Vote et contre-vote

Vote et contre-vote

Le mois de décembre est souvent intéressant à l’ONU. Et si les votes de l’Assemblée générale, organe principalement consultatif, sont avant tout symboliques, ils n’en restent pas moins utiles pour indiquer dans quel sens bat le pouls de la planète géopolitique.

Le 7 décembre, l’Ukraine a présenté une résolution intitulée «Problèmes de la militarisation de la Crimée, de la mer Noire et de la mer d’Azov«, évidemment dirigée contre Moscou.

SI Kiev se félicite du résultat brut, il suffit de creuser un peu pour constater une réalité bien différente. Le parallèle avec le vote du 27 mars 2014 sur le rattachement de la Crimée à la Russie vient immédiatement à l’esprit :

Présenté par les médias occidentaux comme une preuve supplémentaire de l’isolement de Moscou sur la scène internationale, ce vote constitua au contraire une petite victoire pour la Russie et dessinait déjà les prémices de l’isolement américain qui ira grandissant tout au long de l’année. Sous des prétextes divers, près de quatre-vingt États – les principaux pays de la planète en dehors du bloc occidental et de ses protégés – s’abstinrent de condamner la Russie : Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud, Argentine, Pakistan, Iran, Israël (!), Egypte, Irak (!), Vietnam, Liban, Emirats Arabes Unis, Maroc, Kazakhstan, Algérie, Uruguay, Kenya, Tanzanie, Ouzbékistan, Afghanistan (!), Maroc, Sénégal, Côte d’Ivoire… Ces poids-lourds mondiaux ou simplement régionaux ont pour dénominateur commun de ne pas être sous influence occidentale directe, de ne pas faire partie d’une alliance militaire américaine et de mener une politique étrangère indépendante, pas nécessairement pro-russe.

La « trahison » d’États-clients comme Israël – qui argua d’une grève de son personnel diplomatique, piètre excuse qui ne trompa personne à Washington -, l’Irak ou l’Afghanistan provoqua d’ailleurs la fureur du Département d’État américain. Remarquons que, mis à part le petit Bhoutan, l’Eurasie dans son ensemble s’abstint de condamner la Russie, ainsi que la majorité de l’Amérique du Sud, de l’Afrique et la moitié des pays arabes.

Peu ou prou, la même chose peut être dite sur le vote d’il y a dix jours. 62 abstentions et 17 contre : 79 Etats ont refusé de condamner la Russie contre 63 qui l’ont fait. Chose intéressante, plusieurs pays et non des moindres ont pris le chemin inverse par rapport à 2014 : Arabie Saoudite, Mexique, Colombie, Chili, Pérou ou Corée du Sud. On le voit, la liste compte un certain nombre de protégés impériaux…

Derrière la méthode Coué de façade, Washington et Kiev n’ont vraisemblablement pas reçu avec des transports de joie le résultat de la résolution. Pire, en Ukraine même, des voix se font entendre pour dire que, finalement, la Crimée se porte bien mieux depuis son rattachement, comme cette alliée politique du président Zelensky qui en a fait sursauter plus d’un.

Joe l’Indien, dont l’accession à la Maison Blanche ne fait maintenant guère de doute, aura d’ailleurs fort à faire avec sa chère Ukraine. Le temps de Chocochenko et de la croisade anti-russe est bel et bien fini. S’il en fallait encore une preuve, le parti de Zelensky, pourtant régulièrement accusé de ne pas être assez dur avec Moscou, a connu une défaite assez retentissante face à un candidat pro-russe lors de l’élection municipale dans la propre ville du président.

Mais revenons à l’ONU. Quelques jours après le vote criméen, la Russie a présenté sa traditionnelle (depuis 2014 et le putsch maïdanite) résolution condamnant la glorification du nazisme, avec évidemment Kiev dans le viseur. Cette fois, le résultat se passe de tout commentaire…

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À propos de l'auteur Chroniques du Grand Jeu

« La géopolitique autrement, pour mieux la comprendre... »Présent à l'esprit de tout dirigeant anglo-saxon ou russe, le concept de Grand jeu est étonnamment méconnu en France. C'est pourtant lui qui explique une bonne part des événements géopolitiques de la planète. Crise ukrainienne, 11 septembre, tracé des pipelines, guerre de Tchétchénie, développement des BRICS, invasion de l'Irak, partenariat oriental de l'UE, guerre d'Afghanistan, extension de l'OTAN, conflit syrien, crises du gaz, guerre de Géorgie... tous ces événements se rattachent directement ou indirectement au Grand jeu. Il ne faut certes pas compter sur les médias grand public pour décrypter l'état du monde ; les journaux honnêtes font preuve d'une méconnaissance crasse, les malhonnêtes désinforment sciemment. Ces humbles chroniques ont pour but d'y remédier. Le ton y est souvent désinvolte, parfois mordant. Mais derrière la façade visant à familiariser avec la chose géopolitique, l'information est solide, étayée, référencée. Le lecteur qui visite ce site pour la première fois est fortement invité à d'abord lire Qu'est-ce que le Grand jeu ? qui lui donnera la base théorique lui permettant de comprendre les enjeux de l’actuelle partie d’échecs mondiale.Par Observatus geopoliticusTags associés : amerique latine, asie centrale, caucase, chine, economie, etats-unis, europe, extreme-orient, gaz, histoire, moyen-orient, petrole, russie, sous-continent indien, ukraine

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