Les Canadiens Gary et Andrea Dyck ont passé une décennie au Xinjiang, en Chine, a-t-on pu apprendre par les journaux du 26 avril 2021. La nouvelle semble avoir fait le tour du monde. « Nous avions l’impression de vivre dans un immense pénitencier », a dit ce couple canadien qui avait passé 18 ans en Asie.
Mais que faisaient-ils là-bas ? Curieusement, certaines informations faciles à trouver sur Internet ont été omises dans la nouvelle. À nul endroit, on indique par exemple que Gary Dyck est diplômé du Briercrest Christian Academy, College and Seminary de la Saskatchewan, ainsi que de la Providence University College and Theological Seminary du Manitoba, deux institutions évangéliques qui apprennent « à rechercher le royaume de Dieu, à être profondément façonné par les Écritures et à être formé spirituellement et intellectuellement pour des vies de service ». On ne dit pas non plus que Gary Dyck a travaillé en Chine pour l’Evangelical Mennonite Conference/Frontiers : tandis que l’Evangelical Mennonite Conference est un organisme de chrétiens évangéliques, son partenaire Frontiers guide les musulmans vers le Christ.
L’en-tête de l’article du Devoir consacré à Gary et Andrea Dyck, le 26 avril 2021
https://www.ledevoir.com/monde/asie/599510/chine-le-xinjiang-un-immense-penitencier
Dans la nouvelle, on aurait pu féliciter la Chine d’avoir été d’une tolérance exemplaire envers des missionnaires évangéliques comme les Dyck. N’ont-ils pas pu prolonger durant dix ans leur séjour au Xinjiang? Ne devraient-ils pas en être reconnaissants? Mais comme la charité chrétienne est plus souvent un principe qu’un mode de vie, même chez ses spécialistes, il semble qu’ils ont plutôt choisi de diaboliser la Chine. Surtout qu’ils en sont maintenant très loin. On apprend en effet, toujours par Internet, qu’ils travaillent dorénavant au Mennonite Heritage Village, à Steinbach au Manitoba d’où ils sont originaires. C’est un musée consacré à l’histoire des mennonites russes : quelques milliers d’entre eux (ils ont une certaine parenté avec les amish) se sont installés à la fin du 19e siècle au Manitoba en échange d’une terre, de la possibilité de gérer eux-mêmes leur système scolaire et d’être exemptés du service militaire, et le musée semble être une sorte de « village d’antan » leur étant consacré.
Le lobby ouïgour manifeste contre le projet de loi 21 sur la laïcité, le 7 octobre 2018, à la place Émilie-Gamelin à Montréal
https://www.isupportuyghurs.org/en/all-events/protest-against-bill-21-on-october-07-2018
Qui suit la situation au Xinjiang peut, en caricaturant, diviser le monde en deux. D’un côté, il y a ceux qui privilégient systématiquement les droits individuels aux droits collectifs. On y retrouve le monde anglo-saxon avec ses ONG militantes comme l’américaine Human Right Watch ou la britannique Amnesty International, qui veulent chacune étendre au monde entier les « valeurs progressistes et démocratiques occidentales ». Avec eux, on retrouve aussi le lobby ouïghour, les religions de toutes confessions, l’extrême droite, et même le juge Blanchard. De l’autre côté, on retrouve ceux pensant que les droits collectifs constituent une condition nécessaire à l’exercice des droits individuels. On retrouve la Chine et les irréductibles (de moins en moins nombreux en Occident, car le monde anglo-saxon a pris toute la place) qui pensent qu’une société a le droit de se protéger, d’assurer ses valeurs et de se développer. Selon les premiers, on retrouve au Xinjiang des camps de concentration. Selon les seconds, on y retrouve des centres de formation. Tout ce qu’on raconte au-delà de ce découpage relève de la propagande, comme cette nouvelle à propos de Gary et Andrea Dyck où, pour ne pas perdre toute crédibilité, on a préféré cacher la raison de leur si long séjour en Chine.
Paul Lavoie
Source : Lire l'article complet par Mondialisation.ca
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