« Réintroduire la peur dans la conscience… »
• Faut-il montrer sa capacité nucléaire ? Et comment ! répond Dimitri Trenine. • Une nouvelle intervention du débat en cours en Russie sur l’emploi du nucléaire, –en Ukraine et ailleurs. • Ce débat s’impose parce que s’impose le constat que la dissuasion est morte et que pour que l’arme nucléaire soit efficace, il faut la montrer et il faut montrer qu’on est prêt à s’en servir dès qu’on jugera nécessaire de le faire. • La guerre en Ukraine est une effrayante leçon de travaux pratiques sur la plus terrible des armes de destruction massive. • Avec un texte de Dimitri Panine.
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On reprend ici un texte de Dimitri Trenine, publié ce 22 juin sur RT.com, sur la question de l’emploi d’arme nucléaire dans la crise ‘Ukrisis’, dans le cours d’un débat ouvert récemment, également sur RT.com, par un texte du professeur Karaganov (voir le 15 juin 2023). RT.com a publié certaines réactions ou extraits d’autres textes d’experts et d’intellectuels russes en réaction à celui de Karaganov, le 17 juin, – en général dans un sens défavorable.
Celui de Trenine est très intéressant, notamment parce qu’il s’agit de Trenine. Il est décrit, dans le texte qu’il a donné à RT.com (publié également, en russe, dans ‘Russia in Global Affairs’), comme « un expert russe extrêmement respecté qui a servi dans l'armée soviétique », – ainsi que dans ses fonctions actuelles : professeur de recherche à la Higher School of Economics, chercheur principal à l’Institute of World Economy and International Relations et membre du Conseil russe des affaires internationales. Trenine a également occupé des postes remarquables, notamment celui de directeur du ‘Centre Carnegie’ (le think tank US) à Moscou.
Nous avons souvent cité Trenine, en supposant qu’il devait avoir une position assez libérale et “ouverte” pour occuper cette position (à Carnegie), mais en remarquant pour notre compte que ses prises de position n’étaient marquées en rien de l’aspect idéologique de cette position. PhG écrivait à son propos, dans son ‘Journal-dde.crisis’ du 22 septembre 2016 ;
« A noter que la/les même(s) question(s) pouvai(en)t être posée(s), – et comment ! – à propos d’articles de Dimitri Trenine, qui n’est rien moins que le directeur du Carnegie Moscow Center. J’écris cela en référence à trois occurrences où Trenine fut cité dans dedefensa.org, à propos d’articles qu’il écrivit sur la crise ukrainienne, dans lesquels il disait des choses très censées, à mille lieux de la politique complètement folle de Washington (le 4 mars 2014, le 4 août 2014, le 21 août 2014). C’est un point très spécifique, très particulier, très propre aux USA, ce que des officiers de la CIA avaient nommé à une certaine époque (dans les années 1980 pour mon compte) “le complexe de Langley”, en référence au centre opérationnel et de direction de la CIA, à Langley, en Virginie. »
Le texte de Trenine, du 22 juin 2023 (à remarquer lugubrement sans y voir la moindre intention : jour anniversaire du lancement en 1941 de l’opération ‘Barbarossa’) est présenté avec un titre et un sous-titre qui ne dissimulent rien de la position de l’auteur. De même que Karaganov, censé être plutôt un intellectuel libéral, défend une position “réaliste” qui a pu sembler effrayante et belliciste à certains, de même Trenine avance-t-il en mettant toutes les cartes sur la table, – sans en dissimuler aucune ni ce qu’il pense des responsabilités premières…
« Les États-Unis et leurs alliés jouent à la “roulette russe”. On pourrait presque croire qu'ils veulent une guerre nucléaire.
» Si le conflit ukrainien continue sur sa trajectoire actuelle, il se terminera par un désastre total pour l'humanité. »
L’article de Trenine est du plus grand intérêt, surtout venant d’une plume jugée en général très mesurée et rationnelle. Il nous paraît que Trenine est d’un avis très proche de celui de Karaganov, même s’il reste assez ambigu en ce qui concerne la proposition, sans d’ailleurs fournir d’alternative très nette. L’intérêt de son texte est que les données du problème sont exposées d’une façon extrêmement claire, mettant ainsi en évidence les conditions réelles qu’affrontent les Russes, mais nous également puisque l’OTAN, l’UE, les USA, tout ce qui compte de composants de l’‘Ouest-complotistif’ sont partie indirectement prenante, mais d’une façon de plus en plus directe.
La fin de la dissuasion
Ainsi Trenine commence-t-il par le constat que l’escalade continuelle des USA/de l’OTAN et du reste sur un champ de bataille, directement et existentiellement contre une superpuissance nucléaire, indique effectivement que la dissuasion n’existe plus pour cette partie du monde qui se situe du bon côté du Camp du Bien.
« En conséquence, il est devenu évident que la dissuasion nucléaire, sur laquelle beaucoup à Moscou comptaient comme moyen crédible de garantir les intérêts vitaux du pays, s’avère être un outil beaucoup plus limité qu'ils ne le pensaient… […]
» La peur de la bombe atomique, présente dans la seconde moitié du XXe siècle, a disparu. Les armes nucléaires ont été retirées de l'équation. La conclusion pratique est claire : il n'y a pas lieu de craindre une telle réponse de la Russie. »
… Et cela est extrêmement dangereux, et cela doit être aussitôt rectifié parce que la logique de cette posture est effectivement l’affrontement suprême :
« Il s'agit là d'une idée fausse extrêmement dangereuse. La trajectoire de la guerre en Ukraine indique une escalade du conflit à la fois horizontalement (en élargissant le théâtre de l'action militaire) et verticalement (en augmentant la puissance des armes utilisées et l'intensité de leur utilisation). Il faut reconnaître sobrement que cette dynamique se dirige vers une confrontation armée directe entre la Russie et l'OTAN. »
Nécessité de montrer la puissance
Trenine constate qu’en fonction de ce constat fondamental de la fin de la dissuasion, il est absolument nécessaire de montrer désormais qu’on possède la puissance nucléaire et qu’on est prêt à l’utiliser selon le choix qu’on fera, notamment et précisément dans le cadre d’un conflit jugé “existentiel” pour le possesseur de cet armement.
En conséquence, Trenine juge la doctrine russe d’emploi des armes nucléaires complètement dépassée, puisque dépendante du “comportement nucléaire” de l’adversaire ; lequel adversaire n’a aucune conscience de la gravité catastrophique d’un affrontement nucléaire et continue à alimenter un conflit perçu comme “existentiel” par la Russie, et devant donc nécessiter éventuellement l’“emploi en premier” du nucléaire par les Russes. C’est ce que Trenine définit comme la nécessité pour les Russes de ne pas « respecter les règles fixées par l'autre partie » puisque ces règles ne prennent absolument pas en compte la nécessité existentielle dont la Russie est seule juge.
« …Au contraire, il est préférable de clarifier et de moderniser notre stratégie de dissuasion nucléaire, en tenant compte de l'expérience pratique du conflit ukrainien. Les dispositions doctrinales existantes ont été formulées non seulement avant le début de l'opération militaire en cours, mais aussi apparemment sans idée précise de ce qui pourrait se produire au cours d'une telle opération.
» […] Le principal adversaire devrait recevoir un signal sans ambiguïté indiquant que Moscou ne respectera pas les règles fixées par l'autre partie. […] La possibilité d'utiliser des armes nucléaires dans le conflit actuel ne doit pas être dissimulée. Cette perspective réelle, et pas seulement théorique, devrait inciter à limiter et à arrêter l'escalade de la guerre et, en fin de compte, à ouvrir la voie à un équilibre stratégique satisfaisant en Europe. »
Sur la thèse du professeur Karaganov
Trenine mentionne évidemment la proposition du professeur Karaganov. Sans la rejeter absolument ni s’y opposer, il la juge difficile à réaliser même si elle contient des éléments de logique allant évidemment dans le sens d’éviter un conflit généralisé :
« Il se pourrait bien que le calcul que nous venons de décrire soit finalement correct. Mais c'est peu probable. »
… Au reste, qu’en serait-il, justement, si la proposition de loi des sénateurs Graham et Blumenthal était votée par le Sénat ? Les deux sénateurs, – un républicain fameux pour ses vitupérations et un démocrate, – proposent une loi faisant de tout tir nucléaire russe en Ukraine une attaque contre l’OTAN dans son entièreté. L’ambassadeur russe à Washington Antonov diagnostique une « folie russophobe » chez les deux sénateurs, mais nul ne peut nier qu’est ainsi ouvert le dossier d’une sorte de “super-Article 5” qui bouleverserait toutes les possibilités internes et externes de l’OTAN. Nous ne disons pas que cela aggrave la situation (ni que cette loi sera votée, acceptée, appliquée, etc.) mais que cela rend largement caduque la suggestion du professeur Karaganov et élargit considérablement le déjà-vaste champ de désordre incontrôlé que sont les affaires otaniennes, ukrainiennes et transatlantiques, et nucléaires en général.
Du bon non-usage du nucléaire
Pour terminer, Trenine résume donc les quelques nécessités devant lesquelles se trouve la Russie (mais, finalement, toute nation possédant des armes nucléaires et se reposant jusqu’ici sur la dissuasion).
• Il y a d’abord la nécessité de montrer les armes nucléaires et surtout de faire savoir que l’on est prêt à s’en servir.
« La cartouche nucléaire devrait-elle être insérée de manière démontrable dans le barillet du revolver avec lequel les dirigeants américains jouent imprudemment aujourd'hui ? Pour paraphraser un ancien homme d'État américain : Pourquoi avons-nous besoin d'armes nucléaires si nous refusons de les utiliser face à une menace existentielle ? »
• Pour autant, il ne faut pas jouer de cette arme comme d’une menace (« il n'est pas nécessaire d'effrayer les autres avec des mots »), – ce qui rend la démarche précédente bien difficile… Comment faire croire aux autres qu’on est prêt à se servir d’une arme terrible sans prononcer de ces mots qui effraient ? … Mais personne n’a jamais osé prétendre que l’actuelle situation était particulièrement facile dans l’opérationnalisation de ses divers composants.
• La dissuasion (jeu à deux ou à plusieurs) étant morte, il faut faire de l’usage du nucléaire un choix individuel qui doit prendre en compte le fait que l’autre n’est plus préoccupé de la même façon que soi-même par la possibilité que tel ou tel de ses actes puisse déclencher une décision d’emploi du nucléaire.
• Pour conclure, l’apologie de « la peur de l’apocalypse » comme ultime moyen d’éviter notre extinction à tous dans un apocalypse nucléaire.
« Pour éviter une catastrophe générale, il est nécessaire de réintroduire la peur de l'apocalypse dans la politique et dans la conscience publique.
» À l'ère nucléaire, c'est la seule garantie de préserver l'humanité. »
dedefensa.org
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Les USA jouent à “la roulette russe”
Le récent article du professeur Sergei Karaganov a mis en lumière l'épineuse question de l'utilisation d'armes nucléaires dans le conflit ukrainien. De nombreuses réactions à l'article se résument au raisonnement bien connu selon lequel il n'y a pas de vainqueur dans une guerre nucléaire et qu'elle ne peut donc pas être menée.
Dans ce contexte, le président Vladimir Poutine, répondant à une question lors du Forum économique international de Saint-Pétersbourg, a déclaré que les armes nucléaires ont un effet dissuasif et que les conditions de leur utilisation sont définies dans une doctrine publiée. Il a expliqué que la possibilité théorique d'utiliser ces armes existe, mais qu'il n'est pas nécessaire de les utiliser maintenant.
En principe, les armes nucléaires sont “sur la table” pour la Russie depuis le tout début du conflit ukrainien, précisément pour dissuader les États-Unis et leurs alliés de s'impliquer directement. Néanmoins, les rappels publics répétés de Poutine et d'autres responsables sur le statut nucléaire de la Russie n'ont jusqu'à présent pas empêché une escalade croissante de la participation de l'OTAN. En conséquence, il est devenu évident que la dissuasion nucléaire, sur laquelle beaucoup à Moscou comptaient comme moyen crédible de garantir les intérêts vitaux du pays, s’avère être un outil beaucoup plus limité qu'ils ne le pensaient.
En fait, les États-Unis se sont désormais fixé la tâche, – impensable pendant la guerre froide, – d'essayer de vaincre une autre superpuissance nucléaire dans une région stratégiquement importante, sans recourir à l'arme atomique, mais en armant et en contrôlant un pays tiers. Les Américains procèdent avec prudence, testent les réactions de Moscou et repoussent constamment les limites de ce qui est possible en termes d'armes fournies à Kiev, ainsi que de choix des cibles. Après avoir commencé par des ‘Javelins’ antichars, puis avoir cajolé leurs alliés pour qu'ils envoient de véritables chars, les États-Unis envisagent apparemment de transférer des avions de chasse F-16 et des missiles à longue portée.
Il est probable que cette stratégie américaine repose sur la conviction que les dirigeants russes n'oseraient pas utiliser d'armes nucléaires dans le conflit actuel et que leurs références à l'arsenal nucléaire dont ils disposent ne sont rien d'autre que du bluff. Les Américains sont même restés calmes, du moins en apparence, face au transfert d’armes nucléaires russes non stratégiques au Belarus. Cette “intrépidité” est le résultat direct des changements géopolitiques des trois dernières décennies et du changement de génération au pouvoir aux États-Unis et en Occident en général.
La peur de la bombe atomique, présente dans la seconde moitié du XXe siècle, a disparu. Les armes nucléaires ont été retirées de l'équation. La conclusion pratique est claire : il n'y a pas lieu de craindre une telle réponse de la Russie.
Il s'agit là d'une idée fausse extrêmement dangereuse. La trajectoire de la guerre en Ukraine indique une escalade du conflit à la fois horizontalement (en élargissant le théâtre de l'action militaire) et verticalement (en augmentant la puissance des armes utilisées et l'intensité de leur utilisation). Il faut reconnaître sobrement que cette dynamique se dirige vers une confrontation armée directe entre la Russie et l'OTAN. Si la force d’inertie accumulée n’est pas annulée, un tel affrontement aura lieu, et dans ce cas, la guerre, s'étant étendue à l'Europe occidentale, deviendra presque inévitablement nucléaire. Et après un certain temps, une guerre nucléaire en Europe conduira très probablement à un échange de coups entre la Russie et les États-Unis.
Les Américains et leurs alliés jouent véritablement à la roulette russe. Oui, jusqu'à présent, la réponse russe au bombardement de Nord Stream, à l'attaque par drone de la base aérienne stratégique d'Engels, à l'entrée de saboteurs armés par l'Occident dans la région de Belgorod et à bien d'autres actions menées par la partie soutenue et contrôlée par Washington a été relativement modérée.
Comme l'a récemment indiqué M. Poutine, il y a de bonnes raisons à cette retenue. La Russie, a déclaré le président, est capable de détruire n'importe quel bâtiment à Kiev, mais ne s'abaissera pas aux méthodes de terreur utilisées par l'ennemi. M. Poutine a toutefois ajouté que la Russie envisageait diverses options pour détruire les avions de guerre occidentaux s'ils sont basés dans des pays de l'OTAN et participent directement à la guerre en Ukraine.
Jusqu'à présent, la stratégie de Moscou a consisté à laisser l'ennemi prendre l'initiative de l'escalade. L'Occident en a profité pour tenter d'épuiser la Russie sur le champ de bataille et de l'affaiblir de l'intérieur. Il est absurde pour le Kremlin de continuer à suivre cette voie. Au contraire, il est préférable de clarifier et de moderniser notre stratégie de dissuasion nucléaire, en tenant compte de l'expérience pratique du conflit ukrainien. Les dispositions doctrinales existantes ont été formulées non seulement avant le début de l'opération militaire en cours, mais aussi apparemment sans idée précise de ce qui pourrait se produire au cours d'une telle opération
La stratégie extérieure de la Russie comprend un ensemble de mesures de diplomatie étrangère, de campagnes d'information et d'autres aspects, en plus des éléments militaires. Le principal adversaire devrait recevoir un signal sans ambiguïté indiquant que Moscou ne respectera pas les règles fixées par l'autre partie. Bien entendu, cela devrait s'accompagner d'un dialogue crédible avec nos partenaires stratégiques et les États neutres, expliquant les motifs et les objectifs de nos actions. La possibilité d'utiliser des armes nucléaires dans le conflit actuel ne doit pas être dissimulée. Cette perspective réelle, et pas seulement théorique, devrait inciter à limiter et à arrêter l'escalade de la guerre et, en fin de compte, à ouvrir la voie à un équilibre stratégique satisfaisant en Europe.
En ce qui concerne les frappes nucléaires russes contre les pays de l'OTAN, évoquées par le professeur Karaganov: en théorie, Washington ne répondrait probablement pas à une telle attaque par une riposte nucléaire contre la Russie, par crainte d'une riposte russe contre les Etats-Unis eux-mêmes. Cela mettrait fin à la mythologie qui entoure l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord depuis des décennies et entraînerait une crise profonde pour l'OTAN, voire la dissolution de l'organisation. Il est possible que, dans de telles circonstances, les élites atlantiques de l'OTAN et de l'UE paniquent et soient balayées par des forces patriotiques qui verraient par elles-mêmes que leur sécurité ne dépend pas d’un parapluie nucléaire américain inexistant, mais de la construction d'une relation équilibrée avec la Russie. Il est également possible que les Américains décident de laisser la Russie tranquille.
Il se pourrait bien que le calcul que nous venons de décrire soit finalement correct. Mais c'est peu probable.
Oui, une frappe nucléaire américaine sur la Russie ne suivrait probablement pas immédiatement. Il est peu probable que les Américains sacrifient Boston pour Poznan, tout comme ils n'allaient pas sacrifier Chicago pour Hambourg pendant la guerre froide. Mais Washington réagira probablement d'une manière ou d'une autre. Peut-être de type non nucléaire qui, sans spéculer de manière trop sauvage, pourrait être sensible et douloureuse pour nous. Il est probable que Washington tentera de poursuivre un objectif similaire au nôtre : paralyser la volonté des dirigeants russes de poursuivre la guerre et créer la panique dans notre société.
Il est peu probable que les dirigeants de Moscou capitulent après un tel coup, car, à ce stade, l’existence même de la Russie serait en jeu. Il est plus probable qu’une frappe de représailles s’ensuive, et cette fois, on peut le supposer, contre l’adversaire principal plutôt que contre ses satellites.
Faisons une pause avant ce point de non-retour et résumons provisoirement notre analyse.
La cartouche nucléaire devrait-elle être insérée de manière démontrable dans le barillet du revolver avec lequel les dirigeants américains jouent imprudemment aujourd'hui ? Pour paraphraser un ancien homme d'État américain : Pourquoi avons-nous besoin d'armes nucléaires si nous refusons de les utiliser face à une menace existentielle ?
D'autre part, il n'est pas nécessaire d'effrayer les autres avec des mots. Au contraire, nous devons nous préparer concrètement à toute tournure possible des événements en examinant soigneusement les options et leurs conséquences.
La guerre en Ukraine s'est prolongée. D'après ce que l'on peut déduire des actions des dirigeants russes, ils espèrent obtenir un succès stratégique en s'appuyant sur les ressources russes, qui sont bien plus importantes que celles de l'Ukraine. Ils s'appuient également sur le fait que Moscou a beaucoup plus d'enjeux dans cette guerre que l'Occident. Ce calcul est probablement correct, mais il faut tenir compte du fait que l'adversaire évalue les chances de la Russie différemment de nous et peut prendre des mesures qui pourraient conduire à un affrontement armé direct entre la Russie et les États-Unis/l'OTAN.
Nous devons nous préparer à une telle éventualité. Pour éviter une catastrophe générale, il est nécessaire de réintroduire la peur de l'apocalypse dans la politique et dans la conscience publique.
À l'ère nucléaire, c'est la seule garantie de préserver l'humanité.
Dimitri Trenine
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