La Syrie n’est pas un pays que je connais. D’ailleurs, vu de l’extérieur, ça paraît tellement compliqué que je me demande combien de personnes la connaissent vraiment. Mais si ça se trouve, ce n’est pas compliqué du tout.
Par contre, je connais très bien comment la propagande occidentale fonctionne et je la vois tourner à fond. Et vous faire « comprendre » n’est pas une de ses missions. Sa mission est de planter dans vos esprits des impressions générales qui suffisent à obtenir un consentement – ou une résignation. De vous pousser dans la position de « pourquoi diable chercher à savoir, puisque je sais déjà ? ». De vous donner un sentiment d’en comprendre assez pour vous dissuader de chercher à en comprendre davantage puisque… vous comprenez déjà.
C’est une attitude très courante chez les CSP+ et les consommateurs de médias de masse en général.
Et l’égo humain étant ce qu’il est, il n’en faut pas beaucoup pour y arriver. Après tout, « il est plus facile de tromper quelqu’un que de le convaincre qu’il a été trompé » (Mark Twain, si je ne m’abuse).
Et peu importe si la suite des évènements apporte son lot de démentis, car l’esprit humain étant ce qu’il est, la plupart des gens seront passés à autre chose et auront même oublié « pourquoi » ils pensent/pensaient telle ou telle chose.
Vous pouvez tester ce phénomène sur vous-même en réfléchissant à l’image que vous avez de la Chine, par exemple, et la comparer à l’information que vous avez réellement sur la Chine. Combien de villes chinoises êtes-vous capables de nommer, à part Beijing (ou Pékin) et Shanghai ? Quant à la culture chinoise, je me lance : dragons, lotus, tigres, kung-fu, riz, baguettes et thé. Voilà, vous en savez autant que moi maintenant.
Et pour l’Iran, c’est encore pire : Téhéran, mollahs, chiisme. Ensuite ? Et il me faut toutefois préciser que si je connais le mot « chiisme », je n’ai aucune vraie idée en quoi ça consiste, ni ce que ça implique. Et je suis quelqu’un qui prétend s’intéresser beaucoup à la marche du monde.
Hier, je suis tombé sur des articles écrits en 2009, sur Israël. Ça fait 15 ans. Le parallèle avec l’actualité est sidérante. On y parle de nettoyage ethnique à Gaza, de massacres de civils, de militaires israéliens se prenant des selfies, bref, de tout ce que certains semblent découvrir aujourd’hui. Avec Israël, plus on creuse et plus le dégout augmente.
Et pour revenir à la question initiale, comment a-t-on pu distiller une image, sinon « positive », au moins suffisamment atténuée et embellie pour obtenir un consentement ou une résignation pour cet État depuis toujours profondément raciste, fasciste, colonial et génocidaire ?
S’ils arrivent à faire un tel écart entre l’image et la réalité, avec Israël, imaginez ce qu’ils peuvent accomplir en sens inverse pour d’autres pays.
Bref, tout ça pour dire que je n’ai pas de révélations à vous faire sur la Syrie.
La seule chose que je sais (sans guillemets), c’est que lorsqu’une situation est « complexe’, et lorsque les enjeux géopolitiques sont élevés, et parce que les médias sont ce qu’ils sont, la probabilité d’être correctement informés est très exactement égal à ZERO. Dit autrement, la probabilité d’être désinformés est égal à 100%.
Dans ce genre de situation, ce n’est jamais la vérité qui est préparée en cuisine et servie sur un plateau en salle. Si vous en doutez, demandez à voir le Chef.
Dans ce genre de situation, la vérité, il faut aller la chercher soi-même dans la jungle, parfois avec un arc et des flèches, parfois juste avec les dents.
Et on rentre souvent bredouilles, contrairement aux « envoyés spéciaux » et autres « spécialistes » de plateaux dont les prouesses en matière de chasse à l’info se résument à lire la première page des résultats de recherche sur Google.
Pour résumer, disons que je préfère ignorer une vérité que de savoir un mensonge.
Viktor Dedaj
chasseur de châtaignes
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir