par Marco Teruggi.
Le Venezuela subit une modification de son tableau politique tant à l’intérieur du pays qu’à l’étranger : des dimensions souvent inséparables dans le conflit actuel. Cette reconfiguration n’est pas nouvelle et par moments apparaît de façon évidente comme ces jours-ci avec l’entrée en fonctions de la nouvelle Assemblée nationale et Juan Guaidó semble être face à ses ultimes réserves.
L’un des signes de cette situation est la décision de l’Union européenne de ne plus le reconnaître comme « président par intérim. » Cette position a été exprimée avec diplomatie et de façon tranchante : Guaidó a été qualifié de « représentant de l’Assemblée sortante ». L’Union, en affirmant que l’Assemblée présidée par Guaidó n’est plus en vigueur comme l’affirme un secteur de l’opposition, écarte la poursuite de la « présidence par intérim ».
Cette modification avait déjà été anticipée. Des positions dures contre le gouvernement de Nicolás Maduro, comme celles de l’Allemagne, de la Hollande ou de la France ont changé face à la nouvelle situation. Une question se pose : s’agit-il d’un retournement de veste individuel ou une position alignée sur celle du nouveau gouvernement des États-Unis ? La modification du tableau politique se situe à plusieurs niveaux à la fois. Les États-Unis continueront sans doute à reconnaître Guaidó comme « président par intérim » dans ce qui fut un accord bipartite dès le début mais en même temps, la tactique employée pour aborder le dossier du Venezuela est modifiée car de toute évidence, elle n’a pas donné les résultats espérés par Washington.
D’autres gouvernements, comme ceux qui sont le plus à droite en Amérique latine : la Colombie, le Brésil et le Chili, et les alliés des États-Unis dans leur politique étrangère comme le Canada, le Royaume Uni et le Japon continueront avec les États-Unis de reconnaître la « présidence par intérim ». Mais ce seront exclusivement les États-Unis qui décideront de la façon d’essayer d’obtenir un changement de gouvernement au Venezuela et non ces gouvernements comme ça a été le cas depuis le début.
Guaidó est hors du jeu politique pour inefficacité. Tous les acteurs le savent, indépendamment de ce qu’ils racontent en public. C’est pourquoi à l’étranger, certains reviennent sur leur position et cela provoque de nombreuses fractures dans l’opposition vénézuélienne où chaque dirigeant, chaque parti ou chaque tendance de parti cherche à se situer dans le scénario ouvert en train de se construire. Il s’agit sans doute de la fin d’une stratégie représentée par Guaidó : la stratégie des institutions parallèles. Le gouvernement vénézuélien a réussi à en venir à bout en 2 ans au prix du renforcement du blocus, de dommages pour l’économie et pour la population, en particulier les secteurs populaires et moyens et pour la politique qui est devenue une politique de tranchées.
La nouvelle étape
Pour le moment, on ne peut voir qu’une silhouette. Le discours de la nouvelle Assemblée à majorité chaviste, met au premier plan aussi bien le dialogue et la réconciliation que la nécessité qu’il n’y ait pas d’impunité. Iris Varela, vice-président du pouvoir législatif, a affirmé lors de la session de jeudi : « Nous décidons, en tant que direction, de créer une commission spéciale qui va enquêter sur les actes perpétrés contre la République par les membres de la direction et certains membres de l’Assemblée pendant la période 2016-2021 (…) Il doit y avoir des résultats en 1 mois et il faut l’exhorter à faire justice fermement ».
Ce message vise directement Guaidó qui, à partir du 5 janvier, a perdu son immunité parlementaire. Celui qui, le 23 janvier 2019, s’est autoproclamé président alors que personne dans le pays en le connaissait , sait à présent que sa fin politique n’est plus qu’une question de temps. En sera-t-il réduit à ne plus exister que sur Twitter à cause de la dissolution de son capital politique ou sera-t-il arrêté par la justice ? De quoi cela dépendra-t-il ? De l’époque politique, des éventuels dialogues et des éventuelles négociations internationales dans lesquels le chavisme est en position de force politiquement mais en position de faiblesse économiquement.
Ce que vise le Gouvernement pour la nouvelle étape, c’est l’entrée de capitaux privés vénézuéliens et étrangers dans différents domaines importants de l’économie. Ça a commencé officiellement avec la loi anti-blocus votée en octobre par l’Assemblée nationale constituante qui dit, entre autres choses, que ce processus d’entrée de capitaux doit se faire de façon confidentielle pour éviter les répercussions du blocus sur lequel, jusqu’à présent, il n’y a pas eu de rendu de compte.
On ne peut pas encore mesurer les résultats de cette orientation qui a débuté avant même la loi. Selon son efficacité, c’est à dire selon si elle permet une amélioration des rentrées d’argent dans les coffres de l’État, des services publics, dans des entreprises stratégiques comme PDVSA, le gouvernement devra négocier plus ou moins dans l’urgence un assouplissement du blocus grâce à un éventuel dialogue ou à un éventuel accord avec les États-Unis. Ce que vise le gouvernement, en outre, c’est que dans ce casse-tête, cette loi et les opportunités d’investissement qu’elle offre fonctionnent comme un élément qui amène à des accords.
Pour le moment, il s’agit de débats, d’analyses et de portes fermées mais pas d’impacts sur le quotidien qui subit des transformations depuis des années avec des salaires et des retraites qui vont de 2 $ par mois quand ils sont payés par l’État à 50 $ ou 100 $ quand ils sont payés par des entreprises privées, des difficultés d’approvisionnement en eau, gaz, électricité et essence et en monnaie nationale qui recule par rapport au dollar de la petite économie à la macroéconomie. Ce quotidien est le bon moment pour des améliorations au Venezuela.
source : https://www.resumenlatinoamericano.org
traduit par Françoise Lopez pour Bolivar Infos
via http://bolivarinfos.over-blog.com/
Source : Lire l'article complet par Réseau International
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