La Jordanie et l’Iran poussent Israël à la guerre contre l’Égypte nassérienne et la Syrie baassiste (4/4)

La Jordanie et l’Iran poussent Israël à la guerre contre l’Égypte nassérienne et la Syrie baassiste (4/4)

Égypte – Le legs de Nasser : Comment le chef est tombé dans le piège qui lui a été tendu (1/4)

Égypte – La séquence Sadate : le coup d’État de l’intérieur (2/4)

Égypte – La surprenante éviction du Général Saad Eddine Chazli, en pleine guerre d’Octobre 1973 (3/4)

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par Said Al Sabbah.

Quatre des principaux protagonistes de ce drame, – le Roi Faysal d’Arabie Saoudite, le premier ministre israélien Yitzhak Rabin, le premier ministre de Jordanie Wasfi Tall et le président Anouar El Sadate – tous alliés de premier plan des États-Unis, dont deux prix Nobel de la Paix (Rabin et Sadate) auront été assassinés, alors que la République Islamique d’Iran se muait en chef de file du combat pour la libération de la Palestine et de la libération du Moyen orient de la tutelle israélo-américaine.

Note de la rédaction

Le 4ème volet de ce dossier, œuvre de l’écrivain libanais Said Al Sabbah, constitue une synthèse condensée de deux ouvrages rédigés par des universitaires arabes, le premier « Les Guerres d’Égypte à travers les archives israéliennes » du chercheur égyptien Mohamad Al Bouheiry, le second « Le rôle de l’Iran dans la guerre de 1967 », du docteur Mohamad Mouhareb.

Le titre général de cette étude parue dans le quotidien libanais de langue arabe Al Akhbar, en date du 3 octobre 2019, est le suivant : « Comment le Roi Hussein de Jordanie et le Chah d’Iran Réza Phalévi ont incité Israël à frapper l’Égypte et le Syrie, à la veille de la guerre de juin 1967 ».

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1 – Le rôle incitatif de la Jordanie

L’Arabie Saoudite s’est positionnée en fer de lance du combat contre l’Égypte nassérienne et la Syrie baassiste au plus fort de la guerre contre le nationalisme arabe menée conjointement par les États-Unis et Israël en ce que les régimes républicains arabes bordant le bassin historique de la Palestine (Égypte et Syrie) portaient la responsabilité de la guerre contre Israël, pour la libération de la Palestine.

La guerre dérivative du Yémen menée par le Royaume wahhabite contre l’Égypte, soutien des républicains contre l’Imamat, répondait à cet objectif, de même que la mise sur pied ultérieure d’un « pacte islamique » par le Roi Faysal d’Arabie Saoudite, dans la foulée de l’incendie de la Mosquée Al Aqsa de Jérusalem.

Au plus fort de la rivalité égypto-saoudienne, l’entrée en scène des Fedayins palestiniens depuis le front oriental du Monde arabe a placé dans l’embarras la Jordanie, particulièrement le Roi Hussein. À l’instar de son grand père le Roi Abdallah, – assassiné en pleine mosquée d’Al Aqsa à Jérusalem, en 1948, pour avoir entretenu des relations clandestines avec les sionistes du temps du mandat britannique sur la Palestine –, le monarque hachémite entretenait des relations secrètes avec les Israéliens depuis 1963 et s’appliquait méthodiquement à brider la guérilla palestinienne.

La Jordanie considérait que la Syrie constituait l’obstacle majeur à la pérennisation de l’arrangement conclu entre Israël et la Jordanie pour maintenir le calme à la frontière jordano-israélienne. Peu de temps avant l’opération israélienne d’Al Soummouh, Hussein adressa un message aux Israéliens, partiellement codé, les assurant qu’un raid rapide contre la Syrie ne romprait pas le calme sur le Front Nord et que l’Égypte, en dépit d’un accord de défense commune avec la Syrie, ne volerait pas à son secours.

L’opération Al Soummouh a mis en colère le Roi Hussein car il souhaitait vivement instaurer des relations cordiales et secrètes avec les Israéliens. Il déployait pour ce faire de grands efforts pour entraver toute action de la guérilla palestinienne contre l’État hébreu.

L’opération Al Soummouh a suscité en outre la colère des Américains qui se sont posés la question suivante : « Pourquoi les Israéliens ont attaqué un allié proche des États-Unis, alors que Washington avait donné son feu vert à une attaque contre la Syrie ? »

« Pourquoi n’avoir pas attaqué la Syrie ? », a ainsi interpellé un diplomate américain de haut rang un chef militaire israélien, lors de sa visite en Israël après l’opération Al Soummouh. « Pourquoi avoir choisi de porter atteinte à un état ami et allié de l’Occident ? », a poursuivi le diplomate américain, en quête d’une explication convaincante.

2 – Le rôle incitatif du Chah d’Iran

La présence militaire égyptienne au Yémen était « préoccupante » pour l’Iran qui redoutait un accroissement de l’influence nassérienne dans la Péninsule arabique (Arabie Saoudite-Yémen), qui constituerait par voie de conséquence une menace pour la sécurité nationale iranienne.

Pour conjurer cette menace, le Chah d’Iran a entrepris deux démarches, l’une en direction d’Israël, l’autre en direction de l’Union soviétique.

A- En direction d’Israël

Le Chah s’est appliqué à inciter Israël à se livrer à une action militaire contre l’Égypte en vue de la contraindre à retirer ses troupes du Yémen et à les concentrer sur le front israélien.

Parallèlement, le Chah s’est employé à faire pression sur l’Union soviétique en vue d’obtenir que cette dernière contraigne l’Égypte à se retirer du Yémen et de « distraire » la Syrie pour l’empêcher de soutenir l’Égypte.

La visite de Yitzhak Rabin en Iran le 14 avril 1967, soit moins de deux mois avant la guerre de Juin 1967, constitue à cet égard la plus importante visite jamais effectuée par un responsable israélien en Iran.

Durant son séjour à Téhéran, le chef d’État-Major israélien a non seulement rencontré le Chah, mais s’est également entretenu avec le premier ministre et surtout avec les chefs militaires et les responsables de l’appareil sécuritaire iraniens.

Le thème général des entretiens a été l’aménagement d’une coopération stratégique entre l’Iran et Israël, deux alliés majeurs des États-Unis au Moyen-Orient, en vue de faire face à l’Égypte. En contrepartie, Rabin a demandé à l’Iran d’accroitre ses fournitures de pétrole iranien à Israël, qui représentaient déjà 85 pour cent des besoins énergétiques israéliens.

Le chah a attiré l’attention de Rabin sur le fait que « la présence égyptienne au Yémen entravait le déploiement de l’influence iranienne dans la Péninsule arabique et constituait de ce fait une menace pour le Monde arabe et par voie de conséquence pour Israël ».

En conclusion, le Chah a estimé qu’il était « de l’intérêt commun de l’Iran et d’Israël d’occuper l’armée égyptienne dans d’autres endroits et d’occuper la Syrie pour l’empêcher de voler au secours de l’Égypte ».

Ami Jalouska évoque à ce propos le rôle de l’Iran dans l’exacerbation de la tension en pratiquant une « politique du bord du précipice », faisant fuiter de fausses informations à caractère stratégique à l’Union soviétique à propos de prétendues intentions israéliennes de se livrer à une attaque subite contre la Syrie.

Ce fait a mis en colère Nasser qui ordonna alors un mouvement des troupes égyptiennes en signe de solidarité avec la Syrie. Le jeu iranien a contribué à précipiter la guerre, engageant l’Égypte dans un conflit auquel elle n’était pas préparée.

La guerre de Juin 1967 a pleinement satisfait les objectifs stratégiques de l’Iran, en réduisant l’influence de l’Égypte dans la zone pétrolière du Golfe et sa substitution par l’Iran.

B- En direction de l’Union soviétique

Le Chah s’est appliqué à convaincre l’Union soviétique de faire pression sur l’Égypte pour contraindre ce dernier pays à se retirer du Yémen et de brider son influence dans la Péninsule arabique en leur faisant miroiter un marché mirobolant.

a) Les entretiens de Yitzhak Rabin, chef d’État-Major israélien à Téhéran:

Le Chah a tenu les propos suivants à Yitzhak Rabin : « J’ai précisé aux Soviétiques que leurs intérêts en Iran étaient aussi importantes que leurs intérêts en Égypte. J’ai en conséquence conclu d’importants accords économiques et commerciaux avec l’URSS dans les domaines énergétiques (pétrole et gaz), l’installation d’usines russes en Iran en plus de contrats d’armement ».

Le Chah a expliqué à Rabin sa démarche en faisant valoir que ce développement des rapports irano-soviétiques dans le domaine économique avait surpris les États-Unis. Mais qu’il avait pris cette décision afin d’inciter Moscou à « réfléchir quant à l’opportunité de poursuivre sa coopération avec l’Égypte et de mettre en balance les intérêts soviétiques tant en Iran qu’en Égypte ».

Malheureusement pour le Chah, Moscou n’a pas prêté une grande attention aux propos du souverain iranien.

b)- La lettre du Roi Faysal d’Arabie au président Lyndon Johnson

Aux démarches du Chah d’Iran et du Roi Hussein de Jordanie se sont superposées celle du Roi Faysal d’Arabie Saoudite. Le souverain wahhabite a en effet adressé un message à Lyndon Johnson, en date du 23 novembre 1966, dans lequel il demandait au président américain de « suggérer » à Israël de « se livrer à une action militaire contre l’Égypte de Nasser ».

Épilogue

Le Chah d’Iran, l’un des plus farouches adversaires de Nasser, sera évincé du pouvoir en 1979 par une révolte populaire, l’année de la conclusion du traité de paix entre Israël et l’Égypte.

À la recherche d’un abri, l’Amérique refusera, paradoxalement, l’asile à son meilleur gendarme dans le Golfe. Au terme d’une longue errance, le Roi des Rois sera accueilli par l’Égypte, pays contre lequel il avait ardemment incité Israël d’attaquer. La République Islamique d’Iran proclamée à son éviction, compensera stratégiquement la défection de l’Égypte du champ de bataille contre Israël, du fait de sa conclusion d’un traité de paix avec l’État hébreu.

Le Roi Faysal d’Arabie Saoudite connaitra son heure de gloire en 1973, en activant l’arme du pétrole, non pas tant en soutien à l’effort de guerre arabe contre Israël, selon la version pétromonarchique, mais en vue de fragiliser les économies de l’Europe occidentale et du Japon face à l’économie américaine sinistrée par le gouffre financier représenté par la guerre du Vietnam (1958-1975). Faysal sera néanmoins, à son tour, assassiné en 1975, par son propre neveu, diplômé des universités américaines, illustrant par la même la corrosivité de « l’American Way of Fife » pour les bédouins du désert.

Anouar El Sadate, l’homme qui s’est appliqué à gommer l’héritage de son mentor Gamal Abdel Nasser accueillera, en grand seigneur, le monarque iranien déchu, – un mégalomane ayant pourtant vigoureusement incité Israël à attaquer militairement l’Égypte en lui infligeant une sévère défaite militaire. Mais celui qui s’est auto-proclamé « président musulman d’un pays musulman » en vue d’activer le levier islamiste pour neutraliser les laïcs d’Egypte – Nassériens et Communistes -, sera à son tour assassiné par… un néo islamiste.

Nec plus ultra, Yitzhak Rabin, l’ancien chef d’État-Major israélien de la guerre de Juin 1967, l’interlocuteur privilégié du Chah d’Iran, devenu premier ministre et cosignataire du Traité de paix avec l’Égypte de Sadate, sera, à son tour, assassiné par… un ultra sioniste.

Enfin, Le Roi Hussein de Jordanie, rompant la solidarité arabe au profit d’une connivence avec Israël, l’ennemi officiel du Monde arabe, organisera un bain de sang à Amman en septembre 1970 pour mater la guérilla palestinienne et assurer la survie du trône hachémite. Il traînera jusqu’à sa mort, au terme d’une longue maladie, en 2002, le qualificatif de « Boucher d’Amman ».

Son âme damnée, le premier ministre Wasfi Tall, sera assassiné en 1971, un an après le septembre noir jordanien, au Caire par substitution de son Roi.

Au terme de cette séquence, cinq des principaux protagonistes de ce drame, – tous alliés de premier plan des États Unis, dont deux Prix Nobel de la Paix (Rabin et Sadate) -, seront dégagés de manière violente de la scène publique, dont quatre assassinats, alors que la République islamique d’Iran se muait en chef de file du combat pour la libération de la Palestine et de la libération du Moyen orient de la tutelle israélo-américaine.

Quatre assassinats de grands pontes pro occidentaux (Fayçal, Sadate, Rabin Wasfi Tall)… Une histoire de cornecul


Adaptation en version française René Naba

source : https://www.madaniya.info

La Jordanie et l’Iran poussent Israël à la guerre contre l’Égypte nassérienne et la Syrie baassiste (4/4)

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Site de réflexion et de ré-information.Aujourd’hui nous assistons, à travers le monde, à une émancipation des masses vis à vis de l’information produite par les médias dits “mainstream”, et surtout vis à vis de la communication officielle, l’une et l’autre se confondant le plus souvent. Bien sûr, c’est Internet qui a permis cette émancipation. Mais pas seulement. S’il n’y avait pas eu un certain 11 Septembre, s’il n’y avait pas eu toutes ces guerres qui ont découlé de cet évènement, les choses auraient pu être bien différentes. Quelques jours après le 11 Septembre 2001, Marc-Edouard Nabe avait écrit un livre intitulé : “Une lueur d’espoir”. J’avais aimé ce titre. Il s’agissait bien d’une lueur, comme l’aube d’un jour nouveau. La lumière, progressivement, inexorablement se répandait sur la terre. Peu à peu, l’humanité sort des ténèbres. Nous n’en sommes encore qu’au début, mais cette dynamique semble irréversible. Le monde ne remerciera jamais assez Monsieur Thierry Meyssan pour avoir été à l’origine de la prise de conscience mondiale de la manipulation de l’information sur cet évènement que fut le 11 Septembre. Bien sûr, si ce n’était lui, quelqu’un d’autre l’aurait fait tôt ou tard. Mais l’Histoire est ainsi faite : la rencontre d’un homme et d’un évènement.Cette aube qui point, c’est la naissance de la vérité, en lutte contre le mensonge. Lumière contre ténèbres. J’ai espoir que la vérité triomphera car il n’existe d’ombre que par absence de lumière. L’échange d’informations à travers les blogs et forums permettra d’y parvenir. C’est la raison d’être de ce blog. Je souhaitais apporter ma modeste contribution à cette grande aventure, à travers mes réflexions, mon vécu et les divers échanges personnels que j’ai eu ici ou là. Il se veut sans prétentions, et n’a comme orientation que la recherche de la vérité, si elle existe.Chercher la vérité c’est, bien sûr, lutter contre le mensonge où qu’il se niche, mais c’est surtout une recherche éperdue de Justice.

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