Note de la traductrice (I) : La photo de couverture présente une danse de femmes Hopi en Arizona en 1879.
Chris Knight, anthropologue britannique, membre du Radical Anthropology Group, examine dans le texte suivant les mythes des chasseurs-cueilleurs non égalitaires relatifs à un prétendu « matriarcat primitif », qu’ils dénoncent, et qui aurait été une sorte de patriarcat inversé dans lequel les femmes auraient fait des misères aux hommes. À quoi ressemblait cette domination selon les mythes ? Un motif commun se dégage : les femmes se rassemblaient entre elles, loin des hommes et gardaient pour elles les secrets du cycle menstruel et de la naissance. Ou encore, elles possèdent le secret d’un instrument de musique qui est relié à leur pouvoir menstruel et se réunissent pour jouer de la musique. Et les hommes ne sont pas contents. Pourquoi ne sont-ils pas contents ? Les femmes sont-elles violentes avec eux ? Les exploitent-elles ? Non, elles se contentent de partager des moments entre femmes sans se soucier des hommes, de partager entre elles des choses dont les hommes sont exclus. Et les hommes ne sont pas contents.
N’est-il pas étonnant de retrouver ici le scénario exact du récent film critiqué par certaines féministes et honni par les masculinistes de tout poil ?!
En mettant de côté le fait que ce film constitue une importante source de profits pour le capitalisme, duquel il ne propose pas la moindre dénonciation, le scénario de Barbie n’est pas différent des mythes des sociétés des chasseurs-cueilleurs non-égalitaires où les hommes possèdent tout le pouvoir symbolique. Les hommes justifient la subordination des femmes en prétendant que les femmes, par le passé, se rassemblaient entre elles pour se livrer des secrets et les ignoraient. Et les hommes n’aiment pas être ignorés. Ils se mettent alors à accuser les femmes de tous les maux : maladies, météorologie… Comme dans le film Barbie, ils ne savent manifestement que faire de leur vie lorsque l’attention des femmes n’est pas portée sur eux. Alors ils décident un beau jour de voler leur secret et de les asservir. Et c’est la raison qu’ils donnent pour leur accaparement brutal du pouvoir et leur domination : avant, elles étaient méchantes, elles se rassemblaient pour jouer de la musique et faire des choses de femmes entre elles, sans nous et en nous ignorant. Méchantes femmes.
Le titre de ce texte reprend la fameuse phrase d’Engels faisant référence à un moment hypothétique au néolithique, où la majorité des sociétés humaines aurait basculé dans la propriété privée et le patriarcat, basculement concomitant avec la militarisation, la hiérarchisation, la prêtrise mâle et la perte de la liberté des femmes qui auraient ainsi connu leur « défaite historique mondiale », image abondamment critiquée de tous bords pour son manque de nuance. Pourtant, peu importent les résistances des populations et les échelonnements aussi variés que les géographies, les cultures et les sociétés, avec lesquels les patriarcats se sont installés. Au bout du compte, la quasi-totalité du monde est sous l’emprise du patriarcapitalisme et les résistances locales et sporadiques ne font jusqu’ici qu’obtenir des victoires locales et éphémères. Les très rares sociétés égalitaires de subsistance qui sont parvenues à résister jusqu’ici, qu’elles soient agraires-horticulturales ou de chasse-cueillette, sont de plus en plus menacées par les grands projets de « développement durable » des pays patriarcapitalistes.
Ci-dessous, le texte de Chris Knight publié sur Weekly Worker.
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Prenez à peu près n’importe quelle société de chasseurs-cueilleurs dans laquelle les hommes monopolisent le pouvoir rituel. Vous y trouverez un mythe expliquant comment les hommes se sont violemment emparés de ce pouvoir aux dépens des femmes, les anciennes maîtresses du monde. Souvent, les mythes sont très explicites à ce sujet et ne nécessitent pas de décodage particulier. Mais j’y inclurais également des contes de fées plus énigmatiques et bien moins évidents, tels que « Jack et le haricot magique », « La belle au bois dormant » et « Le petit chaperon rouge [1] ». Le célèbre anthropologue social français Claude Lévi-Strauss a soigneusement étudié 1000 contes similaires d’Amérique du Nord et d’Amérique du Sud. La dernière partie de son monumental ouvrage L’Homme nu — intitulé « Le mythique unique[2] » — conclut que les mythes interconnectés de l’humanité se rapportent en fin de compte à un seul. Comme les motifs changeants d’un kaléidoscope, tous sont clairement des variations sur thème.
Prenons l’exemple de Saint-Georges et le dragon. On attribue à notre héros l’établissement de l’ordre social tel que nous le connaissons : en tuant le dragon[3], George rend le monde sûr pour le mariage et la famille [patriarcale]. Dans mon livre Blood relations[4], j’ai montré comment le thème omniprésent du dragon — connu dans toute l’Australie aborigène sous le nom de Serpent Arc-en-ciel (Rainbow Snake) — est en fait une référence codée à la norme de la solidarité du clan. Le clan étant une organisation collectiviste intransigeante, il est logique que le serpent soit représenté avec plusieurs têtes. Tout jeune homme ambitieux qui espère épouser une membresse de la famille royale doit monter à cheval, brandir son épée, traquer les frères et les sœurs de l’épouse qu’il a choisie — les parents de sang [par matrilinéarité] qui la protégeaient auparavant — et leur couper la tête. Trois, sept ou cent, peu importe, tous doivent disparaître.
La cible de ces mythes est la liberté et l’autonomie originelles des femmes, qui sont ici diabolisées — naturellement — en tant que ravisseuses et violatrices. [Elles sont les méchants dragons qui protègent l’ordre ancien de la matrilocalité et la matrilinéarité]. Les mythes s’attaquent tout particulièrement au moindre lien de parenté matrilinéaire : le type de parenté dans lequel les droits sur les enfants et les biens sont hérités par la lignée féminine. La mission sacrée du héros patriarcal consiste à privatiser son épouse. Le « monstre à plusieurs têtes » — la base de ce que Marx et Engels ont appelé le « communisme primitif » — doit être tué.
Permettez-moi de citer quelques exemples pour vous donner une idée de ces mythes. Le premier est celui des Selk’nam-Ona de la Terre de Feu :
Au début, la sorcellerie n’était connue que des femmes de la terre d’Ona. Elles la pratiquaient dans une hutte dont aucun homme n’osait s’approcher. Les filles, à mesure qu’elles approchaient de l’âge adulte, étaient initiées aux arts magiques et apprenaient à provoquer la maladie et la mort chez ceux qui leur déplaisaient. [Elles apprenaient les menstruations, la grossesse, la médecine qui était liée à leur corps de femme]. Les hommes vivaient dans la crainte et la soumission. Certes, ils disposaient d’arcs et de flèches pour chasser, mais ils se demandaient à quoi pouvaient bien servir de telles armes contre la sorcellerie et la maladie.
La tyrannie des femmes pesait de plus en plus lourd, jusqu’à ce qu’un jour, les hommes ripostent. Ils décidèrent de tuer les femmes, ce qui donna lieu à un grand massacre dont aucune femme n’échappa sous sa forme humaine. Les hommes épargnèrent les petites filles et attendirent qu’elles soient en âge de devenir des épouses. Et pour que ces femmes ne puissent plus jamais se regrouper et reprendre leur ascendant passé, les hommes inaugurèrent une société secrète qui leur était propre et bannirent à jamais la loge des femmes, où tant de complots malfaisants avaient été ourdis[5].
Voici une autre version, « L’origine des flûtes sacrées ». Elle nous vient des Baruya de Papouasie–Nouvelle-Guinée :
À l’époque du Wandjinia [temps du rêve], les femmes inventèrent des flûtes. Elles en jouaient et en tiraient des sons merveilleux. Les hommes écoutaient et ne savaient pas ce qui émettait de tels sons. Un jour, un homme se cacha pour les espionner et découvrit ce qui produisait ces sons mélodieux. Il vit plusieurs femmes, dont l’une porta un morceau de bambou à sa bouche, en tirant les sons que les hommes avaient entendus. Puis la femme cacha le bambou sous une de ses jupes qu’elle avait suspendue dans sa maison, une hutte menstruelle. Les femmes s’en allèrent. L’homme s’approcha, se glissa dans la hutte, chercha autour de lui, trouva la flûte et la porta à ses lèvres. Il produisit lui aussi les mêmes sons. Puis il la reposa et alla raconter aux autres hommes ce qu’il avait vu et fait. Quand la femme revint, elle prit sa flûte pour en jouer, mais cette fois les sons qu’elle en tira étaient laids. Elle la jeta donc, soupçonnant les hommes de l’avoir touchée. Plus tard, l’homme revint, trouva la flûte et en joua. Il en sortit de beaux sons, comme ceux que les femmes avaient produits. Depuis lors, les flûtes sont utilisées pour aider les garçons à grandir.
Notez qu’à l’origine, la flûte était rangée par sa propriétaire sous sa jupe, cachée dans sa hutte menstruelle. L’anthropologue Maurice Godelier, qui a consigné cette histoire[6], commente :
« Le message de ce mythe est clair. Au début, les femmes étaient supérieures aux hommes, mais l’un d’entre eux, violant le tabou fondamental qui interdit de pénétrer dans la hutte menstruelle ou de toucher des objets souillés par le sang menstruel, s’est emparé de leur pouvoir et l’a rapporté aux hommes, qui s’en servent maintenant pour transformer les petits garçons en hommes. Mais ce pouvoir, volé aux femmes, est celui-là même que contient leur vagin, celui que leur donne leur sang menstruel. Les vieilles femmes connaissent les grandes lignes de ce mythe et le racontent aux jeunes filles lors de leurs premières règles. »
La maison des hommes
Selon Lévi-Strauss, la mythologie est ce domaine privilégié où l’esprit « est laissé en communion avec lui-même[7] ». Mais à mon avis, les faiseurs de mythes ne se contentent pas de philosopher sur un passé lointain. Une guerre est en cours. Si les femmes contestent collectivement les affirmations des hommes, leurs voix seront étouffées. Les récits masculins, beaucoup plus bruyants, font partie d’un système conçu pour subordonner — voire terroriser — le sexe féminin. [Un mythe relatant le gynocide commis par les hommes a de quoi terroriser les femmes, pire, justifier les violences masculines qu’ils commettent contre elles.] Indépendamment du passé, la préoccupation actuelle des hommes vise à empêcher les femmes de tisser une quelconque solidarité ou de retirer un quelconque pouvoir de leur cycle menstruel ou de l’accouchement. [Le transactivisme participe à ça.]
Aujourd’hui encore, les religions patriarcales du monde propagent l’idée selon laquelle la femme ne donne naissance qu’à de la chair, tandis que l’homme est le véritable créateur d’enfants — celui qui leur infuse une âme. Pour obtenir une âme, la progéniture masculine doit renaître [Le principe du baptême des religions patriarcales]. À travers l’Australie aborigène, les hommes ont prétendu être les reproducteurs de leur propre espèce, tout en prenant évidemment les « matières premières » nécessaires aux femmes. À une certaine période de l’année, des hommes initiés vont arracher une cohorte de petits garçons des bras de leur mère. Les victimes terrifiées sont placées dans un utérus symbolique, parfois plusieurs nuits durant, et leur chair est coupée pour les faire saigner. Ils finissent par en sortir en hommes initiés, « re-nés » avec succès, ornés de peinture corporelle à l’ocre rouge mélangée à du sang[8]. [Les peintures à l’ocre rouge ayant été et étant toujours dans certaines sociétés égalitaires, la prérogative des femmes.]
[Knight emploie la forme passive, mais ce sont des hommes qui font ceci aux garçons. Mary Daly fait remarquer dans Gyn/Ecology que lorsque les anthropologues masculinistes parlent des FGM, c’est toujours en insistant bien sur le fait que ce sont des femmes qui le font aux filles, évidemment, sans analyse — et encore moins de dénonciation — de leur absence de choix. En effet, les hommes ostraciseraient les mères qui n’y soumettent pas leurs filles en refusant d’épouser ces dernières. Les FGM ne sont pas des horreurs que les femmes infligent aux filles par sadisme culturel : ce sont les hommes qui demandent des filles mutilées selon divers mythes patriarcaux justifiant ces mutilations, de la même manière que les hommes chinois souhaitaient des épouses aux pieds bandés. Il s’agit de fétichismes masculins sur le corps des femmes, peu importe les justifications mythologiques ou culturelles données, dans des sociétés hyper-patriarcales où les femmes n’ont aucun moyen de survivre en autonomie. Chez nous, une femme relativement éduquée peut mener une vie relativement pauvre ou confortable sans avoir à plaire aux hommes, même si toute la culture patriarcapitaliste autour d’elle au travers des médias et de la publicité est faite pour l’inciter à se conformer aux dictats masculins. Alors même qu’elle se retrouvera socialement ostracisée, elle peut néanmoins survivre.]
Partout dans le monde, des mythes sacrés accusent les femmes d’avoir autrefois monopolisé le pouvoir dans une loge — que l’on pourrait assimiler à un temple[9]. De nos jours, le patriarcat a réussi à éliminer presque toutes les preuves de ces traditions. Lorsque la « maison des femmes » figure encore dans les mythes, elle est généralement considérée comme une sorte de bordel. Cela me rappelle Frederick Engels, lorsqu’il s’opposait à l’historien moraliste du mariage, Edvard Westermarck :
« Westermarck, il est vrai, part du point de vue que “le manque de règles implique l’étouffement des inclinations individuelles”, si bien que “la prostitution en est la forme la plus authentique”. Il me semble plutôt qu’il demeure impossible de comprendre les conditions primitives tant qu’on les regarde avec l’optique du lupanar[10]. » [Même biais patriarcalo-centré dans les récits des historiens grecs et latins devant ce qu’ils considéraient comme de la « prostitution sacrée ».]
Dans l’esprit d’Engels, passons donc aux faits.
Ma source est ici un livre de Wynne Maggi paru en 2001, Our women are free : gender and ethnicity in the Hindukush (« Nos femmes sont libres : genre et ethnicité dans l’Hindukush »). L’autrice explique comment, à ce jour, les femmes de la vallée de Kalasha, dans le nord-ouest du Pakistan, se considèrent fièrement « libres de se marier ou non, libres de se rendre dans leur foyer maternel et libres de résister aux exigences des hommes ». Le bastion de ces libertés est la maison menstruelle communautaire ; ici, les femmes aiment bavarder, rire et chanter ensemble. Située au centre, la loge des femmes ou bashali — interdite aux hommes — offre une période de refuge et de répit qui s’étend sur plusieurs jours. En théorie, les femmes ne doivent y entrer que lorsqu’elles ont leurs règles ou lorsqu’elles accouchent. Mais une femme qui a simplement besoin d’échapper à son mari — pour planifier un élopement, par exemple — peut invoquer ses menstruations comme prétexte et s’attendre, en toute confiance, à recevoir solidarité et soutien.
Vingt femmes s’y trouvent parfois en même temps, bien qu’en général, seule la moitié d’entre elles passent la nuit sur place. Elles s’aident les unes les autres à s’occuper de leurs enfants en bas âge. Dans leur « lieu le plus sacré », les femmes comparent la durée de leurs flux menstruels et dorment enlacées les unes aux autres. Les hommes n’ont même pas les mots pour demander ce qui se passe dans cette maison : les noms des organes et des processus reproductifs des femmes sont le plus grand secret qui soit. Le bashali offre aux femmes une opportunité à peu près analogue à celle que les maisons des hommes offrent aux hommes dans d’autres cultures. L’autrice nous met en garde :
« Je ne voudrais pas que vous en veniez à croire que les femmes parviennent toujours à une solidarité mystique simplement parce qu’elles passent du temps dans la maison menstruelle […] Pourtant, l’une des choses les plus agréables, pour moi en tout cas, c’est que pendant quelques jours, des femmes dont les chemins se croisent rarement se trouvent des choses en commun […]. Le bashali est un lieu d’intimité physique intense, où les femmes partagent des connaissances sur leur corps d’une manière qui serait impensable dans la vie de tous les jours[11]. »
Je voudrais que vous gardiez cet exemple à l’esprit en réfléchissant aux premières religions. Avant qu’il n’y ait des temples, il y avait des maisons d’hommes. Celles-ci étaient calquées sur la maison communale des femmes. [Le patriarcat est une mâle-adaptation pervertie.] Ce n’est pas seulement parfois vrai, c’est vrai dans tous les cas. Non, vous n’auriez pas pu apprendre cela à l’école du dimanche. Les universitaires ne sont pas très à l’aise pour discuter de ces choses. Il n’y a pas si longtemps que cela, nos grandes universités étaient des collèges de théologie. Nous parlons ici d’églises, de synagogues, de mosquées, de temples. Les gens s’énervent. Il s’agit d’une information sensible. [Les hommes s’énervent. Cf. la manière dont ils ont tenté de discréditer Majira Gimbutas après sa mort.]
Deux théories
Il existe deux théories sur les temples. La première prétend que les chasseurs-cueilleurs n’en ont pas. Les gens qui doivent chercher à se nourrir n’ont pas d’espaces sacrés où se rassembler. Ils n’ont pas « l’esprit entièrement développé » et ne peuvent donc pas attribuer une « signification symbolique » aux choses. Parce qu’ils ne peuvent pas écrire — ils sont généralement analphabètes — leur esprit n’est pas assez développé pour concevoir des institutions religieuses ou d’autres institutions sociales.
C’est un point de vue assez répandu — en fait, le plus grand archéologue de ce pays, Lord Renfrew, présente les choses précisément de cette manière. Colin Renfrew soutient que la société humaine n’a pu connaître aucun développement qualitatif avant le néolithique. [Même Jean Guilaine, ayant fait l’abominable préface à l’édition française du Langage de la Déesse, n’est pas à ce point biaisé, c’est dire.] Avant cela, en tant que simples humains vivant de chasse-cueillette, les humains conservaient une continuité sociale avec les primates non humains. Certes, en termes biologiques, Homo sapiens était une nouvelle espèce. Mais il ne se passa pas grand-chose sur le plan social ou cognitif jusqu’à l’apparition de l’agriculture, associée aux prêtrises, à l’esclavage, aux armées, à la hiérarchie, à la propriété privée, à l’écriture et à la bureaucratie. Comme le dit Renfrew, « il semblerait donc que l’arrivée de notre espèce sur une grande partie de la surface du globe n’ait pas eu de conséquences très remarquables pendant plusieurs dizaines de millénaires[12] ». [À rapprocher de la croyance des humains industriels selon laquelle « nous sommes seuls dans l’univers », incapables de voir le vivant et les communautés intelligentes qu’ils éradiquent continuellement, et qu’ils continueront d’éradiquer jusqu’au bout, parce qu’ils sont existentiellement vides et synthétiques, comme leur culture et leur psychisme.]
Se référant à l’émergence d’un « esprit » typiquement humain — que la plupart des archéologues considèrent comme une transition révolutionnaire — Renfrew suggère que « nous devrions considérer cette supposée révolution humaine, et probablement l’émergence de “l’esprit” lui-même, comme un processus qui, bien qu’ayant commencé avec l’émergence de notre espèce (du moins à certains égards), doit en fait être considéré comme un processus plus graduel, opérant en plusieurs phases et étapes, et peut-être indépendamment dans différentes parties du monde[13] ». Les chasseurs-cueilleurs sont génétiquement comme nous, avec des cerveaux modernes. Ils ont le bon « matériel », concède Renfrew. Mais s’ils n’ont pas le « logiciel » nécessaire, en quoi possèdent-ils un « esprit » ? « Car cela a‑t-il un sens de parler du développement complet de “l’esprit” », demande Renfrew, « si nous ne sommes pas encore en présence d’écritures complexes et du type d’argumentation, par exemple dans le domaine des mathématiques et de l’astronomie, que seule l’écriture permet ? [14]».
Tout en admettant que les chasseurs-cueilleurs et chasseuses-cueilleuses ont une « culture », Renfrew conçoit ces analphabètes comme des animaux qui « cherchent leur nourriture » :
« La plupart des espèces animales peuvent être considérées comme des ramasseurs et des collecteurs, dépendant principalement de la nourriture végétale, ou comme des chasseurs qui, dans de nombreux cas, doivent attraper les proies très mobiles dont ils dépendent. Il en va de même pour la plupart des chasseurs-cueilleurs, bien qu’ils aient en effet leurs propres formes d’engagement médiatisées par la culture[15]. »
« Ce n’est qu’avec l’émergence de sociétés sédentaires (généralement associées à la production alimentaire) que le processus d’engagement humain avec le monde matériel prend une nouvelle forme et lance le développement de nouveaux modes d’interaction avec le monde matériel, permettant l’attribution d’une signification (symbolique) aux objets matériels[16]. » Autrement dit, puisque les chasseurs-cueilleurs ne produisent pas de nourriture — ils se contentent de la cueillir et de la consommer —, ils ne travaillent pas. Ils ne s’engagent pas dans la nature de la manière nécessaire à l’émergence d’une mentalité véritablement « symbolique ».
Renfrew reconnaît qu’à ce stade, ses élucubrations pourraient être prises pour des préjugés ethnocentriques les plus réactionnaires qui soient : « Je me rends compte, avoue-t-il, que la proposition selon laquelle “l’esprit” est en quelque sorte moins développé chez les analphabètes et les illettrés de notre époque est potentiellement controversée et susceptible d’être mal interprétée[17] »: « La véritable révolution humaine » — l’émergence d’un « esprit » pleinement développé — a dû attendre le Néolithique. Engels avait écrit que l’origine de la famille, de la propriété privée et de l’État, inextricablement liée à l’agriculture, correspondait à la « défaite historique mondiale du sexe féminin », au moment où les conflits de classe et l’intensification de l’exploitation ont commencé. Pour Renfrew, l’établissement de la propriété n’est pas une défaite. Il s’agit d’une victoire absolue — la véritable révolution humaine — l’émergence d’une culture et d’un esprit symboliques.
Bref, il s’agit là d’une théorie. [Knight, qui est un très respectable universitaire, reste poli. Ce n’est pas une théorie, c’est un bon gros fantasme patriarcal et suprémaciste de merde.] La théorie originale de la « révolution humaine[18] » affirme le contraire. L’instauration de l’égalitarisme des chasseurs-cueilleurs et chasseuses-cueilleuses a été une transition qualitative. Les humains des groupes de chasse-cueillette ont des esprits pleinement développés, établissent des significations symboliques et délimitent des espaces symboliques pour des cérémonies sacrées. L’avènement d’un esprit, d’un langage et d’une culture pleinement symboliques n’a pas eu besoin d’attendre que les agriculteurs, les prêtres ou les bureaucrates des temples organisent ces choses d’en haut.
Je vais maintenant citer un exemple de chasseurs-cueilleurs africains qui attribuent une signification symbolique à des actions et objets utilisés lors d’une cérémonie sacrée — ce qui, selon Renfrew, ne peut pas se produire. Ne vous attendez pas à un temple : ces peuples ne construisent pas de structures permanentes. Dans le passage suivant, l’anthropologue Colin Turnbull décrit la cérémonie la plus importante et la plus unificatrice au plan social des pygmées Mbuti de la forêt d’Ituri, en Afrique centrale. Centrée sur une hutte en herbe spécialement construite, connue sous le nom d’elima, elle célèbre les premières menstruations d’une jeune fille [les ménarches], accueillies positivement comme un signe de fertilité :
« Ainsi, lorsqu’une jeune pygmée commence à atteindre la maturité et que le sang lui vient pour la première fois, c’est un cadeau qu’elle reçoit avec gratitude et joie […] Il n’y a pas un mot de peur ou de superstition, et tout le monde est informé de la bonne nouvelle.
La jeune fille s’enferme, mais pas dans la séclusion. Elle est accompagnée de toutes ses jeunes amies, de celles qui n’ont pas encore atteint la maturité, et de quelques autres plus âgées.
Dans la maison elima, les filles célèbrent entre elles l’heureux événement. Ensemble, elles apprennent les arts et les métiers de la maternité auprès d’une vieille parente respectée. Elles apprennent non seulement à vivre comme des adultes, mais aussi à chanter des chansons de femmes adultes. Jour après jour, nuit après nuit, la maison elima résonne du contralto guttural des femmes les plus âgées et des voix flûtées des plus jeunes. C’est un moment de joie et de bonheur, non seulement pour les femmes, mais pour tout le peuple. Les pygmées viennent de tous les coins pour présenter leurs respects, les jeunes hommes se tiennent debout ou assis devant la maison elima dans l’espoir d’apercevoir les jeunes beautés à l’intérieur. Les jeunes filles chantent une mélodie légère qui s’envole dans une harmonie complexe, et les hommes répondent par un refrain riche et plein de vitalité. Pour les pygmées, elima est l’une des occasions les plus joyeuses de leur vie :
“C’est donc avec bonheur que nous avons tous appris que non pas une, mais deux filles de notre camp avaient été bénies par la lune”[19]. »
Quelques jours après la cérémonie, les filles décident d’aller sur le sentier de la guerre. Soudain, elles sortent de l’elima. Brandissant des gaules en guise de fouet, elles poursuivent les garçons qui leur plaisent. Lorsqu’il est touché, le jeune homme est tenu par l’honneur d’entrer dans l’elima. « Une fois à l’intérieur, écrit Turnbull, il n’est pas nécessaire de faire quoi que ce soit d’autre, mais si vous refusez, vous risquez de faire l’objet d’une attention considérable[20]. » Turnbull se montre prude : ce qui se passe en réalité, c’est que le garçon — plutôt jeune — peut avoir sa première expérience sexuelle, sous la surveillance de tout un groupe de femmes. Au cours des jours suivants, une succession de jeunes peuvent être initiés de la même manière à la sexualité et à la vie d’adulte.
[Il est à noter que les filles des sociétés de chasse-cueillette ont leurs règles bien plus tard que les humaines industrielles. L’âge moyen, par exemple chez les Agta de Cagayan (Philippines) et les Hazda de Tanzanie est de 17 ans et chez les Pygmées Baka dont il est question ici, l’âge moyen est de 14,5 ans.]
Une fois les jeunes hommes suffisamment motivés, les femmes leur indiquent que leur réussite conjugale future dépendra de leur succès à la chasse. Voici donc l’épreuve finale que les jeunes hommes doivent passer : chacun doit aller dans la forêt et rapporter un gros gibier, en remettant la viande au retour. Il sera ainsi considéré comme éligible [au mariage].
Le communisme en mouvement
Certains aspects peuvent varier, mais en règle générale, dans les sociétés de chasses chasse-cueillette africaines [du moins celles qui sont plutôt égalitaires], c’est peu ou prou la manière dont se déroule l’initiation. Elle commence avec l’apparition des menstruations, considérée comme une bénédiction de la lune. Les chasseurs-cueilleurs considèrent cette période comme le meilleur moment pour avoir des rapports sexuels féconds. Comme l’explique Turnbull, « elles et ils considèrent que tout couple qui souhaite réellement avoir des enfants doit “coucher avec la lune”[21] ». La science occidentale voit les choses différemment, mais cela ne rend pas la vision des chasseurs-cueilleurs erronée : si vous vous liez à une femelle qui a un cycle menstruel actif, et que vous avez des rapports sexuels fréquents avec elle, tôt ou tard, elle finira par concevoir.
Considérons maintenant les implications théoriques. Selon Renfrew, les chasseurs-cueilleurs n’ont pas encore entamé de rupture qualitative avec les principes sociaux des primates et des singes. Leur société n’est pas encore régulée moralement. Rien n’est sacré. Les institutions religieuses n’existent pas encore. Si tel était le cas, l’apparition des règles ne devrait-elle pas déclencher des conflits, avec des mâles qui se battraient entre eux, comme chez n’importe quel autre primate pour monopoliser l’accès à la femelle concernée ? Comme nous venons de le voir, ce n’est pas du tout ce qui se passe. Dans la vie réelle, les femmes interviennent clairement pour empêcher une telle issue. Elles vont trouver la fille en premier, avant qu’un mâle ne puisse l’atteindre. Elle et son sang sont déclarés sacrés. Pendant plusieurs jours, jusqu’à ce que le danger soit écarté, les femmes établissent ce que l’anthropologue évolutionniste Christopher Boehm appelle une « domination inversée », mettant le monde à l’envers[22]. [Attendez avant de demander « mais alors, ça veut dire qu’en dehors de ces rituels, c’est la domination des hommes ? »]
L’elima ne constitue pas une anomalie, elle permet simplement d’étayer une théorie particulière. De même que la « danse du taureau éland » des Bushmen du Kalahari[23]. En fait, tous les chasseurs-cueilleurs véritablement égalitaires — c’est-à-dire pratiquement toutes les sociétés de chasse-cueillette africaines — exercent régulièrement leur « domination inversée » par des moyens similaires. J’en ai moi-même été témoin chez les Hadza de Tanzanie qui chassent avec arcs et flèches. Au cours de rituels de ce type, les jeunes hommes apprennent de manière édifiante que, si la force physique peut être appréciable, ils doivent néanmoins rediriger leurs armes vers l’extérieur : en prouvant qu’ils sont des chasseurs coopératifs et généreux. S’ils veulent avoir des relations sexuelles, il n’y a pas d’autre moyen. La division sexuelle du travail — en fait, le travail coopératif lui-même — est ainsi structurée et motivée par l’action collective des femmes à partir d’en bas.
L’initiation (dans le cas des chasseurs-cueilleurs africains) concerne fondamentalement les filles, même si les garçons sont bien sûr intéressés et impliqués, comme nous l’avons vu. En étant socialisé, le sexe est réellement libéré : les relations sexuelles sont protégées de la logique compétitive de la domination de type « primate » [#NotAllPrimates], avec ses gagnants et ses perdants, ses jalousies et les angoisses qui y sont associées. Engels a noté l’importance évolutive d’une telle libération sexuelle, en décrivant la façon dont la rivalité entre les hommes brise les groupes sociaux de primates : « Mais la tolérance réciproque entre mâles adultes, l’affranchissement de toute jalousie étaient les conditions premières pour la formation de ces groupes plus vastes et durables, au sein desquels pouvait seule s’accomplir la métamorphose de l’animal en homme. »[24]
Tout le monde profite de l’éducation sexuelle chez les chasseurs-cueilleurs, y compris les hommes, bien entendu. Les femmes dominent ces occasions, mais toujours dans la bonne humeur et l’espièglerie. Cependant, dans son inversion sinistre, le patriarcat dépeint ces jeux bienveillants de manière déformée et menaçante, les dénonçant comme une domination tyrannique des femmes. La maison sacrée des femmes est dépeinte comme un bordel, ses habitantes comme des prostituées. Et, bien sûr, ces mêmes patriarches insistent sur le fait que le sang de la femme n’est plus la bénédiction de la lune, mais sa punition — sa « malédiction » mensuelle.
Les femmes n’ont jamais régné [sur les hommes à proprement parler, dans les sociétés de chasse-cueillette]. Certes, les femmes se sont organisées de manière autonome en tant que femmes, en prenant parfois le dessus sur les hommes. En ce sens, la possibilité du matriarcat a toujours été plus qu’un simple mythe. Mais le « règne » des femmes n’a jamais été plus qu’un rassemblement périodique. En se regroupant, les femmes s’emparaient du pouvoir de manière ludique. Puis elles perdaient volontairement ce pouvoir, s’effondrant dans les rires et les plaisirs du sexe hétérosexuel. Ensuite, elles s’unissaient à nouveau, retournant la situation contre les hommes. De cette façon, la révolution ne cessait de se poursuivre.
N’y a‑t-il pas une leçon à tirer de tout ceci ? On peut défendre l’idée que la révolution est nécessairement — et même logiquement — suivie d’une contre-révolution. La meilleure façon d’y faire face consiste à gérer la contre-révolution elle-même, en soutenant les deux mouvements du pendule et en veillant à ce que la contre-révolution ne se prolonge pas plus qu’il n’en faut.
C’est ainsi que fonctionne encore aujourd’hui le communisme dans les sociétés de chasse-cueillettes africaines[25] : la lune traverse ses phases, tandis que le pouvoir oscille entre les sexes sans qu’aucun ne le monopolise longtemps. Morna Finnegan parle d’un « communisme en mouvement[26] », qui aurait duré plus de 100 000 ans. Mais lorsque ces arrangements ont pris fin, le nouveau sexe dominant a réellement pris le pouvoir et l’a gardé — cela ne fait aucun doute[27]. Les élites masculines ont alors justifié leur monopole permanent en prétendant suivre les traces des femmes. Telle a toujours été la fonction idéologique des mythes du matriarcat. [En tant que patriarcat inversé.] Oui, disent les anciens du patriarcat, nous faisons toutes ces choses horribles aux femmes : nous les tenons par le viol, nous conspirons contre elles. Mais, ne l’oubliez pas, c’est ce que les femmes nous ont fait autrefois ».
Il va sans dire que cette accusation est un véritable mythe.
Chris Knight
Traduction : Audrey A.
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Note de la traductrice (II) : au sujet du sens du terme « matriarcat » : ici, Knight s’accorde avec Marija Gimbutas en employant « matriarcat » pour désigner une sorte de patriarcat inversé, c’est-à-dire, une société dans laquelle les femmes asserviraient les hommes et les enfants. Il n’y a aucune trace passée ou présente qu’une telle société ait existé.
En revanche, la philosophe allemande Heide Goettner-Abendroth rappelle que le suffixe arkhos (archie/arquie/arcat) signifie « commencement », d’où l’« archéologie », qui se comprend comme l’étude de ce qui est « originel, primitif », ou encore l’étude de ce qui est « ancien » (arkhaîos, archaïque) et qui signifie bien étude des commencements — et non pas l’étude du pouvoir, de la loi ou du gouvernement. Le terme « patriarcat » est ainsi un non-sens : il est employé pour désigner la domination par la loi et le pouvoir des pères, ce qui correspond plutôt à une « patricratie », mot issu du préfixe pater et du suffixe kratos, pater renvoyant au père et kratos (cratie) à la loi, au pouvoir. Pour l’être humain (et tous les mammifères), au commencement de la vie est la mère. Matriarchie au sens propre désigne ainsi des sociétés où le commencement d’un clan et d’une communauté correspond aux mères (matriclans), et non pas des sociétés où les mères (ou les femmes) asserviraient les hommes. Les sociétés véritablement matriarcales, selon la définition de Heide Goettner-Abendroth, sont les sociétés partenariales et égalitaires en matière de prise de décision politique, de partage des ressources et de sexualité, caractérisées par un mode de résidence matrilocal (les filles et les enfants restent dans le clan de la mère, c’est l’homme qui va vivre avec sa belle-famille).
Il y a une division sexuée du travail qui, comme chez les chasseurs-cueilleurs égalitaires d’aujourd’hui, est dynamique et complémentaire dans la mesure où ils et elles collaborent et contribuent équitablement à la vie du groupe. En résumé, ces sociétés sont matricentrées et matrilinéaires, et pratiquent la résidence matrilocale — qui représente l’un des facteurs nécessaires permettant le maintien de l’égalité homme-femme. Une société sédentaire « égalitaire » ne peut être strictement égalitaire en termes de pouvoir symbolique : la matrilocalité et la matrilinéarité constituent la « contre-dominance » qui permet des liens forts entre les femmes, ce qui compense les tentations d’usage de la force physique et de la violence masculine. Tout homme qui se montrerait violent avec sa compagne serait aussitôt intercepté par un groupe de femmes et par les hommes « normaux » du clan. Chez les chasseurs-cueilleurs égalitaires, tous les rituels sont des oscillations de pouvoir et de contre-dominance maintenant l’équilibre et l’égalité. Il existe des rituels spécifiquement destinés à « remettre à sa place » un homme qui manifesterait de l’arrogance ou de l’égoïsme. Et ce sont les vieilles femmes qui ont le pouvoir de déclencher ces rituels : ces rituels consistent à se moquer par l’imitation du fautif, jusqu’à ce que le coupable comprenne que c’est son comportement qui est moqué, et tout finit dans un rire général.
Ma conviction profonde est que seule une organisation sociale matrilocale est matrilinéaire permet de maintenir un rapport égalitaire entre les sexes dans les sociétés sédentaires. Si une société matrilocale passait progressivement à une organisation néolocale, la domination masculine s’établirait peut-être lentement d’abord, mais sûrement et sans faille en l’affaire de quelques générations. Oui, nous ne sommes pas sorties d’affaires.
- C. Knight, Decoding fairy tales, Londres, 2011 ↑
- Chapitre 7, partie II, e‑book, éditions Plon : www.plon.fr. ↑
- Le dragon est l’avatar d’une déesse dans tous les mythes où un héros mythologique le pourfend : Zeus tuant Thypheus (engeance de Rhéa), Apollon tuant Pytho/Delphynes (engeance d’Héra), Marduk tuant Tiamat (grande déesse), Argos tuant Échidna, Tarhu tua Illuyanka, Horus tua Ua Zit (Isis/Seth) , Indra tuant Vrta, Hercules tuant Ladon, Persée tuant Médusa, que Kadmos tuant le dragon d’Ismène. C’est la défaite mondiale des femmes dans les mythologies. Et les mythologies ne sont autres que des performances du réel, de ce qui se passe dans l’organisation sociale. Les femmes perdaient ainsi leur pouvoir symbolique et leur liberté bien réelle. ↑
- C. Knight, Blood relations : menstruation and the origins of culture, Londres, 1995, p. 449–513. ↑
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- Judith Grahn relate les traditions rémanentes de réclusions menstruelles ainsi que leurs origines préhumaines dans Blood, Bread and Roses, How Menstruations Created the World (« Du sang, du pain et des roses, comment les menstruations ont créé le monde »). NdlT ↑
- F. Engels (1884), L’Origine de la famille, de la propriété et de l’État, ebook éditions MLM ↑
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