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par J. C. Cartagena.
Andre Vltchek vient de signer un texte sur le Chili dans lequel il essaie de montrer que dans ce pays le problème racial est aujourd’hui plus important que la lutte sociale.
Les phrases les plus polémiques de son article, sont « qu’au Chili, la race joue un rôle extrêmement important » et que « le racisme et les divisions raciales au Chili sont une version extrême de ce qui se passe dans plusieurs pays d’Amérique du Sud ». J’estime que ces deux affirmations sont à mitiger ou du moins à expliquer.
La lutte de classe et sociale intègre et explique les fondements du racisme utilisées par la classe dominante pour exercer son pouvoir. Ce n’est pas « la race » qui est extrêmement important au Chili mais l’origine sociale.
Les grands événements qui ont forgé l’histoire du pays, les composants sociaux ont été toujours plus importants que l’antagonisme racial. Et ceci dès l’indépendance du pays.
Je vous propose de commencer par l’origine du pays. La lutte pour l’indépendance du pays a été entamée par des secteurs sous l’influence des idées provenant de la révolutions française et la lutte pour l’indépendance étasunienne.
En général l’issue de tout combat est décidé en rapport à l’importance de rapport de forces. Lorsque les indépendantistes ont compris que la lutte pour l’indépendance nécessitait le concours de toute les forces, ils ont promis la liberté aux esclaves s’ils obtenaient l’indépendance des territoires. Les bataillons des noirs esclaves ont composé presque le tiers de troupes traversant la cordillère des Andes en 1818, sous le commandement de San Martin, pour libérer le futur territoire du Chili. Le reste était composé de forces progressistes, et si on veut souligner l’origine raciale, majoritairement métisses, comme la plupart des habitants du pays d’ailleurs. (Petite paradoxe : à cette période, les mapuche ont majoritairement lutté à côté des troupes coloniales espagnoles et contre l’indépendance du Chili). Par la suite, l’immigration européenne au Chili a commencée fin 19ème siècle et contrairement à ce qu’affirme l’auteur elle n’est pas basée sur la couleur de la peau ni leurs origines, mais sur leur savoir-faire, sinon comment expliquer que la plus grande colonie palestinienne et libanaise au monde, hormis certains pays arabes, soit établie au Chili ?
La plupart de faits marquant l’histoire du Chili n’a aucunement un rapport à la question raciale : ni les guerres civiles, ni les grandes luttes ouvrières (et grands massacres qui voyaient mourir côte à côte d’exploités chiliens, boliviens, péruviens et argentins), ni les grandes victoires de luttes sociales et politiques : gouvernements de Front Populaire en 1938 et Unité Populaire (UP) en 1970. Dans son programme, l’UP prévoyait la promotion et la reconnaissance des peuples autochtones. Le coup d’État de Pinochet n’a pas permis de le développer. Le communiste Pablo Neruda, prix Nobel de Littérature 1971, projetait la création d’une Université mapuche. Pendant le gouvernement de Salvador Allende, la promotion, et développement sociale et économique des communautés indigènes a été entrepris y compris la récupération et l’élargissement de terres mapuche dans le cadre de la réforme agraire.
Dire que la gauche chilienne n’a que peu à voir avec la promotion du peuple mapuche est particulièrement injuste pour S. Allende dont on fête justement aujourd’hui, 26 juin 2020 son 112ème anniversaire de sa naissance. Il n’est pas inutile de rappeler que le programme de l’UP était dans bien des aspects bien plus avancé, pour l’époque, que ceux de nombreux pays dont les gouvernements sont reconnus comme progressistes : Venezuela, Équateur de Correa, Uruguay du Front Élargi, Bolivie d’Evo Morales, Brésil de Lula, entre autres. Et qui se réclament à des différents degrés de l’héritage et de l’expérience de l’UP chilienne et de S. Allende. Alors vouloir ériger tous ces processus émancipateurs et leurs protagonistes en antagonismes relève de la légèreté d’analyse.
La lutte ouvrière et syndicale, en particulier celle des mineurs, sans importer leur couleur de peau, est la composante essentielle de l’histoire sociale du Chili.
Réduire les problèmes sociaux à des questions raciales, non seulement empêche la compréhension de la situation actuelle mais pire encore limite la possibilité de prendre bonnes décisions pour les luttes à venir.
Pour expliquer la pensée actuelle majoritaire des chiliens de nos jours il ne faut surtout pas oublier plusieurs faits : Un. Le Chili a subi une dictature de 17 ans à partir de 1973 commandé, financé et organisé par les USA. L’idéologie neo-libérale a été imposé à grande échelle au Chili pour la première fois dans l’histoire du monde. Deux. Il y a eu par la suite 30 ans de pratique neo-libérale qui ont approfondi le système. L’idéologie dominante de la société est celle de la classe dominante, disait le barbu Marx. C’est ce qui s’est passé au Chili. (A. Vltchek fait référence peut être à la gauche sociale démocrate de cette période en parlant de « révolutionnaires » de Miami, mais il omet de rappeler que même Emilia Nuyado, première députée mapuche, en fait partie). Trois et fin, pour faire court. Le péché originel de la droite chilienne est le coup d’État contre l’UP. Depuis ce jour elle se croit investie (car d’après elle, elle est la seule au monde à avoir vaincu le communisme pendant la guerre froide), d’un mandat messianique : libérer le sous-continent de l’emprise du communisme ce qui explique certains faits et attitudes arrogantes des gouvernements rapportées par l’article d’A. Vltchek, car la droite chilienne est extrêmement anti-communiste mais aussi raciste.
Ce texte est volontairement court, mais il y a encore beaucoup d’éléments et des faits à analyser et à tenir en compte, afin d’émettre des avis informés.
Source: Lire l'article complet de Réseau International