Myriam Bahaffou, chamane post-porn (par Audrey A. et Nicolas Casaux)

Myriam Bahaffou, chamane post-porn (par Audrey A. et Nicolas Casaux)

Dans la com­pi­la­tion de textes pré­ten­du­ment fémi­nistes parue l’an der­nier, en 2021, diri­gée par Elsa Dor­lin (dis­ciple de Judith But­ler) et inti­tu­lée Feu ! Abé­cé­daire des fémi­nismes pré­sents, on retrouve une brillante pré­sen­ta­tion de l’« éco­fé­mi­nisme radi­cal » selon Myriam Bahaf­fou, qui se décrit comme :

« [U]ne meuf cis de 27 ans [aujourd’hui 28], d’origine nord-afri­caine, qui navigue entre les mondes queers, TDS [Tra­vail Du Sexe], éco­fé­mi­nistes, et qui est embar­quée dans une thèse depuis un an sans trop savoir quoi en faire. Elle aime arti­cu­ler des concepts bizarres entre eux, comme car­no­sexisme, véga­nisme et déco­lo­ni­sa­tion. Plus que des concepts, elle sent qu’ils ont prise dans sa chair, et c’est à par­tir de là qu’elle parle d’écologie. Elle vient d’une classe pauvre, adore le luxe, et essaie de négo­cier avec elle-même tout le temps à ce sujet. Elle aime écrire, par­ler de phi­lo fémi­niste, dan­ser, fri­co­ter avec tout le monde, et essaie de prou­ver depuis quelques années que le véga­nisme n’est pas un truc de Blanch·es. »

Que Myriam Bahaf­fou soit embar­quée dans une thèse sans queue ni tête dans laquelle elle arti­cule n’importe com­ment des concepts bizarres, rien de plus évident. Dès le début de son essai, on lit :

« Je pour­rais vous par­ler des mou­ve­ments anti-­ex­trac­ti­vistes en Afrique, des éco­fé­mi­nistes anti-nucléaire en Europe, des terres les­biennes, des sor­cières, du racisme envi­ron­ne­men­tal, d’écologie trans, de la “guerre” des semences, du colo­nia­lisme des ter­ri­toires-peuples-savoirs, de l’eau, des éner­gies fos­siles, de Mon­san­to, de Nest­lé, de Coca-Cola, de la micro­fi­nance, des ONG bien­fai­santes diri­gées par des hommes blancs qui per­pé­tuent un colo­nia­lisme écœu­rant à grands coups de white savio­rism. Je pour­rais vous par­ler de car­no­sexisme, de véga­nisme, de la viande comme sym­bole de la mas­cu­li­ni­té hégé­mo­nique. D’anti-nucléaire, de mobi­li­sa­tions fémi­nistes, de camps de la paix, de sabo­tages, de pink blocks, de witch blocks.

Après avoir jeté tous ces mots sur la table, je regarde ce que ça tisse, et quelles caté­go­ries je fais entrer en réso­nance. Je constate que les éco­fé­mi­nismes savent déci­dé­ment bien semer le trouble, et, d’emblée, nous perdre complètement. »

Effec­ti­ve­ment. Appa­rem­ment, « nous perdre com­plè­te­ment », c’est « la force des éco­fé­mi­nismes » : « hybri­der les pro­ces­sus nar­ra­tifs et les natures de nos his­toires en flou­tant les fron­tières de véri­té ». Tout un projet.

Éco-n’importe quoi

Dans un entre­tien accor­dé au maga­zine — tout à fait mains­treamLes Inrocks, Bahaf­fou affirme que « l’écoféminisme a le vent en poupe et, en deve­nant mains­tream [nous sou­li­gnons], a déjà lais­sé quelques plumes der­rière lui. Blan­chi par les femmes bour­geoises qui s’en reven­diquent aujourd’hui en occi­dent, ce mou­ve­ment révo­lu­tion­naire, qui trouve sa source dans les luttes de femmes des Suds pour la pré­ser­va­tion de leur envi­ron­ne­ment, est peu à peu deve­nu une affaire tout sauf radi­cale, qui risque désor­mais l’ultime dilu­tion dans le grand bain de la poli­tique et du déve­lop­pe­ment personnel. »

En réa­li­té, l’écoféminisme n’a pas vrai­ment le vent en poupe. Les pré­ten­dus « éco­fé­mi­nismes » en train de deve­nir mains­tream, ce sont celui de San­drine Rous­seau et celui de Bahaf­fou. Bahaf­fou qui pré­tend hon­nir Rous­seau au motif que l’élue EELV est éta­tiste et que leurs « éco­fé­mi­nismes » ne sont pas les mêmes (alors qu’ils sont assez proches à bien des égards, qu’ils sont pareille­ment queer par exemple). Ce qui n’empêche mani­fes­te­ment pas les com­parses de Myriam Bahaf­fou d’en appe­ler au par­ti de Rous­seau afin de faire annu­ler une confé­rence — réel­le­ment — éco­fé­mi­niste.

Myriam Bahaf­fou sur France inter

Le pré­ten­du « éco­fé­mi­nisme » de Bahaf­fou cherche moins à com­prendre les com­mu­nau­tés bio­tiques et à com­battre le patriar­ca­pi­ta­lisme qu’à pro­mou­voir les idées queers et à empê­cher l’expression des dis­cours contre­di­sant les élu­cu­bra­tions post­mo­dernes. L’écoféminisme his­to­rique n’est jamais deve­nu mains­tream. Peu de gens ont enten­du par­ler de Maria Mies, de Vero­ni­ka Benn­holdt-Thom­sen, de Caro­lyn Mer­chant, d’Ariel Sal­leh ou de Val Plumwood.

Mais reve­nons-en à son grand pro­jet, « nous perdre complètement » :

« On ne cherche plus LA véri­té, ni LE mou­ve­ment qui per­met­trait de NOUS faire avan­cer ensemble pour une meilleure com­pré­hen­sion des causes éco­lo­giques ou fémi­nistes (qui est ce “nous”, de toute façon ?). »

Cher­cher la véri­té, c’est dépas­sé. L’écoféminisme de Bahaf­fou n’a même pas de sujet. Il parle d’un nous indé­fi­nis­sable et s’en vante : « le sujet [de son éco­fé­mi­nisme (ou de ses éco­fé­mi­nismes)] n’est plus “les femmes”. Dans un cadre éco­fé­mi­niste, le genre est un trem­plin qui sert à dépas­ser l’humain. »

Bahaf­fou sur Radio Nova

En bonne idéo­logue queer/trans, Bahaf­fou ne sau­rait de toute façon pas défi­nir le mot « femme ». Pour elle, femme désigne n’importe quelle per­sonne qui s’identifie comme une femme (une non-défi­ni­tion par­fai­te­ment absurde). Le nou­veau sujet, semble-t-il, c’est donc « le genre », qui doit nous per­mettre de par­ve­nir à une huma­ni­té post-humaine. Trans­genre, trans­hu­main, tran­ses­pèce, l’écoféminisme de Bahaf­fou s’émancipe de la réa­li­té. Et comme, aujourd’hui, le genre désigne tout et n’importe quoi, un res­sen­ti per­son­nel, « une sen­sa­tion ou un sen­ti­ment interne » (entre autres for­mules niaises, vides de sens), sa pen­sée n’a pas vrai­ment de sujet. Bahaf­fou ajoute :

« Les éco­fé­mi­nismes s’attaquent même à la notion de mou­ve­ment poli­tique, car ils sont une telle myriade d’enchevêtrements, de com­pli­ci­tés et d’oppositions idéo­lo­giques et mili­tantes, qu’ils refusent tout sim­ple­ment l’idée du sin­gu­lier. Ils ne cherchent ni la cohé­rence ni la soro­ri­té universelle. »

Pro­met­teur, n’est-ce pas. Ne pas cher­cher la cohé­rence, c’est sans doute ce qui per­met à Myriam Bahaf­fou de cri­ti­quer sans cesse l’« huma­ni­té, blanche, cishé­té­ro­sexuelle, valide », la pen­sée « blanche, ins­ti­tu­tion­nelle », tout en s’inspirant nota­ble­ment de célèbres pen­seuses blanches, cishé­té­ro­sexuelles, valides et ins­ti­tu­tion­nelles comme Don­na Hara­way ou Isa­belle Sten­gers, et tout en évo­luant dans le milieu par­fai­te­ment ins­ti­tu­tion­nel de l’université — « Myriam Bahaf­fou, 28 ans, est cher­cheuse en phi­lo­so­phie fémi­niste, en cotu­telle de thèse à l’université Picar­die — Jules-Verne d’Amiens et à l’université d’Ottawa (Cana­da) » .

Pipi, caca

Éco­fé­mi­nisme sca­to­phile ? Myriam Bahaf­fou aime les choses sales, son « éco­fé­mi­nisme salit la pure­té éco­lo­gique », « les éco­fé­mi­nismes salissent plus qu’ils ne res­taurent. D’ailleurs, ils dérangent : ils ne ché­rissent pas une pos­ture mili­tante de la rete­nue, de la décence, de la sagesse. »

Vous sui­vez ? Véri­té, cohé­rence, décence, sagesse, tout ça, aux chiottes. On salit. Plu­tôt que de ces valeurs ou idées obso­lètes, l’écoféminisme ou les éco­fé­mi­nismes de Myriam Bahaf­fou (ça dépend des moments), fait la pro­mo­tion de la « magie », du « BDSM », des « corps queers, trans », du « tra­vail du sexe », etc. L’anti éco­fé­mi­nisme trans­gres­sif de Bahaf­fou sou­tient donc l’exploitation sexuelle, le patriar­ca­pi­ta­lisme, et l’industrie — l’industrie du sexe, de l’identité, du corps syn­thé­tique, de la fabrique d’hormones, des pro­cé­dures chi­rur­gi­cales esthé­tiques, etc.

Cela dit, il arrive que Myriam Bahaf­fou for­mule des cri­tiques per­ti­nentes, comme lorsqu’elle dénonce « les bombes nucléaires, les méga­ma­chines de l’extractivisme, les parcs d’élevages inten­sifs, les zoos, les trains qui trans­portent les déchets radio­ac­tifs, les jou­joux qu’on envoie dans l’espace avec des singes et des chiens, pour prou­ver qu’il faut trans­gres­ser toutes les limites, sans excep­tion ». Mais c’est ce qui arrive quand on dit tout et n’importe quoi, qu’on récu­père à droite à gauche des dénon­cia­tions faciles, qui flottent dans l’air du temps, sans doute davan­tage par déma­go­gie que par réelle conviction.

D’un côté, donc, Bahaf­fou semble affir­mer que la quête absurde de trans­gres­sion des limites qui anime le capi­ta­lisme indus­triel, c’est mal. Mais de l’autre, c’est exac­te­ment ce qu’elle pro­meut (dans un dis­cours ter­ri­ble­ment amphigourique) :

« Nous […] sommes des bonnes femmes hys­té­riques, des déviantes éco­lo­giques, des radio­ac­tives hor­mo­nées, des cyborgs ani­males, des sor­cières héré­tiques, des cha­manes post-porn. Nous flou­tons les fron­tières, nous négo­cions avec notre corps, dans le but de le connec­ter à d’autres formes de vie : là (et nulle part ailleurs) se joue notre enjeu écologique.

Nous échan­geons des flux avec des plantes, des machines, des esprits. […] 

Maquillage, faux ongles, exten­sions capil­laires, sté­ri­lets, hor­mones, tatouages, sili­cone, botox, chairs bleuies par des cordes, mar­te­lées par des ins­tru­ments BDSM, pou­mons pleins d’air pol­lué de la métro­pole, ou emplis de vapeurs de plantes illé­gales et déli­cieuses : nous sommes tous·tes des orga­nismes géné­ti­que­ment modifiés. »

C’est en prô­nant n’importe quoi et en défen­dant tout et son contraire que l’on se fait bien voir des domi­nants. Bahaf­fou roule sur le dos et montre le ventre en tirant la langue. Elle montre son inof­fen­si­vi­té pour le sta­tu quo, son rôle de bouf­fonne du roi et des idées domi­nantes mains­tream qu’elle accom­pagne avec facétie.

Post-porn

À l’attention de la lec­trice ou du lec­teur tris­te­ment igno­rant, une pré­ci­sion. Le « post-porn » est une idée qui s’inscrit dans le nébu­leux mou­ve­ment queer, théo­ri­sée, de même que les idées queer en géné­ral, par des uni­ver­si­taires dans les pays les plus riches du monde. Des gens (très bien) payés pour ça, donc. Et le « post-porn », nous explique Rachele Bor­ghi (« maître de confé­rences en géo­gra­phie à l’université de la Sor­bonne et por­nac­ti­viste aca­dé­mi­cienne »), est une « per­for­mance » qui pré­sente « de nom­breuses carac­té­ris­tiques consti­tu­tives » par­mi lesquelles :

« abo­li­tion de la dis­tinc­tion entre public et pri­vé, usage de l’ironie, rup­ture avec la dicho­to­mie sujet/objet, effa­ce­ment de la fron­tière entre la culture légi­time (l’art) et les pro­duc­tions cultu­relles illé­gi­times (la por­no­gra­phie), impli­ca­tion des spec­ta­teurs, expo­si­tion publique de pra­tiques tra­di­tion­nel­le­ment ins­crites dans la sphère pri­vée, dénon­cia­tion de la médi­ca­li­sa­tion des corps, ren­ver­se­ments, mise en ques­tion du lien entre sexe et sexua­li­té, usage de pro­thèses (le spé­cu­lum dans ce cas) ».

Tout ça nous fait une belle jambe, pro­thé­tique ou non, n’est-ce pas. Un peu plus loin dans son texte sur le sujet, Rachele Bor­ghi recon­nait elle-même que tout ce qu’elle a dit jusqu’ici n’a pas beau­coup de sens, mais pro­pose de pré­ci­ser encore : « S’il est dif­fi­cile de défi­nir pré­ci­sé­ment ce qu’est le post-porn, on peut iden­ti­fier des carac­té­ris­tiques ou des thèmes récur­rents qui sont par­ta­gés par la pro­duc­tion post-por­no­gra­phique, en par­ti­cu­lier par les performances. »

Pre­mière carac­té­ris­tique majeure du post-porn :

« Cen­tra­li­té de l’anus. Pour le trans­fé­mi­nisme, l’anus a un rôle cen­tral. Dans son Mani­feste contre-sexuel (2000), Bea­triz Pre­cia­do affirme que les tra­vailleurs de l’anus sont les nou­veaux pro­lé­taires d’une pos­sible révo­lu­tion contre-sexuelle. L’anus “tra­verse les fron­tières ana­to­miques impo­sées par la dif­fé­rence sexuelle […] ; c’est un lieu d’excitation et de pro­duc­tion de plai­sir qui est absent de la liste des zones orgas­miques éta­blies […] ; c’est une usine où le corps est recons­truit comme contre-sexuel” (p. 35).

Pre­cia­do déve­loppe cette réflexion dans Ter­ror Anal (2009). L’anus, clos par le régime hété­ro­sexuel afin de main­te­nir les pri­vi­lèges de la mas­cu­li­ni­té, devient un “espace de tra­vail tech­no­lo­gique” (p. 35), un labo­ra­toire de pra­tiques démo­cra­tiques et le sym­bole des sexua­li­tés dis­si­dentes. Dans une pers­pec­tive simi­laire, le fist fucking (anal mais aus­si vagi­nal) se voit confé­rer une grande impor­tance au point d’être sou­vent pré­sent dans les performances. »

Pas­sons sur les autres carac­té­ris­tiques, moins audacieuses.

En fin de compte : « La capa­ci­té à se ques­tion­ner est alors déve­lop­pée grâce à ce voyage qui com­mence “de l’intérieur”. On retrouve ici les pra­tiques fémi­nistes de conscien­ti­sa­tion et de self-help, qui sont notam­ment pré­sentes dans les ate­liers drag king et d’éjaculation. »

N’est-ce pas. Vous vous deman­dez peut-être : mais quel est le but de ces gens et de leurs for­mi­dables idées ? Eh bien, « le post-porn a pour objec­tif d’atteindre et de per­tur­ber les méca­nismes de domi­na­tion, y com­pris les méca­nismes de la domi­na­tion post-coloniale ».

Pour le dire avec euphé­misme, nous sommes un peu scep­tiques. Le post-porn, comme les idées queer en géné­ral, semble plu­tôt consti­tué de clow­ne­ries rela­ti­ve­ment inof­fen­sives pour les méca­nismes de la domi­na­tion, quand elles ne par­ti­cipent pas à les ren­for­cer, ou au moins à détour­ner des vel­léi­tés révo­lu­tion­naires vers toutes sortes de pitre­ries plus ou moins insanes et exhi­bi­tion­nistes. En d’autres termes, vous l’aurez bien pro­fond dans le fion. (Ce n’est pas pour rien que la théo­ri­sa­tion de ces absur­di­tés, tout comme leur concré­ti­sa­tion dans des per­for­mances, lors d’évènements, etc., est sub­ven­tion­née, finan­cée par des ins­ti­tu­tions étatiques.)

Le « post-porn » semble plu­tôt être à la libé­ra­tion des femmes ce que le pop-corn et le sirop de glu­cose fruc­tose issu des mono­cul­tures de maïs sont à l’équilibre ali­men­taire et à l’écologie. Dans la droite lignée de la Slut­Walk (marche des salopes) ou encore du « mon corps mon choix », ce slo­gan creux (lorsque déta­ché de la ques­tion de l’avortement), le post-porn n’a rien de post. La pen­sée queer/­post-moderne s’inscrit dans le fémi­nisme dit de troi­sième vague, auquel appar­tient Bahaf­fou, qui évoque (dans le pod­cast « La poudre » de Lau­ren Bas­tide) un droit à être une salope et à s’hypersexualiser. Il s’agit de faire croire aux femmes qu’en se com­por­tant exac­te­ment de la manière dont les hommes veulent les trai­ter, elles rega­gne­raient en quelque sorte le pou­voir, qu’il serait empou­voi­rant de don­ner volon­tai­re­ment aux hommes ce qu’ils attendent d’elles. Comme il serait sans doute empou­voi­rant pour les per­sonnes noires, de por­ter des chaînes et d’agir de manière ser­vile. Non ? C’est pour­tant ce que prône cette idéo­lo­gie dite fémi­niste, qui n’est en réa­li­té qu’une réaf­fir­ma­tion de la main­mise de la pen­sée des domi­nants sur un mou­ve­ment jadis sub­ver­sif. Magie. C’est la magie des idéo­lo­gies indi­vi­dua­listes et ultra­li­bé­rales : « mon corps mon choix. » À leur niveau indi­vi­duel, les femmes qui agissent dans le but de faire ban­der les hommes et reven­diquent don­ner libre­ment aux hommes ce qu’ils attendent d’elles auront l’impression qu’elles sont en contrôle. Mais de quoi ? Du fait de per­pé­tuer la bana­li­sa­tion de l’infériorisation et la dégra­da­tion de toutes les femmes, tan­dis que rien ne change et que le sta­tu quo demeure. Mon corps mon choix est une béquille psy­cho­lo­gique qui sou­lage l’individue tout en assu­rant la conti­nui­té de l’oppression des femmes en tant que classe. Ces femmes oublient qu’il est contraire aux droits humains de reven­di­quer un sta­tut ou des pra­tiques contre­ve­nant à la digni­té humaine (comme s’écarteler le cul devant une salle de classe, une des per­for­mances post-porn de Rachele Bor­ghi). L’exploitation sexuelle — pros­ti­tu­tion, proxé­né­tisme, por­no­gra­phie — est contraire aux droits humains, et il ne sau­rait en exis­ter une ver­sion éthique.

Lauren Bastide, Myriam Bahaffou, et heureusement que le ridicule ne tue pas

Arrê­tons-nous un bref ins­tant sur le pas­sage de Bahaf­fou dans le pod­cast de Lau­ren Bas­tide inti­tu­lé « La poudre », pro­duit en par­te­na­riat avec Guer­lain.

En guise d’introduction à leur entre­tien, Bas­tide chante les louanges de Bahaf­fou, en la pré­sen­tant comme « l’une des pen­seuses poli­tiques les plus mar­quantes de notre époque », notam­ment parce qu’elle « fait la prouesse de rendre l’éco fémi­nisme simple et acces­sible ». « Tu es le futur », lui dit encore Bas­tide, qui affirme éga­le­ment qu’en lisant le livre de Bahaf­fou, Des paillettes sur le com­post, « on sort avec une com­pré­hen­sion nette de ce que signi­fie ce mot un peu gal­vau­dé : écoféminisme ».

Bas­tide évoque ensuite une anec­dote, une confé­rence que Myriam Bahaf­fou avait don­né quelques temps aupa­ra­vant : « et je me sou­viens qu’après ta confé­rence le public était sor­ti un peu son­né, un peu éber­lué, avec l’impression d’avoir pris une grosse claque dans la figure mais de pas avoir bien com­pris com­ment et pourquoi ».

Sans doute parce que « nous perdre com­plè­te­ment » consti­tue le mot d’ordre de Bahaf­fou. En tout cas, il semble que « le public » ne soit pas sor­ti « avec une com­pré­hen­sion nette » de ce à quoi il venait d’assister.

D’ailleurs, si, au départ de leur dis­cus­sion, Bas­tide affirme que Bahaf­fou trans­met « une com­pré­hen­sion nette de ce que signi­fie ce mot un peu gal­vau­dé : éco­fé­mi­nisme », Bahaf­fou sou­tient quelques ins­tants plus tard qu’il est « super dur de défi­nir l’écoféminisme », et qu’« aujourd’hui », elle ne sau­rait « tou­jours pas don­ner une défi­ni­tion par­faite des éco­fé­mi­nismes ». Tout ce qu’elle peut dire, c’est qu’elle « sai[t] de plus en plus ce que ça n’est pas ». Une com­pré­hen­sion nette !

En réa­li­té, à l’issue de l’entretien entre les deux pen­seuses de l’écoféminisme queer et magique, on n’a rien com­pris sur rien. On a seule­ment enten­du des idées vagues et confuses par­tant dans tous les sens.

Le sexe, encore et encore, oh oui, encore.

Dans l’interview qu’elle a accor­dée au maga­zine Les Inrocks, Myriam Bahaf­fou explique que pour elle « l’écologie, c’est uni­que­ment “com­ment faire groupe pour sur­vivre” », c’est-à-dire « com­ment on réus­sit à s’allier face aux vio­lences du quo­ti­dien, dans un monde ryth­mé par les crises sani­taire, éco­no­mique, de migra­tion, cli­ma­tique. Com­ment arri­ver à faire groupe, c’est donc com­ment créer du lien entre des indi­vi­dus, com­ment faire chair ensemble. Et là, pour moi la réponse se situe for­cé­ment dans le corps, mais pas le corps comme un simple ins­tru­ment de lutte. Le corps comme lieu tra­ver­sé par les poli­tiques de l’amour, dans la chair. Et la réponse, ou l’une des réponses, c’est le sexe. »

Vous sui­vez ? L’écologie, donc, « c’est le sexe ». Le sexe, n’est-ce pas l’argument ven­deur mains­tream par excel­lence ? Le sexe des femmes, pour le regard et la mas­tur­ba­tion des hommes. Le sexe des femmes vend tout et n’importe quoi depuis les années 80. Pour­quoi pas l’« écologie » ?

Elle conti­nue : « Je ne vois pas com­ment on peut réus­sir à être ensemble, à créer des com­mu­nau­tés éco­lo­giques sou­te­nables, joyeuses, résis­tantes, orga­niques, si on omet la dimen­sion sexuelle et éro­tique de nos vies. »

Mais qui parle d’écarter la dimen­sion sexuelle et éro­tique de nos vies ? L’écoféminisme est éga­le­ment un tra­vail de libé­ra­tion des femmes de l’exploitation sexuelle. Il s’agit d’abolir tout ce qui empêche les femmes de se pen­ser col­lec­ti­ve­ment en un sujet dési­rant et déco­lo­ni­sé de l’exploitation sexuelle patriar­cale. D’abolir tout ce qui mutile leur ima­gi­na­tion éro­tique en les vouant à de l’excitation trau­ma­tique for­ma­tée. Au lieu de ça, aujourd’hui, des vio­lences sexuelles contre les femmes sont pré­sen­tées sous un ver­nis de paillettes, comme des « kinks ». En témoigne ce récent article du Guar­dian inti­tu­lé « L’étouffement sexuel est désor­mais si cou­rant que de nom­breux jeunes pensent qu’il ne néces­site même pas de consen­te­ment. C’est un pro­blème. » Des consé­quences par­mi d’autres de l’essor du BDSM que Bahaf­fou appré­cie tant. Le mépris et l’avilissement des femmes n’est plus une vio­lence sexuelle si c’est un kink. Les insultes raciales ne sont plus du racisme si c’est un kink. Ce n’est pas de la vio­lence si le geste est consen­ti, encore mieux s’il est « dési­ré » par le biais d’un dépla­ce­ment traumatique !

Mais Bahaf­fou ne semble pas s’être inté­res­sée aux psy­cho­trau­ma­tismes asso­ciés aux vio­lences sexuelles, étant don­né qu’elle place au centre de son éco­fé­mi­nisme (ou des éco­fé­mi­nismes, c’est selon les moments) une pro­mo­tion de la pros­ti­tu­tion et une cri­tique de la pers­pec­tive abolitionniste.

Plu­tôt que de célé­brer la pros­ti­tu­tion au motif qu’elle pro­cu­re­rait une for­mi­dable « exper­tise du care, de l’écoute » (quelle invrai­sem­blable honte d’affirmer ça ; cela dit, entre le moment où cet article a com­men­cé à être rédi­gé et sa paru­tion, le texte de l’interview de Bahaf­fou publié dans Les Inrocks a chan­gé ; ces mots ne figurent plus dans la der­nière ver­sion ; pour lire l’ancienne ver­sion, c’est par ici), Bahaf­fou ferait mieux d’écouter les sur­vi­vantes des États ayant décri­mi­na­li­sé, voire léga­li­sé le proxé­né­tisme, qui pour­raient lui expli­quer com­ment leur pays est deve­nu une plaque tour­nante du tra­fic humain, et com­ment l’offre entraîne la demande, com­ment la pros­ti­tu­tion nor­ma­lise l’achat de femmes chez une popu­la­tion entière d’hommes, com­ment cela impacte leur vision des femmes, ain­si que la vision que les femmes ont d’elles-mêmes.

Un truc de castes

Bahaf­fou, qui est végane, sou­haite prou­ver que le véga­nisme n’est pas « un truc de blanch·es ». De blanch·es, ce n’est effec­ti­ve­ment pas le cas, mais l’on fait pour­tant dif­fi­ci­le­ment plus bour­geois ou éli­tiste (voir notre entre­tien avec Syl­via Kar­pa­gam inti­tu­lé « Le végé­ta­risme en Inde »), et plus contraire à l’organisation du vivant. L’agriculture mono­cul­tu­rale pra­ti­quée par les pre­mières civi­li­sa­tions ou pro­to-civi­li­sa­tions est à l’origine de la catas­trophe en cours : coupe des forêts pour les construc­tions ou l’ar­me­ment, épui­se­ment de la couche humi­fère (consi­dé­rée comme « arable » pour son exploi­ta­tion), des­truc­tion des bio­topes, cap­ta­tion des rivières et des fleuves, éro­sion per­pé­tuelle des sols indui­sant de per­pé­tuelles conquêtes et la spo­lia­tion des ter­ri­toires d’autres humains et non-humains, guerres et escla­va­gisme (ou ser­vi­tude moderne). Aucune culture sou­te­nable n’a fait le poids face au rou­leau com­pres­seur de l’expansion civi­li­sa­trice (ou la guerre contre tout ce qui existe). Le fruit de ce mode de vie n’a pas tant été le « grain » que son accu­mu­la­tion et le contrôle de la nour­ri­ture qu’il assure aux pos­sé­dants. L’accumulation du pou­voir et des richesses a dû être pro­té­gée de ceux qui étaient exploi­tés pour les pro­duire. D’où une classe pro­fes­sion­nelle de guer­riers, la trans­for­ma­tion d’êtres humains en « res­sources humaines » ren­for­cée par la patri­lo­ca­li­té et une culture mili­taire viriar­cale, etc. Une par­tie de l’origine de l’exploitation et de la subor­di­na­tion sys­té­ma­tiques des femmes, qui demeure aujourd’hui. Aux côtés du monde natu­rel, les femmes sont la matière pre­mière de cette culture. Mais ce n’est pas à cause de la viande. Si, aujourd’­hui, la consom­ma­tion (exces­sive) de viande indus­trielle va de pair avec l’ex­pres­sion d’une mas­cu­li­ni­té phal­lo­cra­tique (le gros consom­ma­teur d’une viande de mau­vaise qua­li­té aime faire de gros bar­be­cues et rou­ler dans son gros 4×4, etc.), en elle-même, la consom­ma­tion de chair ani­male n’in­duit pas néces­sai­re­ment une atti­tude viriar­cale, mas­cu­li­niste, contrai­re­ment à ce qu’une lec­ture absurde de l’histoire humaine pré­tend. « L’ingestion de la chair d’autrui » ne « sup­pose » pas « la vio­lence, la tyran­nie, la guerre », comme Bahaf­fou l’écrit dans sa thèse. Et « la phi­lo­so­phie végé­ta­rienne » n’est pas « liée au paci­fisme », le végé­ta­risme n’a rien d’intrinsèquement paci­fique (en témoigne, entre autres choses, l’histoire de l’Inde).

Bahaf­fou réaf­firme peut-être sans le réa­li­ser la vieille sépa­ra­tion patriar­cale en asso­ciant intrin­sè­que­ment — sans nuances — viande et mas­cu­li­ni­té patriar­cale. Mani­fes­te­ment lec­trice de Peg­gy Reeves San­day, elle cri­tique l’assimilation de la chasse à une pré­ro­ga­tive exclu­si­ve­ment mas­cu­line, mais cette cri­tique ne vise ni à mon­trer que les femmes aus­si chas­saient (ce qu’occultent trop d’anthropologues), ou pour­raient chas­ser. En effet, les anthro­po­logues mas­cu­lins ont trop sou­vent consi­dé­ré que les femmes se conten­taient de cueillir ou de col­lec­ter des végé­taux, alors que dans de nom­breuses socié­tés, elles rame­naient aus­si du petit gibier, des pois­sons, des rep­tiles, des amphi­biens, des oiseaux ou encore des ron­geurs. En outre, le fait que les femmes aient chas­sé et chassent du gros gibier a long­temps été incon­ce­vable. Mary Zeiss Stange dénonce ce biais dans son excellent ouvrage Woman The Hun­ter (« La femme chas­seuse »). Bahaf­fou ne se dis­tingue pas de l’idéologie patriar­cale sur cette ques­tion — les femmes ne chassent pas, la chasse ne sau­rait avoir aucun inté­rêt pour elles. Mary Zeiss Stange montre au contraire dans son livre que le fait de chas­ser, pour les femmes, pour­rait avoir des effets pro­fonds sur la vie des femmes, et émancipateurs.

Bahaf­fou sou­tient par ailleurs que les socié­tés matriar­cales (des socié­tés éga­li­taires, et non pas le reflet inver­sé du patriar­cat) sont végé­ta­riennes. C’est faux, comme le montre Heide Goett­ner-Aben­droth dans son livre Les Socié­tés matriar­cales. Les socié­tés les plus éga­li­taires ayant exis­té et les rares qui existent encore cor­res­pondent à des socié­tés de chasse-cueillette à retour immé­diat. La viande de chasse est (était) une com­po­sante essen­tielle de leur culture. En outre, dans les socié­tés matri­li­néaires qui existent encore, telles les popu­la­tions Minang­ka­bau, la pêche joue un rôle majeur, et la viande de rumi­nant, deve­nue rare à cause du sac­cage de leur éco­no­mie tra­di­tion­nelle par le colo­nia­lisme et le déve­lop­pe­ment capi­ta­liste, est un mets esti­mé, pré­pa­ré de manière tra­di­tion­nelle pour les grandes occa­sions. Le bœuf était une nour­ri­ture pri­mor­diale en Indo­né­sie, en Malai­sie, à Sin­ga­pour et dans les Phi­lip­pines au sein des socié­tés matri­li­néaires et plus éga­li­taires. Les végé­ta­rismes ont sur­tout été impo­sés par des classes de colons reli­gieux et les castes supé­rieures des popu­la­tions colo­ni­sa­trices — patriar­cales de sur­croît. En Inde, ce sont encore les castes supé­rieures qui inter­disent aux classes infé­rieures de consom­mer de la viande, alors que ces popu­la­tions n’ont pas les moyens d’entretenir une ali­men­ta­tion végé­ta­rienne qui leur per­met­trait une rela­tive bonne santé.

L’histoire, en Inde aus­si bien qu’en Occi­dent, nous montre au contraire que le végé­ta­risme a pu et peut ser­vir d’outil de domi­na­tion de classes. Pour les diri­geants de la Vege­ta­rian Socie­ty, créée en 1847, le végé­ta­risme était « le moyen le plus effi­cace pour pro­duire des tra­vailleurs indus­triels sains, purs, vigou­reux, endu­rants à la tâche et res­pec­tables, toutes qua­li­tés requises par la nou­velle dis­ci­pline du tra­vail usi­nier et indus­triel ». Anté­rieu­re­ment, le végé­ta­risme était déjà pro­mu par diverses sectes chré­tiennes, toutes recon­nais­sant une hié­rar­chie des êtres vivants — la Sca­la Natu­rae ou Grande chaîne des êtres. En accord avec leur onto­lo­gie hié­rar­chique, ces phi­lo­so­phies qui situent l’esprit imma­té­riel de la divi­ni­té, puis l’homme (l’homme seule­ment), au-des­sus du reste du vivant, asso­cient la viande à l’impureté, à la maté­ria­li­té des corps sen­sibles que détestent tant les reli­gions patriar­cales, et qui est éga­le­ment asso­ciée au corps sai­gnant de la femme (règles, accou­che­ment). Il s’agit de phi­lo­so­phies dua­listes, qui séparent l’homme du monde natu­rel, réduit à une réserve de res­sources natu­relles à dis­po­si­tion de l’homme. Bahaf­fou invoque d’ailleurs le végé­ta­risme des pytha­go­ri­ciens et le végé­ta­risme anglo-saxon tout en ne men­tion­nant pas leur miso­gy­nie édi­fiante et leur sous­crip­tion au dua­lisme phi­lo­so­phique. Comme toutes les écoles de pen­sée grecques, les pytha­go­ri­ciens asso­ciaient la mas­cu­li­ni­té aux idées et à la ratio­na­li­té, et la fémi­ni­té à la matière informe et inutile à laquelle l’esprit (l’homme) venait don­ner forme. Ces idées ont d’ailleurs été direc­te­ment intro­duites dans le chris­tia­nisme. Ces sys­tèmes de croyances en un dua­lisme méta­phy­sique consi­dèrent le corps comme une pri­son char­nelle qui contraint l’esprit et qui résulte de la Chute (pour le chris­tia­nisme — et de la métem­psy­chose, pour les spi­ri­tua­li­sés qui l’ont pré­cé­dé et qui l’ont ins­pi­ré). L’esprit doit être net­toyé des impu­re­tés de la chair grâce à une ali­men­ta­tion consi­dé­rée comme puri­fi­ca­trice : le végé­ta­risme. La viande est donc mal­saine et entraîne, par exemple, selon l’église adven­tiste du sep­tième jour, tous les péchés mor­tels, dont celui — ultime — de la masturbation.

Les végé­ta­rismes, en plus d’être ins­ti­tu­tion­na­li­sés au tra­vers d’idéologies dua­listes et miso­gynes, reposent sur une concep­tion spé­ciste du monde natu­rel. L’argumentation contem­po­raine invoque aujourd’hui l’éthique et le fait que nous devrions nous com­por­ter de manière morale vis-à-vis de cer­tains ani­maux, mais pas vis-à-vis de toutes les autres espèces ani­males ou vivantes. L’on peut pour­tant envi­sa­ger d’essayer se com­por­ter mora­le­ment envers la tota­li­té du vivant : envers les arbres indi­vi­duels, les plantes, la forêt, le sol, lui aus­si vivant, les insectes, et tous les ani­maux. Et fon­der nos égards ajus­tés sur d’autres prin­cipes que la seule « sen­tience » (un cri­tère anthro­po­cen­tré). C’est pos­si­ble­ment ain­si qu’ont vécu les humains pen­dant la majeure par­tie de leur exis­tence, dans des socié­tés de chasse-cueillette, en ne chas­sant et en ne col­lec­tant pas plus que ce dont ils et elles avaient besoin, par­fois en pra­ti­quant diverses formes d’hor­ti­cul­tures ; en se com­por­tant, d’un point de vue éco­lo­gique, comme des ani­maux bien inté­grés à leur éco­sys­tème, et non pas en exploi­teurs détrui­sant tout sur leur pas­sage, cau­sant l’extinction des autres espèces.

Mais le mélange d’idées en vogue qui carac­té­rise le dis­cours de Bahaf­fou est appro­prié pour l’humain indus­triel aisé des grandes villes, qui appré­hende le monde au prisme des théo­ries post-modernes pro­duites dans les dépar­te­ments d’études de genre de cam­pus uni­ver­si­taires décon­nec­tés de la vie réelle.

Il sem­ble­rait que notre rebelle en herbe ne soit pas tant en train de trans­gres­ser ou de dis­rup­ter l’ordre domi­nant que de four­nir le tra­vail gra­tuit que fait l’opprimée au béné­fice de l’oppresseur, et qui consiste à amé­na­ger sa propre oppres­sion en tra­ves­tis­sant des idées réel­le­ment dan­ge­reuses pour le sta­tu quo — en les vidant de tout leur poten­tiel révo­lu­tion­naire. D’où la petite noto­rié­té qu’on pour­ra sans risque lui accor­der. Les paillettes, ça pol­lue.

Audrey A. et Nico­las Casaux

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