Benoît XVI et moi

Benoît XVI et moi

La mort de Benoît XVI, si elle est en un sens heureuse, en cela qu’elle couronne la vie d’un homme qui a vécu un siècle de préparation au Ciel, est une perte immense pour l’Église, dont l’un des plus éminents docteurs et pasteurs vient de s’éteindre. Cette perte, je la ressens dans ma chair, comme celle d’un vrai père, d’un guide, qui nous laisse quelque peu orphelins.

En 2013, quand le pape Benoît XVI renonce à sa charge, j’ai 17 ans. Pour un passionné d’histoire, l’évènement a quelque chose d’étonnant. Si je n’ai pas eu d’éducation religieuse, je me trouve soudainement plongé dans une recherche boulimique sur l’Église catholique et son histoire, en particulier celle de la papauté à l’époque moderne.

Une fois la frénésie du conclave passée, ma curiosité ne démord pas. Quelques mois plus tard seulement, une fois arrivé au cégep, j’ai l’occasion d’étudier le phénomène religieux. Chargé de me pencher un aspect particulier d’un des trois grands monothéismes, je choisis de m’attaquer à l’amour et à la sexualité tels qu’ils se conçoivent dans la foi chrétienne.

C’est alors que je lis Deus caritas est, la sublime lettre encyclique du pape Benoît XVI sur la vertu théologale de charité. Il y décortique notamment le sens du concept à partir des différents mots qui le désignent en grec ancien. Je découvre un monde.

Moi qui concevais, comme presque tous mes congénères, l’Église comme une institution rétrograde et liberticide, je m’étonne devant la subtilité, la profondeur et la richesse de son enseignement à travers les mots du pape allemand dont les mérites intellectuels ont été si souvent vantés.

De la raison à la foi

Entre cette découverte et le moment décisif de la conversion, plusieurs années se sont écoulées. Mes champs d’intérêt ont évolué, mais mon admiration pour Benoît XVI n’a fait que croitre. Il a été là, pour ainsi dire, à toutes les étapes de mon développement intellectuel, dans ces années charnières d’une vie qui recoupent la fin de l’adolescence et le début de l’âge adulte.

Voulant me familiariser avec les différents aspects de la foi, j’ai misé sur le Catéchisme de l’Église catholique, pour découvrir plus tard qu’il en fut le maitre d’œuvre. Désireux de mieux comprendre le rapport entre la foi, la raison et la culture, j’ai lu ses grands discours.

Sur le lien entre la foi et la raison, Benoît XVI s’est notamment exprimé à Ratisbonne. Pour un jeune homme aux prétentions intellectuelles comme moi, être exposé à la réflexion de Benoît XVI sur ces questions représentait une étape décisive. Plutôt que de comprendre la foi et la raison comme des dispositions intérieures opposées et mutuellement exclusives, je comprenais qu’elles étaient plutôt non seulement compatibles, mais intimement liées.

Me questionnant sur les traits que prend notre culture contemporaine, j’ai lu le discours aux Bernardins, une profonde réflexion sur les pathologies propres à notre époque. Je me permets une citation bien connue, mais toujours pertinente:

 «Une culture purement positiviste, qui renverrait dans le domaine subjectif, comme non scientifique, la question concernant Dieu, serait la capitulation de la raison, le renoncement à ses possibilités les plus élevées et donc un échec de l’humanisme, dont les conséquences ne pourraient être que graves.»

Benoît XVI me faisait ainsi comprendre que de rejeter ces questions, c’était accepter de mettre ma raison en laisse. C’était accepter la «dictature du relativisme» dont il a parlé si éloquemment.

Enraciné dans la tradition

Chemin faisant, les questions les plus urgentes pour moi ont évolué. Toujours, j’ai trouvé chez Benoît XVI des réponses, souvent riches, mais exprimées de manière simple et élégante. La question de la permanence et de la continuité dans les enseignements de l’Église fait partie de ces enjeux qui m’ont préoccupé. Après tout, la crédibilité du témoignage de l’Église repose en partie sur sa cohérence.

Alors qu’elle a connu des développements significatifs dans le siècle dernier, Benoît XVI s’est fait le pédagogue de la continuité, celui qui rattache l’Église du présent à celle du passé, sans sombrer dans un conservatisme idéologique et stérile.

Cet attachement à la tradition intellectuelle de l’Église, à la permanence de la vérité révélée qu’elle porte, se dit également de son enracinement dans la tradition liturgique, dont il se souciait spécialement. Le chemin de la beauté, dans une époque comme la nôtre, est un véhicule puissant pour l’évangélisation.

Dans l’interprétation d’autorité qu’il a faite du Concile sous ses différents rapports, Benoît XVI a voulu montrer l’importance de mettre le Christ au centre et de revêtir notre participation à la liturgie d’un sérieux approprié, revitalisant le sens du sacré que la messe, notamment, doit susciter chez les fidèles, mais aussi chez ceux qui regardent l’Église de loin.

Loin de la banalité, de l’horizontalité, parfois même du kitch, propres à certains abus liturgiques des dernières décennies, Benoît XVI a voulu que l’Église rende à nouveau visible la radicalité de l’eucharistie. En cela, il a rendu sa célébration plus éloquente, plus convaincante.

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