Je suis plus que fatigué par l’utilisation intempestive des mots « décryptage » et « décrypter » par les neuneux des médias dominants.
Lorsque l’on utilise un terme de manière surabondante (en ce moment, chez les djeuns’, c’est « genre ») ou fausse, il y a un problème, une entourloupe, une manœuvre. Que cela soit conscient ou pas importe peu.
Le dictionnaire Robert nous dit que décrypter c’est « traduire des messages chiffrés dont on ne possède pas la clé. Restituer le sens d’un texte obscur. »
La traduction d’un message chiffré implique que l’on casse un code qui a permis l’élaboration de ce message. On a tous en mémoire la célèbre machine allemande Enigma durant la Seconde Guerre mondiale, réputée inviolable mais qui, grâce à Alan Turing entre autres, fut retournée contre les Allemands.
Le sens littéral a facilement débouché sur un sens figuré : « restituer le sens d’un texte obscur ». Lorsqu’on se plonge dans la lecture d’un auteur ardu du style Schopenhauer (« genre ») il est parfois indispensable d’avoir affaire à une glose, simplificatrice ou pas, qui nous aide à déchiffrer, à éclaircir, bref à comprendre une pensée, une écriture peut-être déroutante au premier abord.
Nous ne connaissons pas ce genre de difficulté lorsque nous avons affaire aux neuneux moyens – ou même supérieurs – des médias qui prétendent nous aider à appréhender le sens de la parole dominante.
Ce « décryptage » dénote la complicité entre gens des médias et gens de la politique. Ils sortent du même moule (Sciences-po pour les plus en vue) et leur but n’est pas d’informer mais de produire de la communication. Or si informer c’est aller vers l’autre, lui donner quelque chose, l’enrichir, communiquer c’est aller de soi à soi dans une démarche autotélique. Lorsqu’un journaliste annonce qu’il va décrypter le discours du Premier ministre, cela sous-tend forcément un racisme de classe ou culturel.
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir