Campagne de dons Mai 2021
Réseau International repart sur de nouvelles bases plus sécurisées et plus stables. Aidez-nous à aller encore plus loin dans le combat contre le mensonge et les manipulations. Faites un don.5 963,00 € donated
par Thembisa Fakude.
Il est courant de nos jours de comparer le racisme institutionnel d’Israël et son occupation de la Palestine à l’apartheid sud-africain. Jusqu’à un certain point, c’est une comparaison raisonnable. Jusqu’à un certain point. Malgré toutes ses horreurs et sa brutalité, le régime d’apartheid en Afrique du Sud n’a jamais utilisé d’avions de chasse et d’artillerie pour bombarder les personnes opprimées vivant dans les townships. Israël l’a fait, et continue de le faire. C’est maintenant devenu presque une routine, et donc « acceptable » pour la communauté internationale qui permet à Israël d’agir en toute impunité. Les effets sont effroyables.
Selon le ministre du Logement et des Travaux publics de Gaza, Naji Sarhan, 1800 unités d’habitation ont été complètement détruites par Israël lors de son dernier assaut contre les civils dans le territoire sous blocus, dont cinq tours d’habitation au milieu de la ville de Gaza, une zone densément peuplée. Près de 17 000 autres habitations ont été partiellement endommagées et plus de 120 000 Palestiniens ont ainsi été déplacés de force de leurs foyers.
Les infrastructures civiles ont été délibérément ciblées par Israël. Un peu plus de soixante-dix bâtiments gouvernementaux ont été détruits, dont le siège de la police et d’autres installations de services publics. Au moins 66 écoles ont été endommagées par les bombardements israéliens ; trois mosquées ont été complètement détruites ; 40 autres mosquées et une église ont été endommagées.
Les Israéliens n’ont pas ou peu prévenu de l’imminence des frappes, ne laissant pas aux malades et aux personnes âgées le temps d’évacuer leurs maisons. Le New York Times a rapporté qu’une frappe aérienne israélienne sur un immeuble résidentiel à Deir Al-Balah mercredi soir dernier a tué un couple marié et leur fille de 2 ans, et en a blessé plusieurs autres. La femme tuée était enceinte et son mari était handicapé. En quoi constituaient-ils une menace pour l’État d’Israël doté de l’arme nucléaire ?
Cette destruction de vies humaines et de biens s’est produite en seulement 11 jours d’intenses bombardements israéliens sur les civils de la bande de Gaza. Ils se sont terminés – pour l’instant – par un cessez-le-feu qui est entré en vigueur à 2 heures du matin vendredi dernier.
La plupart des militants et commentateurs palestiniens cherchent à éviter de dire ou de faire quoi que ce soit qui puisse donner lieu à des accusations d’antisémitisme. Le racisme sous toutes ses formes est odieux, ils ont donc raison d’agir ainsi. Cependant, il est souvent difficile de trouver la terminologie correcte pour décrire et définir le conflit israélo-palestinien. Certains des résultats de cette recherche d’un lexique approprié sont toutefois si ridicules qu’ils pourraient finir par compromettre la lutte des Palestiniens de libération de l’occupation israélienne.
J’ai assisté récemment à un débat sur la question de savoir s’il était approprié de qualifier le gouvernement d’Israël de « régime ». Il était surprenant de voir combien de personnes de la gauche politique étaient contre l’utilisation de ce terme. Un dictionnaire définit le terme « régime » comme « un gouvernement, en particulier un gouvernement autoritaire ». Ceci, me semble-t-il, est tout à fait applicable à Israël où les dirigeants politiques et militaires ciblent les femmes, les enfants, les handicapés et les personnes âgées avec leurs bombes et leurs missiles. Pas une fois, pas deux fois, mais à plusieurs reprises pendant 11 jours et 11 nuits, lors de ce qui était la dernière des nombreuses occasions. Israël se fait passer pour un État démocratique avec un régime au pouvoir des plus brutaux. Non seulement il affiche un mépris ouvert pour le droit international, mais il impose également une occupation militaire aux Palestiniens et les terrorise.
Cet État combine dans son mode opératoire le fascisme, le racisme, l’extrémisme d’extrême-droite, l’apartheid et la suprématie raciale. Je comprends tout à fait le raisonnement qui sous-tend la description d’Israël comme un État d’apartheid, vraiment ; il est parfaitement logique pour la plupart des gens de comparer le régime israélien au pire qui ait jamais existé.
Cependant, une telle comparaison réduit en fait la gravité de la cruauté qu’Israël continue d’infliger aux Palestiniens, qui est sans précédent. Les personnes sensées du monde entier devraient donc chercher une autre description qui reste néanmoins pertinente. Cela pourrait être important si et quand la question est débattue au Conseil de sécurité des Nations unies, où l’existence de vetos exercés par les partisans d’Israël qui ne posent aucune question à Washington, Paris et Londres signifie que les arguments, et donc les résolutions du Conseil de sécurité, dépendent davantage de qui vous soutient que de ce que vous pouvez prouver. Le Conseil soutient Israël.
Il peut donc y avoir des désaccords sur le fait qu’Israël soit ou non un régime. La définition de l’apartheid ne convient pas à l’État d’occupation, et voici pourquoi : L’Afrique du Sud de l’apartheid était un régime brutal qui pratiquait la discrimination à l’encontre de ses citoyens « non blancs » ; bien sûr, beaucoup d’entre eux ont reçu la « citoyenneté » de bantoustans créés par Pretoria pour éloigner les « non blancs » de sa propre population. Ce régime a été condamné par la communauté internationale et des dizaines de résolutions critiques ont été adoptées par les Nations unies.
Je suis né et j’ai grandi à Soweto, sans doute l’une des régions d’Afrique du Sud les plus touchées par l’apartheid. Soweto était un laboratoire de l’apartheid ; elle incarnait les pires excès du régime de l’apartheid.
Ce dont nous avons été témoins ces deux dernières semaines à Gaza n’a cependant jamais été vu à Soweto, même au plus fort de l’apartheid. Je suis allé à Gaza, en Cisjordanie et en Israël, et j’ai passé du temps dans des camps de réfugiés palestiniens au Moyen-Orient, notamment à Sabra et Shatila au Liban. On n’a jamais observé, dans l’Afrique du Sud de l’apartheid, les violations des droits de l’homme, les conditions de vie inhumaines, les postes de contrôle militaires, les routes réservées aux colons, et même les différents lieux d’immatriculation des voitures qui facilitent les tirs et le harcèlement des Palestiniens. Il est important de noter que ni Soweto ni aucun autre township « noir » n’a jamais été bombardé par terre, air et mer comme l’a été Gaza.
En outre, malgré les privilèges dont jouissaient les Sud-Africains blancs, un nombre important d’entre eux se sont opposés à l’apartheid. Beaucoup ont refusé de servir dans l’armée de l’apartheid, choisissant plutôt de quitter le pays et de vivre à l’étranger. Bien qu’il y ait un petit nombre d’Israéliens dissidents, la majorité soutient l’occupation et les offensives militaires de l’État contre la population de Gaza et est donc complice des atrocités et de l’oppression. Selon The Guardian, lors de l’offensive israélienne de 2014, le soutien des Israéliens juifs a été massif tout au long des 24 jours qu’a duré l’opération, les sondages montrant que 95 % des personnes interrogées estimaient que l’assaut était justifié.
Aussi mauvais qu’ait pu être le régime de mon pays d’origine, « apartheid » n’est pas un terme assez fort pour décrire Israël. Nous devrions cesser de comparer cet État voyou à l’apartheid sud-africain, car il est bien pire. Nous devons trouver une autre étiquette, et rapidement.
*
Note ISM-France : Si le terme d’apartheid peut s’appliquer au traitement imposé par le régime colonial aux Palestiniens de 48, il est parfaitement impropre pour décrire la situation des Palestiniens de Cisjordanie occupée, de Jérusalem et de Gaza. Le régime d’apartheid d’Afrique du Sud n’a pas cherché à se débarrasser de la population noire indigène dont il avait besoin pour toutes les basses besognes. Le régime sioniste a au contraire mis en place un lent mais constant nettoyage ethnique, une lente mais constante dépossession de la terre, des biens, de la culture, de tous les aspects de la vie palestinienne.
Aurait-on imaginé les Algériens sous occupation française décrire leur situation comme un apartheid ? Non bien sûr.
Ne perdons pas non plus de vue que quand bien même l’apartheid serait aboli en Palestine 48, la question palestinienne serait-elle résolue ? Non bien sûr.
Depuis une quinzaine d’années, des « occidentaux » ont imposé cette notion réductrice et inexacte sur le nettoyage ethnique et le colonialisme de peuplement bien réels que subissent les Palestiniens et l’on peut craindre que la lutte palestinienne ne s’en soit trouvée affaiblie.
source : https://www.middleeastmonitor.com
traduit par MR pour ISM
Source : Lire l'article complet par Réseau International
Source: Lire l'article complet de Réseau International