Les dernières vêpres du pape avec l’Église de Québec

Les dernières vêpres du pape avec l’Église de Québec

C’est avec les fidèles de l’Église locale et nationale que le pape a célébré les vêpres à Québec, le 28 juillet, les exhortant à la joie de l’évangile dans le contexte québécois de sécularisation.

Le Vieux-Québec a retrouvé sa tranquillité. Des passants sont croisés ici et là sur la route, sans doute indifférents à la dernière action liturgique que le pape s’apprêtait à poser avant son départ de Québec. D’autres souhaitent l’apercevoir une dernière fois, fervents, alors qu’il déambulait dans les rues en face de la cathédrale quelques minutes auparavant, faisant entorse au protocole de sécurité.

À l’intérieur de la basilique-cathédrale Notre-Dame-de-Québec, évêques, prêtres, diacres, séminaristes, religieux et religieuses, hommes et femmes au service de l’Église, l’attendent dans une atmosphère de respect et de recueillement. Ils semblent avoir préparé cette rencontre dans leur prière.

Josée Therrien, une religieuse de Jésus-Marie, n’est pas dérangée par l’imposante colonne qui lui cache la vue. « Je suis venue prier avec le pape. Je l’ai déjà vu de plus près. Nous avons besoin de prier beaucoup pour le chemin de réconciliation qui vient de s’amorcer. Ce n’est pas la fin, mais le début. »

Le pape François entre dans la basilique-cathédrale comme dans sa maison, salué et saluant chaleureusement les fidèles de l’Église locale et nationale, qu’il a coutume de rencontrer dans chacun de ses voyages apostoliques. L’antienne traditionnelle en l’honneur du pape, « Tu es Petrus » (Tu es Pierre), chantée par un chœur de garçons inaugure la célébration des vêpres solennelles, dans ce lieu où existe encore le sacré.

La joie de la foi

Dans son homélie adressée au contexte québécois, le pape a relevé certains défis auxquels les chrétiens d’aujourd’hui doivent faire face et a proposé des manières d’y répondre. La vraie joie évangélique est une boussole qui ne trompe pas dans l’examen de conscience pour y parvenir.

La sécularisation ne devrait pas nous faire perdre cette joie, au contraire. Elle peut certes nous en éloigner, comme elle peut devenir une occasion de remettre en question certaines manières dont nous vivons notre foi.

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Photo: Diocèse de Trois-Rivières/Martine Livernoche

Le pape a invité les fidèles à ne pas poser un regard négatif sur le monde sécularisé, « qui naît d’une foi qui, se sentant attaquée, se voit comme une sorte d’armure pour se défendre du monde [… ] ». Face à la tentation de repli sur soi, il a rappelé la beauté de l’Incarnation : 

« [Dieu] bénit notre vie, il dit du bien de nous et de notre réalité, il s’incarne dans les situations de l’histoire non pas pour condamner, mais pour faire germer la graine du Royaume précisément là où les ténèbres semblent triompher. »

Un autre regard

En bon jésuite, le souverain pontife a exhorté l’assemblé à adopter un autre regard, celui qui « discerne la réalité », en faisant une distinction entre sécularisation et sécularisme, se basant sur une définition du pape Paul VI.

La sécularisation serait « “l’effort en lui-même juste et légitime, nullement incompatible avec la foi ou la religion”, pour découvrir les lois de la réalité et de la vie humaine établies par le Créateur ». Alors qu’à l’inverse, le sécularisme serait « une conception de la vie qui sépare totalement du lien avec le Créateur ».

Il n’a pas manqué de rappeler l’importance de s’en remettre à la puissance de l’Esprit, dans la prière. «[…] ne laissons pas entrer en nous l’esprit de sécularisme, en pensant que nous devons créer des projets qui fonctionnent seuls et avec les forces humaines uniquement, sans Dieu. »

Par l’intercession de Mgr de Laval

À la fin de la célébration religieuse, le pape s’est avancé pour se recueillir devant la dépouille de Mgr de Laval, ce saint missionnaire ardent, premier évêque du diocèse, qu’il a d’ailleurs lui-même canonisé en 2016. Une rencontre dense, par le poids du silence de l’homme en blanc, contrastant avec les gens debout sur les bancs d’église, prêts à tout pour le prendre en cliché.

Le pape a d’ailleurs évoqué à quelques reprises la figure de Mgr de Laval dans son homélie, le donnant en exemple dans sa relation aux communautés autochtones, après avoir réitéré sa demande de pardon : « [Il ] fulminait contre tous ceux qui [les ] exploitaient en les incitant à consommer des boissons pour les arnaquer. »

Le souverain pontife s’est retiré doucement, sous une ovation chaleureuse en guise d’un dernier au revoir. 

À la fin, notre chemin a croisé un petit noyau de jeunes qui échangeait : l’un était édifié, soucieux de méditer à nouveau l’homélie ajustée pour notre réalité ecclésiale. Une autre était rejointe par la fragilité visible du pape, qui a essayé de se lever avec difficulté de sa chaise roulante, pendant le chant « Tu es Pierre ». 

C’était, comme le montre le pèlerinage pénitentiel, à l’image de l’Église imparfaite qui a besoin de la grâce de Dieu pour avancer.

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