L’image parle d’elle-même. Elle vient de Finbold. Les données acquises et calculées par la plateforme d’informations financières indiquent qu’en juin dernier, les dix personnes les plus riches des États-Unis possédaient collectivement une valeur nette de 1005 milliards de dollars américains. Ce montant dépassait alors de 7,6 milliards le PIB combiné des 106 pays les plus pauvres, qui s’élève à 998,2 milliards.
Parmi ceux affichant une valeur nette au-dessus des 100 milliards, Elon Musk, le p.-d.g. de Tesla, occupe la première place avec une fortune de 180 milliards, soit un peu plus que le PIB du Koweït. Suit Jeff Bezos, le fondateur et ancien p.-d.g. d’Amazon, avec une valeur nette de 114 milliards, soit un peu plus que le PIB de Cuba. Larry Ellison, d’Oracle, retient la troisième place du classement de Finbold, avec 107 milliards, dépassant le PIB d’Oman. Comme c’est le cas pour Warren Buffett et Bill Gates, qui occupent respectivement les quatrième et cinquième positions avec une fortune évaluée à 106 milliards et 104 milliards respectivement.
Sur le site de Patriotic Millionaires, on ajoute que les États-Unis abritent 735 milliardaires, trois d’entre eux (Elon Musk, Larry Ellison et Jeff Bezos) détenant une fortune multipliant par plus d’un million de fois l’avoir du ménage américain médian. L’on fait également ressortir que près de 60 % des Américains vivent d’une paie à l’autre, que le tiers des travailleurs gagnent moins de 15 $ l’heure et qu’environ 38 millions d’Américains vivent sous le seuil de pauvreté.
Récemment, nombre de ces riches et ultrariches ont pu capitaliser sur les tensions économiques mondiales et la flambée des cours énergétiques et alimentaires. Il est notamment rappelé qu’une majorité des milliardaires sont concentrés dans l’espace technologique, qui a largement bénéficié de la crise sanitaire.
Influence politique
Beaucoup d’inégalités, donc. À cette disparité des richesses s’ajoute une asymétrie de l’influence politique. Ces grandes fortunes « possèdent des ressources et une influence économique à une échelle qui peut potentiellement façonner le cours des économies et influencer les paysages politiques. Les vastes fortunes amassées par cette élite peu nombreuse soulèvent des inquiétudes quant à la concentration du pouvoir et à son impact sur les systèmes socioéconomiques », rappelle Finbold.
Et le site d’ajouter : « les milliardaires ont non seulement prospéré, mais ont également profité d’un prétendu système fiscal régressif, où les individus les plus riches des États-Unis ont été accusés de payer moins d’impôts » en raison de politiques gouvernementales qui les favorisent principalement.
Un écart qu’est venue exacerber la réforme fiscale de Donald Trump de 2017, qui a bénéficié presque deux fois plus à la classe des plus riches qu’à la classe moyenne, selon les données 2018 de Bloomberg. Sans compter que la loi sur la réforme fiscale Tax Cuts and Jobs Act (TCJA) a doublé les exemptions fiscales pour dons et successions. Un particulier peut, en 2023, éviter l’imposition fédérale sur les dons et successions de 12,9 millions de dollars américains, ont calculé les analystes.
Le TCJA doit prendre fin en 2025. Du moins, en partie. La législation de 2017 a rendu permanentes plusieurs des réductions d’impôt offertes aux entreprises. Mais pour le particulier, l’abaissement des taux individuels expire le 31 décembre 2025 pour revenir au niveau d’avant l’entrée en vigueur des allégements.
Avec le dépôt du Great Economy Project visant justement à profiter de cette expiration pour proposer une inversion de la situation, le lobbyisme de Patriotic Millionaires continue de militer pour une hausse du taux d’imposition des plus riches, pour une augmentation du salaire minimum, pour un système d’imposition progressif, pour la fermeture des échappatoires fiscales et pour une réforme du financement des campagnes électorales afin d’atténuer l’influence politique de l’argent.
Tout cela animé d’une crainte qu’un accroissement des inégalités vienne alimenter une détérioration rapide de la stabilité sociale. Mais l’on est loin d’un mouvement de fond. On parle plutôt d’une base d’un peu plus de 200 membres, une goutte dans une mer de quelque 22 millions de millionnaires que comptent les États-Unis.
Et aucune allusion à une quelconque taxe sur le patrimoine ou à une offensive contre les paradis fiscaux. L’évasion et l’évitement reposent pourtant sur un choix volontaire, délibéré. Le Fonds monétaire international a déjà estimé que, grosso modo, 40 % des investissements directs étrangers passent par des coquilles d’entreprises vides sans véritables activités commerciales.
Cela ne vaut pas que pour les Américains. Il faut rappeler cette capacité des contribuables au revenu plus élevé d’adoucir leur fardeau fiscal et disposant d’un accès facile aux services de fiscalistes leur montrant des voies légales de planification créative et d’évitement fiscal. Sans compter le recours des entreprises à l’optimisation fiscale, le jeu de l’incorporation chez les professionnels, des arbitrages salaire-dividende chez les propriétaires de PME ou encore des comptes fiscalisés, des créations de fiducies…
Dans une étude publiée à la fin d’août 2020, le Centre sur la productivité et sur la prospérité mettait l’accent sur la capacité des contribuables au revenu plus élevé d’adoucir leur fardeau fiscal. Son directeur, Robert Gagné, également coauteur de l’étude, concluait notamment que « les voies de contournement à la portée des contribuables s’accroissent à mesure que leur revenu augmente et que leurs sources de revenus se diversifient ».
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