Hommage de la Syrie résiliente à l’un de ses illustres fils, l’Évêque de Jérusalem, icône de la résistance contre l’occupation israélienne. En choisissant de produire et présenter à la télévision nationale tout au long du mois sacré de Ramadan, un feuilleton de grande facture dont le héros est un prêtre syrien natif d’Alep, devenu évêque de l’Église melkite de Jérusalem, la Syrie envoie au monde un message de clairvoyance, de tolérance et d’universalisme citoyen.
Entre la pandémie des sanctions, les incendies criminels ici et là (l’oasis de Palmyre est à nouveau en feu) et les menées tortueuses du mégalomane Mamamouchi, le Ramadan n’a amené aucun répit à la Syrie martyrisée. Gavée de blocus et d’embargos, harcelée par des agresseurs pourtant sinistrés, elle attend de pied ferme les lois « Caesar » bêtes et méchantes de l’oncle Donald.
L’intox et l’infox ayant fait très bon ménage avec le coronavirus, il est toujours dans le vent d’ostraciser la Syrie et de lui prêter tous les péchés du monde, y compris celui d’intolérance. Certes il serait vain d’attendre des « dévots » qu’à l’instar de saint Paul il y a deux mille ans ils trouvent leur chemin de Damas, mais on pourrait rêver que le Ciel éclaire leur lanterne en leur rappelant le lien indestructible entre le christianisme et son berceau syrien. Ils comprendraient alors pourquoi le « cœur battant du monde arabe », haut lieu d’un islam prestigieux et œcuménique, respecte tant une diversité religieuse qui fait partie de son patrimoine. La vénérable Grande Mosquée des Omeyades n’héberge-t-elle pas le tombeau de saint Jean le Baptiste tandis que son minaret de Jésus veille sur la « perle de l’Orient » ? Non, les chrétiens – au nombre de 2,5 millions (10 % de la population) au début du conflit – n’ont pas été persécutés par le gouvernement, n’en déplaise aux imposteurs. Ceux-ci seraient-ils amnésiques ou aveugles au point d’absoudre les fanatiques travestis en démocrates, qui à l’été 2011 promettaient le tombeau aux alaouites (le « tabout ») et sommaient les chrétiens de partir « à Beyrouth ».
Il semble donc juste de saluer les hardiesses d’un État mal traité mais résilient, où l’on sait avoir du courage et de la tenue. En témoigne la décision de produire et présenter à la télévision nationale une série dont le héros est un prêtre syrien natif d’Alep, devenu évêque de l’Église melkite de Jérusalem. Il fallait en outre de la détermination et de la clairvoyance pour choisir un calendrier porteur d’une symbolique si lourde : il n’est pas anodin d’avoir choisi le Ramadan pour proposer un feuilleton tel que Hares al Qods (Le Gardien de Jérusalem). Mais le personnage vedette n’a rien de banal.
Ordonné prêtre en 1947, Hilarion Cabbougi est nommé archevêque de Césarée en Palestine et vicaire patriarcal melkite de Jérusalem en juillet 1965. Sa « consécration » épiscopale par le patriarche d’Antioche intervient en septembre. S’imposant vite comme une icône de la résistance palestinienne et une figure de proue de la cause arabe, il est arrêté en 1974, emprisonné et torturé par l’occupant israélien, il est libéré en 1977 après des tractations difficiles entre Tel-Aviv et la papauté qui lui imposent un exil à vie loin de la Palestine et de tout pays arabe. Il sera donc propulsé de poste en poste jusque dans la lointaine Amérique du Sud. Bien que son nom soit déjà célèbre, c’est grâce à l’impact de cette série à succès en trente épisodes qu’un certain grand public arabe ou arabophone verra désormais en Mgr Cabbougi, le gardien d’un lieu saint pas comme les autres.
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