L’auteur est étudiant en Science politique et philosophie à l’Université de Montréal
Chaque été, comme des milliers d’étudiants québécois, je travaille pour mettre de l’argent de côté. C’est aussi une façon, pour moi, d’acquérir de l’expérience, en plus de me développer un réseau d’amis et de contacts utiles. Je suis au service d’un marché où se situent plusieurs commerçants. C’est le genre de lieu qui témoigne de l’art de la communauté au sens fort, à l’ère du tout-à-l’individu. En ce sens, ce dernier est peut-être encore plus essentiel pour son effet psychologique sur les citoyens que pour son approvisionnement en denrées. Les vendeurs redonnent sourire : malgré les aléas de l’existence, nous demeurons. À l’heure des changements qui se bousculent jour après jour, nous sommes toujours fidèles au poste. La vie d’un homme a besoin de ce type de repères qui peuvent servir, en temps de crise, de bouées de sauvetage.
Or, vivant sous la tutelle du régime canadien, j’apprends depuis quelques jours que l’élite politique d’Ottawa a eu l’idée saugrenue de décourager notre peuple au travail. C’est ainsi que l’aide financière d’urgence pour les étudiants ne sera accessible que pour ceux qui font moins de 1000$ par mois, soit un maximum de 19 heures par semaine au salaire minimum. Au moment même où notre économie n’aura jamais eu autant besoin de nous, une absurdité administrative nous désinvite à son soutien.
Heureusement, les revendications de l’opposition ont fait en sorte que l’étudiant devra « prouver » qu’il est à la recherche d’un emploi. Entendons-nous pour dire qu’il est tout de même facile de contourner ce genre de procédure. Dans les faits, les emplois ne manquent pas et peu d’étudiants ont de bonnes raisons de passer leur été à se la couler douce. Depuis le début de l’état d’urgence, une trop grande partie de la jeunesse ne sait plus quoi faire de sa peau, en témoigne les pubs du gouvernement qui invitent à écouter des séries télé et à jouer aux jeux vidéo.
Par cette mesure incitative à l’inertie, le régime canadien confine la jeunesse québécoise à la loi du moindre effort et insulte nos entrepreneurs qui ont peur pour leurs lendemains, ces derniers n’ayant rien à voir aux « chemins ensoleillés » de Trudeau. Notre gouvernement national, à Québec, devrait réagir aux aléas d’Ottawa et trouver des mesures qui inciteront notre jeunesse à développer les valeurs qui ont fait notre réputation, soit la vaillance, la ténacité, la fidélité, le courage et l’intégrité.
Que diraient nos ancêtres ouvriers, bûcherons, coureurs des bois, conquérants des mers, mères de huit à douze enfants, s’ils nous voyaient dessiner des pancartes d’arc-en-ciel en prétendant, par-là, « sauver des vies »? Notre époque a la mauvaise manie d’ériger en action héroïque le moindre geste insignifiant. Cela ne sera pas suffisant pour redresser notre nation, qui a des jours très difficiles qui l’attendent devant elle.
On le constate autour de nous et dans les médias, la population commence à se poser des questions. À quoi bon le confinement si les personnes qu’il s’agissait de protéger ont fini par être contaminées?
D’autres ne l’avoueront pas, mais ils se demandent sérieusement si une vie dans un goulag pour grabataires vaut plus que le dynamisme économique. Ainsi donc des préposés fraîchement diplômés qui découvrent avec stupéfaction comment une société qui abdique son destin traite ses vieillards. Sans blague, une journée d’Ivan Denissovitch relève du paradis terrestre à côté d’une seule heure en isolement, à baigner dans ses excréments. La dernière catégorie encore croyante de la société québécoise aura donc connu le livre de Job sans l’avoir lu.
Peuple du Québec, une longue quête s’annonce pour retrouver ton honneur. Sauras-tu enfin redresser l’échine?
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