Avant d’entendre les opinions des Québécois qui ont fui leur pays du fait d’une politique sanitaire délirante, nous avons écouté le jeune intellectuel Jérôme Blanchet-Gravel, pour qui « l’accusation de complotiste remplace celle de raciste ». Il est interrogé par Kernews à la fin février 2021.
Kernews : On voit apparaître au Québec une nouvelle génération d’intellectuels qui occupent, comme en France, une place croissante dans les médias. D’abord, quelle est la situation sanitaire au Québec ?
Jérôme Blanchet-Gravel : Je conteste certaines mesures, mais pas toutes, et je n’ai jamais nié l’existence du virus, contrairement aux complotistes qui minimisent le virus. En Occident, on a une réaction assez homogène, c’est une crise anthropologique, l’Occident est paralysé devant la peur de la mort. On sait qu’il y aura des gagnants et des perdants, c’est certain, des entreprises comme des groupes idéologiques. La première chose que j’observe, c’est la peur de la mort. Les Occidentaux vivent dans le déni de la mort et je n’aurais jamais pensé que ce serait à ce point. J’imagine que les autres peuples, les empires de l’Est, doivent regarder cela avec beaucoup d’étonnement. Les Occidentaux réagissent comme des enfants qui vont se réfugier dans les jupes de Maman, à savoir les gouvernements… C’est un peu triste. On aurait pu penser que les Occidentaux auraient un peu plus de vitalité.
Ce sont les peuples qui ont perdu toute spiritualité qui sont en pointe dans cette peur. D’ailleurs, les Arabes ou les Africains n’éprouvent pas cette crainte…
Il est très intéressant de mentionner cela. Le nouvel ordre sanitaire est l’aboutissement de la modernité avec tout son fantasme de l’homme-Dieu, celui du contrôle absolu. C’est un nouveau régime politique et anthropologique. J’ai passé beaucoup de temps au Mexique au cours de ces dernières années et, en mars 2020, j’étais à Mexico. La réaction a été très différente, alors qu’en Occident on veut avoir le contrôle absolu sur nos vies. On pense que l’on peut casser des vagues, on veut avoir le pouvoir absolu sur nos destinées biologiques, on nous explique que les sexes n’existent plus… C’est comme si la fatalité n’existait plus, alors qu’il y a encore des fatalités dans l’existence.
On observe aussi une évolution du débat et la pensée alternative modérée n’a plus sa place. Il y a des extrêmes de la dictature sanitaire et, par ailleurs, d’autres extrêmes qui soutiennent que le virus n’existe pas : or, si vous essayez de vous frayer un chemin entre les deux, vous n’arrivez plus à vous faire entendre…
Vous commencez à parler de complotisme en France, un peu plus tard que chez nous. Vous avez des intellectuels qui ont travaillé sur ce sujet, mais c’est un imaginaire politique qui vient d’Amérique du Nord. L’accusation de complotiste remplace celle de raciste. Cela signifie que l’on ne peut plus discuter avec vous dès lors que vous commencez à remettre en question certaines mesures. J’évolue encore dans les médias institutionnels au Québec et on ne me la fait pas ! Ceci dit, sur les réseaux sociaux, de plus en plus de citoyens ordinaires sont associés au complotisme dès lors qu’ils critiquent certaines mesures. Tous les commerces ont pris toutes les mesures nécessaires, avec le gel purificateur : c’est la nouvelle eau bénite ! Vous vous retrouvez avec une préposée avec une visière de soudeur, derrière une baie vitrée et on vous explique déjà que c’est trop risqué ! On a dépassé le stade de la rationalité. Le nouvel ordre sanitaire n’est pas scientifique, il témoigne d’une nouvelle vision du monde. De toute façon, la science est incapable, face à l’infinie variété de dommages collatéraux que l’on est en train de créer. On est dans le triomphe du risque zéro.
– La Rédaction d’E&R –
À l’approche du premier anniversaire de l’état d’urgence sanitaire, des Québécois insatisfaits du gouvernement Legault se sont établis à l’étranger. D’autres sont sur le point de faire leurs valises. Faut-il y voir un phénomène isolé ou prévoir une petite vague migratoire ? Sputnik est allé à la rencontre de plusieurs de ces citoyens déçus.
Ils ont choisi de s’établir au Costa Rica, au Mexique, en République dominicaine, en Espagne, en Estonie, au Texas, en Floride ou ailleurs aux États-Unis. Au Québec, ils sont nombreux à se dire déçus de la manière dont le gouvernement provincial a géré la crise. Quelques jours avant la commémoration du jour 1 de l’état d’urgence sanitaire du Québec – décrété le 13 mars 2020 –, des Québécois ont quitté le territoire et d’autres y songent sérieusement.
Le Québec, champion du confinement en Amérique du Nord ?
Les mesures de confinement imposées au Québec sont régulièrement accusées d’être les plus contraignantes en Amérique du Nord. « État policier », selon Maxime Bernier du Parti populaire ; « dérive autoritaire », taclait un commentateur anonyme ; « extrémisme sanitaire », à en croire Éric Duhaime du Parti conservateur : dans la Belle Province, les opposants aux contraintes sanitaires usent désormais d’un lexique qui relève de la dissidence.
« Sur 370 millions de personnes en Amérique du Nord, il n’y a que les 8,5 millions de Québécois qui vivent présentement sous un couvre-feu », déclarait l’avocat William Desrochers à la Cour supérieure du Québec, dans une vaine tentative de faire avorter le couvre-feu en février dernier.
L’impression de vivre l’un des plus rudes confinements en Amérique du Nord explique une bonne partie de la désillusion de certains Québécois. Récemment, l’État du Texas a annoncé la réouverture totale des commerces et la levée du port du masque, alors que le Québec allait entamer un déconfinement partiel et dans certaines régions seulement.
Mais les règles sanitaires n’expliquent pas tout. Consultant en stratégie d’affaires, Vincent Melanson confie sa déception de voir le Québec entrer dans une phase de « décrépitude » sur les plans économique et social. Il estime que la crise aura révélé, entre autres, la fragilité du système de santé et l’absence de débat sur les mesures en place. Des thèmes qui reviennent régulièrement dans les propos des personnes interrogées par Sputnik.
« Vivre au Québec est encore un privilège. […] Mais, ces dernières années, le cynisme a atteint des sommets et la gestion de la pandémie est la goutte qui fait déborder le vase. La pandémie a révélé l’ineptie de nos dirigeants et de nos institutions, mais aussi notre mentalité. Je me sens maintenant en décalage avec la majorité. J’ai l’impression de vivre dans un monde parallèle », déplore-t-il à notre micro.
Combien sont-ils à avoir quitté le Québec ou à projeter de le faire ? Impossible de le dire, car aucune donnée n’existe encore sur le phénomène. Chose certaine, la déception est palpable parmi cette minorité silencieuse.
La crise sanitaire comme « électrochoc »
Propriétaire d’une maison en République dominicaine, Jacques Bélanger (nom modifié) estime que la gestion de la crise a eu pour lui l’effet d’un « électrochoc ». Âgé d’une soixantaine d’années, cet ingénieur électricien travaille pour une firme de génie-conseil. Il nous confie que ses enfants entendent aussi s’établir sur l’île d’Hispaniola ! Revenu quelque temps au Québec pour des raisons familiales, l’homme compte retourner dès que possible à son domicile dominicain pour y vivre de manière permanente :
« Je ne fais plus confiance au gouvernement Legault. Il n’y a pas de cohérence dans les mesures au Québec. […] Dans les médias, on a commencé à traiter les gens de complotistes, alors que je me considère plus comme un ‘‘interrogationniste’’. […] Mais, ce qui m’a le plus choqué, c’est de voir des délateurs dénoncer leurs voisins. Pour moi, c’est la déception totale », lâche-t-il.
Les Québécois qui choisissent l’exil sont de tous les âges et profils. Ayant perdu son emploi d’agent de bord en début de crise, Évelyne Tremblay (nom modifié), 30 ans, a décidé d’aller rejoindre son conjoint français en Estonie, où il venait de s’installer. Pour elle, l’expatriation est à la fois sanitaire et politique :
« Quand je suis arrivée en Estonie, j’ai vu que le pays fonctionnait bien malgré la pandémie. Mieux qu’au Québec. Il y avait moins de mesures et les gens étaient moins intransigeants. […] L’emprise du mouvement ‘‘woke’’ [néo-progressiste, NDLR] à Montréal est aussi quelque chose qui m’a incitée à partir. Les manifestations avec des centaines de personnes pour le mouvement Black Lives Matter, ça m’a déçue », souligne-t-elle.
Des immigrés installés depuis de longues années au Canada font également le choix de retourner dans leur pays d’origine. C’est du moins le cas d’Alya Ben Ayed (nom modifié) et de son mari, tous deux d’origine tunisienne.
« Mon mari et moi allons repartir à cause des mesures actuelles. Mon mari est ici depuis seize ans et moi depuis douze ans, mais c’est triste ce qui se passe. Premièrement, nous avons déjà l’expérience d’un État policier et nous ne souhaitons pas la revivre. Deuxièmement, la réaction des Québécois face à la crise nous laisse pantois. Ils acceptent tout sans rien dire. […] Je ne vois pas du tout le bout du tunnel », déplore la Canado-Tunisienne.
Certains Québécois décident de partir seuls, alors que d’autres prennent le large avec leurs enfants ou d’autres membres de leur famille.
Une tendance à la hausse selon des témoignages
Une résidente de la ville de Québec assure que plusieurs de ses compatriotes « cherchent et “magasinent” [prospectent, comparent plusieurs destinations] actuellement » un pays où s’établir :
« Des gens qui ont décidé de quitter le Québec : je confirme que la tendance est à la hausse depuis la fin de l’année dernière. Mon conjoint et moi avons déjà décidé de nous expatrier en Amérique centrale en 2022. Je suis membre de plusieurs groupes Facebook de Québécois expatriés au Costa Rica ou de Canadiens expatriés au Panama. Beaucoup de Québécois ont rejoint ces groupes et demandent de l’information sur les mesures sanitaires, les prix des maisons, les loyers, les assurances, etc. », observe-t-elle.
Au-delà des mesures sanitaires et du climat social, plusieurs de nos interlocuteurs évoquent la grande facilité que leur procure le télétravail pour poursuivre leurs activités professionnelles.
« Quand tu peux emporter ton emploi et tes revenus dans tes valises, il n’y a plus aucune raison de rester », résume Jacques Bélanger.
Avec un bilan d’environ 10.500 morts, le Québec compte pour 47 % de tous les décès attribués au Covid-19 au Canada, alors qu’il représente 22 % de la population canadienne.
Source: Lire l'article complet de Égalité et Réconciliation