Rosneft vs Gazprom… ou pas tout à fait

Rosneft vs Gazprom… ou pas tout à fait

Décidément, l’interminable et rocambolesque feuilleton Nord Stream II ne cessera de nous étonner. Dernière trouvaille en date des scénaristes, un rapprochement entre les deux géants énergétiques russes.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ces deux-là ne s’entendent guère. Depuis plusieurs années, Rosneft, mastodonte pétrolier dirigé par l’incontournable Igor Setchine, et Gazprom, colosse gazier mené par le non moins influent Alexeï Miller, se tirent la bourre, parfois sans vergogne.

Dans un article de 2018, Reuters évoquait même, avec peut-être un peu d’exagération mais non sans raison, un clash des titans : concurrence féroce sur certains marchés-clé, débauchage des cadres de l’adversaire etc.

La difficulté vient de ce que Rosneft se diversifie dans le gaz et Gazprom dans le pétrole, chacun empiétant donc sur les platebandes de l’autre, le tout sous l’oeil parfois inquiet du Kremlin qui se retrouve dans la position inconfortable de l’arbitre qui ne veut déplaire à aucun des deux camps – preuve supplémentaire que la Russie poutinienne n’est pas un tout monolithique comme on le lit trop souvent dans la presse.

Mais il se pourrait bien que l’abracadabrante telenovela baltique finisse par les mettre sur la même longueur d’onde…

En effet, après que le Washingtonistan ait jeté l’éponge sur le pipeline, l’euronouillerie masochiste a décoché une ultime flèche du Parthe administrative en rappelant à la rescousse le troisième paquet énergétique : le propriétaire du tube ne peut avoir le monopole des flux qui y transitent.

Il n’en fallait pas plus pour que Rosneft ne saute sur l’occasion, proposant à Vladimirovitch d’utiliser le NS II pour vendre son propre gaz, une éventualité étudiée avec attention. En réalité, il n’y a pas beaucoup de suspense. Si l’euroland ne fait pas marche arrière, Gazprom est obligé d’ouvrir son tube aux concurrents et pour Moscou, le calcul est vite fait : mieux vaut que ce soit la compagnie de Setchine plutôt qu’un producteur indépendant voire un hypothétique gaz d’Asie centrale.

Que Rosneft ait volé au secours de Gazprom ou profité de ses difficultés, ou les deux à la fois, le résultat final est le même : l’or bleu «officiel» russe va irriguer le Rimland occidental.

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À propos de l'auteur Chroniques du Grand Jeu

« La géopolitique autrement, pour mieux la comprendre... »Présent à l'esprit de tout dirigeant anglo-saxon ou russe, le concept de Grand jeu est étonnamment méconnu en France. C'est pourtant lui qui explique une bonne part des événements géopolitiques de la planète. Crise ukrainienne, 11 septembre, tracé des pipelines, guerre de Tchétchénie, développement des BRICS, invasion de l'Irak, partenariat oriental de l'UE, guerre d'Afghanistan, extension de l'OTAN, conflit syrien, crises du gaz, guerre de Géorgie... tous ces événements se rattachent directement ou indirectement au Grand jeu. Il ne faut certes pas compter sur les médias grand public pour décrypter l'état du monde ; les journaux honnêtes font preuve d'une méconnaissance crasse, les malhonnêtes désinforment sciemment. Ces humbles chroniques ont pour but d'y remédier. Le ton y est souvent désinvolte, parfois mordant. Mais derrière la façade visant à familiariser avec la chose géopolitique, l'information est solide, étayée, référencée. Le lecteur qui visite ce site pour la première fois est fortement invité à d'abord lire Qu'est-ce que le Grand jeu ? qui lui donnera la base théorique lui permettant de comprendre les enjeux de l’actuelle partie d’échecs mondiale.Par Observatus geopoliticusTags associés : amerique latine, asie centrale, caucase, chine, economie, etats-unis, europe, extreme-orient, gaz, histoire, moyen-orient, petrole, russie, sous-continent indien, ukraine

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