Pourquoi QAnon, la théorie du complot en passe d’englober toutes les autres, était culturellement inévitable. Un texte de notre collaborateur Paul Memmi, à retrouver en exclusivité dans Le Grand Continent.
Le complotisme fait fureur. Mais pourquoi tellement, pourquoi maintenant ? Dans le mille-feuille idéologique, il partage des éléments avec d’autres formes de pensées, de croyances ou d’expressions sociales. Reste à le reconnaître partout où il sévit, car il ne suffit pas de lutter contre ses seuls symptômes politiques.
Qui dit complotisme, dit productions imaginaires et figures symboliques ; l’art et sa cristallisation culturelle sont inévitablement convoqués. Le complotisme actuel se relie-t-il aux pratiques et courants artistiques contemporains ? Techniquement, il est dernier-cri mais, pour ses tournures d’esprit, peut-on admettre qu’il faille une génération, voire deux, avant que des écoles artistiques, nées de précurseurs intuitifs et de philosophes d’avant-garde, ne diffusent pleinement dans le grand public – la poussée de complotisme de ce début de XXIe siècle devant alors être reliée à ce qui apparut dans les années 1960-70 et arriva à maturité dans les années 1990 ?
Examinons QAnon, la théorie complotiste américaine en passe d’englober toutes les autres. Son univers formel cumule les symboles (souvent tatoués) du paganisme néonazi – triangles de Wotan, marteau de Thor, etc. – et l’inusable iconographie de l’Œil de Dieu sur pyramide d’Égypte, des sacrifices d’enfants à Moloch, des béliers et des boucs, des sexes et du sang ; et, dans un symbolisme pompier, tout ce qui peut rendre le Pouvoir « mystérieux, fascinant, terrifiant » : hauts personnages représentés dans leurs hauts-lieux avec les attributs de leur toute puissance – en deux mots, un style paranoïaque et recuit.
Mais plus profondément, c’est le désordre qui frappe, la confusion entre réel et imaginaire, mythe et politique, la prolifération de fausses interprétations qu’aucune logique ou règle sociale n’arrêtent ou ne structurent, étant disqualifiées. Tout est saisi par le crime mais, criminalité mise à part, ce mode n’a-t-il pas des pendants dans l’époque, au sein des arts qui lui sont contemporains ? […]
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