Le gouvernement du Mali a commis pratiquement la même erreur que le gouvernement français en maintenant contre le bon sens un scrutin en plein milieu de pandémie de COVID-19 et d’une situation sécuritaire assez inquiétante. Jamais des législatives n’ont été aussi boudées que celles du premier tour du 29 mars 2020 dans l’histoire du Mali.
Au point où la plupart de la classe politique en appelle à son annulation pure et simple. Qui a donc pris la décision de maintenir ce scrutin dans des conditions aussi aléatoires ?
Le chef de file de l’opposition malienne, Soumeila Cissé, ancien ministre des finances, opposant au président Ibrahim Boubakar Keita (IBK) et ex-candidat aux présidentielles, a été enlevé en compagnie de six autres personnes mercredi dernier dans son fief électoral de Nianfunké par des hommes armés de la Katiba de La Macina, une milice armée dirigée par le prédicateur peul Amadou Kouffa.
Dans la Macina, des centaines de milliers de personnes déplacés par l’instabilité et les combats ne sont toujours pas recensés et dans le nord du pays, c’est la dissidence armée qui tient tête avec succès aux forces françaises et onusiennes qui dicte sa loi. Pour aggraver le tout, le Mali compte officiellement 25 cas recensés de COVID-19 et deux décès des suites de cette épidémie.
Certaines voix et elles sont nombreuses au Mali pointent du doigt Paris et sa gestion catastrophique de l’épidémie en France où l’exécutif n’a pas hésité à maintenir le premier tour des municipales du 15 mars 2020 en dépit de sa possession d’informations précises sur la menace du COVID-19. Cet entêtement et cette volonté à vouloir mettre la vie des populations en danger pour des considérations purement politiciennes font débat en France et si Paris fait mine de ne pas avoir anticipé la crise, il ne s’est nullement empêché de conseiller à Bamako de maintenir un scrutin surréaliste envers et contre la logique la plus élémentaire. Résultat: la plupart des maliens sont en colère contre la France et leur gouvernement qui a suivi les recommendations de son homologue français sans tenir compte du désastre sans précédent dans lequel est plongée la France. Ces mêmes voix soulignent avec raison que la France ne viendra jamais à leur aide si la situation sanitaire s’aggrave au Mali et que la tendence actuelle entre les pays membres de l’union européenne est à l’égoïsme le plus primaire et la piraterie. L’exemple de l’Italie abandonnée à son sort par ses partenaires les plus proches n’a pas manqué de choquer en Afrique.
Que dire alors du Mali, pays qui n’est pas du tout préparé à faire face à une épidémie qui a entraîné la saturation sinon l’effondrement des systèmes de santé des pays les plus performants du G-7?
Indubitablement, la politique telle qu’elle est appréhendée en France n’est plus adaptée aux nouvelles réalités africaines. Elle pouvait se justifier dans le cadre d’un néo-colonialisme dans son acception des années 80 mais plus dans le contexte actuel du Sahel. Les élites maliennes estiment que leur pays ne peut plus suivre l’exemple d’un pays comme la France qui a mis les intérêts de castes et de réseaux avant celles de ses propres populations. C’est ce qui cest passé en ce 29 mars 2020 et le taux de participation quasi-nul au premier tour des législatives malienne est à lui seul un message clair que quelque chose ne tourne pas rond dans l’esprit de ceux qui ont soutenu la tenue d’un scrutin dans ce contexte de crise où les préoccupations premières du Mali ont été totalement occultés.
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