Le responsable des nécros ayant refusé d’écrire celle-ci, pour différentes raisons, toutes musicales, mais aussi un peu sexistes, on va s’y coller et ce, sans regarder Wiki ni donner des ordres à ChatGPT ou Deepseek, la nouvelle IA chinoise qui coûte horriblement moins cher que l’américaine.
Survivante des sixties
On va donc travailler sur des souvenirs vagues, sans dates précises : ce sera plus vivant, plus humain. Et on a constaté une chose : dans la presse, les articles d’intelligence artificielle sont moins cliqués que les articles d’imbécilité artificielle. Peut-être que l’animal humain n’aime pas trop la machine, le logiciel, il a peut-être l’impression qu’un Alien essaye de la lui faire à l’envers.
Nous sommes dans les années 60, le swinging London, les Stones et les Beatles sont en haut de la vague, l’Angleterre victorienne a les cheveux longs, la jeunesse née dans la guerre et les privations découvre le rock, l’amour et la drogue, c’est toujours comme ça après une guerre mondiale. La culture s’enrichit sur les tragédies, après 14-18 il y a aussi eu une explosion artistique, centrée à Paris d’ailleurs, Picasso, Montparnasse, tout ça.
Ne croyez pas qu’on gagne du temps, qu’on meuble, c’est important de trouver les invariants des époques, qui changent comme la mode, mais en dessous, c’est pareil. Les Stones sortent leurs meilleurs albums à la fin des sixties, carrément des bijoux sans déchets, ils attirent les filles, qui aiment les bad boys, et aujourd’hui, comme on a dit nous, elles aiment les rappeurs. Faut arrêter de critiquer ses contemporains quand on vient de l’époque d’avant et qu’on trouve que les jeunes sont cons : les jeunes ont TOUJOURS été cons, et toujours, reproduisent les mêmes schémas, redécouvrent l’amour, dans un contexte différent bien sûr, avec ou sans crise, avec ou sans guerre.
Allez jeter un œil devant la Sorbonne, c’est toujours des babas cool assis par terre comme des traîne-misère. Dans les lycées aussi, ça s’assoit par terre, ça fume, ça boit des bières. À l’époque des Stones, on découvre non seulement l’herbe, mais aussi les drogues dures, qui viennent du Nam. L’héroïne, qui était auparavant réservée à une élite culturelle (Burroughs) et à quelques médecins qui s’injectaient de la meilleure, de la morphine, en douce, l’accès au tableau B, se démocratise…
Les filles – majoritairement pucelles – aiment les Beatles, mais les chaudasses, les petites salopes en herbe préfèrent les Stones, surtout Mick et le blondinet, là, qui finira dans une pistoche, comme la Pisier. Paint It Black lui sera ensuite dédiée, comme Back In Black sera dédiée à Bon Scott.
Les groupies affluent, la pilule est là depuis 66 ou 67, comme par hasard c’est l’été de l’amour, le Summer of Love aux USA. La vieille Angleterre se pince le nez mais devant l’afflux de royalties, anoblit les stars du rock à tours de bras.
Marianne est une groupie d’une beauté pure comme de l’héro non coupée, elle traverse l’écran contre lequel se cognent les groupies d’un soir, qui attendent devant les loges, entassées dans le couloir, presque avec un numéro à la main, comme à la poissonnerie d’Auchan, ou devant la sortie des artistes, pour quémander un peu de semence divine. Car il n’y a plus de Dieu, c’est Lennon qui l’a dit, seulement des stars.
On raconte ça de mémoire mais on ne l’a pas vécu, ça permet de rêver un peu. Marianne, divine blonde aux yeux clairs et à la voix douce comme une pluie d’été, devient une groupie de luxe, puisqu’elle entame une relation avec Mick, ou Keith, on ne sait plus trop, les filles passant d’un musicien à l’autre. C’est l’amour libre, comme dans le groupe Téléphone, ces sous-Stones français où la bassiste Corinne passe du chanteur au guitariste, sinon dans l’autre sens…
Après quelques années de groupisme, Marianne, qui n’est pas qu’une bonne starfuckeuse, s’essaye à la chanson, comme toutes les filles à guitare d’aujourd’hui, le retour du folk song. Elle passe dix ans à se camer à l’héro, puis, la voix cassée, sort Broken English au début des années 80, les années Thatcher, le prolétariat british vaincu par le marché. Il y a beaucoup de retours de souffrances dans cette voix grave de femme qui a trop fumé, trop shooté, mais pas trop aimé parce que ça, ça ne fait pas de mal à la santé.
Après avoir passé les barrages de groupie, le premier tour de la Ligue des championnes, elle devient une femme de, puis une artiste. Aujourd’hui, elle est morte, à l’âge de 78 ans, comme tout le monde ou presque, et même un peu avant, car l’espérance chez les Rosbifettes avoisine les 83 berges, malgré la casse du système de santé outre-Manche.
Quand Françoise Hardy est partie, elle a emporté un petit bout de France avec elle. Marianne, c’est pareil. C’est un peu du Londres foufou qui s’en va, elle n’était pas une superstar mais elle incarnait un truc, une époque, une fin d’époque déjà.
Pour ceux qui seront déçus par cette nécro, pour les puristes qui ne vont pas manquer de nous massacrer en coms, on ajoute l’article du Figaro, en accès libre. Les choses ont bien changé, le rock s’est embourgeoisé. Nous, on préfère verser une petite larme avec un peu de poudre blanche dedans.
Avant de leur laisser la place, voici la reprise de – c’est de circonstance – As Tears Go By, le pendant de Comment Te Dire Adieu de Françoise, un bijou de la paire Jagger-Richards.
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Marianne par Le Figarock
La chanteuse et actrice britannique Marianne Faithfull, connue notamment pour sa chanson As Tears Go By, est décédée ce jeudi à l’âge de 78 ans à Londres, a annoncé un porte-parole. Elle s’est « éteinte paisiblement en compagnie de sa famille ». L’égérie folk-rock des années 1960 connaissait des problèmes de santé ces dernières années.
Si elle se déplaçait avec une canne, elle semblait avoir réglé les problèmes physiques qui l’avaient un temps privée de sorties. C’est à cause de ceux-ci qu’elle avait dû renoncer à la scène, après avoir donné plusieurs concerts assise dans un fauteuil. Rétablie d’un cancer du sein et d’une hépatite C, Marianne Faithfull avait vu son corps la lâcher progressivement dans les dernières années de sa vie, avec plusieurs fractures.
C’est à l’âge tendre de 17 ans que cette sage jeune fille très comme il faut était sortie de l’anonymat. Un grand méchant loup nommé Andrew Loog Oldham l’avait repérée au cours d’une fête en l’honneur du groupe qu’il manageait, les Rolling Stones. Bien qu’elle y fût accompagnée par son futur époux John Dunbar, artiste et galeriste branché, l’homme avait immédiatement perçu le potentiel de celle qu’il qualifia d’« ange à la forte poitrine ». C’est avec une chanson de Mick Jagger et Keith Richards, la ballade As Tears Go By, que la carrière de la belle fut lancée pour de bon en 1964, après des débuts infructueux dans les clubs folks de Londres. Peu après la naissance de son fils Nicholas, Marianne Faithfull entama une liaison très médiatisée avec le chanteur des Rolling Stones.
Une légende des sixties
Le couple qu’elle forma avec Mick Jagger entre 1966 et 1970 appartient à la légende des sixties. Marianne Faithfull devint, à son corps défendant, le modèle canonique de l’égérie pour rock stars qui continue de peupler l’imaginaire de ces années-là, avec quelques autres comme Pattie Boyd ou Anita Pallenberg, fiancée de Brian Jones devenue la compagne et la mère des enfants de Keith Richards, qu’elle considérait comme sa sœur.
Dans cet environnement, la jeune femme commence à consommer de copieuses quantités de marijuana, avant de succomber rapidement à la cocaïne. La descente de police au domicile de Richards durant laquelle elle est aperçue constitue une rupture brutale dans sa vie. Vouée aux gémonies par la presse britannique, elle en conçoit une grande amertume vis-à-vis de son pays natal. Cinquante ans plus tard, la plaie restait ouverte.
« J’avais 19 ans, j’étais nue sous un tapis en fourrure lorsqu’ils sont arrivés. C’était plutôt charmant, et pas du tout sale comme on l’a écrit à l’époque, se souvient-elle. J’adore mon pays, mais j’ai toujours pensé qu’on me détestait là-bas. Et je n’ai plus jamais envie d’y retourner. »
Dans l’Angleterre alors puritaine, le nom de Leopold von Sacher-Masoch, auteur de La Vénus à la fourrure, grande figure du XIXe siècle et père du masochisme, sentait le soufre. C’était celui de son arrière-grand-oncle maternel, issu de la noblesse austro-hongroise. Son père, grand résistant, et professeur de littérature italienne, était originaire du pays de Galles. Ses parents s’étaient séparés lorsqu’elle n’avait que 6 ans. Elle avait été élevée à Reading (Berkshire) dans des conditions modestes et avait survécu à la tuberculose.
Un grand retour après une descente aux enfers
Après cinq albums sur le label Decca, sa carrière connaîtra un brutal coup d’arrêt en 1967. Il lui faudra près de dix ans pour retrouver le chemin des studios. Sa séparation avec Jagger, en mai 1970, la plongera dans une spirale autodestructrice d’une violence inouïe, avec une tentative de suicide. Elle est sans abri lorsque triomphe l’album des Stones Sticky Fingers, qui inclut Sister Morphine, la chanson qu’elle a co-écrite. Elle mettra de longues années à faire valoir ses droits d’auteur du titre, qui atteste de son flirt avec l’héroïne. Ayant perdu la garde de son fils unique, elle s’enfonce dans la détresse. En 1971, on lui fait enregistrer un album qui ne sortira qu’en 1985. Sa seule apparition publique du début de la décennie 1970, elle l’effectue aux côtés de David Bowie, en 1973, dans un show télévisé consacré à l’icône glam. Elle vit deux années dans les rues de Soho, entre addiction et anorexie. Des amis essaient de la tirer de là, en vain. En 1975, elle sort un album de country-music bien reçu en Irlande. Elle loge alors avec son deuxième mari dans un squat de Chelsea. Sa voix, aiguë et cristalline dans les sixties, est devenue grave et rocailleuse. Elle est superbement mise en valeur sur le chef-d’œuvre Broken English, qui marque son grand retour en 1979.
Installée à New York au début des années 1980, elle décide de partir en cure de désintoxication dans un des établissements les plus réputés du pays, la clinique d’Hazelden, dans le Minnesota. En 1985, elle participe à un album de reprises de Kurt Weill orchestré par le New-Yorkais Hal Willner. C’est là qu’elle présente le timbre qui sera le sien jusqu’à la fin de sa vie, tragique, profond et bouleversant. L’année suivante, définitivement débarrassée de l’héroïne après dix-sept ans d’accoutumance, elle enregistre Strange Weather, album de la renaissance qui la voit s’essayer avec succès aux répertoires blues et jazz tendance cabaret. « C’est à cette époque que j’ai fini par m’accepter enfin en tant que chanteuse, après avoir lutté de toutes mes forces contre cette notion. Dès lors, j’ai décidé de m’y consacrer pleinement », disait-elle.
Elle y célébrait ses 40 ans avec une nouvelle version de As Tears Go By. Une troisième version de sa chanson fétiche sera enregistrée en 2018 sur Negative Capability, manière de boucler la boucle. « Quand je la chante aujourd’hui, je ne pense pas au passé. Toute ma vie, j’ai essayé de l’interpréter correctement », nous confiait-elle alors.
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Source: Lire l'article complet de Égalité et Réconciliation