Trump va-t-il attaquer l’Iran pour sauver l’économie et l’industrie américaines ?

Trump va-t-il attaquer l’Iran pour sauver l’économie et l’industrie américaines ?

Par Scott Ritter

Scott Ritter est un ancien officier du renseignement du corps des Marines américains. Il a servi en Union soviétique comme inspecteur de la mise en œuvre du traité INF, auprès du Général Schwarzkopf pendant la guerre du Golfe et de 1991 à 1998 en tant qu’inspecteur des armes de l’ONU.

Source : RT, le 1er avril 2020

Traduction : lecridespeuples.fr

Il est estimé qu’une guerre américano-iranienne perturberait le flux de pétrole issu du Moyen-Orient et, à ce titre, devrait être évitée à tout prix. Après que le prix du pétrole américain soit devenu négatif (s’échangeant à -37 dollars le baril), le risque d’une telle guerre est-il soudain devenu attractif ?

La semaine dernière, près d’une douzaine de navires de la marine du Corps des gardiens de la révolution islamique iranienne (IRGCN) auraient harcelé une formation de navires de la marine américaine et des garde-côtes opérant dans les eaux internationales du nord du golfe Persique. Selon l’US Navy, environ 11 vedettes rapides iraniennes ont effectué des « approches dangereuses et harcelantes » d’une flottille de six navires, traversant à plusieurs reprises les arcs et les poupe des navires américains à grande vitesse. [L’Iran affirme pour sa part qu’il n’a fait que réagir à des manœuvres de provocation dangereuses et illégales.]

De tels accrochages ne sont pas rares dans le golfe Persique, où les marines américaine et iranienne se sont affrontées plusieurs fois au fil des ans, en utilisant des tactiques de harcèlement similaires, mais en évitant toujours la confrontation réelle.

En tant que tel, le Tweet du Président Donald Trump mercredi, ordonnant à la marine américaine « d’abattre et de détruire toutes les vedettes iraniennes si elles harcèlent nos navires en mer », semblait être une escalade inutile et dangereuse, surtout compte tenu de l’histoire des affrontements entre les États-Unis et l’Iran dans la région et de ses conséquences potentiellement dévastatrices.

Presque immédiatement après que Trump a publié son Tweet, le prix du pétrole a rebondi. Les contrats à terme pour le West Texas Intermediate (WTI) ont atteint 13,49$, après avoir chuté à des niveaux historiquement bas, atteignant un creux négatif de -37 $. De même, le Brent, qui représentent environ 60% des achats mondiaux de brut, ont bondi de 1,20 $ pour atteindre 20,53 $ le baril, après être descendus jusqu’à 15,98 $. Normalement, la relation de cause à effet entre la menace de guerre et la hausse des prix du pétrole serait considérée sous un jour négatif. Mais nous ne vivons pas des temps normaux.

En septembre 2019, une attaque de drones et de missiles imputée à l’Iran, avec ou sans l’aide des résistants Houthis, a frappé deux installations pétrolières saoudiennes, les obligeant à fermer et, partant, à réduire la production de pétrole nationale de 5,7 millions de barils de pétrole par jour, soit cinq pour cent de la production mondiale. Cette attaque a fait suite à une série d’explosions visant des pétroliers dans le détroit stratégique d’Ormuz en mai 2019, attaques qui, encore une fois, ont été imputées à l’Iran.

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L’Iran a envoyé à plusieurs reprises un message aux États-Unis, à ses alliés arabes du Golfe et au reste du monde, affirmant que si les États-Unis élargissaient leur campagne de « pression maximale » en sanctionnant l’industrie pétrolière et gazière de l’Iran, refusant ainsi à l’Iran l’accès aux marchés mondiaux, alors l’Iran était pleinement capable de riposter en nature, de fermer le détroit d’Ormuz au trafic de pétroliers et de détruire les infrastructures critiques de production de pétrole. Ce message a été réitéré lors des attaques de représailles de mai 2019, dont l’Iran n’a cependant jamais revendiqué la responsabilité, tout en reconnaissant soutenir les Houthis face à l’agression de la coalition saoudo-américaine.

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Alors que l’instinct du Président Trump à l’époque était de confronter l’Iran avec force, il en a été dissuadé par des têtes plus calmes au sein de son administration, y compris des officiers supérieurs de l’armée américaine qui ont averti que les États-Unis n’étaient pas en mesure d’empêcher l’Iran d’imposer un terrible tribut à la production de pétrole du Moyen-Orient et, ce faisant, de paralyser l’économie mondiale. Autrement dit, les risques associés à une guerre avec l’Iran l’emportaient de loin sur tout gain potentiel.

Voir Le Yémen dévaste les installations pétrolières saoudiennes, l’Iran se déclare prêt à la guerre contre les Etats-Unis

Telle était la situation alors ; elle est bien différente maintenant. La pandémie de Covid-19 a entraîné un arrêt économique mondial qui a considérablement réduit la demande de pétrole à un moment où le monde connaissait des niveaux de production record. La surabondance qui en résulte a entraîné un effondrement du prix du pétrole, qui a été exacerbé par une guerre des prix entre la Russie et l’Arabie Saoudite, lancée dans le but de chasser les producteurs américains de pétrole de schiste et de verrouiller leur part respective d’un marché en baisse.

Les Russes et les Saoudiens ont réussi, et même trop bien réussi. Le pétrole américain continue d’être produit à des taux record, contribuant à une production mondiale excédentaire s’élevant à quelque 27 millions de barils par jour, si bien que les États-Unis et le monde manqueront rapidement d’endroits pour stocker la surproduction qui en résulte. Cela a conduit à une crise où le prix du Western Texas Intermediate, l’indice de référence pour le pétrole américain, est devenu négatif, les négociants en pétrole ayant été contraints de payer des clients pour qu’ils prennent possession des contrats pétroliers pour mai. Un sort similaire attend les contrats WTI de juin et, à moins que la surproduction mondiale de pétrole ne cesse, c’est un modèle qui se répétera. Déjà, les producteurs américains font faillite, déclenchant un effondrement économique qui menace de détruire une partie considérable de l’industrie pétrolière américaine.

Vidéo : https://www.dailymotion.com/video/x7tu3py

Le seul moyen de sortir de cette catastrophe économique est que le monde réduise la production de pétrole. Les discussions entre les principaux producteurs de pétrole au début du mois ont abouti à des réductions prévues d’environ 10 millions de barils par jour, ce qui laisse quelque 17 millions de barils en surproduction quotidienne. Bien qu’il soit question d’instaurer des réductions supplémentaires, aucun pays ne veut sacrifier sa part de marché pour sauver le pétrole de schiste américain, que de nombreux pays accusent de la surproduction qui a lieu aujourd’hui.

Il existe cependant un moyen de retirer instantanément plus de 20 millions de barils par jour de l’économie mondiale : une guerre avec l’Iran qui provoquerait la fermeture du détroit d’Ormuz et arrêterait la production de pétrole dans la région du golfe Persique. En 2019, c’est cette crainte même qui a atténué un conflit militaire entre les États-Unis et l’Iran. Aujourd’hui, alors que l’industrie pétrolière américaine est en crise et fait face à des pertes potentiellement irréversibles, une guerre au Moyen-Orient prendrait soudain tout son sens.

En 2019, les États-Unis étaient mal préparés à une guerre avec l’Iran. Dans l’intervalle, ils ont renforcé leurs défenses et leur présence militaire dans la région du golfe Persique au point qu’ils peuvent, au minimum, fournir un semblant de protection aux forces déployées tout en étant en mesure de lancer simultanément des attaques dommageables contre l’Iran [c’est extrêmement douteux au vu de l’absence de réaction humiliante face à la riposte iranienne massive à l’assassinat de Soleimani].

La mesure dans laquelle les États-Unis peuvent protéger leurs alliés arabes du Golfe de toute contre-attaque iranienne est incertaine [elle est inexistante, surtout après le retrait des inefficaces Patriot d’Arabie Saoudite annoncé début mai] et, plus précisément, non pertinente. Alors que les États-Unis ont déployé des batteries de missiles sol-air Patriot en Arabie Saoudite pour protéger les infrastructures pétrolières critiques, il ne fait aucun doute que l’Iran ferait payer un terrible tribut à la capacité de production de pétrole de l’Arabie Saoudite et des autres États arabes du Golfe.

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Les conséquences d’une telle confrontation militaire seraient désastreuses et immédiates, avec plus de 21 millions de barils de pétrole retirés instantanément du marché mondial et la flambée des prix du pétrole, précisément le résultat nécessaire pour sauver les producteurs de pétrole américains. On ne sait pas encore si une telle guerre se produira réellement, mais une chose est sûre : l’analyse des gains et des risques selon laquelle une guerre avec l’Iran serait prohibitive a été renversée. Le fait est qu’une guerre américaine avec l’Iran pourrait être la seule chose qui puisse sauver le pétrole américain. Dans une année d’élection présidentielle où Trump cherche désespérément à soutenir l’économie américaine, la guerre est soudainement devenue très attrayante.

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En période de pandémie, les États-Unis se préparent à la guerre, mais la faiblesse de l’Iran est grossièrement exagérée

Par Scott Ritter

Source : RT, le 30 mars 2020

Traduction : lecridespeuples.fr

Les États-Unis se préparent à une confrontation avec les milices soutenues par l’Iran en Irak tandis que l’Iran lutte pour faire face aux conséquences du coronavirus à l’intérieur de ses frontières. Cela pourrait sembler être le bon moment pour les Américains de frapper, mais ce n’est pas le cas.

L’armée américaine est engagée dans un redéploiement stratégique de ses forces à l’intérieur de l’Irak, y compris le déploiement de missiles sol-air dont le seul objectif logique était de se défendre contre la menace des missiles balistiques iraniens. Ce mouvement de forces a renforcé les inquiétudes selon lesquelles certains membres de l’administration Trump pourraient chercher à exploiter la faiblesse perçue de l’Iran provoquée par la pandémie actuelle de Covid-19. La réalité est cependant très différente : l’Iran est prêt à se défendre en utilisant la totalité de ses ressources de défense. Toute décision des États-Unis contre l’Iran serait une grave erreur de calcul avec des résultats dévastateurs.

L’Iran est devenu l’épicentre de l’épidémie de Covid-19 au Moyen-Orient. Au 1er avril, le ministère iranien de la Santé avait signalé plus de 47 000 cas confirmés et plus de 3 000 décès. Pour mieux coordonner une réponse à cette épidémie, le ministère iranien de la Santé a annoncé la formation d’un siège national de lutte contre les coronavirus et de prévention qui a déployé 30 000 équipes opérant sous la supervision du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) pour aider à lutter contre l’épidémie.

Vidéo : https://www.dailymotion.com/video/x7szhcx

La gravité de l’épidémie de Covid-19 en Iran a été interprétée par certains décideurs politiques au sein de l’administration Trump comme la preuve que la campagne en cours de « pression maximale », basée sur l’application de sanctions économiques strictes, a réussi. Ces mêmes personnes, dont les rangs comprennent le secrétaire d’État Mike Pompeo et le conseiller à la sécurité nationale Robert O’Brien, ont cité de prétendues manifestations généralisées en Iran et en Irak comme preuve supplémentaire du niveau de mécontentement qui existe à l’égard du gouvernement théocratique iranien. [C’était avant que l’Europe et les Etats-Unis deviennent le principal foyer de l’épidémie.]

Les États-Unis sont depuis longtemps impliqués dans une guerre de l’ombre avec l’Iran pour savoir quel camp pourra exercer le plus de contrôle sur le gouvernement irakien. Les États-Unis ont particulièrement pris ombrage du rôle joué par les milices soutenues par l’Iran opérant sous l’égide des Forces de milice populaire, ou PMF [qui ont éradiqué Daech]. Une de ces milices, les Kataib Hezbollah, a été désignée responsable d’une série d’attaques de missiles sur des bases américaines en Irak qui ont tué et blessé plusieurs Américains, menant des radicaux dans l’administration Trump, dirigée par Pompeo et O’Brien, à envisager de plus grandes opérations militaires visant à détruire Kataib Hezbollah. Certains estiment qu’étant donné l’inévitabilité d’une réponse iranienne, Pompeo et O’Brien prévoient une opération militaire plus vaste qui comprendrait des attaques majeures contre l’Iran visant à conduire à renverser le gouvernement iranien.

Vidéo : https://www.dailymotion.com/video/x7sq161

Les récents mouvements militaires dans la région tendraient à indiquer que les États-Unis se préparent à une sorte d’action majeure en Irak. Au cours des dernières semaines, les États-Unis ont consolidé leurs forces en Irak, se retirant de plusieurs bases plus isolées et concentrant leurs troupes dans deux complexes de bases plus grands, l’un près d’Al-Qaim et l’autre à la base aérienne d’Al Assad que l’Iran a frappée en janvier. Les États-Unis ont commencé à déployer des unités de missiles Patriot à Al-Qaim et Al-Assad, apparemment pour se protéger contre les attaques de missiles de Kataib Hezbollah et d’Iran.

La probabilité d’une réponse massive de Kataib Hezbollah et de l’Iran à toute attaque américaine concertée contre les forces des PMF en Irak a conduit le commandant américain en Irak, le lieutenant-général Robert White, à lancer un avertissement catégorique qu’une telle attaque « nécessiterait que des milliers de soldats américains supplémentaires soient envoyés en Irak et impliqeurait la réassignation des ressources de ce qui a été officiellement la principale mission militaire américaine là-bas : la formation des troupes irakiennes pour combattre Daech [lol]. » L’avertissement brutal du général White est en fait un euphémisme. Dans leur hâte de promouvoir un changement de régime en Iran, les extrémistes de l’administration Trump comme Pompeo et O’Brien ont exagéré la vulnérabilité du régime iranien, en particulier à la lumière de la pandémie de coronavirus en cours, tout en minimisant la menace pour les forces américaines en Irak.

Voir Nasrallah : une guerre contre l’Iran signifierait la fin d’Israël, des Saoud et de l’hégémonie américaine

La frappe de missiles de représailles de l’Iran contre la base aérienne d’Al-Assad en janvier a fait comprendre que sa force de missiles balistiques possède une grande capacité de frappe de précision. Les missiles utilisés dans cette attaque étaient des variantes plus anciennes, et l’Iran a maintenant déployé des missiles plus récents avec des avancées technologiques qui incluent des ogives manœuvrables conçues pour échapper aux défenses antimissiles américaines. Les capacités de l’Iran en matière de missiles balistiques sont réelles et sa menace de les utiliser en réponse à toute attaque américaine n’est pas un bluff.

Une confrontation entre les États-Unis et le PMF irakien qui impliquerait l’Iran se transformerait en bain de sang pour toutes les personnes impliquées. Pour sa part, l’Iran s’est montré capable de faire deux choses à la fois, ce qui signifie qu’il peut simultanément faire face à l’épidémie de Covid-19 et se préparer à une guerre plus large avec les États-Unis en Irak. On ne peut pas en dire autant de l’administration Trump. Espérons que des têtes plus saines l’emporteront et que la Maison Blanche tiendra compte des conseils de prudence du général White. L’alternative ne fera que provoquer un désastre. [En plus de sauver l’industrie pétrolière, une guerre en Iran pourrait être vue comme un moyen de détourner l’attention de l’échec monumentale de l’administration Trump face au Covid-19].

Vidéo : https://www.dailymotion.com/video/x7tj8nf

Voir également : Après Youtube & Facebook, Vimeo bannit les vidéos de Nasrallah et ‘Le Cri des Peuples’

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« La voix des peuples et de la Résistance, sans le filtre des médias dominants. »[Le Cri des Peuples traduit en Français de nombreux articles de différentes sources, principalement sur la situation géopolitique du Moyen-Orient. C'est une source incontournable pour comprendre ce qui se passe réellement en Palestine, en Syrie, en Irak, en Iran, ainsi qu'en géopolitique internationale.]

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