La catastrophe du coronavirus : retour à la guerre biologique ?

La catastrophe du coronavirus : retour à la guerre biologique ?

Par Ron Unz − Le 21 avril 2020 − Source Unz Review

Ron UnzPrès de 30 000 Américains sont morts du coronavirus au cours des deux dernières semaines [80 000 au 10 mai, NdT], et selon certaines estimations, il s’agit d’un sous-dénombrement important, tandis que le nombre de morts continue d’augmenter rapidement. Pendant ce temps, des mesures pour contrôler la propagation de cette infection mortelle ont déjà coûté leurs emplois à 22 millions d’Américains, un effondrement économique sans précédent qui a poussé nos taux de chômage au niveau de la Grande dépression des années 30. Notre pays fait face à une crise aussi grave que presque toutes les autres dans notre histoire nationale.

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Pendant de nombreuses semaines, le président Trump et ses alliés politiques ont régulièrement écarté ou minimisé cette terrible menace pour la santé et, soudain, face à une catastrophe aussi manifeste, ils ont naturellement commencé à chercher d’autres coupables à blâmer.

Le choix évident est la Chine, où l’épidémie mondiale a commencé à la fin de 2019. Durant ces quinze derniers jours, nos médias ont été de plus en plus remplis d’accusations affirmant que la malhonnêteté et l’incompétence du gouvernement chinois ont joué un rôle majeur dans notre propre catastrophe sanitaire.

Des reproches encore plus graves sont également prononcés, de hauts responsables gouvernementaux informent les médias qu’ils soupçonnent que le virus de la Covid-19 a été développé dans un laboratoire chinois à Wuhan, puis relâché sans précaution dans un monde vulnérable. De telles «théories du complot» étaient autrefois confinées à la frange politique extrême d’Internet, mais elles se trouvent maintenant dans les pages respectables de mes lectures matinales, le New York Times et le Wall Street Journal.

Plausibles ou non, ces accusations ont les implications internationales les plus graves, et certains exigent en plus que la Chine compense financièrement notre pays pour les milliards de dollars de pertes économiques. Une nouvelle guerre froide mondiale sur les plans politique et économique pourrait bientôt éclore.

Je n’ai aucune expertise personnelle dans la technologie de la guerre biologique, ni accès aux rapports des services secrets américains qui semblent avoir été pris au sérieux par nos journaux nationaux les plus élitistes. Mais je pense qu’une analyse minutieuse des affrontements sino-américains antérieurs au cours des deux dernières décennies peut fournir un aperçu utile de la crédibilité relative de ces deux gouvernements ainsi que celle de nos propres médias.

À la fin des années 1990, l’Amérique a semblé atteindre le sommet de sa puissance et de sa prospérité mondiales, se prélassant au lendemain de sa victoire historique qui a mis fin à la longue Guerre froide, tandis que les Américains ordinaires ont grandement profité de l’expansion économique record de cette décennie. L’énorme boom technologique était à son apogée, et le terrorisme islamique semblait une chose vague et distante, presque entièrement réservée aux scénarios des films hollywoodiens. Avec l’effondrement de l’Union soviétique, la possibilité d’une guerre à grande échelle semblait s’être dissipée, de sorte que les dirigeants politiques se vantaient des «dividende de la paix», dont les citoyens commençaient à jouir alors que nos énormes forces militaires, constituées pendant près d’un demi-siècle, étaient réduites par des coupes sombres dans le budget monstrueux de la défense. L’Amérique revenait enfin à une économie régulière en temps de paix, avec des avantages apparents pour tout le monde.

À l’époque, j’étais extrêmement concentré sur les questions de politique intérieure, je n’ai donc prêté qu’une attention distraite à notre seule petite opération militaire de cette période, la guerre aérienne de l’OTAN contre la Serbie en 1999, destinée à protéger les Albanais du Kosovo du nettoyage ethnique et du massacre, un projet de l’administration Clinton que j’avais entièrement approuvé à l’époque.

Bien que notre campagne limitée de bombardement ait semblé assez fructueuse pour forcer les Serbes à la table de négociation, la courte guerre a connu un incident très embarrassant. L’utilisation d’anciennes cartes a provoqué une erreur de ciblage qui a, accidentellement, frappé l’ambassade de Chine à Belgrade, avec une bombe « intelligente », tuant trois membres de sa délégation et en blessant des dizaines d’autres. Les Chinois ont été scandalisés par cet incident, et leurs organes de propagande ont commencé à affirmer que l’attaque avait été délibérée, une accusation téméraire qui n’avait logiquement aucun sens.

À cette époque, je regardais l’émission PBS Newshour tous les soirs, et j’ai été choqué de voir l’ambassadeur des États-Unis relever ces accusations absurdes avec l’hôte Jim Lehrer, dont l’incrédulité correspondait à la mienne. Mais quand j’ai considéré que le gouvernement chinois niait encore obstinément la réalité du massacre des étudiants protestataires sur la place Tian’anmen, une décennie plus tôt, j’en ai conclu qu’un comportement déraisonnable de la part des responsables de la République Populaire de Chine (RPC) était prévisible. En effet, il y avait même des spéculations que la Chine exploitait cyniquement le malheureux accident pour des raisons domestiques, espérant attiser l’anti-américanisme chauvin dans le peuple chinois pour tenter enfin de panser les blessures sociales de l’outrage de 1989 [Tian’anmen].

Telles étaient du moins mes réflexions à ce sujet il y a plus de deux décennies. Mais dans les années qui ont suivi, ma compréhension du monde, et de nombreux événements charnières de l’histoire moderne, ont connu des transformations radicales que j’ai décrites dans ma série American Pravda. Et certaines de mes hypothèses des années 90 en faisaient partie.

Prenons, par exemple, le massacre de la place Tian’anmen, qui, chaque 4 juin, fait toujours l’objet d’une vague annuelle de condamnations sévères dans les pages d’actualités et d’opinion de nos principaux journaux nationaux. Je n’avais jamais douté de ces faits à l’origine, mais il y a un an ou deux, je suis tombé sur un court article du journaliste Jay Matthews intitulé « Le mythe de Tian’anmen » qui a complètement bouleversé cette réalité apparente.

Selon Matthews, le tristement célèbre massacre ne s’est probablement jamais produit, et n’était qu’un artefact médiatique produit par des journalistes occidentaux confus et une propagande malhonnête, une croyance erronée qui avait rapidement été intégrée dans notre histoire médiatique standard, répétée à l’infini par tant de journalistes ignorants qu’ils ont tous finalement cru que c’était vrai. Au lieu de cela, pour rester aussi près que possible des faits, les étudiants protestataires avaient tous quitté la place Tiananmen pacifiquement, tout comme le gouvernement chinois l’avait toujours dit. En effet, des journaux de premier plan tels que le New York Times et le Washington Post ont parfois reconnu ces faits au fil des années, mais ont généralement enfoui ces maigres reconnaissances si profondément dans leurs histoires que peu de personnes l’ont jamais remarqué. Pendant ce temps, la plupart des médias grand public avaient gobé le canular.

Matthews lui-même était chef du bureau du Washington Post à Pékin, couvrant personnellement les manifestations à l’époque, et son article a été publié dans la Columbia Journalism Review, le site US le plus prestigieux pour la critique des médias. Cette analyse, faisant autorité, contenait des conclusions explosives qui furent publiées pour la première fois en 1998, et je trouve difficile de croire que de nombreux journalistes ou rédacteurs couvrant la Chine sont restés ignorants de ces informations, mais l’impact a été absolument nul. Pendant plus de vingt ans, pratiquement tous les comptes rendus des médias grand public que j’ai lus ont continué à promouvoir le canular du massacre de la place Tian’anmen, généralement implicitement, mais parfois explicitement.

Encore plus remarquables ont été les découvertes que j’ai faites concernant notre bombardement soi-disant accidentel de l’ambassade de Chine en Serbie, en 1999. Peu de temps après le lancement de ce site web, j’ai intégré l’ancien contributeur d’Asia Times Peter Lee en tant que chroniqueur, incorporant les archives de son blog China Matters qui s’étalaient sur une décennie. Il a rapidement publié un article sur le bombardement de l’ambassade de Belgrade, représentant une compilation de documents déjà contenus dans une demi-douzaine d’articles qu’il avait écrits à ce sujet à partir de 2007. À ma grande surprise, il a fourni de nombreuses preuves convaincantes que l’attaque américaine contre l’ambassade de Chine avait bien été délibérée, comme la Chine l’avait toujours prétendu.

Selon Lee, Pékin avait autorisé son ambassade comme site de sécurisation des installations de transmission radio de l’armée serbe, dont le réseau de communication était la principale cible des frappes aériennes de l’OTAN. Pendant ce temps, les défenses aériennes serbes avaient abattu un chasseur américain avancé F-117A, dont la technologie était un secret militaire américain crucial. Des portions de cette épave extrêmement précieuse ont été soigneusement rassemblées par les Serbes reconnaissants, qui les ont livrées aux Chinois pour un stockage temporaire à leur ambassade avant de les transférer chez eux. Cette acquisition technologique vitale a ensuite permis à la Chine de déployer son propre chasseur furtif J20 au début de 2011, beaucoup plus tôt que les analystes militaires américains ne l’avaient cru possible.

Sur la base de cette analyse, Lee a fait valoir que l’ambassade de Chine avait été attaquée afin de détruire les installations militaires serbes de retransmission qui s’y trouvaient, tout en punissant les Chinois pour avoir autorisé une telle utilisation. Il y avait également des rumeurs répandues en Chine selon lesquelles un autre motif avait été la tentative infructueuse de détruire les débris de l’avion furtif stockés à l’intérieur. Des témoignages ultérieurs du Congrès ont révélé que parmi les centaines de frappes aériennes de l’OTAN, l’attaque contre l’ambassade de Chine était la seule directement demandée par la CIA, un détail hautement suspect.

Je connaissais peu le travail de Lee et, dans des circonstances normales, j’aurais été très prudent avant d’accepter ses remarquables revendications qui allaient à l’encontre de la position universellement partagée par tous nos médias d’élite. Mais les sources qu’il a citées ont complètement changé cet équilibre.

Bien que les médias américains dominent le monde anglophone, de nombreuses publications britanniques ont également une solide réputation internationale et, comme elles sont souvent beaucoup moins liées à notre propre État de sécurité nationale, elles ont parfois couvert des histoires importantes qui ont été ignorées ici. Ainsi, le Sunday Observer a publié un remarquable exposé en octobre 1999, citant plusieurs sources militaires et de renseignement de l’OTAN qui ont pleinement confirmé la nature délibérée du bombardement américain de l’ambassade de Chine, un colonel américain se vantant même que sa bombe intelligente avait frappé exactement l’endroit prévu dans les locaux de l’ambassade.

Cette histoire importante a été immédiatement résumée dans The Guardian, une publication sœur, et également couverte par le rival Times of London et de nombreuses autres publications parmi les plus prestigieuses du monde, mais ont rencontré un mur de silence absolu dans notre propre pays. Une telle divergence bizarre sur une histoire d’importance stratégique mondiale – une attaque délibérée et meurtrière, menée par les États-Unis, contre le territoire diplomatique chinois – a attiré l’attention de FAIR, un important groupe de surveillance des médias américains, qui a publié une critique initiale et a ensuite suivi l’affaire. Ces deux articles résumaient efficacement à la fois les preuves accablantes des faits et également la forte couverture internationale, tout en rapportant les faibles excuses avancées par les meilleurs éditeurs américains pour expliquer leur silence continu. Sur la base de ces articles, j’estime que l’affaire est réglée.

Peu d’Américains se souviennent de notre attaque de 1999 contre l’ambassade de Chine à Belgrade, et sans l’agitation annuelle d’un drapeau sanglant chaque 4 juin par nos médias ignorants et malhonnêtes, le «massacre de la place Tian’anmen» aurait également disparu depuis longtemps de la mémoire. Aucun de ces événements n’a aujourd’hui beaucoup d’importance directe, du moins pour nos propres citoyens aux États-Unis. Mais les implications médiatiques plus larges de ces exemples semblent assez importantes.

Ces incidents ont représenté les deux occasions de clash les plus graves entre les gouvernements chinois et américain au cours des trente dernières années. Dans les deux cas, les affirmations du gouvernement chinois étaient tout à fait exactes, bien qu’elles aient été rejetées par nos dirigeants politiques et ignorées ou ridiculisées par pratiquement tous nos médias traditionnels. De plus, en quelques mois, ou en un an, les faits réels ont été connus de nombreux journalistes, et ont même été rapportés dans des lieux tout à fait respectables. Mais cette réalité a été complètement ignorée et supprimée pendant des décennies, de sorte qu’aujourd’hui presque aucun Américain, dont les informations proviennent de nos médias réguliers, n’en serait même conscient. En effet, comme de nombreux jeunes journalistes tirent leur connaissance de ces mêmes sources médiatiques d’élite, je soupçonne que beaucoup d’entre eux n’ont jamais appris ce que leurs prédécesseurs savaient mais n’osaient pas mentionner.

La plupart des principaux médias chinois appartiennent, ou sont contrôlés par, le gouvernement chinois, et ils ont tendance à suivre largement la ligne du gouvernement. Les principaux médias américains ont une structure de propriété privée et se vantent souvent de leur féroce indépendance ; mais sur de nombreuses questions cruciales, je pense que la réalité n’est pas très différente de celle de la Chine.

J’ai tendance à douter que les dirigeants chinois aient un engagement important envers la vérité, et les raisons de leur plus grande véracité sont probablement d’ordre pratique. Les actualités et les divertissements américains dominent complètement le paysage médiatique mondial et ne font face à aucun rival national important dans le domaine de la communication. La Chine reconnaît donc qu’elle est largement surpassée dans tout conflit de propagande et que le parti, de beaucoup le plus faible, doit nécessairement essayer de se rapprocher de la vérité, de peur que ses mensonges ne soient immédiatement révélés. Pendant ce temps, le contrôle écrasant des États-Unis sur les informations mondiales peut inspirer beaucoup d’orgueil, le gouvernement faisant parfois la promotion des mensonges les plus scandaleux et les plus ridicules avec l’assurance que les médias américains favorable couvriront toutes ses affirmations – même erronées ou mensongères.

Ces considérations doivent être gardées à l’esprit alors que nous tentons de passer au crible les récits de nos médias souvent peu fiables et malhonnêtes dans l’espoir d’extraire les véritables circonstances de l’épidémie actuelle de coronavirus. Contrairement à des études historiques minutieuses, nous travaillons en temps réel et notre analyse est fortement entravée par le brouillard de la guerre en cours, de sorte que toute conclusion est nécessairement très précaire. Mais étant donné les enjeux élevés, une telle tentative semble justifiée.

Lorsque mes journaux du matin ont commencé à mentionner l’apparition d’une mystérieuse nouvelle maladie en Chine à la mi-janvier, je n’y ai prêté que peu d’attention, absorbé que j’étais au lendemain de l’assassinat inattendu du chef militaire iranien et de la dangereuse possibilité d’un autre Guerre au Moyen-Orient. Mais les rapports ont persisté et augmenté, avec des décès et des preuves de plus en plus nombreuses que la maladie virale pourrait être transmise entre humains. Les premiers efforts conventionnels de la Chine n’ont pas réussi à enrayer la propagation de la maladie.

Puis, le 23 janvier et après seulement 17 morts, le gouvernement chinois a pris la mesure étonnante de confiner en quarantaine l’ensemble des 11 millions d’habitants de la ville de Wuhan, une affaire qui a attiré l’attention du monde entier. Ils ont rapidement étendu cette politique aux 60 millions de Chinois de la province du Hubei, et très peu de temps après ont arrêté toute leur économie nationale et confiné 700 millions de Chinois chez eux, une mesure de santé publique probablement mille fois plus importante que tout ce qui avait été entrepris auparavant dans l’histoire de l’humanité. Donc, soit les dirigeants chinois étaient soudain devenus fous, soit ils considéraient ce nouveau virus comme une menace nationale absolument mortelle, qui devait être contrôlée à tout prix.

Compte tenu de ces actions chinoises dramatiques et des manchettes internationales qu’elles ont générées, les accusations actuelles des responsables de l’administration Trump selon lesquelles la Chine a tenté de minimiser ou de cacher la gravité de l’épidémie est si ridicule qu’elle défie toute raison. En tout état de cause, le dossier montre que le 31 décembre, les Chinois avaient déjà alerté l’Organisation mondiale de la santé de l’existence de l’étrange nouvelle maladie, et les scientifiques chinois ont publié l’intégralité du génome du virus le 12 janvier, permettant la réalisation de tests diagnostiques dans le monde entier.

Contrairement à d’autres pays, la Chine n’a reçu aucun avertissement préalable sur la nature ou l’existence de la nouvelle maladie mortelle et se heurtait donc à des obstacles inédits. Mais leur gouvernement a mis en œuvre des mesures de contrôle de la santé publique sans précédent dans l’histoire du monde et a réussi à éradiquer presque complètement la maladie avec seulement la perte de quelques milliers de vies. Pendant ce temps, de nombreux autres pays occidentaux tels que les États-Unis, l’Italie, l’Espagne, la France et la Grande-Bretagne ont traîné les pieds pendant des mois et ont ignoré la menace potentielle, ce qui, en conséquence, a maintenant fait plus de 100 000 morts, avec un bilan en augmentation rapide. Pour l’une quelconque de ces nations ou leurs organes médiatiques, critiquer la Chine pour son inefficacité ou sa réponse trop lente est une inversion absolument obscène de la réalité.

Certains gouvernements ont pleinement profité de l’alerte rapide et des informations scientifiques fournies par la Chine. Bien que les pays voisins d’Asie de l’Est, tels que la Corée du Sud, le Japon, Taïwan et Singapour aient été les plus à risque et parmi les premiers infectés, leurs réponses compétentes et énergiques leur ont permis d’éviter une épidémie majeure, et ils ont connu un minimum de décès. Mais l’Amérique et plusieurs pays européens n’ont pas adopté ces mêmes mesures précoces telles que des tests généralisés, la quarantaine et le traçage des contacts, et ont payé un prix terrible pour leur négligence.

Il y a quelques semaines, le Premier ministre britannique Boris Johnson a déclaré avec audace que sa propre stratégie contre la maladie en Grande-Bretagne était basée sur la réalisation rapide d’une «immunité collective» – consistant à laisser infecter la majorité de ses citoyens – puis a rapidement reculé après que ses conseillers désespérés aient reconnu que cela pourrait entraîner un million ou plus de morts britanniques.

Selon toute mesure objective, la réponse de la Chine, et de la plupart des pays d’Asie de l’Est, à cette crise sanitaire mondiale a été absolument exemplaire, tandis que celle de nombreux pays occidentaux a été tout aussi désastreuse. Le maintien d’une santé publique efficace est un devoir fondamentale des gouvernements depuis l’époque des cités-États sumériennes. L’incompétence totale de l’Amérique et de la plupart de ses vassaux européens est à couper le souffle. Si les médias occidentaux tentent de prétendre le contraire, ils perdront définitivement le peu de crédibilité internationale qui leur reste.

Je ne pense pas que ces faits particuliers soient très contestés, sauf parmi les partisans les plus aveugles, et l’administration Trump reconnaît probablement l’inutilité d’en discuter. Cela explique probablement son récent virage vers un récit beaucoup plus explosif et controversé, à savoir affirmer que la Covid-19 pourrait être le produit de recherches chinoises sur des virus mortels, dans un laboratoire de Wuhan, ce qui suggère que le sang de centaines de milliers ou de millions de victimes du monde entier sera sur les mains des Chinois. Ces accusations dramatiques, soutenues par la puissance écrasante des médias internationaux, peuvent résonner profondément à travers le monde.

Les informations parues dans le Wall Street Journal et le New York Times sont raisonnablement consistantes. De hauts responsables de l’administration Trump ont désigné le Wuhan Institute of Virology, un important biolab chinois, comme la source possible de l’infection, le virus mortel ayant été accidentellement libéré, se propageant d’abord dans toute la Chine puis dans le monde entier. Trump lui-même a exprimé publiquement des soupçons similaires, tout comme le secrétaire d’État et ancien directeur de la CIA, Mike Pompeo, dans une interview à FoxNews. Des poursuites, par des personnes privées, contre la Chine réclamant plusieurs milliards de dollars ont déjà été entamées par des militants de droite, et les sénateurs républicains Tom Cotton et Lindsey Graham ont soulevé des demandes similaires auprès du gouvernement.

Je n’ai évidemment aucun accès personnel aux rapports de renseignement classifiés qui ont été à la base de ces accusations de Trump, Pompeo et d’autres hauts responsables de l’administration. Mais en lisant ces récents articles, j’ai remarqué quelque chose d’assez étrange.

En janvier, peu d’Américains accordaient beaucoup d’attention aux premiers rapports d’une épidémie inhabituelle dans la ville chinoise de Wuhan, qui n’était guère un nom familier. Au lieu de cela, une attention politique écrasante s’est concentrée sur la bataille autour de la destitution de Trump et les conséquences de notre dangereuse confrontation militaire avec l’Iran. Mais vers la fin de ce mois, j’ai découvert que les marges d’Internet étaient inondées d’affirmations selon lesquelles la maladie était causée par une arme biologique chinoise libérée accidentellement de ce même laboratoire de Wuhan, ces affirmations émanaient de l’ancien conseiller de Trump Steve Bannon et de ZeroHedge, un site web de droite, conspirationniste et populaire, jouant un rôle de premier plan dans l’avancement de la théorie. En effet, les histoires se sont disséminées si largement dans ces cercles idéologiques que le sénateur Tom Cotton, un néocon républicain de premier plan, a commencé à les promouvoir sur Twitter et FoxNews, provoquant ainsi un article dans le NYT sur ces «théories du complot marginales».

Je soupçonne qu’il n’est peut être pas purement fortuit que les théories sur la guerre biologique qui ont prospéré de manière si concertée, sur de petits sites web politisés et des comptes des médias sociaux, en janvier, correspondent si étroitement à celles maintenant publiquement défendues par les hauts responsables de l’administration Trump, et supposément basées sur les sources de renseignement les plus sécurisées. Peut-être que quelques citoyens-activistes intrépides et fauchés sont arrivés aux mêmes conclusions que notre appareil de renseignement de plusieurs milliards de dollars, et l’ont fait en quelques jours, alors que ce dernier a mis des semaines ou des mois. Mais un scénario plus probable est que la vague de spéculation de janvier a été provoquée par des fuites privées et des «indications» fournies par exactement les mêmes éléments qui, aujourd’hui, publient urbi et orbi des accusations similaires dans les médias d’élite. Initialement, la promotion de théories controversées dans des médias moins traditionnels a toujours été une pratique assez standard des services de renseignements.

Quelle que soit l’origine de l’idée, cela paraît-il  plausible que l’épidémie de coronavirus ait pu provenir d’une fuite accidentelle de ce laboratoire chinois ? Je ne suis pas au courant des procédures de sécurité des installations du gouvernement chinois, mais appliquer un peu de bon sens peut éclairer cette question.

Bien que le coronavirus ne soit que modérément mortel, ayant apparemment un taux de mortalité de 1% ou moins, il est extrêmement contagieux, y compris pendant une période pré-symptomatique prolongée et également parmi les porteurs asymptomatiques. Ainsi, certaines parties des États-Unis et de l’Europe subissent désormais de lourdes pertes, tandis que les politiques adoptées pour contrôler la propagation ont dévasté leurs économies nationales. Bien qu’il soit peu probable que le virus tue plus qu’une petite fraction de notre population, nous avons constaté avec consternation qu’une épidémie majeure peut facilement détruire toute notre vie économique.

En janvier, les journalistes qui ont rendu compte de la crise sanitaire croissante de la Chine ont régulièrement souligné que la mystérieuse nouvelle épidémie virale s’était produite au pire endroit et au pire moment, apparaissant dans la principale plateforme de transport de Wuhan, juste avant les vacances du Nouvel An lunaire, lorsque des centaines de millions de Chinois se rendent normalement dans leurs foyers éloignés pour la célébration, ce qui pourrait propager la maladie dans toutes les régions du pays et provoquer une épidémie permanente et incontrôlable. Le gouvernement chinois a évité ce cataclysme en prenant la décision, sans précédent, de fermer l’ensemble de son économie nationale et de confiner 700 millions de Chinois chez eux pendant de nombreuses semaines. Mais la catastrophe semble avoir été très proche, car si Wuhan était resté ouvert pendant quelques jours de plus, la Chine aurait facilement souffert d’une dévastation économique et sociale à long terme.

Le moment d’une libération accidentelle en laboratoire serait évidemment entièrement aléatoire. Pourtant, l’épidémie semble avoir commencé au cours de la période précisément la plus susceptible d’endommager la Chine, la pire fenêtre possible de dix ou peut-être trente jours. Comme je l’ai noté en janvier, je n’ai vu aucune preuve solide que le coronavirus était une arme biologique, mais si c’était le cas, le moment de la diffusion n’aurait certainement pas été accidentel.

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Croissance du PIB par habitant

Si le virus était libéré intentionnellement, le contexte et le motif d’une telle attaque de guerre biologique contre la Chine ne pourraient pas être plus évidents. Bien que nos médias malhonnêtes continuent de prétendre le contraire, la taille de l’économie chinoise a dépassé la nôtre depuis plusieurs années et a continué de croître beaucoup plus rapidement. Les entreprises chinoises ont également pris les devants dans plusieurs technologies cruciales, Huawei devenant le premier fabricant mondial d’équipements de télécommunications et dominant l’important marché de la 5G. La vaste initiative de la Chine avec la Ceinture et la Route de la soie menace de réorienter le commerce mondial autour d’un vaste territoire eurasien interconnecté, diminuant considérablement l’intérêt du contrôle américain sur les mers. J’ai suivi de près la Chine depuis plus de quarante ans et les tendances n’ont jamais été aussi apparentes. En 2012, j’ai publié un article portant le titre provocateur «China’s Rise, America’s Fall ?» et depuis lors, je n’ai vu aucune raison de réévaluer mon verdict.

Pendant trois générations après la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Amérique était restée la puissance économique et technologique suprême du monde, et après l’effondrement de l’Union soviétique, elle restait la seule superpuissance, sans rival militaire concevable. Le sentiment croissant que nous perdions rapidement cette position incontestée avait certainement inspiré la rhétorique anti-chinoise de nombreuses personnalités de l’administration Trump qui a lancé une grande guerre commerciale peu après son entrée en fonction. La misère croissante et l’appauvrissement continu d’une grande partie de la population américaine poussent les électeurs à rechercher un bouc émissaire pratique, et les Chinois de plus en plus prospères sont une cible parfaite.

Malgré le conflit économique croissant des États-Unis avec la Chine au cours des deux dernières années, je n’avais jamais envisagé la possibilité que les choses prennent une tournure militaire. Les Chinois avaient depuis longtemps déployé des missiles avancés à portée intermédiaire qui, selon beaucoup de monde, pouvaient facilement couler les porte-avions dans la région, et ils avaient aussi amélioré leur dissuasion militaire conventionnelle, en général. De plus, la Chine est en assez bons termes avec la Russie, qui est elle-même la cible d’une intense hostilité américaine depuis plusieurs années. La nouvelle série de missiles hypersoniques révolutionnaires de la Russie avait considérablement réduit l’avantage stratégique américain [d’envisager une première frappe nucléaire]. Ainsi, une guerre conventionnelle contre la Chine semblait être une entreprise absolument sans espoir, tandis que des hommes d’affaires et des ingénieurs chinois exceptionnellement compétents gagnaient progressivement du terrain contre le système économique américain en déclin et fortement financiarisé.

Dans ces circonstances difficiles, une attaque de guerre biologique américaine contre la Chine aurait pu sembler la seule carte à jouer dans l’espoir de maintenir la suprématie américaine. Un déni plausible minimiserait le risque de représailles chinoises directes et, s’il réussissait, le coup terrible infligé à l’économie chinoise la ralentirait pendant de nombreuses années, voire déstabiliserait son système social et politique. L’utilisation des médias, d’élite ou alternatifs, pour promouvoir immédiatement les théories selon lesquelles l’épidémie de coronavirus était le résultat d’une fuite d’un laboratoire de guerre biologique chinois était un moyen naturel de prévenir toutes les accusations chinoises ultérieures dans le même sens, permettant ainsi à l’Amérique de gagner la guerre de propagande internationale avant même que la Chine n’ait commencé à jouer.

La décision, prise par des éléments de notre établissement de sécurité nationale, de mener une guerre biologique dans l’espoir de maintenir le pouvoir mondial américain aurait certainement été un acte extrêmement imprudent, mais l’imprudence extrême est devenue un aspect naturel du comportement américain depuis 2001, encore plus sous l’administration Trump. Il y a un an, nous avions kidnappé la fille du fondateur et président de Huawei, qui était également directeur financier, et classée parmi les plus hauts dirigeants chinois, tandis qu’au début du mois de janvier, nous avons brutalement assassiné un chef militaire iranien important.

Telles sont les pensées qui me sont venues à l’esprit au cours de la dernière semaine de janvier, une fois que j’ai découvert les théories largement répandues suggérant que l’épidémie massive de maladies en Chine avait été la conséquence auto-infligée de ses propres recherches sur la guerre biologique. Je n’ai vu aucune preuve solide que le coronavirus était une arme biologique, mais si c’était le cas, la Chine était sûrement la victime innocente de l’attaque, vraisemblablement menée par des éléments de l’establishment américain de la sécurité nationale.

Peu de temps après, quelqu’un a attiré mon attention sur un très long article d’un expatrié américain vivant en Chine qui se faisait appeler «Metallicman» et avait un large éventail de croyances excentriques et invraisemblables. Je sais depuis longtemps que des individus pas nets peuvent souvent servir de sources d’informations importantes autrement indisponibles, et ce cas en est un parfait exemple. Son article dénonçait l’épidémie comme une probable attaque de guerre biologique américaine et fournissait un grand nombre de données factuelles que je n’avais pas envisagées auparavant. Depuis qu’il a autorisé la republication, je l’ai fait, et son analyse de 15 000 mots [à titre de comparaison, l’article que vous lisez contient 8 000 mots, NdT], bien que quelque peu brute et non lustrée, a commencé à attirer une énorme quantité de lecteurs sur notre site web, car étant probablement l’un des tout premiers articles en anglais à suggérer que la mystérieuse nouvelle maladie était une arme biologique américaine. Beaucoup de ses arguments m’ont paru douteux, ou ont été invalidés par des développements ultérieurs, mais plusieurs semblaient assez révélateurs.

Il y explique qu’au cours des deux années précédentes, l’économie chinoise avait déjà subi de graves coups d’autres mystérieuses nouvelles maladies, bien que celles-ci aient ciblé des animaux d’élevage plutôt que les humains. En 2018, un nouveau virus de la grippe aviaire a balayé le pays, détruisant une grande partie de l’industrie de la volaille en Chine, et en 2019, l’épidémie virale de grippe porcine a dévasté les élevages de porcs en Chine, détruisant 40% de la principale source nationale de viande du pays, avec des affirmations largement répandues selon lesquelles cette dernière maladie se propageait par de mystérieux petits drones. Mes journaux du matin relataient à peine ces affaires importantes, notant que l’effondrement soudain d’une grande partie de la production alimentaire intérieure de la Chine pourrait être une aubaine énorme pour les exportations agricoles américaines au plus fort du conflit commercial, mais je n’avais jamais examiné les implications évidentes. Ainsi, pendant trois années consécutives, la Chine a été gravement touchée par d’étranges nouvelles maladies virales, bien que seules les plus récentes aient été mortelles pour l’homme. Ces preuves étaient simplement circonstancielles, mais le schéma semblait très suspect.

L’auteur y note également que peu avant l’épidémie de coronavirus à Wuhan, cette ville avait accueilli 300 officiers militaires américains en visite, venus participer aux Jeux mondiaux militaires de 2019, une coïncidence absolument remarquable. Comme je l’ai souligné à l’époque, comment les Américains réagiraient-ils si 300 officiers militaires chinois avaient effectué une visite prolongée à Chicago et que peu de temps après une épidémie mystérieuse et meurtrière avait soudainement éclaté dans cette ville ? Une fois de plus, la preuve était simplement circonstancielle mais aurait certainement soulevé de sinistres soupçons.

L’enquête scientifique sur le coronavirus avait déjà montré ses origines dans un virus de chauve-souris, ce qui a conduit à une spéculation largement répandue dans les médias selon laquelle les chauves-souris vendues comme nourriture sur les marchés libres de Wuhan étaient le vecteur d’origine de la maladie. Pendant ce temps, les vagues orchestrées d’accusations anti-chinoises avaient mis l’accent sur les recherches chinoises en laboratoire sur cette même source virale. Mais nous avons rapidement publié un long article de la journaliste d’investigation Whitney Webb fournissant de nombreuses preuves des énormes efforts de recherche des États-Unis en matière de guerre biologique, qui se concentraient depuis des années sur les virus de chauves-souris. Webb était alors associée à MintPress News, mais cette publication avait étrangement refusé de publier son article important, peut-être stressée par les graves soupçons qu’elle adressait au gouvernement américain sur une question aussi capitale. Ainsi, sans le bénéfice de notre plateforme, sa contribution majeure au débat public n’aurait attiré que peu de lecteurs.

À peu près à la même époque, j’ai remarqué une autre coïncidence extrêmement étrange qui n’a suscité aucun intérêt de la part de nos somnolents médias nationaux. Bien que son nom n’ait rien signifié pour moi, fin janvier, mes journaux du matin contenaient des articles importants sur l’arrestation soudaine du professeur Charles Lieber, l’un des meilleurs scientifiques de l’Université de Harvard et président de son département de chimie, parfois qualifié de futur lauréat du prix Nobel.

Les circonstances de cette affaire m’ont paru tout à fait bizarres. Comme de nombreux autres universitaires américains éminents, Lieber avait eu des décennies de liens de recherche étroits avec la Chine, échangeant des rencontres et recevant un financement substantiel pour son travail. Mais maintenant, il a été accusé de divulgation non autorisée de rapports financiers concernant  des activités subventionnées par le gouvernement – le type d’infraction le plus obscur – et sur la base de ces accusations, il a été saisi par le FBI lors d’une descente matinale à son domicile dans la banlieue de Lexington, menotté, risquant des années en prison fédérale.

Une telle action du gouvernement contre un universitaire semblait presque sans précédent. Au plus fort de la guerre froide, de nombreux scientifiques et techniciens américains ont été légitimement accusés d’avoir volé nos secrets nucléaires pour les livrer à Staline, mais je n’avais jamais entendu parler de l’un d’eux traité d’une manière aussi sévère, sans parler d’un savant de la stature de Lieber, qui était simplement accusé de divulgation technique non autorisée de rapport financier. En effet, cet incident rappelle les récits de raids du NKVD lors des purges soviétiques des années 1930.

Bien que Lieber ait été décrit comme un professeur de chimie, quelques secondes de recherche sur Google ont révélé que certains de ses travaux les plus importants concernaient la virologie, y compris la technologie pour la détection des virus. Donc, une nouvelle épidémie virale massive et mortelle a éclaté en Chine et presque simultanément, un éminent universitaire américain ayant des liens étroits avec la Chine et une expertise en virologie a été soudainement arrêté par le gouvernement fédéral, mais personne dans les médias n’a exprimé de curiosité à propos d’une éventuelle connexion entre ces deux événements.

Je pense que nous pouvons dire avec certitude que l’arrestation de Lieber par le FBI a un rapport avec l’épidémie de coronavirus, mais à part cela, le reste n’est que de la spéculation. Ceux qui accusent maintenant la Chine d’avoir créé le coronavirus pourraient certainement suggérer que nos agences de renseignement ont découvert que le professeur de Harvard avait été personnellement impliqué dans cette recherche. Mais je pense qu’une possibilité beaucoup plus probable est que Lieber a commencé à se demander si l’épidémie en Chine pourrait ne pas être le résultat d’une attaque de guerre biologique américaine, et était peut-être un peu trop libre d’exprimer ses soupçons, attirant ainsi la colère de l‘establishment de notre sécurité nationale. Infliger un traitement aussi sévère à un scientifique de haut niveau de Harvard intimiderait grandement tous ses collègues, moins en vue, qui maintenant réfléchiraient sûrement à deux fois avant d’aborder certaines théories controversées avec n’importe quel journaliste.

Fin janvier, notre site web avait publié une douzaine d’articles et de publications sur l’épidémie de coronavirus, puis en avait ajouté bien d’autres à la mi-février. Ces articles ont attiré un demi-million de mots de commentaires, représentant probablement la principale source de langue anglaise pour une perspective particulière sur l’épidémie meurtrière, ce matériel attirant finalement plusieurs centaines de milliers de pages vues. Quelques semaines plus tard, le gouvernement chinois a commencé à évoquer avec précaution la possibilité que le coronavirus ait été amené à Wuhan par les 300 officiers militaires américains visitant cette ville. Il a été violemment attaqué par l’administration Trump pour avoir diffusé de la propagande anti-américaine. Mais je soupçonne fortement que les Chinois avaient trouvé cette idée dans notre propre publication.

Alors que le coronavirus commençait progressivement à se propager au-delà des frontières de la Chine, un autre développement s’est produit qui a considérablement multiplié mes soupçons. La plupart de ces premiers cas s’étaient produits exactement là où on pouvait s’y attendre, parmi les pays d’Asie de l’Est limitrophes de la Chine. Mais fin février, l’Iran était devenu le deuxième épicentre de l’épidémie mondiale. Plus surprenant encore, ses élites politiques ont été particulièrement touchées, avec 10% de l’ensemble du parlement iranien bientôt infecté et au moins une douzaine de ses fonctionnaires et politiciens morts de la maladie, dont certains assez âgés. En effet, les militants néocons sur Twitter ont commencé à remarquer avec joie que leurs ennemis iraniens haïs tombaient maintenant comme des mouches.

Examinons les implications de ces faits. Dans le monde entier, les seules élites politiques qui ont subi des pertes humaines importantes sont celles de l’Iran, et elles sont mortes très tôt, avant que des flambées importantes ne se soient même produites presque partout ailleurs dans le monde en dehors de la Chine. Ainsi, l’Amérique a assassiné le plus haut commandant militaire iranien le 2 janvier, puis quelques semaines plus tard, une grande partie des élites dirigeantes iraniennes ont été infectées par un nouveau virus mystérieux et mortel, dont beaucoup meurent rapidement. Un individu rationnel pourrait-il considérer cela comme une simple coïncidence ?

La guerre biologique est un sujet hautement technique et il est peu probable que ceux qui possèdent une telle expertise rapportent franchement leurs activités de recherche classifiées dans les pages de nos principaux journaux, peut-être encore moins après que le professeur Lieber a été traîné en prison, menotté. Ma propre connaissance est nulle. Mais à la mi-mars, je suis tombé sur plusieurs commentaires extrêmement longs et détaillés sur l’épidémie de coronavirus qui avait été publiée sur un petit site web par un individu se faisant appeler « OldMicrobiologist » et qui prétendait être un vétéran à la retraite ayant travaillé quarante ans dans la biodéfense américaine. Le style et les détails de son matériel m’ont paru tout à fait crédibles, et après un peu plus ample enquête, j’ai conclu qu’il y avait de fortes chances que ses antécédents soient exactement comme il les avait décrits. J’ai pris des dispositions pour republier ses commentaires sous la forme d’un article, qui a rapidement attiré beaucoup de trafic et de très nombreux commentaires supplémentaires.

Bien que l’auteur ait souligné le manque de preuves tangibles, il a déclaré que son expérience l’avait conduit à soupçonner fortement que l’épidémie de coronavirus était en effet une attaque de guerre biologique américaine contre la Chine, probablement menée par des agents arrivés dans ce pays sous le couvert des Jeux militaires organisés à Wuhan fin octobre, le genre d’opérations de sabotage que nos agences de renseignement avaient parfois entreprises ailleurs. Un point important qu’il a fait valoir est qu’une forte létalité est souvent contre-productive pour une arme biologique, car affaiblir ou hospitaliser un grand nombre de personnes impose des coûts économiques beaucoup plus élevés à un pays qu’un agent biologique qui inflige simplement un nombre égal de décès. Selon lui, «une maladie à transmissibilité élevée et à faible létalité est parfaite pour ruiner une économie», suggérant que les caractéristiques apparentes du coronavirus étaient presque optimales à cet égard. Les personnes intéressées devraient lire son analyse et juger par elles-mêmes de sa crédibilité et de son pouvoir de persuasion.

Un aspect intrigant de la situation était que presque dès le premier moment où les rapports de l’étrange nouvelle épidémie en Chine ont atteint les médias internationaux, une grande campagne orchestrée avait été lancée sur de nombreux sites web et plateformes de médias sociaux pour trouver la cause dans une arme biologique chinoise négligemment répandue dans son propre pays. Pendant ce temps, l’hypothèse beaucoup plus plausible que la Chine était la victime plutôt que l’auteur n’avait reçu pratiquement aucun soutien organisé nulle part et n’a commencé à prendre forme que lorsque j’ai localisé et republié des documents pertinents, généralement tirés de coins très obscurs et souvent écrits de manière anonyme. Il apparaissait donc que seule la partie hostile à la Chine menait une guerre de l’information active. Le déclenchement de la maladie et le lancement presque simultané d’une campagne de propagande aussi importante ne prouvent pas nécessairement qu’une véritable attaque de guerre biologique a eu lieu, mais je pense qu’elle tend à soutenir une telle théorie.

Lorsque l’on considère l’hypothèse d’une attaque de guerre biologique américaine, certaines objections naturelles viennent à l’esprit. L’inconvénient majeur de la guerre biologique a toujours été le fait évident que les agents auto-reproducteurs employés ne respecteront pas les frontières nationales, augmentant ainsi le risque sérieux que la maladie puisse finalement se retourner contre le pays d’origine et faire des victimes substantielles. Pour cette raison, il semble très douteux que toute direction américaine rationnelle et à moitié compétente ait déclenché le coronavirus contre la Chine.

Mais comme nous le voyons démontré absolument dans les nouvelles de l’actualité quotidienne, le gouvernement américain actuel est manifestement incompétent, plus que tout ce que l’on pourrait imaginer. Des dizaines de milliers d’Américains ont déjà payé de leur vie cette incompétence extrême. La rationalité et la compétence ne sont évidemment pas présentes chez les néocons de l’État profond que le président Donald Trump a nommés à tant de postes cruciaux dans notre appareil de sécurité nationale.

De plus, l’idée extrêmement irréfléchie selon laquelle une épidémie massive de coronavirus en Chine ne se propagerait jamais aux États-Unis aurait pu sembler plausible à des individus qui pensaient négligemment que les analogies historiques passées continueraient de s’appliquer. Comme je l’ai écrit il y a quelques semaines :

Des gens raisonnables ont suggéré que si le coronavirus était une arme biologique déployée par des éléments de l'appareil de sécurité nationale américain contre la Chine (et l'Iran), il est difficile d'imaginer pourquoi ils ne pensaient pas qu'il reviendrait naturellement aux États-Unis et démarrerait une énorme pandémie ici, comme c'est le cas actuellement. La réponse la plus évidente est qu’ils étaient stupides et incompétents, mais voici un autre point à considérer…

À la fin de 2002, il y a eu une épidémie de SRAS en Chine, un virus apparenté, mais qui était beaucoup plus meurtrier et quelque peu différent dans ses autres caractéristiques. Le virus a tué des centaines de Chinois et s'est propagé dans quelques autres pays avant d'être contrôlé et éradiqué. L'impact sur les États-Unis et l'Europe a été négligeable, avec seulement une petite dispersion des cas et seulement un ou deux décès.

Donc, si les analystes américains de la guerre biologique envisageaient une attaque de coronavirus contre la Chine, n’est-il pas tout à fait possible qu’ils se seraient dit que, comme le SRAS n’a jamais migré de manière significative vers les États-Unis ou l’Europe, nous resterions également isolés du coronavirus ? De toute évidence, une telle analyse était stupide et erronée, mais aurait-elle semblé si peu plausible à l'époque ?

Comme certains l’ont sûrement remarqué, j’ai délibérément évité d’étudier les détails scientifiques du coronavirus. En principe, une analyse objective et précise des caractéristiques et de la structure du virus pourrait aider à suggérer s’il était entièrement naturel ou plutôt le produit d’un laboratoire de recherche, et dans ce dernier cas, peut-être si la source probable était la Chine, l’Amérique ou un pays tiers.

Mais nous avons affaire à un événement mondial cataclysmique et ces questions ont évidemment d’énormes ramifications politiques, de sorte que l’ensemble du sujet est entouré d’un épais brouillard de propagande complexe, avec de nombreuses affirmations contradictoires avancées par les parties intéressées. Je n’ai aucune expérience en microbiologie et encore moins en guerre biologique, donc je serais désespérément perdu dans l’évaluation de telles affirmations scientifiques et techniques contradictoires. Je soupçonne que cela est également le cas de l’écrasante majorité des autres observateurs, bien que des partisans déterminés répugnent à admettre ce fait, et saisiront avec empressement tout argument scientifique soutenant leur position préférée tout en rejetant ceux qui la contredisent.

Par conséquent, par nécessité, je me concentre sur des preuves qui peuvent au moins être comprises par un profane, sinon nécessairement toujours acceptées. Et je crois que la simple juxtaposition de plusieurs divulgations récentes dans les médias traditionnels mène à une conclusion plutôt révélatrice.

Pour des raisons évidentes, l’administration Trump est devenue très désireuse de souligner les premiers faux pas et les retards dans la réaction chinoise à l’épidémie virale à Wuhan, et a probablement encouragé nos médias à se concentrer dans cette direction.

À titre d’exemple, l’Associated Press Investigative Unit a récemment publié une analyse assez détaillée de ces premiers événements, prétendument basée sur des documents chinois confidentiels. Comme une provocation, intitulé «La Chine n’a pas averti le public d’une pandémie probable pendant six  jours clés», l’article a été largement diffusée, même sous forme abrégée dans le NYT et ailleurs. Selon cette reconstruction, le gouvernement chinois a d’abord pris conscience de la gravité de cette crise de santé publique le 14 janvier, mais a retardé toute action majeure jusqu’au 20 janvier, une période pendant laquelle le nombre d’infections s’est considérablement multiplié.

Le mois dernier, une équipe de cinq journalistes du Wall Street Journal (WSJ) a produit une analyse très détaillée et approfondie de la même période, et le NYT a également publié une chronologie utile de ces premiers événements. Bien qu’il puisse y avoir des différences d’appréciations sur l’importance, ou des désaccords mineurs, toutes ces sources médiatiques américaines conviennent que les autorités chinoises ont d’abord pris connaissance de la grave épidémie virale à Wuhan du début à la mi-janvier, le premier décès connu étant survenu le 11 janvier a finalement mis en œuvre d’importantes nouvelles mesures de santé publique plus tard dans le même mois. Personne n’a apparemment contesté ces faits fondamentaux.

Mais les conséquences horribles de notre propre inaction gouvernementale ultérieure étant devenues évidentes, des éléments de nos agences de renseignement ont cherché à démontrer que ce ne sont pas eux qui s’étaient endormis au volant. Au début de ce mois, un article d’ABC News a cité quatre sources gouvernementales distinctes pour révéler que, même fin novembre, une unité spéciale de renseignement médical au sein de notre agence de renseignement de la défense avait produit un rapport avertissant qu’une épidémie de maladie incontrôlée se produisait dans la région de Wuhan en Chine, et a largement diffusé ce document dans les rangs supérieurs de notre gouvernement, avertissant que des mesures devraient être prises pour protéger les forces américaines basées en Asie. Après la diffusion de l’histoire, un porte-parole du Pentagone a officiellement nié l’existence de ce rapport de novembre, tandis que divers autres hauts responsables du gouvernement et des services de renseignement ont refusé de commenter. Mais quelques jours plus tard, la télévision israélienne a mentionné qu’en novembre, les services de renseignement américains avaient en effet partagé un tel rapport sur l’épidémie de la maladie de Wuhan avec ses alliés de l’OTAN et Israël, semblant ainsi confirmer de manière indépendante l’exactitude de l’histoire originale d’ABC News et de ses divers sources gouvernementales.

Il apparaît donc que des éléments de la Defense Intelligence Agency étaient au courant de l’épidémie virale meurtrière à Wuhan plus d’un mois avant tout responsable du gouvernement chinois lui-même. À moins que nos agences de renseignement n’aient été les pionnières de la technologie de la précognition, je pense que cela est peut-être arrivé pour la même raison que les pyromanes ont la connaissance la plus précoce des incendies à venir.

En février, avant qu’un seul Américain ne soit décédé de la maladie, j’ai écrit ma propre vue d’ensemble de l’évolution possible des événements, et je m’y tiendrai encore aujourd’hui :

Considérez une issue particulièrement ironique de cette situation, peu probable mais certainement possible…

Tout le monde sait que les élites dirigeantes américaines sont criminelles, folles et extrêmement incompétentes.

Alors peut-être que l'épidémie de coronavirus était en effet une attaque délibérée de guerre biologique contre la Chine, frappant cette nation juste avant le Nouvel An lunaire, le pire moment possible pour produire une pandémie permanente à l'échelle nationale. 

Cependant, la RPC a réagi avec une rapidité et une efficacité remarquables, mettant en œuvre de loin la plus grande quarantaine de l'histoire humaine, et la maladie mortelle semble maintenant régresser.

Pendant ce temps, la maladie retourne naturellement aux États-Unis, et malgré tous les avertissements préalables, notre gouvernement totalement incompétent a mal géré la situation, produisant une énorme catastrophe sanitaire nationale, et l'effondrement de notre économie et du système politique décrépit.

Comme je l'ai dit, pas particulièrement probable, mais certainement une fin très appropriée pour l'Empire américain ...

Ron Unz

Note du Saker Francophone


Vous pouvez en profiter pour lire cet entretien de Lucien Cerise chez nos confrères de rebellion-sre, qui complète son article sur strategika.fr :

Lucien Cerise : « face au biopouvoir, nous n’avons pas le capital économique. Mais nous avons le capital humain »

Traduit par jj, relu par Hervé pour le Saker Francophone

Source: Lire l'article complet de Le Saker Francophone

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