l’université de Chi­ca­go. L’information s’étant répan­due que de nou­velles idées sur­pre­nantes seraient dévoi­lées lors de cette confé­rence, quelques grands noms de l’anthropologie, dont Claude Lévi-Strauss, tra­ver­sèrent l’Atlantique pour y assister.Les révé­la­tions de Lee don­nèrent le ton à ce qui allait deve­nir l’un des congrès les plus remar­qués de l’histoire de l’anthropologie moderne. Dans une pré­sen­ta­tion désor­mais célèbre, Lee révé­la com­ment les Ju/’hoansi l’avaient per­sua­dé que, contrai­re­ment aux idées reçues, “la vie dans un état de nature n’est pas néces­sai­re­ment désa­gréable, bru­tale et courte”.Lee expli­qua à son audi­toire qu’en dépit du fait qu’il avait mené ses recherches pen­dant une séche­resse si sévère que la plu­part des popu­la­tions rurales du Bots­wa­na sur­vi­vaient grâce à une aide ali­men­taire d’urgence, les Ju/’hoansi n’avaient pas eu besoin d’aide exté­rieure et se nour­ris­saient faci­le­ment des végé­taux sau­vages qu’ils ramas­saient et du pro­duit de leur chasse. Chaque indi­vi­du du groupe qu’il avait sui­vi consom­mait en moyenne 2 140 calo­ries par jour, un chiffre supé­rieur de près de 10 % à la consom­ma­tion quo­ti­dienne recom­man­dée pour des per­sonnes de leur sta­ture. Plus remar­quable encore, les Ju/’hoansi se pro­cu­raient toute la nour­ri­ture dont ils avaient besoin grâce à “un modeste effort” — si modeste, en fait, qu’ils avaient beau­coup plus de “temps libre” que des per­sonnes tra­vaillant à plein temps dans le monde indus­tria­li­sé. Notant que les enfants et les per­sonnes âgées dépen­daient des autres pour leurs res­sources, Lee avait cal­cu­lé que les adultes éco­no­mi­que­ment actifs consa­craient en moyenne un peu plus de dix-sept heures par semaine à la quête de nour­ri­ture, et vingt heures sup­plé­men­taires à d’autres tâches comme la pré­pa­ra­tion de la nour­ri­ture, le ramas­sage du bois, la construc­tion d’abris et la fabri­ca­tion ou la répa­ra­tion d’outils – ce qui cor­res­pon­dait à moins de la moi­tié du temps que les Amé­ri­cains consacrent à leur emploi, au trans­port pour s’y rendre et à leurs tâches domes­tiques. »
  5. Là encore, la lec­ture de n’importe quel ouvrage d’anthropologie des chas­seurs-cueilleurs devrait per­mettre de le réa­li­ser. Les livres men­tion­nés dans les notes pré­cé­dentes, celui de Suz­man comme celui de Grae­ber et Wen­grow, en parlent. Grae­ber et Wen­grow évoquent nombre de réac­tions de civi­li­sés face au mode de vie des « sau­vages » du Nou­veau Monde. Voi­ci par exemple ce qu’écrivait en 1642 à pro­pos des Mon­ta­gnais-Nas­ka­pis le mis­sion­naire jésuite Le Jeune, supé­rieur pro­vin­cial pour le Cana­da dans les années 1630 :« Ils s’imaginent que par droit de nais­sance ils doivent jouir de la liber­té des ânons sau­vages, ne ren­dant aucune sub­jec­tion à qui que ce soit, sinon quand il leur plaît. Ils m’ont repro­ché cent fois que nous crai­gnons nos capi­taines, mais pour eux qu’ils se moquaient et se gaus­saient des leurs ; toute l’autorité de leur chef est au bout de ses lèvres ; il est aus­si puis­sant qu’il est élo­quent, et quand il s’est tué de par­ler et de haran­guer, il ne sera pas obéi s’il ne plaît aux sau­vages. »
  6. Fran­cis Dupuis-Déri, Nous n’irons plus aux urnes, Lux, 2019.
  7. Voir : https://www.partage-le.com/2018/08/01/de-la-royaute-aux-democraties-modernes-un-continuum-antidemocratique-par-nicolas-casaux/
  8. Auré­lien Ber­lan, Terre et Liber­té, édi­tions La Len­teur, 2021.

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À propos de l'auteur Le Partage

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