Par Ray Mc Govern − Le 3 juin 2020 − Source ConsortiumNews
Les espoirs russes se sont envolés : tous les espoirs que le président russe Vladimir Poutine aurait pu avoir d’établir une relation plus viable avec l’administration Trump ont été « douchés », pour ainsi dire. Cela a été lourdement et clairement exprimé dans les remarques acerbes du vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Ryabkov, lors d’une interview vendredi avec The National Interest.
Ryabkov a déploré le triste état des relations de la Russie et des États-Unis, tout en pointant, de façon très subtile, la Chine comme atout dans la manche de la Russie. Il reconnaissait simplement que ce que les Soviétiques appelaient autrefois «la corrélation des forces» a changé de façon profonde, et a fortement sous-entendu que les États-Unis devraient en tirer les conclusions appropriées.
Ryabkov n’est pas un diplomate amateur, il a utilisé des mots inhabituellement affûtés, presque certainement préautorisés, pour envoyer son message à destination :
«Nous ne croyons pas que les États-Unis, dans leur forme actuelle, soient un interlocuteur fiable, nous n’avons donc aucune confiance en lui, aucune. Nos propres calculs et conclusions sont donc moins liés à ce que fait l’Amérique… nous chérissons nos relations étroites et amicales avec la Chine. Nous considérons celle-ci comme un partenaire stratégique global dans différents domaines et nous avons l’intention de développer davantage ce partenariat. »
En d’autres termes : nous, Russes et Chinois, resterons unis alors que les États-Unis tentent de nous dépeindre tous les deux comme des super-méchants, tout en s’isolant et en se bloquant dans un coin du ring.
Sic Transit Trust : ainsi va la confiance
Poutine a fini par admettre que des forces puissantes favorisant une haute tension avec la Russie, le complexe Militaro-Industriel-Congrès-Renseignement-Médias-Académie-Think-Tank – État-profond, si vous voulez – sont bien plus fortes que n’importe quel président, et, dans ce contexte, essayer de mettre en place une relation de confiance personnelle avec un président, peut être largement une perte de temps.
Le système dans lequel Poutine a passé sa jeunesse a mis l’accent sur ce que les Soviétiques appelaient yedinonachaliya, ce qui signifie leadership d’une personne au sommet du pouvoir qui est pleinement habilitée à prendre des décisions et à les faire exécuter par des subordonnés – ou d’autres. L’expérience personnelle de Poutine, travaillant utilement avec le président Barack Obama au début de septembre 2013 pour empêcher une guerre plus large contre la Syrie [plus de détails plus loin] peut l’avoir trompé en supposant que les présidents des États-Unis peuvent exercer ce type de pouvoir, à volonté. Et, si tel était le cas, les relations personnelles au plus haut niveau étaient le moyen préféré de trancher les nœuds gordiens – et même de coopérer pour un avantage mutuel.
Au cours des années qui ont suivi, l’idée qu’un président américain est complètement «libre de ses actes» s’est complètement dissipée. Il serait plutôt entre les mains du complexe de l’État-profond – et en particulier sa composante sécuritaire avec des services de renseignement et d’application de la loi profondément enracinés et extrêmement puissants. Le président Donald Trump, lui-même, appelle cette réalité «l’État profond».
Trump avec une grande gueule un gros bâton [vocal]
Il doit y avoir un équivalent sibérien à l’expression «Grand causeux, petit faiseux». S’il y en a, je peux presque l’entendre d’ici, venant du Kremlin, en réaction à la rhétorique de Trump, comme ses remarques du 23 mai dans une interview avec le journaliste Sharyl Attkisson :
« Que suis-je en train de faire ? Je me bats contre l’État profond. Je combat le marais… Si ça continue comme ça, j’ai une chance de détruire l’État profond. C’est un groupe de personnes vicieuses . C’est très mauvais pour notre pays. »
Trump n’a pas hésité à nommer les acteurs de l’État profond qu’il a dans le collimateur – l’ancien directeur du FBI James Comey, l’ancien directeur de la CIA, John Brennan, et l’ancien directeur du Renseignement national James Clapper, par exemple – mais, jusqu’à présent, il a évité de les attaquer de front. Il a même viré quelques-uns de ses partisans les plus proches, comme Devin Nunes, membre du la commission du Renseignement à la Chambre des représentants, lorsque ce dernier a essayé de saisir le ministère de la Justice à propos d’affaires criminelles.
Ainsi, il reste la question ouverte de savoir si Trump autorisera les différentes enquêtes en cours à proposer des inculpations. Ce n’est pas un jeu de société. Il s’agirait de décisions très graves, avec des conséquences difficiles à prévoir. S’il s’avère que le président n’est pas qu’un causeux et décide de les mettre en œuvre, ceux qu’il a étiquetés de «groupe vicieux» se battront bec et ongles.
Paix à ses cendres : le «piratage» russe du DNC, le Comité National du parti Démocrate, est mort
Trump pourrait agir cette fois parce qu’il est personnellement la cible de l’affaire Russiagate. Des preuves récemment révélées sont en sa faveur. Bien que la dernière preuve a été publiée il y a trois semaines et demie, la plupart des Américains ne savent pas que la pierre angulaire du Russiagate, l’accusation que la Russie a piratée les ordinateurs du Comité national démocrate, s’est effondrée. Toujours appauvrie en éléments de preuve, l’accusation est maintenant totalement dépourvue de preuves par le témoignage sous serment de l’expert technique, Shawn Henry, le chef de CrowdStrike. Il s’agit de la firme de cyber-sécurité, choisie et financée par la campagne Clinton et le DNC (avec la bénédiction de Comey), pour enquêter sur le soi-disant piratage russe.
Interrogé le 5 décembre 2017, à huis clos, par le président du comité du renseignement de la Chambre à l’époque des faits, Adam Schiff, pour fournir «la date à laquelle les Russes ont exfiltré [piraté] les données de la DNC», Henry a répondu, « … il y a des fois où nous pouvons voir des données exfiltrées, et affirmer de manière concluante. Mais dans ce cas … nous n’avons tout simplement pas les preuves qui indiquent que les données ont été piratées. «
Ce n’est que sous la pression extrême du directeur intérimaire du Renseignement national que Schiff, maintenant président du House Intelligence Committee, a rendu public le 7 mai 2020 la transcription du témoignage d’Henry le 5 décembre 2017. Les Démocrates savaient depuis plus de deux ans que le piratage russe était un mensonge mais ont continué à mentir.
Mais maintenant, nous savons. Mieux vaut tard que jamais, non ? Pas vraiment.
Si un arbre tombe dans la forêt…
Si le témoignage d’une bombe, comme celui d’Henry, n’est pas rapporté par le New York Times ou d’autres médias de l’establishment, comme c’est le cas depuis le 7 mai, qui peut entendre l’arbre tomber – ou la bombe exploser ? Combien d’Américains savent que la Maison Blanche a raison sur au moins une chose – que l’accusation selon laquelle la Russie a «piraté la DNC» n’est étayée par aucune preuve méritant d’être examinée de près ?
Je suppose qu’il est vrai que la plupart des Américains préféreraient ne pas le savoir, mais vous n’avez pas besoin d’un doctorat pour comprendre les conséquences inévitables de tout laisser passer avec un « Et alors ? »
Si le New York Times réussit à cacher les bombes, telles que le témoignage de Henry, il peut supprimer tout ce qu’il juge «impropre à imprimer». Faisons une expérience : faites une vidéo discussion avec quelques amis – de préférence ceux qui lisent encore le Times – et demandez leur s’ils savent qu’il n’y a aucune preuve concrète que les Russes, ou quelqu’un d’autre, ont piraté le DNC, puis regardez attentivement leur expression. S’ils envoient les hommes en blouse blanche frapper à votre porte, vous saurez pourquoi.
Le Times, bien sûr, vient de remporter un prix Pulitzer pour sa gamme d’articles contre la Russie. Pour ne pas être en reste, la conseillère à la sécurité nationale d’Obama, Susan Rice, a déclaré dimanche à Fox News qu’elle «ne serait pas surprise d’apprendre que les Russes fomentent et financent les extrémistes des deux côtés» des manifestations de protestation en cours aux États-Unis. Typiquement, Rice n’a cité aucune preuve, se contentant de dire : «D’après mon expérience, cela vient tout droit du manuel de jeu russe». [Susan Rice est bien placée pour le savoir elle qui a largement participé aux « révolutions de couleur » US, partout dans le monde, NdT]
Rice a dit à Fox : « Je ne lis pas les renseignements ces jours-ci. » Mais qui, je vous le demande, a besoin de renseignements lorsque vous avez le New York Times ? Elle a peut-être trouvé des conseils dans l’article de son journal du 10 mars, «La Russie essaie d’attiser les tensions raciales américaines avant les élections, disent les responsables.» Ou peut-être qu’elle était l’une des sources du Times pour cet article, ce qui équivaudrait à une approche de type ADM, comme en Irak, semblant provenir de plusieurs sources, mais venant toutes de la même, assez courante pour diffuser des « nouvelles » dans Washington.
Vous ne pouvez pas dire que nous n’avons pas été prévenus. Après tout, la présidente de la Chambre, Nancy Pelosi, a déclaré à Trump en octobre dernier « Tous les chemins mènent à Poutine ». Sans oublier la perspicacité d’un autre spécialiste, amateur de la Russie, le représentant Jason Crow (D-CO), qui affirme : « Vladimir Poutine se réveille chaque matin et se couche chaque nuit en essayant de trouver comment détruire la démocratie américaine. » Et ces avocats n’ont-ils pas témoigné de façon absurde devant le comité de mise en accusation présidé par Schiff : «Nous aurions mieux fait de combattre les Russes là-bas en Ukraine, comme ça nous n’aurions pas à les combattre ici». Alors que même au plus fort de la première guerre froide, personne n’avait sérieusement envisagé que les troupes soviétiques puissent envahir le sol américain.
«Les sales types» pour toujours
J’imagine que les responsables du Kremlin lisent le Times d’aussi prés que je lisais la Pravda à l’époque – pour discerner ce qui manque, ainsi que la signification de ce qui est imprimé. Les dirigeants russes sont évidemment conscients que le Times et la plupart des autres médias de l’establishment sont si profondément investis dans le «piratage» russe que la fausse histoire est tout simplement trop importante pour échouer. En outre, il s’est avéré trop facile de faire croire aux Américains qu’en fait, l’URSS existe toujours et qu’elle est dirigée par des «méchants diaboliques» obsédés par l’agression.
A présent, Poutine doit se rendre compte que c’est un travail de Sisyphe, d’essayer de dissocier la Russie d’aujourd’hui de l’Union soviétique. Il y a cinq ans, il a essayé la pédagogie. Le 16 avril 2015, il a fait allusion à cette période sombre, évoquant «la laideur du régime stalinien» et la réaction qui existe encore à ce jour. Il a concédé :
«Il est peut très désagréable de l’admettre. Mais en vérité, nous, ou plutôt nos prédécesseurs, ont tendu la bâton pour se faire battre. Pourquoi ? Parce qu’après la Seconde Guerre mondiale, nous avons essayé d’imposer notre propre modèle de développement à de nombreux pays d’Europe de l’Est, et nous l’avons fait par la force. Cela doit être admis. Il n’y a rien de bon en cela et nous en ressentons maintenant les conséquences. »
Il est probable que Poutine fait preuve d’un mélange de sang-froid et de scepticisme, alors qu’il observe les développements politiques aux États-Unis pour les mois à venir [et la question des traités de désarmement, NdT], dans le contexte de ce qu’il a vécu avec ses homologues américains ces dernières années.
Le tête-a-tête Obama-Poutine donne des résultats
Le 4 septembre 2013, la veille de l’arrivée d’Obama à Saint-Pétersbourg pour un sommet du G-20, Poutine, à la télévision et en direct, accusait le secrétaire d’État John Kerry d’avoir menti la veille lors d’un témoignage du Congrès sur la Syrie. Kerry avait continué de blâmer la Syrie pour l’attaque au sarin, minimisé le rôle d’al-Qaïda parmi les rebelles et exagéré la force des rebelles «modérés». Avec un franc-parler inhabituel, Poutine a déclaré que Kerry «ment, et il sait qu’il ment, c’est triste. »
Obama, lui aussi, était informé à l’époque que Kerry étirait la vérité bien au-delà du point de rupture. Le président le savait par les briefings du général Martin Dempsey, Chef d’État-major interarmes, par le directeur du Renseignement national, Clapper; et par nous, Veteran Intelligence Professionals for Sanity. Cela peut aider à expliquer pourquoi le président n’a pas demandé à Kerry de l’accompagner à Saint-Pétersbourg, pourquoi il a choisi de conclure personnellement l’accord avec Poutine, et pourquoi il a choisi de garder Kerry complètement dans le noir pendant cinq jours.
Lors d’une conférence de presse à Londres au début du 9 août 2013, Kerry avait été interrogé pour savoir si Assad pouvait faire quoi que ce soit pour empêcher une attaque américaine. Kerry a répondu avec dédain qu’Assad pourrait renoncer à ses armes chimiques, mais « il n’est pas sur le point de le faire, cela ne peut pas être fait. » Plus tard dans la journée, Kerry a reçu le mot du ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, l’informant qu’un tel accord allait être conclu – et était sur le point d’être annoncé.
Par une heureuse coïncidence, le même soir, j’ai eu une occasion inhabituelle au sommet du bâtiment de CNN à Washington de regarder des néocons comme Paul Wolfowitz et Joe Lieberman exprimer leur frustration à propos d’Obama «qui se dégonfle» et gaspille une occasion en or de faire entrer les États-Unis en guerre directe en Syrie . [Voir le sous-chapitre Morose à CNN dans « Comment la guerre en Syrie a déraillé. »]
Il se trouve qu’Obama était fier d’être allé à l’encontre des conseils de pratiquement tous ses conseillers pour empêcher le mastodonte, Moby-Dick, de se précipiter dans la guerre. Deux ans plus tard, lors d’une interview avec Jeffrey Goldberg de The Atlantic, Obama s’est vanté d’avoir pu défier ce qu’il a appelé « Le manuel de jeu de Washington » en annulant l’attaque contre la Syrie.
La confiance est l’exception, pas la règle
Poutine a dû apprendre à la dure que les circonstances de septembre 2013 étaient sui generis. Poutine a pu offrir à Obama un accord, qu’il ne pouvait pas refuser, pour le sortir d’une position très difficile. Sans que Kerry ou d’autres conseillers ne regardent par-dessus son épaule, Obama a pu profiter de l’offre malgré le désir de guerre qui prévalait – non seulement parmi les néocons, mais parmi les propres conseillers d’Obama.
Six jours seulement après sa rencontre fructueuse avec Obama, Poutine a donné un brillant espoir aux perspectives d’amélioration des relations avec Washington : « Mes relations de travail et personnelles avec le président Obama sont marquées par une confiance croissante », écrivait Poutine dans un éditorial du New York Times du 11 septembre 2013.
Le président russe se reposait sur ses lauriers d’avoir, d’abord obligé le président syrien Bachar al-Assad à accepter de rendre les armes chimiques de l’armée syrienne pour une destruction supervisée par l’ONU, ensuite personnellement persuadé Obama d’accepter, et enfin aidé à empêcher l’escalade militaire en Syrie que ni Poutine ni Obama ne voulaient. L’accord était tout à fait dans l’intérêt d’Obama, affalant les voiles de la plupart de ses conseillers, y compris Kerry, qui n’a rien fait pour cacher son désir d’une attaque américaine ouverte contre la Syrie.
Les forces américaines étaient en place. L’attaque planifiée serait «justifiée» en représailles à une attaque au gaz sarin près de Damas le 21 août 2013. Kerry a mené la charge contre le Syrien al-Assad, le blâmant à plusieurs reprises malgré les nombreuses preuves que l’attaque au sarin était un stratagème sous faux drapeau – que Kerry le sache ou non – conçu pour piéger Obama en ordonnant une frappe «shock and awe» sur Bagdad. [Damas ? , NdSF]
La réaction immédiate des responsables américains à cet éditorial du New York Times dans lequel Poutine parlait de la confiance réciproque des présidents Obama et lui-même, aurait dû amener tout le monde à perdre espoir. En effet, la réaction s’est révélée être un signe avant-coureur des choses à venir – prenant la forme d’un coup d’État parrainé par l’Occident en Ukraine, de sanctions et, bien sûr, du Russiagate.
Le sénateur Bob Menendez (D-NJ), alors président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, a parlé au nom de nombreux initiés de Washington en disant : «J’étais au dîner et j’avais presque envie de vomir.» [Pour en savoir plus sur ce sujet, voir «Rewarding Group Think on Syria» sur Consortium News]
Le chagrin des extrémistes face à l’opportunité manquée d’une guerre contre la Syrie ne s’est pas beaucoup dissipé au cours des années suivantes. Le sénateur Bob Corker, (R-TN), qui a succédé à Menendez comme président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, a été l’un des critiques les plus virulents de la décision d’Obama d’annuler l’attaque prévue contre la Syrie en 2013. Le 3 décembre 2014, Corker se plaignait amèrement que, alors que l’armée américaine était sur le point de lancer une opération « très ciblée et très brève » contre le gouvernement syrien pour avoir employé des armes chimiques, Obama a annulé l’attaque à la dernière minute.
La critique de Corker était cinglante :
«Je pense que le pire moment de la politique étrangère américaine depuis que je suis ici, pour montrer au monde où nous étions en tant que nation, a été il y a un an, lorsque nous avions une opération de dix heures préparée contre la Syrie, mais qu’elle ne s’est pas produite. … Essentiellement et – je suis désolé d’être un peu rhétorique – nous avons sauté sur les genoux de Poutine.»
Ça vous semble familier ?
Les événements de l’automne 2013 sont une étude de cas en soi. Poutine a tiré beaucoup de l’expérience unique de traiter personnellement avec un Obama dans le besoin. Poutine a ensuite découvert, à la suite de ses relations avec lui et Trump, qu’il devait réorganiser sa réflexion sur le pouvoir réel d’un président américain lorsqu’il s’agit d’affronter l’État de sécurité bien enraciné – même si le désir d’un président d’améliorer les relations est authentique.
Les médias sociaux comme «preuve»
Le président russe a compris, au fil des années, qu’Obama s’en remettrait d’ordinaire au «script de Washington» et à l’État profond. Et la plupart du temps Trump aussi.
Mais les néocons s’en sont pris à Poutine pour son rôle clé dans l’annulation de l’opération « shock and awe » contre Damas en réalisant un coup d’État à Kiev six mois plus tard, et lors de leur exploitation artificielle de la terrible perte de 298 vies dans la chute du MH17, blâmant les Russes sans aucune preuve convaincante.
Comme pour l’attaque au sarin de 2013 près de Damas, dans le cas du MH17, Kerry a souligné que les «médias sociaux» sont un «outil extraordinaire». Correct. Mais aussi utile pour le mensonge que pour la vérité. Les tentatives boiteuses de diverses personnes imaginatives – mais pas assez – dont beaucoup semblent être employées par les services de renseignement occidentaux pour faire valoir leur imagination en impliquant les «médias sociaux» dans l’affaire du MH17, sont transparentes pour tout observateur averti.
Alors qu’il continuait de blâmer les Russes, Kerry n’a jamais produit les preuves qu’il avait révélées à David Gregory de NBC, trois jours après la chute de l’avion. Voici ce que dit Kerry à Gregory le 20 juillet 2014 :
«Nous avons récupéré les images de ce lancement de missile. Nous connaissons la trajectoire. Nous savons d’où cela vient. Nous connaissons le timing. Et c’est exactement au moment où cet avion a disparu du radar. »
Rappelez-vous : à la suite du crash du MH17, les États-Unis ont réussi à faire pression sur de nombreux autres pays pour imposer des sanctions économiques à la Russie.
Accords au sommet contrecarrés
En Syrie, Poutine a été témoin de l’absence de yedinonachaliya [autorité personnelle décisionnaire] dans le système politique et militaire américain. À la demande de Poutine et d’Obama, Kerry et Lavrov ont travaillé très dur pendant onze mois pour organiser un cessez-le-feu. L’un a été signé le 9 septembre 2016. Le 17 septembre, des avions américains ont bombardé des positions fixes de l’armée syrienne tuant entre 64 et 84 soldats de l’armée syrienne, en blessant environ 100 autres, preuve suffisante pour convaincre les Russes que le Pentagone avait l’intention de saborder une coopération significative avec la Russie.
Voici Lavrov le 26 septembre :
«Mon bon ami John Kerry… fait l’objet de vives critiques de la part de la machine militaire américaine. Malgré le fait que, comme toujours, [ils] ont assuré que le commandant en chef des États-Unis, le président Barack Obama, l’avait soutenu dans ses contacts avec la Russie – il l’a confirmé lors de sa rencontre avec le président Vladimir Poutine – apparemment, l’armée n’a pas vraiment écouté le commandant en chef. … Il est difficile de travailler avec de tels partenaires. … »
Un mois plus tard, Poutine déplorait publiquement : « Mes accords personnels avec le président des États-Unis n’ont pas donné de résultats ». Poutine s’est plaint que « des gens à Washington prêts à tout faire pour empêcher la mise en œuvre de ces accords dans la pratique », et, se référant à la Syrie, a dénoncé l’absence d’un « front commun contre le terrorisme après des négociations aussi longues, des efforts énormes et des compromis difficiles. »
En résumé, les remarques du vice-ministre des Affaires étrangères Ryabkov, vendredi, suggèrent fortement qu’à ce stade, les dirigeants russes ne tiennent plus beaucoup compte des engagements de Washington – y compris ceux qui peuvent venir du président. Pour les prochains mois, au moins, Moscou sera dans une position passive, attendra et verra. Avec tant de travail mutuel à faire – en particulier sur la maîtrise des armements – c’est dommage.
Ray McGovern travaille avec Tell the Word, une publication de l’Église œcuménique du Sauveur dans le centre-ville de Washington. Au cours de ses 27 ans à la CIA, il a été chef du Service de la politique étrangère soviétique, et conseiller présidentiel. À la retraite, il a cofondé Veterans Intelligence Professionals for Sanity (VIPS).
Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone
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