L’arme nucléaire, obsolète face aux nouvelles menaces du 21e siècle
La guerre est déclarée. Le Président l’a dit, il l’a répété. À six reprises. La France est entrée en guerre, en guerre sanitaire. Confinement, restrictions, économie en berne, entreprises réquisitionnées, nationalisations suggérées, grilles de commerces abaissées, et villes désertées. Nous y sommes. Et pourtant, où sommes-nous exactement ? Sommes-nous réellement en guerre, et si oui, contre quoi ? Un virus ? La crise du coronavirus, en menaçant d’asphyxie la santé de populations et d’économies toutes entières, révèle les nouveaux visages de la guerre au 21ème siècle.
Mais quels sont-ils ? Loin des schémas manichéens traditionnels, de l’héritage des deux guerres mondiales passées, ou encore des théories réalistes d’inspiration hobbesienne d’auteurs comme Raymond Aron, la guerre à l’époque contemporaine est plurielle, complexe, et muable. Elle ne se résume plus à la simple alternative : conflits civils ou interétatiques. Elle transcende les frontières, revêt de nouveaux habits – parfois invisibles -, surprend souvent, et désoriente notre imaginaire collectif. Guerre cybernétique, guerre terroriste, guerre climatique, guerre pandémique et sanitaire, qu’ils sont nombreux les visages de la guerre au 21ème siècle.
L’impertinence de la dissuasion nucléaire au 21ème siècle
Et pourtant, alors que le nombre de conflits armés étatiques dans le monde ne cesse de diminuer, que les conflits non étatiques et intra-étatiques internationalisés ne cessent d’augmenter, ébranlant la capacité de résilience d’une communauté internationale démunie [1], il semblerait que quelques-uns, des « puissances à contresens de l’histoire » [2], ne parviennent à mesurer, à analyser et à comprendre l’onde de choc de ces antagonismes nouveaux.
La parure vieillissante des Chefs de guerre du 21ème siècle reste intacte, préservée, voire même modernisée. L’arme de la guerre froide, « la bombe » est là, toujours présente. L’anachronisme est pourtant évident. Pourquoi alors, l’oligarchie dépassée des puissances du siècle dernier, s’entêterait, encore et toujours, à moderniser ses arsenaux nucléaires alors même que le nombre de conflits entre États ne cesse de diminuer, alors même qu’elle se retrouve incapable de répondre aux crises du présent ?
De nouvelles réponses pour de nouveaux défis
La crise du coronavirus se fait, une fois de plus, le reflet de cette contradiction. Les attentats terroristes et les attaques cybernétiques qui ont secoué l’Hexagone – et bien au-delà -, n’auront pas suffi. Il aura au moins fallu une pandémie. À l’heure même où le personnel soignant crie à l’aide, réclamant une protection aussi rudimentaire soit-elle qu’un masque chirurgical pour se prémunir d’un virus possiblement mortel, qu’avons-nous à leur proposer ? De quoi dispose l’État français pour se prémunir de cette guerre, inédite, contre cet ennemi invisible ? De quoi dispose l’État français pour se défendre, pour répliquer, contre cet ennemi à la forme ni humaine, ni étatique ? Pas de masques à l’évidence, mais d’une bombe peut-être.
Face aux nouveaux paradigmes de la guerre, face aux nouveaux virus de ce monde, ne faudrait-il pas repenser ces outils du passé ? Une chose est sûre, ni la rhétorique de la dissuasion, ni la puissance de la bombe ne suffiront à ralentir la propagation de ce virus pandémique, à déjouer l’activation de ce virus informatique ou à enrayer l’endoctrinement viral de ce djihadisme.
[1] Peace Research Institute Oslo (PRIO), Conflict trends 05 2018, (p.1).
[2] Bertrand BADIE, Nous ne sommes plus seuls au monde, Éditions la Découverte, 2016 (p.175).
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