Il y a plusieurs décennies, au début des années 1990, un groupe d’hommes états-uniens (au moins 5 hommes sur 6 personnes) se sont réunis pour rédiger une « Charte internationale des droits du genre » (International Bill of Gender Rights), dans le cadre d’une série de conférences organisée à Houston, au Texas, entre 1992 et 1997, par Phyllis Randolph Frye, intitulée « Conférence internationale annuelle sur le droit et la politique de l’emploi des personnes transgenres (International Conference on Transgender Law and Employment Policy, ICTLEP) ».
Outre Phyllis Frye (homme se disant femme, « premier juge ouvertement transgenre du monde »), les rédacteurs de la « Charte internationale des droits du genre » comprenaient Susan Stryker (homme se disant femme, historien), Martine Rothblatt (homme se disant femme, voir ici), Sharon Ann Stuart (homme se disant femme), JoAnn Roberts (homme se disant femme), et Jan Eaton (je n’ai pas réussi à en savoir plus sur cette dernière personne).
Ces hommes souhaitaient rédiger une telle charte afin que leur fétichisme de la féminité, de l’image de la femme dans la société patriarcale, devienne légal et que leurs désirs deviennent lois. Il ne s’agissait pas simplement d’hommes appréciant de mettre des jupes ou des robes. Il s’agissait d’hommes aspirant à modifier les définitions de ce qu’est un homme et de ce qu’est une femme. Leur objectif consistait en grande partie à remplacer, partout dans les législations, partout dans les règlementations, la notion de « sexe » par celle d’« identité de genre ». Sachant que l’expression « identité de genre » avait initialement été conçue par le psychiatre états-unien Robert Stoller pour désigner « la connaissance et la réalisation, conscientes ou inconscientes, du fait d’appartenir à un sexe et non à l’autre ». Un concept très imprécis et très imparfait, ainsi que Stoller le reconnaissait lui-même, est donc devenu l’arme d’un groupe d’hommes déterminés à effacer dans la loi la réalité du sexe et sa signification. En effet, peu importait et peu importe pour ces hommes que les femmes soient opprimées, dans la société patriarcale, parce qu’elles sont de sexe féminin et pas parce qu’elles possèdent une « identité de genre » d’un certain type.
Document important dans le développement ultérieur du mouvement pour les « droits des trans », la « Charte internationale des droits du genre » présente déjà toutes les contradictions et toutes les confusions qui caractérisent toujours le mouvement en faveur de l’identité de genre, le mouvement « trans », aujourd’hui.
Outre l’objectif absurde et misogyne qui consiste à vouloir effacer la notion de « sexe » de la législation en lui substituant arbitrairement celle, totalement floue, d’« identité de genre », on y retrouve, entre autres aberrations, la contradiction entre d’une part une prétention à vouloir s’émanciper des normes de genre, des rôles socio-sexuels, de « ce que la société considère comme un comportement masculin ou féminin », et d’autre part une revendication du droit de « modifier » son corps afin de le conformer à une « identité de genre » choisie. Pile, s’émanciper des stéréotypes, face, le droit de se conformer aux stéréotypes associés au sexe opposé et de modifier son corps en conséquence. On y retrouve également l’idée mensongère selon laquelle le sexe serait « assigné » à la naissance — plutôt que simplement constaté.
(On remarquera que le concept d’« identité de genre » est aujourd’hui encore plus confus qu’à l’époque où Stoller l’inventa, étant donné qu’il désigne désormais « l’expérience intérieure et personnelle que chaque personne a de son genre. Il s’agit du sentiment d’être une femme, un homme, les deux, ni l’un ni l’autre, ou d’être à un autre point dans le continuum des genres[1]. »)
Ainsi que le remarque Sheila Jeffreys, féministe et lesbienne australienne, dans son livre Gender Hurts (2014) :
« Les ambitions des activistes transgenres furent exposées en 1995 aux États-Unis dans la Charte internationale des droits du genre (Frye, 2001). Il ne s’agissait pas d’un document issu d’une législature ou ayant un quelconque poids juridique, mais plutôt d’une liste de revendications rédigée par un groupe d’activistes transgenres. À l’époque, une telle liste aurait semblé trop farfelu pour être prise au sérieux par les législateurs. Mais ses préceptes préfigurent la manière dont les droits liés au genre ont été incorporés dans le droit national de nombreux États, ce qui la rend digne d’un examen attentif. Elle exigeait que l’individu ait le droit d’exprimer l’“identité de genre” de son choix de la manière dont il le souhaitait, en particulier dans les espaces auparavant réservés aux femmes. Depuis lors, la législation sur l’égalité et les droits humains a été mise à jour dans les États du monde occidental afin d’intégrer le “droit” de l’individu d’exprimer quelque “identité de genre”. Par conséquent, le genre, qui consiste en des stéréotypes traditionnels de comportement approprié pour les hommes et les femmes, qui régissent la domination masculine et la subordination des femmes, est devenu une affaire d’État. […]
cette [charte] crée deux difficultés singulières pour les intérêts des femmes (Brennan et Hungerford, 2011). Elle supprime la possibilité d’avoir des espaces réservés aux femmes et promeut les stéréotypes de genre qui sont depuis longtemps reconnus par les théoriciennes féministes comme le mécanisme d’organisation de base de la domination masculine (MacKinnon, 1989 ; Jeffreys, 2005).
La création du droit à “l’identité de genre” crée un “conflit de droits” dans lequel les droits demandés par un groupe de personnes peuvent mettre en danger les droits d’un autre groupe (Sniderman et al., 1997). […]
La liste de revendications que constitue la Charte internationale des droits du genre (1995) a été conçue par des individus de sexe masculin aux États-Unis ne sachant rien de ce qu’implique le fait de naître, de grandir et d’être élevé en tant que membre de la caste des femmes. Leurs biographies révèlent qu’ils sont des hommes d’une masculinité tout à fait conventionnelle. Il s’agit par ailleurs d’hommes qui avaient choisi de personnifier des femmes avec plus ou moins de sérieux à l’âge adulte. L’homme qui, selon son site web, a “rédigé” la première Charte des droits du genre en 1990, devenue par la suite la Charte internationale des droits du genre, s’appelle JoAnn Roberts. Il s’agit d’un homme dont la personnification des femmes n’est qu’occasionnelle. Roberts ne prétend pas être une femme, mais un travesti […]. »
Afin de saisir d’où vient le mouvement en faveur de l’identité de genre, le mouvement trans, de comprendre une partie de son histoire, de ses origines, voici une traduction de la « Charte internationale des droits du genre » rédigée par Rothblatt et ses affidés, telle qu’adoptée le 17 juin 1995 à Houston, au Texas, aux États-Unis[2].
(Aux antipodes de cette Charte absurde et misogyne, il y a la « Déclaration internationale des droits des femmes basés sur le sexe biologique », à lire et à signer ici : https://womensdeclaration.com/fr/)
Nicolas Casaux
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Charte internationale des droits du genre
Le droit de définir l’identité de genre
Tous les êtres humains portent en eux une idée en perpétuelle mutation de ce qu’ils sont et de ce qu’ils sont capables d’accomplir. Le sentiment d’identité de l’individu n’est pas déterminé par le sexe chromosomique, les organes génitaux, le sexe assigné à la naissance ou le rôle de genre initial. Ainsi, l’identité et les capacités de l’individu ne peuvent être circonscrites par ce que la société considère comme un comportement masculin ou féminin. Il est fondamental que les individus aient le droit de définir, et de redéfinir au fil de leur vie, leur propre identité de genre, sans tenir compte du sexe chromosomique, des organes génitaux, du sexe assigné à la naissance ou du rôle de genre initial.
Par conséquent, tous les êtres humains ont le droit de définir leur propre identité de genre, indépendamment du sexe chromosomique, des organes génitaux, du sexe assigné à la naissance ou du rôle de genre initial. En outre, aucun individu ne peut être privé de ses droits humains ou civils en raison d’une identité de genre autodéfinie ne s’accordant pas avec le sexe chromosomique, les organes génitaux, le sexe assigné à la naissance ou le rôle de genre initial.
Le droit à la libre expression de l’identité de genre
Étant donné le droit de définir sa propre identité de genre, tous les êtres humains ont le droit corrélatif à la libre expression de leur identité de genre auto-définie.
Par conséquent, tous les êtres humains ont le droit d’exprimer librement l’identité de genre qu’ils ont définie. En outre, aucun individu ne peut être privé de ses droits humains ou civils en raison de l’expression de son identité de genre.
Le droit d’obtenir et de conserver un emploi et de recevoir une rémunération équitable
Compte tenu de la structure économique de la société moderne, tous les êtres humains ont le droit de se former et d’exercer un métier ou une profession afin de se procurer un abri, de la nourriture, les nécessités et les bienfaits de la vie, pour eux-mêmes et pour ceux qui sont à leur charge, d’obtenir et de conserver un emploi, et de recevoir une juste rémunération pour leur travail, indépendamment de leur identité de genre, de leur sexe chromosomique, de leurs organes génitaux, du sexe qui leur a été assigné à la naissance ou de leur rôle de genre initial.
Par conséquent, les individus ne doivent pas se voir refuser le droit de se former à un métier ou à une profession et de l’exercer, ni le droit d’obtenir et de conserver un emploi, ni le droit de recevoir une juste rémunération pour leur travail, en raison de leur sexe chromosomique, de leurs organes génitaux, du sexe qui leur a été assigné à la naissance ou de leur rôle de genre initial, ou sur la base d’une identité de genre autodéfinie ou de son expression.
Le droit d’accès à l’espace genré et de participation aux activités genrées
Étant donné le droit de définir sa propre identité de genre et le droit correspondant à la libre expression de cette identité de genre, aucun individu ne devrait se voir refuser l’accès à un espace ou la participation à une activité en raison d’une identité de genre autodéfinie qui ne correspond pas au sexe chromosomique, aux organes génitaux, au sexe assigné à la naissance ou au rôle de genre initial.
Par conséquent, aucune personne ne peut se voir refuser l’accès à un espace ou la participation à une activité en raison d’une identité de genre autodéfinie ne correspondant pas au sexe chromosomique, aux organes génitaux, au sexe assigné à la naissance ou au rôle de genre initial.
Le droit de contrôler et de modifier son propre corps
Tous les êtres humains ont le droit de disposer de leur corps, ce qui inclut le droit de modifier leur corps de manière cosmétique, chimique ou chirurgicale, afin d’exprimer une identité de genre autodéfinie.
Par conséquent, les individus ne doivent pas se voir refuser le droit de changer leur corps pour exprimer une identité de genre autodéfinie ; et en outre, les individus ne doivent pas se voir refuser des droits humains ou des droits civils au motif qu’ils ont changé leur corps de manière cosmétique, chimique ou chirurgicale, ou qu’ils souhaitent le faire pour exprimer une identité de genre autodéfinie.
Le droit à des soins médicaux et professionnels compétents
Étant donné le droit de l’individu de définir sa propre identité de genre et le droit de modifier son propre corps comme moyen d’exprimer une identité de genre autodéfinie, aucun individu ne devrait se voir refuser l’accès à des soins médicaux ou professionnels compétents sur la base de son sexe chromosomique, de ses organes génitaux, du sexe qui lui a été assigné à la naissance ou de son rôle de genre initial.
Par conséquent, les individus ne doivent pas se voir refuser le droit à des soins médicaux ou professionnels compétents lorsqu’ils modifient leur corps de manière cosmétique, chimique ou chirurgicale, sur la base de leur sexe chromosomique, de leurs organes génitaux, du sexe qui leur a été assigné à la naissance ou de leur rôle de genre initial.
Le droit de ne pas subir de diagnostic ou de traitement psychiatrique
Étant donné le droit de définir leur propre identité de genre, les individus ne doivent pas faire l’objet d’un diagnostic ou d’un traitement psychiatrique uniquement sur la base de leur identité ou de leur rôle de genre.
Par conséquent, les personnes ne doivent pas faire l’objet d’un diagnostic ou d’un traitement psychiatrique en tant que personnes souffrant de troubles mentaux ou de maladies uniquement en raison de leur identité de genre ou de son expression.
Le droit à l’expression sexuelle
Étant donné le droit à une identité de genre autodéfinie, tout adulte consentant a un droit correspondant à la libre expression sexuelle.
Par conséquent, aucun droit humain ou civil ne peut être refusé à une personne sur la base de son orientation sexuelle ; en outre, aucun individu ne peut se voir refuser des droits humains ou civils pour l’expression d’une identité de genre autodéfinie au travers d’actes sexuels entre adultes consentants.
Le droit de former des relations engagées et aimantes et de conclure des contrats de mariage
Étant donné que tous les êtres humains ont le droit d’exprimer librement leur identité de genre et le droit à l’expression sexuelle en tant que forme d’expression de genre, tous les êtres humains ont le droit corrélatif de former des relations engagées et aimantes les uns avec les autres et de conclure des contrats de mariage, indépendamment de leur propre sexe chromosomique, de leurs organes génitaux, du sexe assigné à la naissance ou du rôle de genre initial de leur partenaire.
Par conséquent, les individus ne doivent pas se voir refuser le droit de former des relations amoureuses et engagées entre eux ou de conclure des contrats de mariage en raison de leur propre sexe chromosomique, de leurs organes génitaux, du sexe qui leur a été assigné à la naissance ou de leur rôle de genre initial, ou sur la base de l’expression d’une identité de genre autodéfinie.
Le droit de concevoir, de porter ou d’adopter des enfants ; le droit d’élever et d’avoir la garde des enfants et d’exercer la capacité parentale
Étant donné le droit de former une relation engagée et aimante avec une autre personne et de conclure des contrats de mariage, ainsi que le droit d’exprimer une identité de genre autodéfinie et le droit à l’expression sexuelle, les individus ont le droit corrélatif de concevoir et d’avoir des enfants, d’adopter des enfants, de les élever, d’en avoir la garde et d’exercer leur capacité parentale à l’égard d’enfants, naturels ou adoptés, quel que soit leur sexe chromosomique, leurs organes génitaux, leur sexe assigné à la naissance ou leur rôle de genre initial, et quelle que soit leur identité de genre autodéfinie ou son expression.
Par conséquent, les individus ne peuvent se voir refuser le droit de concevoir, d’avoir ou d’adopter des enfants, ni d’élever et d’avoir la garde d’enfants, ni d’exercer la capacité parentale à l’égard d’enfants, naturels ou adoptés, en raison de leur sexe chromosomique, de leurs organes génitaux, du sexe assigné à la naissance, du rôle initial du genre, ou en vertu d’une identité de genre autodéfinie ou de l’expression de celle-ci, ou de ceux de leur partenaire ou de leurs enfants.
- https://www.canada.ca/fr/ministere-justice/nouvelles/2016/05/identite-de-genre-et-expression-de-genre.html ↑
- https://www.learningforjustice.org/classroom-resources/texts/international-bill-of-gender-rights ↑
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