“La pression morale que subissent les enfants semble démesurée” témoigne une enseignante

“La pression morale que subissent les enfants semble démesurée” témoigne une enseignante

Sophie Desestoiles est professeur agrégé de lettres modernes, elle dénonce notamment dans ce témoignage un “climat de peur” aux potentielles “conséquences psychologiques graves sur les enfants”.

Le port du masque obligatoire en milieu scolaire et ses effets physiologiques, psychologiques et pédagogiques.

“Depuis la rentrée scolaire 2020, le port du masque en établissement scolaire a été rendu obligatoire pour les jeunes à partir de onze ans, pour les enseignants et tous les personnels.
Les lycéens sont donc amenés à le porter de 8h à 18h dans l’établissement selon leur emploi du temps, plus dans le temps des transports scolaires ou dans les bus de ville, soit sur une amplitude de 11 à 12h par jour, quatre jours et demi par semaine. Ils peuvent toutefois l’ôter pendant la pause déjeuner car on n’a pas trouvé le moyen de les faire manger avec un masque ni de les priver d’alimentation. Or, depuis trois semaines nous faisons cours avec cet accessoire qui n’est pas « un vêtement comme un autre », pour reprendre une citation du ministre.

Comment le vivent-ils ? Au niveau physiologique, ils le supportent difficilement pour la plupart d’après leurs témoignages. Ils respirent mal, ils ont envie de baisser le masque pour respirer. De surcroît, il a fait très chaud les trois premières semaines de septembre, et dans certaines salles de cours la température avoisinait les 30° : le manque d’air associé à la chaleur rend vraiment les conditions de travail très fatigantes. Plusieurs se plaignent de maux de tête, de fatigue et cela diminue leur concentration en cours. De plus, ceux qui osent prendre la parole sont obligés de forcer leur voix pour être audibles, d’autres préfèrent s’abstenir de participer. Certains jeunes avouent ne pas comprendre que dans tel lieu à telle heure, ils doivent le porter, alors que dans un autre lieu, à une autre heure, ils peuvent l’enlever.

Le ministre de l’Éducation Nationale avait d’ailleurs précisé quelques jours avant la rentrée de septembre que les enseignants pourraient ne pas mettre le masque en gardant une distance de 2 mètres avec leurs élèves, ce qui reprenait pratiquement le protocole mis en place lors du déconfinement, où la distance n’était que d’un mètre. Puis, juste avant la reprise de cours, cette annonce a été contredite par un nouveau protocole imposant le port du masque aux enseignants quelle que soit la distance, sans qu’aucune étude sur les conséquences au niveau de leur santé n’ait été faite et rendue publique. Le très faible nombre de médecins du travail dans l’Éducation Nationale ne permet pas un suivi régulier et fréquent des personnels. Les masques qui ont été fournis aux enseignants dans les établissements, (au nombre de 2 en juin et 2 à la rentrée de septembre dans mon établissement scolaire), sont en tissu blanc et épais. Aucune mention de leur composition, de leur lieu de fabrication, de la température de lavage et du nombre de lavages n’a été indiqué pour les usagers de ces masques.

Pour les enseignants, faire cours avec un masque demande un effort considérable, tant par sensation d’étouffement respiratoire que pour faire porter leur voix dans une salle vaste à travers le tissu du masque. La chaleur a encore accru la difficulté. Un petit reportage dans un journal télévisé d’une TV d’Etat (France 2 le 16 ou 17 septembre 2020) prétendait démontrer avec un médecin et un appareil de mesure que le niveau d’oxygène dans le sang ne diminue pas avec le port d’un masque, ni avec le port de 6 masques superposés.

Quelles seront les conséquences physiologiques d’un port du masque prolongé sur le système respiratoire et sur les cordes vocales, qui sont leur outil de travail principal ? Quels risques, pour les jeunes et les adultes, de respirer des fermentations de bactéries accumulées dans un tissu humide et chaud et de développer des maladies respiratoires au bout de quelques semaines ou quelques mois ? Après trois semaines de cours avec port du masque, certains enseignants commencent à ressentir des douleurs au niveau de la gorge et des cordes vocales et une fatigue accrue.

Au niveau psychologique et moral, il est difficile d’enseigner face à des jeunes que l’on ne connaît pas encore et dont on ne voit que le haut du visage, ce qui rend difficile la reconnaissance et la mémorisation de leurs visages. De plus, se présenter à eux en étant ainsi masqués ne permet pas de rendre très expressifs nos propos, puisque les expressions du visage sont grandement occultées. Cela diminue beaucoup l’échange entre professeurs et élèves et entre élèves. La spontanéité, les sourires, les mimiques expressives disparaissent. Les activités de production orale en public sont rendues plus difficiles, voire pour certains enfants, trop stressantes dans ces conditions, et certains enseignants vont éviter de les proposer tant que la mesure de port du masque en classe sera maintenue.

Quant à la pression morale que subissent les enfants, qui ne sont généralement pas malades, quand bien même ils sont testés positifs, elle semble démesurée. On leur laisse accroire qu’ils pourraient être responsables de la contamination de leurs aînés.

Depuis la fin de l’été, les médias dominants et les politiques annoncent une deuxième vague qui justifierait ces mesures de sécurité sanitaire, avec le port du masque imposé ici et là, et la limitation des rassemblements et des activités festives. Ils s’appuient sur une augmentation des tests et une hausse consécutive des personnes testées positives (plus on teste plus on trouve de « cas » de gens testés positifs). Mais qu’est-ce que cela veut dire au niveau médical ? Ces « cas » sont-ils des personnes malades et contagieuses, ou des personnes ayant développé des anticorps, ou des personnes porteuses du virus mais asymptomatiques, et dans ce cas, sont-elles contagieuses, et pendant combien de temps ? La durée de la contagiosité varie tous les jours selon les études et on ne peut se fier à rien… ce qui ne fait qu’augmenter la psychose collective. La durée de quarantaine des testés positifs d’abord fixée à 14 jours vient d’être revue à la baisse…

Au niveau moral, ces discours médicaux discordants, ces injonctions politiques qui varient sans cesse, ces chiffres terrifiants, ces reportages télévisuels alarmants, instaurent un climat de peur ou d’inquiétude diffuse qui peut avoir des conséquences psychologiques graves sur les plus fragiles, personnes âgées ou enfants, personnes souffrant d’autres pathologies…. Le confinement a également ruiné une part importante des entreprises : une hausse des faillites, des licenciements massifs, des chances très diminuées pour les jeunes d’accéder à l’emploi entraînent des risques sociaux importants, tels que la hausse des dépressions et des suicides, les violences intraconjugales et intrafamiliales…

Mais l’emprise de la peur, constamment alimentée depuis des mois et encore entretenue par les récentes annonces de hausse du nombre de « cas » alors que le nombre réel d’hospitalisations en réanimation et de décès dus à cette maladie, est à un niveau très bas depuis le début de l’été. Ces chiffres sont consultables et vérifiables sur les sites officiels. Alors pourquoi maintenir ce climat de peur, d’incertitudes, ces mesures toujours plus restrictives, ces menaces de reconfinement et de limitation de déplacements ? Devrons-nous porter le masque toute l’année scolaire ? Et pourquoi pas, toutes les années ? toujours ? Puisqu’après ce virus, il y aura la grippe, puis un autre virus. Nous aimerions avoir des études médicales sérieuses et sans conflits d’intérêts sur les conséquences physiques et psychologiques du port prolongé du masque.

Le port du masque ainsi que les limitations de déplacement et les interdictions de rassemblement n’ont pas que des enjeux médicaux ; ils permettent de contrôler les mouvements de protestation sociale, c’est évident. Et gouverner par la peur a toujours été la stratégie des gouvernements craignant d’être contestés et renversés.”

Le 20 septembre 2020,

Sophie Desestoiles

Professeur agrégé de lettres modernes, ayant prolongé sa formation par des études d’histoire des civilisations. Elle commence à écrire des poèmes vers l’âge de quinze ans et s’amuse parfois à dessiner. Nantaise d’origine, elle a passé son enfance entre le Cantal, l’Aveyron et la Beauce. Après une quinzaine d’années de vie professionnelle en Ile de France, elle est revenue vivre en Auvergne où elle enseigne en lycée général. Poétesse, essayiste, conférencière. Ses recherches historiques établissent des comparaisons inattendues et soulignent des analogies étonnantes entre des écrivains et des artistes de différentes époques.

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