Une autre attaque israélienne a ciblé des positions militaires syriennes près de Hadar dans le voisinage de la ville de Qunaïtra (Golan) quelques jours après un attaque de missiles massive sur Damas et la chute de missiles syriens sur la colonie de Magdel Chams
Les attaques israéliennes contre la Syrie continuent dans le cadre d’un redéploiement des forces US au Levant et une recrudescence des activités militaires US autour de la base d’Al-Tanf mais également le nord de la Syrie après la réussite de la stratégie confusionnelle de « Bellum omnium contra omnes » ou guerre de tous contre tous visant en premier lieu à brouiller la perception stratégique russe.
Les derniers missiles israéliens lancés par des appareils de combat au dessus du plateau du Golan sont justifiés du côté israélien comme une riposte à la chute de débris de missiles Sol-Air syriens sur la partie sous occupation israélienne du Golan après le bombardement de sites au Sud de Damas.
En d’autres termes, Israël attaque régulièrement la Syrie après l’échec de la guerre hybride par proxy et lorsque les syriens (où leurs alliés) utilisent des missiles Sol-Air pour contrer les missiles israéliens dans l’espace aérien syrien, cette action est qualifiée comme une attaque par Tel-Aviv.
En réalité ces attaques concertées entre les Etats-Unis et Israël (avec la participation active de pays alliés dans la région) sont plus un message en direction de la Russie en Syrie qu’à égard de Damas ou Téhéran. Ces actions s’insèrent dans le cadre d’une montée en puissance d’une guerre en préparation contre les puissances émergentes que sont la Russie et la Chine et reflètent un changement de paradigme radical dans la stratégie de Washington où les notions de « guerre sans fin contre le terrorisme » par le biais de la création ex-nihilo d’acteurs non-étatiques idéologiquement ou religieusement motivés par la manipulation et la subversion sont abandonnées au profit d’une approche plus classique d’une confrontation avec un ou plusieurs rivaux géostratégiques majeurs.
La Russie appelle Israël à cesser ses attaques contre la Syrie:
Le représentant russe aux Nations Unies a réitéré les appels de la Russie à Israël pour la cessation des raids aériens sur le territoire syrien et de mettre fin à toute occupation étrangère dans ce pays ainsi que l’arrêt des tentatives de démanteler la Syrie en entités éparses. Cet appel très diplomatique n’a pourtant aucune chance d’être entendu.
Une certaine naïveté russe…
En dépit de leurs expériences passées, les russes ont fait montre d’une certaine naïveté en Syrie où ils ont cru pouvoir jouer au funambule dans un environnement où il fallait éviter ou du moins prévenir la prolifération de bases US et offrir les moyens d’une dissuasion fiable à une Syrie techniquement en guerre ouverte avec Israël et soumise à une guerre économique et financière américaine et européenne d’une férocité extrême. Le protectorat de facto de la Turquie sur la province syrienne rebelle d’Idleb a non seulement mis à mal la stratégie russe en Syrie mais a prouvé que la stratégie turque au Levant est une pièce maîtresse de la grande stratégie de Washington visant à reprendre la main au Levant au Moyen-Orient et de bloquer l’initiative de la nouvelle Route de la Soie chinoise d’atteindre la Méditerranée orientale.
Le déclin des groupes rebelles en Syrie ne pouvait qu’amener Israël à intervenir plus ou moins directement dans un conflit où il est l’un des principaux protagonistes. Cette donnée est essentielle et démontre qu’en dépit de la confusion globale délibérée entretenue par la nouvelle approche de Washington -ruse de guerre, brouillard de guerre ou situationnisme confusionnel dans la plus pure tradition du très classique « Art de la Guerre » de Sun Tzu, les pays ayant déclenché la guerre en Syrie poursuivent inlassablement leurs objectifs initiaux avec pour ligne de mire:
- Affaiblir les forces armées syriennes et découpler le Hezbollah libanais de l’équation syrienne et isoler ce dernier sur la scène libanaise, prélude à son ciblage;
- Découpler l’axe Damas-Téhéran et obtenir un changement de régime en Syrie en lui substituant dans le meilleur des cas un état de chaos similaire ou pire à celui en cours en Libye avec des protagonistes rivaux acquis ou alliés à l’Otan;
- Une fois la destruction de l’Etat syrien obtenue, focaliser l’ensemble des synergies régionales et internationale dans une alliance contre l’Iran pour aboutir au même objectif qu’en Syrie;
- Un changement de régime en Iran par un autre favorable à l’empire mettrait d’immenses réserves et de gisement d’énergies fossiles à la disposition de Washington et permettra de lancer avec l’aide des riches pays Arabes du Conseil de Coopération du Golfe et la Turquie le « Grand Djihad otanien » sur le flanc sud de la Russie en créant des remake de la première guerre d’Afghanistan dans les ex-République d’Asie centrale;
- La Russie se retrouvera ainsi acculée sur ses marches occidentales (pays baltes, Pologne, Ukraine, Roumanie) mais encore plus gravement sur son flanc méridional en Asie centrale où l’islam politique pourrait encore servir la stratégie US pour déstabiliser et tenter de porter atteinte à l’intégrité territoriale de la Russie avec pour objectif économique d’obtenir un changement de régime à Moscou et la mise en place d’un leadership russe favorable aux intérêts des oligarques compradores liés à la mafia financière occidentale comme c’était le cas au temps d’Eltsine sur fond d’une nouvelle humiliation de la Russie dans tous les domaine et la destruction de ses structures militaires, sociales et culturelles (propagation du chaos social);
- Simultanément, obtenir le découplage de l’axe stratégique Moscou-Beijing et de préférence créer les conditions d’une hostilité entre la Russie et la Chine tout en ciblant l’Ouest chinois par les mêmes outils de la subversion (guérilla islamiste pan-turquiste au Xinjiang, renforcée par l’incendie en Asie centrale musulmane) tout en renforçant son encerclement stratégique (Mer de Chine méridionale, péninsule coréenne, Hong Kong, rivalité avec le Viet-Nam, et nouvel élément géostratégique, un état de guerre froide avec l’Inde) dans un remake plus étendu et plus élaboré des guerres de l’Opium du 19ème siècle.
Inutile de préciser que ce scénario comporte des conséquences très lourdes à assumer pour l’ensemble de la population mondiale (après tout c’est grâce à la Chine si la plupart des consommateurs parviennent à s’offrir des commodités à des prix plus ou moins raisonnables ou accessibles au plus grand nombre) ou encore sur les capacités avérées des russes à reprendre les choses en main en cas de décapitation subite du leadership ou d’une révolution colorée (ils l’ont assez prouvés tout au long de leur histoire fort mouvementée) et le pire scénario est de voir une Russie dotée de plus de 5000 ogives nucléaires (plus de 12 000 en réalité) sombrer dans le chaos et qu’un groupe d’officiers nationalistes décident de prendre le pouvoir en prenant les armes contre un gouvernement fantoche mis en place par Washington avec l’aide des puissants réseaux sionistes internationaux. Ces données expliquent en partie la volonté de Vladimir Poutine de demeurer à la tête de la Russie pour quelques années et la décision unanime des élites dirigeantes de la Chine à nommer à vie le président Xi Jinping. Pour ces deux pays, le loup est derrière la porte de la maison et tous les moyens sont bons pour l’abattre.
L’empire US et ses alliés ne sont plus ce qu’ils étaient il y trois décennies. L’état des Etats-Unis en 2020 est similaire à celui prévalant en ex-Union Soviétique durant les années 1986-1990 et l’effondrement politique, économique et social est réel en dépit de la mainmise du dollar et de la falsification de tous les indices macro-économiques et boursiers. La spéculation et la méga-propagande renforcée par le contrôle de l’internet pallient pour le reste. Les élites de la finance ont décidé de créer des crises multi-formes (le COVID-19 n’en est qu’un aspect) afin de maintenir un statu quo ou à défaut faire couler le navire tout en maintenant leurs dividendes astronomiques et en multipliant à l’infini les clivages sociétaux à l’intérieur des sociétés humaines et les conflits armés entre les Etats. La guerre hybride se transforme et on saura bientôt la nouvelle forme qu’elle va adopter sur fond de crise sanitaire (en fait une guerre hybride mêlant un vecteur biologique et une médiaguerre avec une domestication des population par la peur et la terreur, un créneau toujours porteur).
Le Grand Jeu est entré dans sa phase paroxystique et tout est désormais possible.
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